Chapitre 154 : Un tricheur
Le bateau de croisière offrait toutes sortes de divertissements comme des parcs aquatiques, des salles de théâtre, des cinémas, des petits terrains de jeux, des gymnases, etc. Malheureusement, Chi Yan ne pouvait pas participer à ces activités. Il ne pouvait que rester dans la suite pour regarder la mer avec Ye Yingzhi. Même dans cette situation, durant les derniers jours qu’ils avaient à passer ensemble, Chi Yan était capable de se blottir tranquillement contre son bien-aimé sans que rien ni personne ne les dérange, être assis et contempler le ciel et la mer, observer le mouvement des vagues. Cela le satisfaisait complètement.
Il y avait également cinq restaurants à thèmes différents sur le navire. Le sixième jour de la croisière, Chi Yan était de bonne humeur, alors Ye Yingzhi l’emmena dans un des restaurants cantonais qui était réputé pour avoir un très bon porridge. Dans son état, Chi Yan ne pouvait pas manger de la nourriture trop grasse ou épicée, il ne pouvait manger que des mets légers et faciles à digérer.
Chi Yan était rarement sorti au restaurant avec Ye Yingzhi depuis le début de sa maladie. Même si c’était sur le bateau, le fait de sortir manger lui rappela le temps insouciant où Ye Yingzhi et lui sortaient ensemble et fêtaient toutes sortes d’anniversaires autrefois — ils avaient même célébré ensemble la fête des fantômes. Son cœur s’emballa d’anticipation à cause de ces souvenirs.
Il y avait un bar petit mais de qualité à côté du restaurant, qui proposait des cocktails pour les passagers qui embarquaient ou qui débarquaient. De là où était assis Chi Yan, il pouvait voir les bouteilles de vin exposées sur les étagères. En fait, il n’était pas non plus recommandé de boire avec sa maladie, alors il ne put que tirer sur la manche de Ye Yingzhi sous la table.
« Yingzhi, tu ne voudrais pas prendre un verre de vin ? … Je prendrai une gorgée de ton verre. »
Il n’était pas spécialement amateur d’alcool mais après deux ans sans en boire, il en avait presque oublié le goût. Voilà pourquoi il ne pouvait s’empêcher d’avoir envie d’y goûter de nouveau.
Comment Ye Yingzhi aurait-il pu ne pas comprendre ce qu’il voulait ? Il se dit néanmoins qu’une gorgée ne pourrait pas lui faire de mal. Alors comme d’habitude, il céda à son caprice.
« Attends un peu. Qu’est-ce que tu as envie de boire ? Je vais te le chercher. »
Puis il se leva et se dirigea vers le bar.
Un homme d’âge moyen entra dans le bar juste avant Ye Yingzhi. Il posa les mains sur le comptoir. Il portait un anneau en jade limpide et brillant au pouce de sa main gauche, ce qui attirait beaucoup le regard. Comme on n’était pas en haute saison, il n’y avait qu’un barman dans le bar. Ye Yingzhi se tint sur le côté et attendit son tour.
Durant l’attente, l’autre client prit l’initiative d’entamer la conversation avec lui :
« Vous voyagez seul ?
– Avec mon époux, » répondit poliment Ye Yingzhi.
L’homme l’observa attentivement puis fit d’un ton doux :
« Vous semblez avoir un fort désir et une obsession, et vous êtes irrité parce que vous n’arrivez pas à accomplir ce que vous désirez… Est-ce en rapport avec votre époux ? »
Ye Yingzhi n’appréciait guère ce genre de ton interrogateur, surtout quand cela concernait Chi Yan. Alors il leva les yeux et eut un léger sourire, mais ne répondit pas.
« Les désirs des humains sont bien trop puissants et obstinés, cela ne peut qu’attirer les démons, » marmonna doucement l’homme en le regardant à nouveau.
Puis il partit avec son verre de vin.
