Child of the Night 51

Partie Cinquante-et-une : Restrictions



L'an de grâce 1698
Budapest, Hongrie



« Simion ?

– Pourquoi ne dors-tu pas, Rill ? Le soleil s'est levé il y a une heure. Tu n'as pas sommeil ? »

Il y eut un grand bâillement.

« Si. »

Simion fit entrer le jeune vampire dans sa chambre.

« Et je t'ai dit de ne pas aller dans le couloir. Si la porte s'ouvre et que la lumière du soleil te tombe dessus, tu n'aimeras pas ça, crois-moi.

– Oui, Simion. »

Rill s'allongea à nouveau sur le lit de Simion et le serviteur tira un drap sur lui en le bordant.

« Mais je me demandais — tu es sûr que Rock est à l'aise ? Je veux dire, cette chambre où vous l'avez mis est si froide et poussiéreuse et il n'a qu'une couverture. »

Il en aurait eu encore moins si tu n'avais pas été là, mon garçon. Je l'aurais joyeusement jeté dans la cave avec les rats et les scarabées noirs Une vilaine sorte de cafards (1) jusqu'à son réveil.


« Il ne sent rien, Rill, tu te rappelles ? Maintenant, dors. Rock devrait se réveiller ce soir et tu tiens à être bien reposé pour l'accueillir. »

On toqua à la porte d'entrée.

« Je dois répondre. »

Il leva un doigt en signe d'avertissement et fit sévèrement :

« Ne te lève plus. »

Rill lui sourit tendrement en se retournant pour se nicher sous la couverture.

Simion le regarda un moment puis caressa gentiment les boucles sombres du garçon. Il avait à peine touché les cheveux mais Rill émit un murmure ravi. Simion se mordit la lèvre et retira soigneusement sa main puis il partit en verrouillant la porte. Quand il fut certain qu'aucun rayon de soleil ne pourrait trouver son protégé, il ouvrit la porte d'entrée.


Un homme petit, miteux et absolument peu recommandable se tenait sur le pas de la porte. Il y avait un petit terrier, aussi sale et pouilleux que son maître, assis à ses pieds et il y avait un sac de toile sur ses épaules. La surface du sac était agitée de soubresauts et de tortillements et des cris étouffés venaient de l'intérieur. La toile était aussi tachée de sang.

L'homme sur les marches leva son chapeau sale en penchant la tête vers Simion.

« 'Jour, vot' seigneurie. Tipper et moi, on a eu une bonn' nuit. On a attrapé une tonn' de bons gros pour vous. »


Simion désigna les taches de sang sur le sac.

« Ils sont tous vivants ? Je vous l'ai dit, je ne veux pas de morts — ils ne me serviraient à rien. »

Clément, l'attrapeur de rat, acquiesça.

« J'comprends, vot' seigneurie, et y z'étaient tous vifs quand y sont rentrés dans l'sac. Mais comme j'suis pas l'Bon Dieu en personne, j'peux pas vous promettre qu'y sont tous encore en vie. Y en a que'ques-un qu'ont dû aller au paradis des rats mais juste un peu, j'pense. Sûrement pas assez pour qu'vous m'refusiez mon argent. »


Simion tendit les mains et Clément lui passa le sac. Simion tâta soigneusement son contenu à travers le tissu en cherchant des masses immobiles et molles. Tous semblaient être vigoureux. Ses doigts furent fortement pincés une fois ou deux mais les dents des rôdeurs ne pouvaient pas percer la toile rude. Finalement, il hocha la tête, prit une pièce d'argent de sa bourse et la jeta à Clément.

Clément l'attrapa avec une certaine aisance et sourit à Simion en montrant des dents remarquablement semblables à celles des bêtes qu'il chassait.

« Merci, vot' seigneurie. Z'avez besoin de rien d'aut' ce soir ?

– Non, cela suffira.

– Bon, souv'nez-vous juste de Clément si vous avez encore besoin de rats. »


Il hésita.

« Si ça vous gêne pas qu'je demande, m'sieur, pourquoi z'avez besoin de vermine ? »

Il ricana.

« Mes meilleurs clients sont des tanneurs pour les peaux et les marchands d'pâtés en croûte pour le reste.

– Disons juste que je n'ai ni besoin de la peau ou de la viande, mais que j'ai un peu près le même but que vos marchands de pâtés en croûte. »

Clément y réfléchit en jouant avec la pièce. Finalement, il haussa les épaules en mettant la pièce dans un chiffon et le chiffon dans sa chemise.

« Bof, Tipper, qui sommes-nous pour questionner les bizarreries des riches et bien-nés ? »

Le chien jappa. Clément se frotta les mains.

