Prisonnier du Temps 46

Chapitre Quarante-six : Pratiquer


Le prince prenait à présent pleinement conscience d'une vérité :

Ça avait l'air si facile sur le papier, c'était une autre histoire quand il fallait le faire soi-même.

Quand il avait lu les documents, ne s'était-il pas dit : jouer une petite civette qui faisait toujours plaisir à son maître, où était la difficulté ? Mais quand il voulut le faire en vrai, il trouva très difficile de faire face au directeur Shi...

Yan Tuo serra les dents et descendit du lit pour s'agenouiller sur l'épaisse couverture en laine au sol. Il posa les mains sur la cuisse de l'autre homme, frotta son visage contre puis leva la tête d'un air misérable pour regarder Shi Jian :

« Miaou... »

Il miaula doucement puis referma la bouche, gêné.

Quand il se frottait contre la jambe de l'autre homme, il parvenait déjà à peine à s'imaginer que c'était un pilier mais ça... c'était trop honteux d'émettre ce son, encore plus quand les yeux gris pâles de Shi Jian se posèrent sur lui, leurs profondeurs infinies lui donnant l'impression qu'il était mentalement attardé.


Shi Jian lui lança ce genre de regard et Yan Tuo ne put se résoudre à lever la tête, trop humilié. Puis il sentit la fine main de l'autre homme toucher sa nuque et la caresser d'avant en arrière.

Il voulut l'éviter par réflexe mais se rappela aussitôt de son identité du moment. Il se dit patiemment qu'il devait s'y habituer sinon leur couverture serait fichue et les efforts de tous les groupes n'auraient servi à rien.

Les caresses de Shi Jian le chatouillèrent à la nuque. Il pencha la tête inconsciemment, frotta son visage contre le dos de la main de Shi Jian et émit un léger ronronnement dans sa gorge. Le prince ne se rendait absolument pas compte à quel point il se comportait comme un véritable chaton collant en cet instant.

Les yeux de Shi Jian s'assombrirent. Il retira sa main de la nuque, la plaça sur son épaule nue et fit :

« Debout. »


Yan Tuo s'appuya contre Shi Jian pour se lever puis ne put s'empêcher d'ouvrir de grands yeux — Shi Jian l'avait enlacé et déposé un baiser sur son épaule.

Cette intimité sans précédent fit frémir Yan Tuo et ses jambes devinrent du coton. Il parvenait à peine à rester debout et n'eut pas d'autre choix que de s'agripper à la personne devant lui. Il entendit alors Shi Jian lui murmurer à l'oreille :

« Rappelez-vous de m'appeler. »

Yan Tuo fut pris au dépourvu.

« Comment dois-je vous appeler ? »

Le directeur Shi rétrécit ses yeux et le pinça sévèrement dans le dos.

« Montre-moi comment tu m'appelles. »

Yan Tuo inspira de douleur et se renfrogna, vexé. Soudain une inspiration le frappa et il se souvint du contenu des documents. Après ça, il se nicha dans les bras du directeur et miaula à voix basse :

« Miaou, miaou, miaou. »

Le directeur le tint dans ses bras quelques minutes puis lança un "Mmm" satisfait.


À ce moment, on toqua à la porte et la voix du directeur des ressources humaines leur parvint :

« Directeur Shi, vous êtes là ? J'aimerais vous signaler quelque chose. »

Yan Tuo fut si effrayé par la voix qu'il n'osa plus bouger.

Shi Jian fit une pause, tapota la taille de Yan Tuo, désigna le lit du menton et murmura :

« Reposez-vous d'abord, nous pratiquerons autre chose plus tard. »

Le chef Ren se tenait anxieusement à la porte et ressuya la sueur de son front.

Il avait un sujet important à rapporter mais il n'avait pas pu contacter le directeur Shi de toute la matinée. Il avait demandé à Liu Mi et ce dernier avait répondu que le directeur Shi était resté dans son bureau sans sortir de toute la journée, alors il était venu le trouver.

Mais il lui avait semblé entendre à l'instant dans le bureau du directeur un... miaulement ? Et ce n'était pas un vrai chat mais plutôt le son de quelqu'un qui se montrait délibérément aguicheur.


