Chapitre 156 : Acheter de la vie
Le DE780 s’approcha rapidement de l’île dans l’obscurité. Il ralentit progressivement, puis accosta au port.
Le vieil homme aveugle entra dans la cabine et fit signe à tout le monde de sortir.
Ye Yingzhi resta assis parmi les derniers, observant en silence les passagers qui sortaient en file indienne. Il prit Chi Yan par la main et sortit quand il ne resta plus qu’une dizaine de personnes dans la cabine. Avant de descendre, il regarda exprès en direction de la cabine de pilotage — il n’y avait personne à l’intérieur.
Du début à la fin, la seule personne qui dirigeait le navire avait été ce vieil homme aveugle et muet.
Ye Yingzhi calcula qu’il y avait environ deux cents passagers de différentes nationalités sur le bateau, mais le temps que Chi Yan et lui débarquent sur l’île, la plupart des gens qui étaient déjà venus ici avant avaient complètement disparu.
Quand il les vit débarquer, un homme dans un costume moulant et avec des cheveux frisés les accueillit d’un sourire. Il rassembla la vingtaine de gens qui avaient débarqué et qui restaient. Cet homme avait un maquillage de clown sur le visage, des lèvres d’un rouge vif exagéré, le contour des yeux peint d’une couleur bleu violet très dense et voyante, tandis que le reste de son visage était aussi blanc qu’un mur. Quand il souriait, son visage tout entier arborait une sorte de grimace féroce.
« Mesdames et messieurs, soyez les bienvenus à Démonville. Ici, du moment que vous participez au carnaval des démons, vous aurez l’opportunité d’acheter toutes sortes de prix de choix… »
Il prononça son discours d’une manière toute aussi exagérée, mais également d’un ton très grave et captivant.
La plupart des choses qu’il disait étaient cohérentes avec ce que Ye Yingzhi avait entendu de la bouche de Hu Tu. Cependant, cet homme ne cessait de répéter et d’insister sur les mots intéressants et excitants comme carnaval et jeux, mais jamais il ne parla des dangers potentiels — il ne leur dit pas que s’ils échouaient à un jeu, ils pouvaient devenir de la pâtée pour démon et se faire dévorer par eux. Il n’expliqua pas non plus que les humains ici pouvaient se montrer encore plus dangereux que les démons. Non seulement il y avait toutes sortes de menteurs et de voleurs, mais aussi des meurtriers qui n’hésiteraient pas à tuer.
De ce point de vue, Ye Yingzhi accorda un peu plus de crédit aux paroles de Hu Tu.
Mais dans le discours de cet homme, Ye Yingzhi apprit également certaines règles que Hu Tu n’avait pas clairement expliquées : les démons ne pouvaient pas arbitrairement attraper des gens dans la rue pour les manger. Ils avaient seulement le droit de les chasser et les tuer à l’occasion des divers jeux, et ils devaient également bien respecter les règles des jeux. C’était compréhensible : après tout, si on voulait qu’un jeu soit amusant, il fallait bien un minimum d’équité. Même les démons ne voulaient pas que les autres de leur espèce enfreignent les règles selon leur bon vouloir.
Mais cela ne voulait pas dire pour autant qu’ils n’avaient qu’à ne pas s’impliquer dans le carnaval et les jeux des démons pour rester sains et sauf. Premièrement, la seule manière de gagner des points, c’était en participant aux jeux. S’ils ne participaient pas et ne gagnaient pas de points, ils seraient venus ici pour rien et ils ne pourraient jamais récolter suffisamment de point pour rallonger la vie de Chi Yan et quitter l’île. Ils ne pourraient donc jamais partir de cet endroit.
Deuxièmement, il ne fallait pas seulement se méfier des démons, mais aussi des humains. Les âmes souillées par les meurtres étaient plus susceptibles d’attirer l’attention des démons. Alors même s’il n’y avait pas trop de meurtres ici sans les contraintes de la loi et de la morale, il y avait tout de même beaucoup de risques de se faire attaquer ou tuer dans cette Démonville que dans la société humaine normale.
L’homme au maquillage de clown commença à leur présenter ce qu’ils allaient pouvoir acheter dans les boutiques de Démonville.
« … Avec dix mille points, vous pouvez acheter quinze millions de yuan. Mais si vous voulez mon avis, ce n’est pas ce qu’il y a de mieux dans les boutiques. »
Quand il entendit des exclamations dans le public, la bouche du clown se fendit d’une oreille à l’autre, arborant un sourire démoniaque.