Le mot ‘démon’ fit tiquer Ye Yingzhi. Il releva la tête et fronça les sourcils en contemplant le dos de l’homme qui s’éloignait. Après y avoir réfléchi, il sortit son portable et prit une photo de cet homme de dos. Il l’envoya à ses hommes en leur demandant de vérifier son identité.
Lui-même avait des choses plus importantes à faire : il devait ramener le vin à Ah Yan, il devait manger avec Ah Yan puis il devait regarder Ah Yan s’endormir. Tout ce qui concernait Chi Yan était prioritaire, le reste devrait attendre.
Le soir venu, Ye Yingzhi cajola donc Chi Yan jusqu’à ce qu’il s’endorme. Puis il ordonna à deux des hommes qu’il avait pris avec lui de monter la garde à la porte. Il s’habilla et sortit sans faire de bruit. Il se rendit directement dans une chambre du cinquième étage. La porte n’était pas fermée à clef. Il entra et referma la porte derrière lui.
Dans la chambre se trouvaient ses deux autres hommes ainsi que l’homme qu’il avait rencontré dans la soirée. Ce dernier était actuellement attaché.
Ye Yingzhi s’avança et fit un signe de tête pour dire à ses deux hommes de sortir. En même temps, il baissa les yeux et contempla calmement l’homme qui était ligoté.
« Je veux savoir ce que signifie ce que tu m’as dit ce soir et qui t’a demandé de me dire ça. »
Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !
Il avait reçu avant les résultats de l’enquête. Cet homme se nommait Hu Tu et c’était un marchand de jade. Il était à la base un voyou. À l’âge de trente ans, il fit subitement fortune illégalement grâce à la contrebande de jade et pesait plusieurs centaines de millions. Cependant, c’était un joueur invétéré. Après sa fortune subite, il se montra encore plus débridé et n’eut plus de limites. Il n’avait qu’un sens du commerce médiocre. La chance qui lui avait permis de faire fortune disparut peu à peu. Même s’il était très riche, sa fortune ne pouvait pas résister face à ses dépenses excessives et elle fut bientôt épuisée. Après ça, Hu Tu avait fait son apparition sur le Silver Wave.
Un détail de sa vie avait attiré en particulier l’attention de Ye Yingzhi — avant que Hu Tu ne fasse fortune à l’âge de trente ans, il avait complètement disparu pendant un an. Les gens de sa ville natale disaient qu’il était parti pour un travail temporaire et pour faire des affaires mais quand on approfondissait l’enquête, il s’avérait que personne ne l’avait vu durant cette période et qu’il n’y avait aucune preuve de ses activités pendant cette année. Après ça, Hu Tu était revenu dans sa ville natale et avait aussitôt commencé à s’enrichir. Ye Yingzhi ne pouvait s’empêcher de soupçonner un lien entre tout ça.
En regardant le bel homme morose devant lui, Hu Tu se rendit légèrement compte que cette fois, il avait imprudemment provoqué quelqu’un qu’il n’aurait pas dû.
Mais il ne perdit pas espoir pour autant et toutes sortes de pensées défilèrent dans son esprit. Ce genre de situation n’était rien pour lui. Les choses terrifiantes qu’il avait vécues étaient impossibles à imaginer pour les gens ordinaires et le fait qu’il ait pu y survivre suffisait à prouver qu’il avait des capacités.
Il pencha la tête sur le côté et arbora un air apeuré :
« … Je ne peux rien dire, je ne peux rien révéler. Ils me tueront sinon. »
Il sentit alors quelque chose de froid et de dur à l’arrière de son crâne. L’homme devant lui avait un sourire gracieux, mais ce sourire semblait encore plus terrifiant que le plus cruel des démons qu’il avait vu. Les yeux sombres de cet homme semblaient brûler d’un feu sombre, fou et obstiné.