« Viande et bière pour nous deux, et un lit propre pour c'soir, mon gars ! »

Et il partit avec son chien.


Simion porta le sac remuant et couinant dans la maison, dans le garde-manger juste à côté de la cuisine. Il posa le sac suffisamment longtemps pour déverrouiller la porte. Le verrou sur la porte était aussi solide que ceux de la maison, à cause des soupçons du précédent propriétaire à propos de ses serviteurs. Il avait été déterminé à ce qu'ils n'aient pas plus que leur part de nourriture et il avait été assidu à compter les patates et mesurer le reste de beurre. Plus d'un serviteur avait été renvoyé lorsqu'il manquait une saucisse.

Le garde-manger était long et étroit, sombre et poussiéreux, et des étagères s'y alignaient, ne contenant plus que de la poussière. Le peu de nourriture dont avaient besoin Simion et les tziganes était stocké dans la cuisine. Simion fit tomber le sac près des deux autres près de la porte. Alors que le sac tombait, il fut satisfait de voir les deux autres bouger. Leurs occupants avaient certainement faim mais ils n'avaient pas encore commencé à se manger entre eux. Il n'y aurait pas beaucoup de morts d'ici la soirée, là où on aurait besoin d'eux.


Il commença à repartir mais il s'arrêta puis se rendit lentement vers le fond de la pièce et s'accroupit près de la silhouette recouverte d'une couverture qui reposait à terre. Simion tira un coin de la couverture et regarda le visage froid et rigide de Rock. Il semblait mort. Mais il est mort — depuis deux jours. Il n'y a aucun moyen d'en être sûr mais je pense qu'il va se réveiller ce soir. Que je sois damné si je ne suis pas tenté de le tuer. Rill va avoir besoin de lui au moins un moment mais je crois qu'il va poser plus de problème qu'il ne le vaut. C'est un entêté.

Simion haussa les épaules. Bon, même avant de découvrir ses nouveaux talents, mon seigneur était un homme ferme. Il a eu affaire de son vivant à des gens plus forts et traîtres — il se chargera de lui. Simion étudia Rock un moment de plus en se rappelant les marques de violence sur Rill qui ne disparaissaient que récemment. Il cracha au visage de l'homme, remit le drap sur lui et quitta le garde-manger en le verrouillant. Il revint dans le couloir en songeant qu'il pouvait aller s'allonger à côté de Rill un moment. Même quand il ne dormait pas, le simple fait d'être proche de Rill semblait le calmer et le rafraîchir.


« Simion ? »

Draculea se tenait devant la porte de sa chambre.

« Mon seigneur ? »

Simion le rejoignit.

« Je veux que tu sortes Rill ce soir, dès que ce sera sûr. »

Au regard interrogateur de Simion, il fit :

« Oui, je sais. C'est trop tôt pour qu'il sorte mais je compte sur toi pour le protéger et je ne le veux pas ici quand son frère se réveillera. Je pense que ce sera bruyant, pour ne pas dire plus. »

Simion nota son accord.

« Trouve-lui quelque chose à manger, quelque chose qui ne le bouleversera pas. Il ne peux pas toujours utiliser mes serviteurs. »


Rill s'était nourri des tziganes, une gorgée par-ci, par-là, soigneusement supervisé par Simion ou Draculea. Il était traité comme un enfant — des petits repas fréquents et il semblait se fortifier. Les tziganes offraient de temps en temps un repas à leur maître lorsqu'il ne pouvait pas chasser alors ce n'était rien de nouveau pour eux et bien que Draculea ne soit jamais brutal, il était devenu pragmatique en se nourrissant. Après sa frénésie de nourriture, ils durent le cajoler. Rill avait été si hésitant et gentil en se nourrissant que cela semblait avoir touché ces hommes solides. Simion avait vu l'un d'eux sourire et caresser doucement la tête de Rill alors que le garçon se nourrissait.


Simion hocha la tête.

« Je peux lui avoir une servante ou une catin.

– Bien. Pas mes clients usuels — du moins, pas encore. J'ai l'impression que ce garçon ne tuera pas sauf s'il se trompe ou s'il y est forcé et nous ne voudrions pas que des scélérats à moitié drainés traînent dans les parages. Ils pourraient poser problème. »


Simion savait ce qu'il voulait dire. Draculea se trompait rarement mais cela lui arrivait. Il avait été surpris un fois au beau milieu d'un meurtre. Le partenaire de sa victime les avait suivis et avait planté une dague dans ses côtes. Pendant que Draculea brisait la nuque de son assaillant et retirait la dague, la victime à moitié morte avait réussi à atteindre une taverne. S'il n'avait pas été blessé, Draculea aurait probablement été capable de se frayer un chemin dans la foule qui surgit alors de la taverne mais il jugea plus prudent de ne pas s'y risquer. Il avait fallu presque deux semaines pour que la plaie soit guérie.