« Je vous conseille de ne pas gaspiller vos points comme ça. Pour la même somme de dix mille points, vous pouvez acheter le respect et le soutien sincère de cent mille personnes, ou bien l’amour inébranlable d’une seule personne. Et pour cinquante mille points, vous pouvez obtenir l’amour de votre bien-aimé. »
L’homme arbora un air dramatique de passion, puis baissa la voix et poursuivit :
« Pour également cinquante mille points, vous pouvez acheter le droit de quitter l’île. Et pour cent mille points, vous pouvez acheter une année de vie. »
Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !
À ces mots, les pupilles de Ye Yingzhi se contractèrent soudain.
On pouvait effectivement acheter de la vie ici.
Mais cent mille points ne permettaient d’obtenir qu’une année de vie. Hu Tu avait fait tout son possible pour survivre sur cette île pendant un an et il n’avait récolté que trente mille points. Il était donc normal de se dire que ce serait très difficile d’obtenir ces cent mille points. Il était hors de question qu’il reste avec Ah Yan sur cette île toutes leurs vies. En fait, ce serait déjà bien ardu de survivre une année dans un tel endroit.
Ah Yan n’avait pas encore trente ans cette année. Si on se basait sur l’espérance de vie moyenne, cela voulait dire que Ye Yingzhi allait devoir gagner cinq millions de points en une année.
« Si vous voulez plus de points, vous devez activement participer à nos jeux et notre carnaval. »
Le clown sourit de nouveau et comme un tour de magie, il fit sortir plus d’une vingtaine de montres digitales en cuir noir de la poche extérieure de son costume moulant.
« Afin de vous remercier d’être venus et de vous aider à vous adapter à la vie ici, nous avons spécialement préparé un cadeau de bienvenue pour chacun de nos invités. Tout comme vous avez des âmes différentes, le niveau de votre cadeau va varier — portez ces montres et vous découvrirez votre cadeau : vos points initiaux. Les points que vous obtiendrez lors des jeux seront également ajoutés sur cette montre et vous pouvez aussi transférer des points à d’autres personnes au moyen de ces montres. »
Ye Yingzhi prit deux montres des mains du clown et en passa une autour du poignet de Chi Yan, puis l’autre autour du sien. Au moment où il referma le bracelet sur son poignet, une ligne de nombres s’afficha sur le cadran : + 20 000. Toutefois, le cadran de Chi Yan n’afficha que des zéros.
« Vous devez avoir une très forte obsession. Il est rare de trouver une âme si sombre parmi les humains et qui peut recevoir autant de points. »
À un moment donné, le clown en costume était apparu en silence derrière Ye Yingzhi et avait prononcé ces mots d’un ton chantant.
Ye Yingzhi ne dit rien, alors le clown se tourna vers Chi Yan et expliqua :
« Seuls les invités peuvent recevoir ce cadeau de bienvenue, les amis qui accompagnent les invités ne reçoivent rien. »
Chi Yan hocha la tête et le remercia doucement.
Le clown eut un léger rire et l’observa un moment de ses yeux plissés. Il fit en souriant :
« Si vous êtes prêts, vous pouvez tous les deux entrer dans la ville maintenant. L’entrée est par là-bas. »
Il désigna du doigt la direction pour eux deux, puis retira sa main pour la poser sur son torse. Il s’inclina bien bas et fit d’un ton chic et classique :
« Je vous souhaite à tous les deux de bien vous amuser. »
Après un court moment, le clown se releva et contempla les deux dos qui s’éloignaient. Il eut un large sourire.
C’est vraiment très rare de voir une âme aussi pure, elle est terriblement attirante pour les démons. Autrefois, un tel humain aurait certainement été directement envoyé aux seigneurs des Enfers pour qu’ils le savourent. Et cet autre humain… tss, il n’a rien à envier à un démon avec son âme sombre et sa puissante obsession. Malgré tout, ces deux-là sont en couple.
Ce jeu va sûrement être très intéressant.
Comme l’avait dit le clown et Hu Tu avant lui, cette île ressemblait vraiment à un parc d’attractions pour que les gens s’amusent et passent du bon temps. Des deux côtés de la route, on pouvait voir toutes sortes de maisons aux formes étranges, qui ressemblaient à des magasins.
