Esprit Malin 12

Chapitre 12 : Convoiter


Sous la protection des cendres de Ye Yingzhi, Chi Yan devint bien plus courageux. Le cinquième jour des congés, il prit l'autoroute pour la ville de Shiming.

Sa cousine Du Tingting étudiait à l'étranger. Les cours avaient déjà repris là-bas. Alors sa tante et son oncle étaient les seuls à la maison quand il arriva. Chi Yan posa ses cadeaux et il fut rapidement l'heure de déjeuner.

Sa tante Huang Shu sourit et suggéra :

« Viens, sortons manger. Ton oncle a réservé une table dans un restaurant pas loin. »

Après ça, elle ajouta comme si elle y songeait soudain :

« Au fait, mon grand-frère et sa famille nous rejoindront aussi, ainsi que ma nièce, Fenfen, qui a à peu près le même âge que toi. Vous pourrez en profiter pour faire connaissance. »

Son oncle Du Mingjing acquiesça dans sa direction. La famille de la fille ne quittait pas exprès leur demeure le cinquième jour du Nouvel An pour passer faire un saut. Tout le monde savait ce que cela signifiait. Devant l'enthousiasme de ces gens, Chi Yan ne put qu'accepter en souriant.


Peu après qu'ils soient tous les trois arrivés au restaurant, la famille du frère de Huang Shu arriva aussi. Bien que que Huang Fenfen n'était pas une reine de beauté, elle n'était pas non plus vilaine. Elle était jeune et avait l'air très jolie et fraîche avec du maquillage.

L'oncle de Chi Yan avait tout d'abord dédaigné un peu la nièce de son épouse. D'abord parce que le frère de Huang Shu n'était pas du genre travailleur et préférait tout avoir sans efforts. Autrefois il avait l'habitude de parier. Ces dernières années, même s'il avait assuré qu'il avait arrêté, Du Mingjing restait critique. Quant à la belle-sœur de Huang Shu, elle était tout aussi vaniteuse.

La seconde raison était que Huan Fenfen n'avait pas pu s'extirper de la fange familiale. Elle ne semblait pas avoir des soucis aussi graves que les paris mais comme ses parents, elle ne faisait pas d'effort pour progresser et devenir meilleure. Même durant ses études elle avait vécu au jour le jour en dépendant de l'argent de sa famille. Après la fin de ses études, Du Mingjing l'aida à trouver un travail d'employée de bureau dans une société qu'il connaissait par respect pour son épouse. Cependant la jeune fille trouva ça trop difficile et prétendit que ses collègues la mettaient à l'écart, alors elle ne tint pas plus de quelques jours. Après ça, il paraissait qu'elle avait retrouvé du travail mais Du Mingjing ne prit pas la peine de prendre de ses nouvelles et ne demanda plus jamais.


Du Mingjing lui-même était quelqu'un de très travailleur et désireux de réussir dans la vie. À ses yeux, son neveu qui avait perdu ses parents très jeunes n'avait cependant pas mal tourné. Il s'était débrouillé tout seul pour ses études et trouver du travail sans jamais demander d'aide à qui que ce soit. Bien qu'il semblait un peu trop introverti pour un jeune homme et manquait de combativité, c'était un très bon garçon. Du Mingjing se disait que Huang Fenfen n'était pas digne de lui mais tout d'abord sa femme avait mentionné ce sujet plusieurs fois alors il ne voulait pas blesser son amour-propre et ensuite, il voulait rappeler à Chi Yan qu'il était temps de songer à des projets à long terme. Même si Chi Yan se rendait compte que cela ne collait pas entre eux deux, aucune importance, c'était Huang Shu qui avait organisé cette rencontre de toute façon.


Chi Yan n'était pas quelqu'un de méchant. Même s'il était très réticent à l'idée d'un tel rendez-vous arrangé, il resta aimable et poli. La jeune femme avait également l'air très gentille et un peu timide. Huang Shu, son grand-frère et sa belle-sœur animèrent l'ambiance et le repas se déroula harmonieusement.

Soudain Huang Fenfen contempla soudain le bar cuit à la vapeur dans son assiette, sans bouger ou parler pendant un moment.

Huang Shu lui tapota le bras.