Le soleil venait juste de disparaître à l'horizon lorsque Simion réveilla Rill ce soir-là.

« Viens, Rill. Nous sortons. »

Rill se leva docilement mais en fronçant les sourcils.

« Mais Simion, Rock doit se réveiller ce soir.

– Oui, mon garçon, mais il le fera que tu sois avec lui ou non, et notre maître nous demande de partir. Nous serons de retour avant le lever du soleil et tu pourras alors voir ton frère. »

Simion fit cette promesse et espéra presque que Draculea ne juge pas nécessaire de tuer ce bâtard, de crainte que Rill ne soit déçu.

Il conduisit Rill dans la pénombre de la rue. Ils étaient hors d'écoute lorsque les cris commencèrent.

Froid. Ce fut ce qu'il ressentit d'abord, avant même de remarquer à quel point il faisait sombre. Rock se sentit dériver mais ce n'était pas la sensation agréable qu'il associait à un sommeil réparateur. Non, c'était effrayant. C'était comme si son âme avait été séparée de son corps... du monde. Et il faisait si froid ! Est-ce que Rill avait pris les couvertures ? Il avait laissé le feu s'éteindre ? Il faudrait qu'il le punisse pour ça.

Le punir... Oui, il l'avait fait récemment, n'est-ce pas ? Il se souvenait de la satisfaction à frapper son frère au dos et aux épaules. C'était presque aussi satisfaisant que de plonger son sexe dans son corps servile.


Même en songeant à cela, il eut l'impression de s'élever, dérivant si rapidement qu'il eut plus l'impression de tomber que de se lever. À ce moment, il fut englouti par une faim qui parut le brûler, en dépit du froid. Il se sentit avalé et réduit dans un espace étroit, froid et inconfortable qui était, réalisa-t-il avec horreur, son propre corps.

Il se souvint de ce qui s'était passé. Il se rappela de Rill, froid et mort, oh oui, indéniablement mort — mais qui bougeait encore. Il se souvint du contact froid, de la douleur déchirante et de la chaleur de son propre sang baignant sa peau. Puis la chute dans les ténèbres froides. Mais avant de sombrer sous la surface des ténèbres qui étaient la mort, un petit filet de feu froid et doux s'était frayé un chemin dans sa gorge. Puis rien. Maintenant ceci.


La conscience de Rock s'éveilla rapidement et il ouvrit les yeux en hurlant.

Un pied le frappa dans les côtes et une voix siffla :

« Silence ! »

Rock hurla à nouveau et écouta son premier instinct naturel — il attaqua. Il bondit en se jetant sur la silhouette entre-aperçue qui se tenait près de lui. Des mains se refermèrent sur sa gorge, l'arrachant de sa cible et le tenant facilement. Il fut secoué de la même façon que Tipper le fox-terrier secouait les rats qu'il attrapait pour son maître.

« Arrête ça, idiot, ou je te jure que je vais trouver un moyen de te tuer, malgré ton frère. »

Rock continua de se débattre jusqu'à ce qu'on le secoue à nouveau et que l'homme ordonne :

« Je t'ordonne de t'arrêter ! »


Rock fut alarmé de sentir son envie de combattre disparaître. Aucun homme n'avait été capable de lui donner des ordres, pas depuis la dernière fois que son père avait tenté de le frapper et qu'il avait répliqué. Il se calma à présent mais la rage, le ressentiment et la peur bouillaient toujours en lui. Son geôlier sentit sa résignation et son étreinte se relâcha. Rock ne se dit que bien plus tard qu'il aurait dû être à moitié étouffé.

Quelques regards rapides lui apprirent qu'il se trouvait dans une sorte de petit cabinet de rangement. Cette révélation le rendit perplexe car il n'y avait aucune source de lumière et pourtant il pouvait voir.


Le prince Draculea se tenait devant lui, ses yeux rétrécis en signe de dédain répugné. Il vérifia son état et ne put en blâmer le prince. Ses vêtements étaient sales et déchirés. Il n'aurait jamais pu y croire mais il semblait s'être souillé. Depuis combien de temps ai-je perdu conscience ? Il y avait une couche de crasse séchée autour de sa gorge et de son épaule qu'il gratta sans y penser. Puis il s'arrêta et porta ses doigts à son nez pour renifler. Une odeur piquante de moisi remplit ses narines. Il ne pouvait pas mettre un nom dessus mais en même temps, elle était familière, de façon bouleversante. Il se mit à saliver et il suça rapidement la saleté de ses ongles. L'odeur était fétide mais elle enclencha sa faim dévorante jusqu'à ce qu'il ait une faim de loup.