Les cinq sens d'un cultivateur étaient très sensibles et il pouvait détecter des mouvements que les gens ordinaires ne pouvaient saisir, mais il se dit alors qu'il devait avoir vraiment mal entendu... Une personne aussi froide et indifférente que le directeur Shi ne pouvait certainement pas s'adonner à ce genre de choses au bureau, peu importait ce qu'il avait entendu.

Au moment où il se disait cela, la porte noire du bureau s'ouvrit et le chef Ren vit son patron qui se tenait à la porte, le visage sévère, son expression morne et insatisfaite, comme s'il était vraiment malheureux.

Le chef sourit rapidement et hocha la tête.

« Directeur Shi. »

Shi Jian ouvrit la porte en grand pour le laisser entrer.

« Venez me dire ce dont vous devez me parler. »


Le chef Ren le suivit et remarqua immédiatement l'immense paravent noir sur le côté. Il n'y prêta pas plus d'attention mais il vit alors du coin de l'œil une oreille blanche de chat sous l'écran.

Shi Jian suivit son regard et nota aussi l'oreille de chat.

« Euh... » grommela le chef Ren en se demandant ce qu'il pouvait dire.

L'atmosphère devint tout à coup gênante.

Puis le directeur conserva un air impassible et fit calmement :

« Le prince a voulu s'amuser un peu et il a laissé son oreille ici. »

Le chef Ren savait naturellement que le prince avait été posté à l'entrée du bureau du directeur. À ce moment, il retint un soupir. Il n'aurait jamais cru que le directeur Shi était comme ça, qu'il avait deux visages et qu'il profitait de l'absence du prince pour tout lui mettre sur le dos.

Mais après un autre moment de réflexion, il se demanda si cette chose n'appartenait pas vraiment au prince. Alors que faisaient le directeur Shi et le prince dans le bureau... ?

Il n'osa pas approfondir cette réflexion et chassa aussitôt toutes les pensées de son esprit. Il se redressa et entama son rapport à Shi Jian.


Yan Tuo s'était caché sous la couverture et avait écouté leur conversation. Il fut abasourdi en entendant le mot oreille. Il se tâta le crâne et effectivement, l'oreille droite avait disparu... Dire que ce genre de chose avait été vue par un autre que Shi Jian et que Shi Jian n'avait pas hésité à le trahir et dire que cela lui appartenait.. le prince mordit la couverture d'humiliation.


Le chef Ren finit rapidement son rapport et quitta le bureau après avoir reçu des instructions de la part du directeur Shi.

Shi Jian attendit qu'il soit parti pour verrouiller la porte puis il alla derrière l'écran. Il vit son chaton qui tenait la couverture à deux mains, le visage rouge, et profondément endormi dans son lit.

Le directeur s'assit au bord du lit et caressa la visage du prince. Il soupira doucement et se retint de crier.

* * *

Quand Yan Tuo se réveilla, il vit que la pièce était plongée dans le noir à l'exception d'une lampe qui projetait une chaude lumière jaune sur le bureau derrière l'écran. Le bureau était entièrement calme. La couverture en laine était enroulée étroitement autour de lui.

Il ne savait pas combien de temps il avait dormi et crut même que le directeur Shi avait déjà quitté le travail et qu'il ne restait plus que lui dans le bureau. Cependant, le bruit de pages que l'on tournait mit aussitôt un terme à cette idée.

Yan Tuo se leva du lit et découvrit qu'il portait encore ce honteux costume de chat blanc. Un courant d'air se fit sentir et il s'enroula dans la couverture.


Shi Jian dut entendre le bruit de son côté et une ombre noire se dessina sur l'écran noir. Le directeur Shi le rejoignit, le visage impassible, et il était impossible comme toujours de savoir s'il était content ou malheureux.

Yan Tuo se souvenait encore de son entraînement spécial où il était dans les bras de cet homme en miaulant. Il ne sut plus quoi dire un moment puis ouvrit la bouche pour dire à son patron :

« Je peux rentrer chez moi ? »

Aussitôt, le prince baissa la tête, honteux — bien qu'il détestait son chef, il prenait son travail très au sérieux et très sincèrement. Non seulement il s'était endormi pendant les heures de bureau mais en plus dans le bureau de son chef. Il avait dormi jusqu'à la fin de la journée et dès son réveil, il demandait à partir du bureau... Yan Tuo savait que ce n'était pas bien d'agir ainsi et que s'il poursuivait dans cette voie, il finirait comme ces fils à papa qui se reposaient sur leurs privilèges pour se comporter de manière scandaleuse.


