Le Prince Solitaire Alternative 5.2 partie 1

Alternative 5.2 : La première cour (suite)

Partie 1


Kurojū, dixième mois de l’année 2448


Trois ans plus tard, Haruni se sentait mieux à Kurojū. Entre les entraînements au sabre et les promenades à cheval, sans parler de son corps plus solide, il avait retrouvé un certain équilibre. Kikuchi et lui faisaient régulièrement des duels amicaux et leurs amis comprirent qu'il y avait un autre fanatique du sabre parmi eux. Kikuchi et Kenshirō étaient en cour depuis un an et tout se passait bien. La majorité de Kikuchi n'allait plus tarder, ce qui lui posait un dilemme : il souhaitait faire plaisir à Haruni en invitant Tetsuō et Yatsu pour l'occasion, mais il ne souhaitait pas que cela rapproche à nouveau le Second Prince et Mitsuhide. Finalement, il envoya quand même les invitations. Quand la réponse lui parvint, il en fut égoïstement soulagé.


« Désolé, fit-il à Haruni en lui expliquant ses intentions. Le seigneur Mitsuhide ne veut pas revenir si tôt à Kurojū à cause de… de…

La mort de Yama, compléta Haruni pour lui, la mine sombre.

En effet. »

Kikuchi avait noté que le garçon se distinguait de Yama, comme pour mieux accepter la situation. Par contre lorsqu'ils parlaient d'événements passés, Haruni ne faisait plus la différence et disait “je” sans souci.

« Encore désolé, » fit le Firal en se mordant les lèvres.

Haruni prit un air résigné.

« Au moins, tu auras essayé. »


Le Firal se retint de le serrer dans ses bras pour le consoler. Haruni n'exprimait pas sa tristesse de façon manifeste comme les autres, il gardait tout en lui et ne s'autorisait jamais la moindre larme.

« Ce n'est que partie remise, assura Kikuchi. Chiharu sera majeur d'ici cinq ans, nous les inviterons de nouveau. »

Haruni ne dit rien. Comme Kikuchi entretenait une correspondance régulière avec Tetsuō, il lui demandait toujours des nouvelles de Yatsu. Grâce à ça, Haruni savait que le garçon allait bien, quoique toujours peiné de la mort de son père. L'idée de revoir Yatsu… cela lui ferait certainement plus de mal que de bien.


~*~


Un an et demi plus tard, au début de l'automne, Kikuchi — à présent Seiryū — reçut un message inquiétant de la part de Tetsuō. Il en fit aussitôt part à Haruni :

« Il y a eu plusieurs cas de fièvres à Madare, dont certains mortels. »

Haruni prit un air soucieux.

« Comment vont-ils ?

La petite Jika était malade, mais elle est à présent hors de danger. Par contre, Yatsu… »

Le Second Prince pâlit visiblement.

« Il est mort ? demanda-t'il d'une voix hésitante.

Il est très malade et ne montre aucun signe de guérison. Le message date d'une semaine et Tetsuō n'est pas très optimiste sur sa survie. Haruni, je suis désolé… »

Le regard doré le foudroya.

« Il n'est pas encore mort ! Je l'aurais senti sinon ! » affirma-t'il.

Seiryū ne voulut pas le contredire, mais il n'y croyait guère.

Œuvre originale écrite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé mon histoire !

« Je vais à Madare, reprit subitement Haruni.

Que vas-tu faire là-bas ? le raisonna le jeune homme. L'Empereur ne te laissera jamais y aller et puis, le temps qu'on arrive… il sera sûrement déjà trop ta…

Tais-toi ! le coupa Haruni. J'irai, tout seul s'il le faut !

Évidemment que je viens avec toi, assura aussitôt Seiryū. Mais comment quitter le palais ?

C'est assez facile de se glisser hors de cet endroit, fit Haruni avec un mince sourire. Le plus difficile, ce sera de semer nos poursuivants.

Les gardes ?

Gugonjū. »

Malgré les années, Haruni n'avait toujours pas pardonné au prêtre qui résidait à Kurojū lui aussi. Haruni se montrait courtois avec lui, mais gardait ses distances. Gugonjū n'insistait pas, semblant comprendre les sentiments du Second Prince.