Il lança un regard accusateur au prince silencieux.

« Que m'avez-vous fait ?

– Rien que je n'avais prévu, je t'assure.

– Je suis mort ? Je suis en enfer ? »

Draculea eut un sourire cruel.

« Pas vraiment mort. Quant à l'enfer... »

Il fit un geste.

« Il y en a qui croient que chaque homme a un enfer privé, fait juste pour lui. Ce pourrait très bien être le tien. Tu es un Nosferatu, Rock, comme ton frère. »

Rock vacilla sous l'effet de la révélation. Une partie de son cerveau refusait tout cela mais l'autre partie acceptait la situation. Rock pouvait s'adapter. Il avait toujours été un survivant.

« Comme vous ?

– Pas vraiment. Je t'ai crée, Rock. Je suis ton maître.

– Nul homme est mon maître, » gronda Rock.


Draculea le frappa. Le coup l'envoya contre le mur en cassant son nez. En effet, cela l'aurait tué — s'il n'avait pas déjà été mort. La main du prince s'enroula à nouveau autour de sa gorge, le clouant contre le mur.

« Tu te montres encore stupide. Idiot ! N'as-tu pas encore compris que je n'étais pas un homme ? Je suis Draculea, Nosferatu, Prince des Ténèbres, et je suis ton maître. Tu vas m'obéir ou tu souffriras. »

Il s'approcha de Rock et ronronna :

<<Je ne suis pas encore sûr de la façon dont on peut tuer les non-vivants. Il existe de nombreuses légendes et je pourrais les essayer une par une jusqu'à ce que j'en trouve une d'efficace mais je veux que tu réfléchisses à quelque chose, Rock. Le corps que tu habites à présent peut supporter beaucoup d'abus. Je pourrais passer des années à voir à quel point tu peux les supporter. »


À sa grande colère et honte, Rock réalisa qu'il tremblait. Il n'avait aucun doute que Draculea disait vrai. Il se força à dire :

« Ne me faites pas de mal — maître. »

Draculea le lâcha. Détestant l'idée de demander au lieu de commander, Rock fit d'un ton morne :

« Maître, j'ai faim.

– Sans aucun doute, mais nous devons d'abord parler de certaines règles. Si tu souhaites poursuivre ta misérable existence, tu ferais mieux d'écouter attentivement. Le soleil est désormais ton ennemi. Je n'en ai senti que quelques rayons au lever ou au coucher du soleil et ce fut comme de l'eau bouillante sur ma peau. Le soleil de midi pourrait très bien te tuer. L'argent brûle aussi, de même que les objets sacrés, mais je suppose qu'ils ne vont pas trop te manquer.

« Et je dois boire du sang. »


Draculea eut un sourire grave.

« Seulement si tu veux te nourrir. Je ne sais pas si nous pouvons mourir de faim mais ce serait en tout cas une agonie. Cela nous conduit à une autre règle — les proies. Tu vas te limiter à la racaille — meurtriers, violeurs et leurs pareils. Eux, tu peux les tuer bien qu'il vaille mieux se montrer prudents lorsque nous vivons si près des vivants. Jusqu'à ce que je sois sûr que tu peux te contrôler, tu ne te nourriras que sous mon contrôle. »

Rock se crispait nerveusement, affamé.

« Oui, maître. Mais je vous en prie, amenez-en moi un maintenant.

– Non. Ce serait un trop grand risque que d'en amener un ici ou bien de t'emmener dehors alors que la frénésie de la première faim t'habite encore. Tu vas devoir faire avec autre chose. »


Il prit l'un des sacs qui se trouvaient près de la porte et en défit l'ouverture.

« Voici une autre information sur ton nouvel état, Rock. »

Il leva le sac et une horde de rats tomba à terre, criant et grattant comme des fous.

Draculea regarda avec amusement Rock crier lorsque le premier rôdeur gras courut sur son pied.

« Pas besoin que ce soit du sang humain. »

Rill était assis devant le feu à la taverne, regardant avec perplexité son verre de cidre chaud.

« Je ne comprends pas, Simion. Ça a toujours ce même bon goût et j'ai envie de boire mais... »

Il secoua la tête.

« ... mais je ne veux pas en boire.

– Une gorgée ou deux ne te fera pas de mal, Rill, mais tu n'as plus besoin de telles choses, expliqua Simion. Si tu manges quoi que ce soit, tu peux être... indisposé jusqu'à ce que ton corps le rejette. »

Il tapota la main du garçon.

« Il vaut mieux t'en tenir à ce qui est bon pour toi. »

Rill pointa le bout de sa langue dehors et Simion eut soudain chaud. Le garçon soupira.