Au même moment, Hu Tu l’entendit dire d’une voix indifférente et nonchalante :
« Je n’ai pas peur de la mort et je n’ai pas peur d’aller en Enfer. Et toi ? Tu as peur ? »
En cet instant, Hu Tu fut complètement abasourdi. Il aurait été bien difficile de comprendre ce qu’il ressentait actuellement s’il n’était pas en train de le vivre personnellement. Il eut seulement l’impression que son esprit était vide et qu’il avait complètement oublié toutes les ruses et mensonges auxquels il venait de penser.
Il avait rencontré bien des criminels dans Démonville. Beaucoup d’entre eux étaient fous, cruels et dépourvus d’humanité. Il avait même vu face à face plus d’un démon, mais avait réussi à s’en sortir soit en usant de tours, soit en allant jusqu’à trahir ses compagnons. Il s’était également trouvé dans différentes situations de vie ou de mort, mais il avait survécu par chance. Il avait même été capable d’accumuler suffisamment de points pour les échanger contre le droit de quitter l’île et de devenir riche.
Mais jamais encore il n’avait ressenti de la peur et tremblé ainsi au plus profond de son être. C’était comme si… comme s’il y avait le plus puissant et rusé des démons qui se cachait sous la peau de cet homme.
C’était la description la plus correcte à laquelle il pouvait songer, même s’il était persuadé que cet autre homme n’était qu’un humain ordinaire.
Il se mit à éprouver quelques regrets.
Au départ, il avait juste deviné que cet homme faisait également partie de ceux qui avaient reçu une invitation des démons, alors il avait entamé exprès la conversation dans l’espoir de profiter de l’ignorance de ce novice pour lui soutirer des points initiaux.
Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !
Démonville attribuait des points initiaux en fonction de l’intensité du désir et de l’obsession de chaque invité. Il se targuait d’avoir développé la forte capacité à bien cerner les gens durant cette année. Au premier regard, l’autre homme était du genre déterminé et fort. Pour qu’une telle personne accepte l’invitation du démon, cela prouvait simplement que son désir intérieur et son obsession étaient très puissants, et qu’il ne pouvait pas accomplir son désir par des moyens conventionnels — pour une âme si délicieuse, les démons accordaient toujours plus de points au départ afin de pimenter encore plus leurs jeux. Alors si Hu Tu avait pu s’emparer de ces points par la ruse, ses chances de gagner s’en seraient trouvées bien augmentées.
Mais il n’aurait jamais pensé qu’il se tromperait dans son jugement de cet homme.
À ce moment, la voix glaciale se fit de nouveau entendre :
« Si tu n’as pas envie de finir en Enfer, tu vas me dire tout ce que tu sais. »
Cette voix restait toujours calme et sans la moindre fluctuation, pourtant elle dissuadait les gens de lui désobéir du plus profond de leurs cœurs.
Durant les onze jours de croisière, le bateau faisait également des escales. Les passagers pouvaient descendre pour visiter et s’amuser. À ces occasions, il y avait moins de gens qui restaient sur le navire qui du coup devenait extraordinairement tranquille. Dans des moments pareils, Chi Yan prenait souvent l’ascenseur avec Ye Yingzhi pour monter sur le pont supérieur afin d’admirer la vue et de profiter de la brise maritime. Toutefois, Ye Yingzhi le ramenait toujours à l’intérieur au bout de dix minutes maximum.
Chi Yan se pliait volontiers aux souhaits de son époux mais en lui-même, il éprouvait inévitablement du chagrin. Il savait très bien qu’après cette croisière, il n’aurait probablement pas l’occasion d’aller en mer avec Ye Yingzhi sur leur propre bateau. La scène où il pourrait ‘prendre l’air et courir sur le pont comme il voudrait’ décrite par Ye Yingzhi ne pourrait se réaliser que dans ses rêves.
Sans qu’ils ne s’en aperçoivent, cela faisait déjà dix jours que le Silver Wave naviguait. Il accosterait au port du pays de K le lendemain matin.