Toutefois, le clown avait dit que le fait d’entrer dans une maison revenait à accepter de participer au jeu qui s’y pratiquait. Il n’y avait que dans les magasins démons et les hôtels démons, qui étaient officiellement gérés par la ville et repérables grâce à des enseignes vertes, qu’on pouvait entrer librement.
Par conséquent, Ye Yingzhi et Chi Yan ne s’arrêtèrent pas du tout en chemin, mais se rendirent directement à la place centrale de la ville.
Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !
Il y avait une petite fontaine au centre de cette place et au milieu de la fontaine, on voyait une statue en pierre qui représentait un ange avec la tête levée vers le ciel. L’eau jaillissait de sa bouche. Si on regardait de plus près, on pouvait voir que les ailes de cet ange étaient attachées avec de longues chaînes en fer. L’ange semblait prisonnier et retenu ici par ces chaînes, sans aucun moyen de s’échapper. Une tablette en pierre se trouvait en face de l’ange avec les mots suivants : Ceci est un véritable ange.
En voyant ce spectacle, Chi Yan fut parcouru d’un frisson sans raison apparente. Il tira sur la manche de Ye Yingzhi pour lui demander de partir. Cette fontaine créait un sentiment de malaise dans son cœur.
À l’ouest de la fontaine, il y avait un magasin démon avec une enseigne verte. La vitrine était noire, ce qui empêchait de voir ce qu’il y avait à l’intérieur du magasin. La porte à double battant était peinte en vert, mais elle possédait des poignées en or foncé. Un crâne humain était suspendu au-dessus de la porte. Quand elle s’ouvrait, le crâne émettait une sonnerie claire et agréable, comme un carillon à vent.
Ye Yingzhi et Chi Yan entrèrent dans la boutique. L’endroit était vide : mis à part un comptoir en verre démodé, il n’y avait rien d’autre.
En entendant la clochette sonner, une silhouette émergea de l’arrière-boutique. Elle possédait deux cornes incurvées de couleur rouge sombre sur sa tête et une petite queue noire comme celle d’un chat qui était courbée vers le haut le long de sa cuisse. Elle portait un T-shirt vert foncé ainsi qu’une jupe, ce qui ressemblait à un uniforme d’employé. En voyant les deux humains, l’employée se pencha sur le comptoir et leur offrit un sourire affable.
« Que puis-je faire pour vous ? »
Quand elle parla, deux canines pointues apparurent derrière ses lèvres roses.
Automatiquement et avec un peu de méfiance, Ye Yingzhi cacha Chi Yan derrière lui.
« On m’a dit qu’on pouvait acheter de la vie ici.
– C’est exact, fit l’employée en redressant sa queue. C’est cent mille points pour une année. Vous désirez acheter maintenant ?
– Je veux acheter un dixième d’abord, est-ce possible ? »
Ye Yingzhi baissa légèrement la tête, ses yeux noirs fixant l’autre partie.
L’employée ressentit alors un rare sentiment instinctif d’oppression.
Elle fit la moue et sortit une calculatrice de sous le comptoir en verre transparent. Ses longs doigts avec du vernis doré tapotèrent les touches.
« Voyons voir, si on compte trois cent soixante-cinq jours dans une année, alors un dixième représente trente-six jours et demi. Quant à un dixième de cent mille points, cela fait dix mille points Sérieux, tu as besoin d’une calculatrice pour diviser par 10 ?????? (1). On va donc dire dix mille points pour acheter trente-six jours et demi de vie… Okay, c’est bon. »
Après avoir dit ça, elle sortit de sous le comptoir un flacon noir en forme de losange.
« Pour être honnête, ce genre de chose ne se vend pas vraiment. Cela fait bien dix ans que personne n’est venu acheter de la vie. C’est tout vous, ça, les humains. Tant que vous êtes vivants, vous estimez que la vie est ce qui a le moins d’importance. »
Ye Yingzhi ne prit pas la peine de lui répondre. Il s’avança pour prendre le flacon. Au moment où il le saisit, une notification apparut sur la montre digitale : - 10 000. Sans hésiter, Ye Yingzhi tendit le flacon à Chi Yan. Cependant, au moment de le lâcher, il hésita un peu et fit en baissant la voix :
« … Ah Yan, je devrais peut-être d’abord faire un essai. »
Notes du chapitre :
(1) Sérieux, tu as besoin d’une calculatrice pour diviser par 10 ??????
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