« Oui. »

Il tourna un regard sombre et liquide vers Simion.

« J'ai faim.

– Je sais. »


Simion parcourut la pièce du regard puis désigna une belle femme au visage dur qui était assise seule en sirotant une bière. Elle souriait à tous les hommes qui passaient mais il y avait des filles plus jeunes et plus belles et aucun homme ne lui prêtait attention.

« Dois-je lui dire de nous rejoindre ? »

Rill cilla puis fit :

« Simion, c'est une catin. Je le sais — je peux reconnaître mon espèce.

– Arrête ! » fit durement Simion.

Quand Rill recula, la voix de Simion s'adoucit.

« Rill, je n'aime pas t'entendre parler ainsi de toi. Peu importe ce que tu étais avant, c'est du passé. Tu es l'enfant du prince Draculea et mon jeune maître. »

Rill lui lança un regard timide.

« J'aimerais mieux être ton ami, Simion. »


Simion sentit son cœur déborder de joie.

« J'aimerais aussi. Mais que fait-on pour la femme ? »

Rill haussa les épaules.

« Si tu la veux, je suis sûr qu'elle a une chambre ici. Je peux attendre.

– Non, mon garçon. Je parle pour toi. »

Si Rill avait été rempli de sang, il aurait rougi. Il murmura :

« Je... Je n'ai jamais été avec une femme, Simion. »

Le sourire de Simion était gentiment sceptique.

« Quoi, jamais ? »

Le garçon haussa à nouveau les épaules.

« Rock n'a jamais trouvé une femme qui me voulait suffisamment pour payer. »


Simion détourna brièvement le regard pour que Rill ne voit pas la colère dans ses yeux en entendant la façon implacable dont Rock avait contrôlé chaque aspect de la vie de son frère. Rill parla à nouveau en attirant son attention.

« Je ne crois pas que j'en ai envie.

– Pas pour ça. Tu as dit que tu avais faim, pas vrai ? »

Rill s'illumina en regarda à nouveau la femme. Elle croisa son regard et lui sourit. Toujours aussi amical, Rill lui sourit en retour.

« Va-t-elle me nourrir, Simion ? »

Simion avait remarqué l'échange silencieux entre les deux. Il fit signe à la femme et elle se leva pour les rejoindre.

<< Oui, Rill. Il faudra juste que tu te souviennes d'être prudent et gentil. »

Rock s'accroupit sur le sol du garde-manger et jeta le rat agité et mourant contre le mur avec tant de force que la bête mourut en se brisant le cou avant de mourir par manque de sang. Son estomac se souleva à nouveau mais il ne vomit pas. Il l'avait déjà fait, au grand amusement de Draculea, et sa faim partiellement apaisée était revenue en force. Il avait dû à nouveau apaiser sa soif de sang. C'était une bonne chose que Simion ait prévu plein de rats — Rock avait eu besoin de tous.

« J'espère que tu en as eu assez, fit Draculea, car il n'y en a plus. Tu n'as pas le droit de chasser ce soir et je ne vais pas sacrifier mes serviteurs ou mes chevaux pour ton appétit si tu ne peux pas garder ce que tu as déjà pris. Debout. »


Rock se leva et Draculea se tourna pour déverrouiller la porte. Rock se tendit en se demandant s'il serait assez rapide et fort pour briser la nuque du prince. Draculea s'arrêta et fit :

« Essaie si tu peux, Rock. »

Rock se figea de surprise. Draculea rit.

« Non, je n'ai pas lu dans tes pensées — pas tout à fait, en tout cas. Mais une attaque sournoise à la première occasion est exactement ton genre, Rock. »

Quand il se retourna, ses yeux étaient rouges et Rock recula.

« Tu es très prévisible, Rock. Cela veut dire que tu peux être dangereux, mais pas autant que tu le penses. »


Rock suivit Draculea dans la cuisine. Les tziganes étaient en train de vider une dernière bassine d'eau dans une grande baignoire. Ils s'inclinèrent silencieusement devant le prince, lancèrent un sourire suffisant à Rock et quittèrent la pièce. Draculea indiqua la baignoire puis une pile de vêtements propres sur la table.

« Tu es sale. Déshabille-toi et lave-toi. Je veux que tu sois aussi présentable que possible pour le retour de ton frère. »

Quand Rock hésita encore, Draculea fit impatiemment :

« Vas-y ! Hadès, je sais que tu étais un prostitué avant de débaucher ton pauvre frère. Ce n'est pas comme si tu ne t'étais jamais retrouvé nu devant un homme avant, et tu ferais mieux de t'y habituer à nouveau. »


Rock enleva ses vêtements d'un air morne et alla dans la baignoire. Les tziganes n'avaient pas pris la peine de réchauffer l'eau mais il le remarqua à peine. Il se lava rapidement et efficacement, très conscient du regard du prince sur lui. En d'autres circonstances il aurait pu être excité. Draculea était un homme séduisant et Rock avait toujours été attiré par le pouvoir. Mais il n'aimait pas être sous le joug de quelqu'un. Il l'avait été suffisamment dans son enfance et il s'était juré qu'il ne serait plus jamais sous les ordres de quelqu'un. Mais il semblait à présent qu'il n'avait pas le choix.