Cette nuit-là, ils s’allongèrent l’un à côté de l’autre dans le lit, mais Chi Yan ne resta pas de son côté comme les autres fois pour s’endormir. Il passa doucement ses bras autour de la taille de Ye Yingzhi et l’embrassa dans le cou.
Sachant parfaitement que l’autre faisait exprès de le déranger, Ye Yingzhi eut bien du mal à se résoudre à le calmer. Il finit par soupirer et posa sa main gauche sur la tête de Chi Yan. Il fit d’un ton sévère :
« Ah Yan, arrête de t’amuser. On doit débarquer demain matin. Alors allonge-toi et dors. »
Chi Yan se mit assis et s’éloigna un peu de lui. Il leva la tête et le fixa de ses yeux noirs larmoyants. Après un moment, il se pencha pour poser la tête sur son épaule et marmonna à voix basse :
« Ne dormons pas ce soir, je veux que Yingzhi… »
Il avait beau vouloir se montrer direct, il ne parvenait pas à le dire.
Ye Yingzhi déglutit et le fixa sans dire un mot.
Chi Yan poursuivit dans un murmure :
« … J’ai bien dormi dans la journée, je me sens en forme et je n’ai pas du tout mal. Alors si tu y vas doucement, ça ira. »
En réalité, il se fatiguait encore facilement et il était épuisé, mais plus important que tout ça, il avait envie de Ye Yingzhi. Avant qu’il ne s’en aille pour de bon et à jamais.
« Petite fripouille, » murmura Ye Yingzhi.
Il le prit dans ses bras et le pressa contre le matelas.
« … Si tu ne te sens pas bien, dis-le moi. »
Le lendemain matin, les autres touristes étaient affairés à quitter leurs cabines et à débarquer. Ye Yingzhi, lui, ne bougea pas. Il était assis contre la tête du lit d’un air calme, ses yeux sombres profonds.
Un Chi Yan épuisé dormait à poings fermés à côté de lui. De temps en temps, il agitait son petit nez et émettait un léger bruit. En entendant ça, le visage de Ye Yingzhi s’adoucit et il caressa la joue de son époux pour le rassurer.
La carte noire disait qu’il devait rester à bord du Silver Wave jusqu’au terminus, et c’était le terminus. Pourtant, l’autre partie ne s’était pas encore manifestée, alors Ye Yingzhi ne pouvait qu’attendre. D’après Hu Tu, le chemin vers l’île pouvait différer à chaque fois et même la destination n’était pas la même. La dernière fois, Hu Tu avait pris place à bord d’un très long train qui traversait toute l’Eurasie. Il avait dû descendre à un arrêt et avait été transporté par hélicoptère à la destination finale.
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Ye Yingzhi se remémora les informations qu’il avait obtenues de ce marchand de jade Hu Tu l’autre jour. Il espérait que cet homme avait dit vrai et que les démons dont il parlait existaient bel et bien. Car il se pouvait que seul un vrai dieu ou un vrai démon ait la capacité de sauver la vie de Ah Yan.
Note de Karura : Que c’est triste et touchant.
Cette histoire de jeu du démon n’est pas sans rappeler un certain Squid Game, sauf qu’il ne s’agit pas que d’argent ici.
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Petit théâtre n°3 :
Démon Chi Yan : Misérable humain, donne-moi ton âme et j’accomplirai ton souhait le plus cher.
Ye Yingzhi : Okay, je vais te donner mon âme, mon cœur et mon corps.
Démon Chi Yan : … Je veux juste ton âme.
Ye Yingzhi : C’est tout ou rien !
Démon Chi Yan : … D’accord, et quel est ton souhait ?
Ye Yingzhi : Épouse-moi ! ❤❤❤
Démon Chi Yan : Hum… tu n’as pas un autre souhait ?
Ye Yingzhi : Non !
Démon Chi Yan, rougissant : … Bon, c’est d’accord.
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