« Que se passe-t'il, Fenfen ? Tu ne te sens pas bien ? »

Huang Fenfen leva la tête et l'éclairage tamisé de la pièce privée du restaurant fit ressortit son visage pâle et les gouttes de sueur. Ses lèvres tremblèrent et elle se tourna vers Huang Shu.

« Le poisson... ses yeux ont bougé... »

Huang Shu ne réagit pas outre-mesure :

« Quoi ? Il n'a pas été assez cuit ? »


Huang Fenfen secoua frénétiquement la tête, semblant pleurer, et elle s'écria soudain :

« Il me regarde ! Il me sourit ! J'ai vu quand il a été tué, qu'on a ouvert son ventre et gratté ses écailles. Il y avait un petit poisson dans son ventre ! Le petit poisson a été enlevé et il m'a souri aussi ! Il va s'enfoncer dans mon estomac ! »

L'atmosphère plaisante à la base devint sinistre à cause des divagations et de l'attitude bizarre de Huang Fenfen. Huang Shu ne put s'empêcher d'avoir la chair de poule en l'entendant parler et elle frissonna.

La mère de Huang Fenfen sembla frappée par une pensée, son visage changea d'expression et elle recouvrit rapidement la bouche de sa fille de sa main avant de la gronder :

« Qu'est-ce qui ne tourne pas rond chez toi ? On ne voit pas de fantôme en plein jour ! Arrête de dire n'importe quoi ! »

Avec sa bouche couverte, Huang Fenfen ne pouvait plus rien dire mais elle émit un hé hé dans sa gorge, comme une sorte de sanglot étrange.


Vu l'état de la jeune fille, elle ne pouvait plus continuer le repas. Huang Mu s'excusa auprès de Du Mingjing et Chi Yan avec un sourire puis partit rapidement avec son époux et sa fille.

Chi Yan sentit un frisson dans le dos. C'était la première fois que quelqu'un près de lui se retrouvait possédé, et pour une fois ce n'était pas lui.

Il ne savait pas si c'était son imagination mais il avait l'impression que Huang Fenfen voulait dire quelque chose mais que sa mère l'avait empêchée de parler à temps. Cependant comme il n'était pas intéressé par ce mariage et ne se considérait pas comme un bon samaritain, il exprima simplement une inquiétude polie et suggéra sincèrement à sa tante qu'elle emmène sa nièce au temple de Tai An dans la banlieue de la ville afin de voir s'il y avait le moindre souci.

Du Mingjing ne put s'empêcher de lancer un regard à Chi Yan quand il l'entendit parler du temple de Tai An.

Son neveu avait un défaut et c'était la superstition. Cependant il semblait tenir de sa grand-mère, la mère de Du Mingjing. Comme ce dernier avait toujours aimé et respecté sa mère, il n'avait jamais trop rien dit à ce sujet.


* * *


Après cet incident, il ne fut naturellement plus question de les mettre ensemble. Plus tard Chi Yan apprit que Huang Fenfen s'était fiancée à un autre homme juste après le quinze. Il se dit en lui-même : Je pense que ma tante a dû emmener la jeune femme au temple de Tai An. De son expérience personnelle, le temple de Tai An près de la ville de Shiming était le plus fiable. Se pouvait-il qu'après avoir vu la jeune femme, le grand-prêtre du temple avait dit que c'était effectivement une possession et suggéré un mariage Chongxi C'est un mariage pour chasser le mauvais sort. L'autre personne est choisie en fonction de son horoscope et de leur compatibilité. (1), ce qui expliquait ces fiançailles si rapides ?

Devrais-je aussi profiter d'un mariage de la nouvelle année pour chasser les esprits maléfiques ? Cette pensée s'attarda un moment seulement dans l'esprit de Chi Yan puis il sourit et la rejeta.


Cependant, il ne savait pas si c'était à cause du printemps dans l'air ou parce qu'il avait un an de plus et que les gens estimaient qu'il était en âge de se marier ou simplement parce que les gens n'avaient que ça à faire après le Nouvel An, mais de plus en plus de personnes autour de lui voulaient lui présenter quelqu'un. Chi Yan se rappela de Xu Jiang qui avait voulu lui présenter ses amies puis ensuite qu'il avait rencontré un fantôme après l'autre. Ensuite il y avait eu sa tante qui voulait lui présenter sa nièce : il n'arriva rien à Chi Yan mais la jeune femme fut soupçonnée d'être possédée. Il ne savait pas si cela avait un rapport avec lui.