Draculea regarda l'ancien mac se baigner et son désir apparut. Mais c'était une sensation étrangement détachée. Il pouvait admirer la beauté physique de Rock mais il méprisait l'homme en lui-même. Il était cruel, grossier et mesquin, tout ce que Draculea détestait. Mais il est pâle de corps et de visage, même si son esprit est infect. Et je n'ai encore jamais été avec quelqu'un de mon espèce. J'ai l'impression qu'il pourra subir plus de choses que mes amants mortels. Un sourire lent et cruel se dessina sur les lèvres de Draculea. Simion et Rill ne reviendront pas avant un moment. Je pense que je vais faire des découvertes.

La prostituée se félicitait sur sa chance — deux hommes, avenants et propres avec de l’argent sonnant et trébuchant. Elle sourit en refermant la porte de sa chambre et en jetant un regard aux deux hommes qui attendaient sur le lit. Et le plus jeune est vierge, si on peut le croire. C'est presque un régal.

Elle rejoignit les deux hommes en balançant ses hanches et tendit la main, paume vers le haut, et en frottant ses doigts. Le plus âgé des hommes mit deux pièces d'argent dans sa main et elle faillit crier de joie. Elle ne pouvait pas attendre de voir une de ces pétasses plus jeunes tenter de se vanter sur ce qu'elle pouvait gagner en une nuit. Elle mit les pièces dans sa table de nuit et commença à défaire son corset.


Simion murmurait à Rill :

« Reste calme et vas-y lentement. Parle-lui, cajole-la et caresse-la. Ton contact et ta voix peuvent l'apaiser, il suffit d'essayer, Rill. Quand elle sera sous le charme, alors... alors tu pourras prendre ce dont tu as besoin. »

Elle se dirigea vers eux en souriant. En hochant la tête en direction de Rill, elle fit :

« C'est votre garçon ?

– Non, pas vraiment. Nous sommes juste bons amis et je suis là pour l'aider.

– Ah. Je pensais juste que ce serait très mignon — un père apprenant à son fils comment faire avec les femmes. »


Elle prit la main de Rill en le tirant pour qu'il s'assoit à côté d'elle sur le lit.

« Tu es donc Rill. »

Elle l'embrassa sur la joue. C'était une catin expérimentée, capable de cacher ses vrais sentiments, aussi ne montra-t-elle pas qu'elle sentit à quel point le garçon était froid.

« Quel joli garçon tu es, Rill. »

Rill sourit timidement.

« Vous êtes une jolie dame. »

Il caressa sa joue et sa main était également froide.

« Si jolie et chaude. »

Il y avait quelque d'étrange là, mais elle ne pouvait pas dire ce que c'était. Sa main descendit vers sa gorge et son contact devenait de plus en plus tolérable. Il bougea légèrement vers sa poitrine et elle sentit ses mamelons s'ériger sous l'effet du contact doux et froid.

« La plus jolie dame que j'ai jamais vue. Votre peau est si douce et blanche. »

Les mots murmurés et les caresses gentilles et insistantes la bercèrent. Elle se sentit bientôt à moitié endormie.


Simion regarda Rill murmurer et caresser la femme. Il se demanda s'il s'agissait d'un talent commun à tous les Nosferatu. Il avait le sentiment que la personnalité de chacun pouvait influencer leurs forces. Rill était une créature si simple et innocente qu'il ne pouvait qu'enchanter tous ceux qui étaient le plus susceptibles de l'être. Rock, songea-t-il, était plus du genre à prendre de force.

La catin était affalée sur Rill, sa tête sur son épaule, ses yeux mi-clos. Rill fit doucement :

« Je peux vous embrasser ? »

La femme sourit.

« J'aimerais ça. Ça fait longtemps que je n'ai pas été embrassée par quelqu'un d'aussi doux et mignon que toi. »

Elle pencha son visage vers lui, ses yeux fermés. Rill lança un regard interrogateur à Simion qui lui fit signe de continuer. Il se pencha et toucha sa bouche en un chaste baiser.