Heureusement, le directeur lui offrit aussitôt une chance de faire des heures supplémentaires.

« Une minute, fit Shi Jian, j'ais encore faire quelque chose à vous faire pratiquer aujourd'hui, votre Altesse. »

Yan Tuo avait tellement honte d'avoir dormi pendant les heures de travail qu'il acquiesça sincèrement en entendant cette proposition.

Le directeur Shi tendit la main pour prendre la petite horloge sur son bureau.

« Votre Altesse, durant les dix prochaines minutes, quoi que je fasse, vous devrez coopérer avec moi et m'obéir. Vous pouvez minauder avec moi mais vous ne devez pas me résister pour de bon, compris ? Ce n'est qu'ainsi que vous pourrez prétendre être mon animal spirituel sans révéler la supercherie. »

Yan Tuo comprit ce que voulait dire Shi Jian. Il acquiesça et ferma les yeux.

« Je comprends. Allez-y. »

Shi Jian se tint en silence devant le lit, le regarda de la tête aux pieds puis baissa les yeux, tendit la main droite et poussa gentiment le prince dans le lit...


Yan Tuo ne put s'empêcher de se débattre un peu. Shi Jian immobilisa aisément ses mains de la sienne, les plaça autour de son propre cou et fit d'un ton calme :

« Il y a une punition pour les animaux spirituels qui se révoltent contre leur maître. Si vous n'arrivez pas à vous contrôler, accrochez-vous simplement à moi. »

Yan Tuo laissa échapper un gémissement et tenta d'ouvrir les yeux tant bien que mal pour regarder l'homme en face de lui.

Le coin de ses yeux était rempli de larmes dues à la stimulation physique mais aussi à la honte psychologique, et son regard semblait flou. Mais même ainsi, il savait bien qu'il se faisait misérablement tourmenter. Son corps se couvrit de sueur, même les poils à la base de sa queue étaient complètement trempés. Le responsable de tout ceci était toujours impeccablement habillé, sa chemise noire n'était même pas froissée et les boutons dorés étaient fermés jusqu'au col sans même un seul de raté.

Les yeux gris pâles étaient aussi foutrement calmes que jamais.


Yan Tuo ne parvenait pas à associer le comportement et les actions de ce moment avec le ton sévère et l'expression ascétique ordinaire de Shi Jian.

Un si fort contraste stimula la honte du prince.

De toute évidence, le directeur Shi considérait ces actes comme un moyen nécessaire pour accomplir leur mission et il n'éprouvait rien à ce sujet. Le manque de contrôle et la confusion de Yan Tuo n'eurent aucun impact sur l'autre homme. Au contraire, il était complètement à la merci de l'autre homme, incapable de s'empêcher de dévoiler son apparence la plus honteuse et intime, se donnant entièrement à lui.

Et cette personne était Shi Jian qu'il détestait tant.

Le prince avait de moins en moins envie de se sentir lésé, il estimait que c'était injuste. Il était déjà dans cet état, pourquoi Shi Jian restait-il indifférent ?


Il était comme un homme en train de se noyer et qui avait sombré dans les abysses des Enfers, et il voulait entraîner avec lui Shi Jian qui le regardait tranquillement depuis la côte.

Mû par cette pensée, il céda à la tentation. Il profita de son élan pour passer ses bras autour du cou de Shi Jian, se redresser et frotter sa joue contre le torse de l'autre. Finalement, il se pressa dans les bras de Shi Jian et ferma les yeux.

« Maître... c'est vous que j'aime le plus. »

Il avait vu ces mots dans les informations et ils coulèrent naturellement de sa bouche en cet instant.

Le prince ferma les yeux de satisfaction en se disant que peu importait ce qui arrivait ensuite, au moins la chemise impeccable du directeur était froissée par sa faute.

Cela le réjouit.


Note de Karura : C'est le retour des dix minutes ! Bien entendu, comme Shi Jian manipule le temps, c'est toujours plus long que dix minutes.

Yan Tuo joue avec le feu !






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