Sa constitution pouvait vraiment apporter le malheur aux autres.


Sans parler de ça, imaginez qu'une fille tombe amoureuse de lui et qu'elle voie la petite bouteille en porcelaine qu'il portait quand ils étaient au cinéma ou au café. La fille lui demanderait alors :

« Chi Yan, c'est quoi ce que tu portes ? C'est tellement mignon et chic. Tu m'en offriras une pareille ? »

Il sourirait alors et répondrait :

« Les cendres d'une personne. »

Cela ne traumatiserait-il pas à vie la jeune femme ?


Et même, admettons que la jeune femme accepte l'idée qu'il porte des cendres ou bien qu'il parvienne à lui cacher le fait qu'il y ait des cendres dans la bouteille en porcelaine, il faudrait bien qu'un jour il l'invite chez lui, non ? Et dès qu'elle mettrait un pied chez lui, elle verrait aussitôt la tablette funéraire.

Il sourirait alors et expliquerait à la jeune femme :

« Je n'ai pas dressé cet autel pour une journée. Je le garderai pour le restant de mes jours. Quand nous serons une famille, nous devrons encore l'honorer. Il faut trois offrandes par jour, chérie, alors n'oublie pas de cuisiner plus pour M. Ye. »

Quelle fille normale pourrait supporter ça ?


Chi Yan était très lucide quant à sa situation alors il se disait qu'il valait mieux pour lui de garder la tablette du jeune troisième maître Ye à vie et de rester seul.

Quand il aurait moins de travail plus tard, il s'inscrirait dans un club de sport ou une association pour se faire des amis. Il pourrait aussi prendre un animal pour lui tenir compagnie. Une telle vie ne serait pas trop mal.

Du coup il n'hésita pas à décliner toutes les invitations des gens qui voulaient lui présenter quelqu'un.

Cependant son colocataire n'en pouvait plus.


Il restait avec Chi Yan jour après jour mais ce dernier ne pouvait pas le voir.

Il pouvait le prendre dans ses bras mais personne d'autre ne le savait.

Son amant était célibataire aux yeux des autres — même Chi Yan se considérait comme tel.

Il le convoitait et en même temps cela ne lui plaisait pas que d'autres convoitent Chi Yan.

Il voulait que cet homme lui rende ses étreintes et ses baisers.

Il souhaitait que cet homme le regarde dans les yeux et prononce son nom.

Il désirait une réponse.


Un jour à la fin de Mars, Chi Yan s'était endormi comme d'habitude. Le temps s'était radouci mais les nuits étaient encore un peu fraîches. Il eut froid dans son sommeil et ramena inconsciemment la couverture sur lui.

Une personne l'enlaça par derrière et des filaments de fumée noire invisibles à l'œil nu pénétrèrent lentement dans son corps.

Charmant son esprit et perturbant ses souvenirs.

C'était ce qu'on appelait être ensorcelé Lit. en chinois : le fantôme qui hante son cœur. Cela se traduit par être obsédé ou être possédé mais je trouve que ensorcelé décrit le mieux la situation puisque cela veut dire être victime d'un sort ou être fasciné, enchanté par une personne. (2).


Note de Karura : Concernant Huang Fenfen, l'histoire du bébé poisson veut sans doute dire qu'elle était enceinte et qu'elle cherchait un époux pour rendre son enfant légitime. Voilà pourquoi la mère l'a faite taire.

Prochains chapitres : voilà ce que je voulais dire en parlant de consentement douteux et de Ye Yingzhi qui est sans scrupule.


Notes du chapitre :
(1) C'est un mariage pour chasser le mauvais sort. L'autre personne est choisie en fonction de son horoscope et de leur compatibilité.
(2) Lit. en chinois : le fantôme qui hante son cœur. Cela se traduit par être obsédé ou être possédé mais je trouve que ensorcelé décrit le mieux la situation puisque cela veut dire être victime d'un sort ou être fasciné, enchanté par une personne.






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