La femme le crut timide et sourit sous ses lèvres. Le sourire s'élargit alors qu'il embrassa sa joue puis pressa sa bouche froide contre sa gorge. Elle gémit sous l'effet de la douleur subite mais le gémissement devint un soupir lorsqu'elle sentit le garçon sucer sa gorge. Alors comme ça, la petite chose voulait la marquer, n'est-ce pas ? Il pouvait être innocent avec les femmes, mais il avait de bons instincts.

Simion regarda Rill se nourrir. Si Rill ne terminait pas rapidement, Simion devrait l'arrêter. Mais après quelques gorgées de plus, le garçon s'arrêta de sucer et se mit à lécher la plaie comme Draculea le lui avait appris. Le saignement s'arrêta rapidement. Rill s'éloigna de la femme et l'installa sur le lit.


« Vous devriez dormir à présent. Vous avez été si bonne envers moi, je me suis senti bien. Merci, jolie dame. Mais vous avez l'air fatigué. Vous devriez dormir.

– Dormir, murmura la femme en fermant les yeux. »

Un moment plus tard, elle respirait profondément et régulièrement.

Rill regarda Simion avec des yeux brillants.

« Je m'en suis bien sorti, Simion ? »

Il sourit et prit le garçon dans ses bras.

« Parfait, mon garçon, parfait. Tu n'as pris que ce dont tu avais besoin et tu ne l'as pas fait souffrir. Certes, elle se sentira un peu fatiguée demain mais elle sera très contente d'elle. Elle pourra se vanter d'avoir pris la fleur d'un beau jeune homme et d'avoir été payée pour ce privilège. Maintenant viens. Je pense qu'il est temps de rentrer. »

Rock finit de se baigner et sortit de la baignoire en tendant la main vers une serviette. Draculea fit :

« Tu ferais mieux de l'étendre sur la table.

– Pourquoi ? »

Draculea prit la serviette de ses mains et l'étendit sur la table.

« La surface est couverte d'échardes. »

Il commença à défaire son pantalon.

« Ce sera plus confortable quand tu te pencheras dessus. »

Rock recula d'un pas, les poings serrés à ses côtés.

« Non. »

Draculea fit courir ses yeux sur Rock en observant la lumière de la lampe se refléter sur la peau douce et mouillé et en regardant les cheveux blonds-roux mouillés et collés sur son crâne.

« Si tu me combats, tu vas le regretter. »


Rock se retourna pour courir, prêt à courir nu dans les rues. Il n'atteignit jamais la sortie. Draculea l'intercepta aisément en agrippant un bras et en le tordant derrière son dos jusqu'à ce qu'il crie de douleur.

« Je peux le briser facilement. Tu sais, si on se casse un os, il peut se remettre, comme pour un mortel. Nous guérissons beaucoup plus vite qu'eux et si nous ne faisons pas attention, nos os ne se remettent pas correctement. Tu ne l'as peut-être pas remarqué mais mon petit doigt à la main droite est un peu tordu. Je l'ai ignoré pendant un jour ou deux et je vais devoir à nouveau le casser pour le remettre droit. Si tu me satisfait, quand j'aurai fini, je te redresserai le nez pour qu'il ne finisse pas de travers.

– Lèche-moi le cul ! » gronda Rock.


Draculea resserra son étreinte en soulevant le bras plus haut et en obtenant un autre cri de son prisonnier.

« Non, ce n'est pas moi qui vais le faire mais toi, très bientôt. Je vois qu'il faut te forcer la première fois. Comme c'est regrettable. »

En se servant de sa prise sur le bras du jeune homme, il retourna Rock et plaqua son corps contre la table. Rock se tortilla pour s'échapper mais Draculea fit reposer son poids sur Rock pour le clouer sur la table et pour tirer son bras jusqu'au point de rupture. De sa main libre, il attrapa son sexe rigide et le pressa dans la fente étroite des fesses de Rock. Il ne pouvait pas relâcher pour écarter les fesses de l'homme aussi poussa-t-il simplement en utilisant un doigt pour guider son membre.

Vlad fit glisser la tête de son membre le long de la fente étroite en poussant, tandis que Rock se débattait et jurait. Finalement, le gland passa sur l'anus de Rock dans le bon angle et pénétra doucement. Draculea poussa un cri de triomphe et s'enfonça profondément dans la froideur étroite du corps de Rock.


Rock hurla en se débattant. Ce que Draculea avait dit était vrai — il avait été un prostitué en venant dans la ville. Il avait loué sa bouche et ses fesses à quiconque avait une pièce et la haine d'être possédé par un autre, même un moment, était devenue une obsession. Il n'avait laissé aucun autre homme le pénétrer depuis qu'il avait amené Rill en ville, il y avait plus de huit ans. Le fait d'être pris vigoureusement et à sec était physiquement douloureux mais la peine mentale était agonisante.

Draculea baisa Rock durement et rapidement, sans se retenir. Il avait fait l'amour avec Nicolae, avait couché avec ses autres amants et il s'accouplait avec Rock. Il se laissa complètement aller pour la première fois depuis de nombreuses années, s'enfonçant dans l'étroitesse froide, sentant le sang à moitié gelé de Rock faciliter son passage alors que le tissu délicat de son passage anal se déchirait sous le furieux assaut.


Rock cessa finalement de se débattre, se concentrant sur la façon d'endurer l'assaut. Draculea attrapa ses hanches avec sa main libre et le souleva légèrement pour mieux le pénétrer. Son sexe passa sur le lieu de plaisir de Rock et le jeune homme cria alors qu'une vague de plaisir émergeait au plus profond de lui. Cela ne voulait rien dire pour Vlad mais dans cette position, il recevait plus de stimulation aussi continua-t-il. Le lieu de plaisir de Rock fut encore et encore frôlé et il fut bientôt excité, son sexe rigide vacillant sous lui alors qu'il était ballotté.

Draculea jouit en libérant son sperme dans l'homme à présent tremblant. Rock grogna en sentant le flot liquide. Il semblait geler tout en brûlant. Il avait oublié cette sensation. Pour Rock, c'était comme si on le possédait et il haïssait cela.


Draculea se retira presque comme si de rien n'était, en relâchant Rock. Il prit la serviette de bain et se nettoya soigneusement en ressuyant le sang et la merde. Rock se leva avec raideur et douloureusement. Son sexe était dur et juteux. Rock regarda Draculea et fit d'un ton morne :

« Et moi ?

– Tu as la permission de finir, fit Draculea d'un ton négligeant, en refermant son pantalon. Quand tu auras fini, nettoie-toi puis habille-toi. Puis tu viendras dans ma chambre pour attendre ton frère. »

Il commença à quitter la chambre.

« Et au fait, essaie de t'enfuir si tu le souhaites. J'apprécierais beaucoup de te chasser et de te punir. »


Avec un grognement, Rock attrapa son sexe et se masturba en quelques coups rapides et durs. Il cria à nouveau en voyant la semence ensanglantée sortir de son membre mais puisque ça ne faisait pas mal, il se calma rapidement. Un autre aspect déplaisant de sa nouvelle existence. C'était la jouissance la moins satisfaisante qu'il avait jamais eue. En jurant, il se nettoya et commença à s'habiller. Je présume que je vais devoir cajoler Rill à présent. Il semble que le prince le considère comme un animal de compagnie, mais c'est moi, sa chienne.

Quand Rill et Simion revinrent, ils virent Draculea au bout du couloir, devant sa chambre. Au moment où il vit le prince, Rill vibrait presque d'excitation. Son désir de courir le long du couloir était palpable mais il se retint, attendant d'être convoqué. Draculea sourit en lui faisant signe et Rill courut vers lui.

« Rock ? fit-il anxieusement. Prince, Rock s'est réveillé ?

– Oui, mon petit. Ton frère est de nouveau parmi nous et il est impatient de te voir. »

Draculea fit un pas sur le côté.

« Va le voir. »

Rill entra dans la chambre et vit Rock assis sur le lit, semblant en meilleure forme qu'avant, mais il fronçait les sourcils. Rill s'arrêta net en lui lançant un regard plein d'espoir. Rock regarda simplement par-dessus l'épaule de son frère pour voir Draculea avec un visage grave. Il avait soigneusement appris à Rock la façon dont il devait désormais se comporter avec son frère et il lui avait tout aussi soigneusement informé de ce qui l'attendait s'il causait encore plus de peine à son frère.


Rock se força à sourire et ouvrit les bras. Avec un cri de joie, Rill courut vers lui et se jeta dans les bras de son frère.

« Je suis désolé, Rock. Je ne voulais pas te faire de mal, hein ?

– Non, petit-frère, bien sûr que non.

– J'ai eu si peur. Je n'aurais pas pu le supporter si je t'avais fait du mal.

– Eh bien, ne t'en fais pas autant.

– Rock ? Nous allons rester avec le prince à présent.

– C'est ce qu'on m'a dit. »

Une touche glaciale s'était glissée dans le ton de Rock mais Rill ne le remarqua pas.

« Je n'ai plus besoin d'aller avec les gentilshommes et tu n'as plus à travailler. Rock ? On va prendre soin de nous. »

On va prendre soin de toi. Et tu n'iras peut-être plus avec les gentilshommes, il croisa le regard glacial de Draculea et son ventre se serra de haine et d'outrage devant cette injustice, mais moi oui.

« Oui, Rill. C'est merveilleux. »


Notes du chapitre :
(1) Une vilaine sorte de cafards






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