« Peu importe, reprit Haruni. Retrouve-moi aux écuries dans une heure avec des affaires pour un long voyage !

Cela va attirer les soupçons, non ? »

Haruni lui lança un regard peu patient. Le garçon était plus stratège que ça d'habitude mais là, il fonçait tête baissée à cause de son inquiétude pour Yatsu. Pour autant, Seiryū se voyait mal lui dire de prendre le temps de réfléchir calmement.

« Alors faisons comme si nous partions en promenade, mais on prendra de l'argent. Comme ça, nous achèterons ce qu'il nous faut en cours de route.

Entendu ! »

Voilà qui était nettement plus réfléchi.


~*~


Malheureusement lorsqu'ils se retrouvèrent aux écuries, ils eurent la mauvaise surprise de tomber nez à nez avec Gugonjū accompagné de trois prêtres. Ils saluèrent les jeunes gens, l'air de rien.

« Votre Altesse, fit ensuite Gugonjū à Haruni, pourrions-nous nous joindre à vous pour cette promenade ? »

Haruni lança un regard à Seiryū qui disait “je te l'avais bien dit”.

« Votre compagnie n'est pas souhaitée, refusa-t'il brutalement.

Je ne compte pas gâcher vos précieux moments avec le Firal Seiryū, assura le prêtre avec un sourire entendu. Nous resterons en retrait pour vous laisser toute votre intimité, soyez-en sûr. »

Seiryū rougit à cause de l'implication. Haruni était encore mineur, bon sang, alors jamais il ne se permettrait ne serait-ce qu'un baiser ! Il attendait patiemment que le Second Prince ait l'âge approprié. Pour le moment, il se contentait de lui tenir la main en privé.


De son côté, Haruni ne laissa pas déstabiliser par les insinuations — en fait, il ne les comprit même pas.

« Quel est le problème, Gugonjū ? demanda-t'il assez rudement. Tu cherches encore un endroit isolé pour me tuer ? »

Les autres prêtres regardèrent nerveusement autour d'eux, mais il n'y avait aucun autre témoin. C'était rare que Haruni évoque ces faits aussi directement depuis qu'ils étaient à Kurojū. Cela trahissait son impatience. Gugonjū réagit en haussant un sourcil, puis il se montra à son tour très direct :

« Les Dieux m'ont ordonné de vous accompagner à Madare. »

Cela surprit Haruni. Il n'avait plus eu de contact avec les dieux depuis Myūjin et ces derniers semblaient satisfaits de la situation, surtout depuis que Tegami avait repris les rituels d'Invocation. Il sentait parfois les ombres s'agiter autour de lui, mais il les ignorait totalement. Il n'avait plus rien à leur dire sauf que là, ils semblaient le soutenir dans son projet de retourner à Madare ?


« Je ne te crois pas, fit-il à Gugonjū.

Vous n'avez qu'à Leur demander, » suggéra ce dernier.

Cela pouvait être un piège, mais quel mal pourraient-il encore lui faire ? Haruni ferma les yeux et se retrouva dans le monde des esprits, la transition aussi facile qu'autrefois.

« Fils ! s'écrièrent les dieux, tout heureux de le revoir.

Reculez ! ordonna-t'il en levant une main. Dites-moi seulement pourquoi vous acceptez que je me rende à Madare.

Nous avons une mission pour toi.

Votre mission, vous pouvez vous la foutre là où…

Délivrer un message au seigneur de Madare. »

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Le garçon écarquilla les yeux.

« Quel message ? demanda-t'il avec méfiance.

Nous te le dirons une fois sur place.

Vous ne m'empêcherez pas de voir Yatsu ?

Non, tu as notre parole. »

Haruni resta sur ses gardes, mais quel autre choix avait-il ? S'il refusait, Gugonjū l'empêcherait de quitter le palais et irait tout raconter à l'Empereur. Le seul moyen de partir, c'était donc avec les prêtres, même si cette perspective ne lui plaisait pas du tout ! Sans dire un mot de plus aux dieux, Haruni revint dans le monde matériel. Cela n'avait duré que quelques secondes, mais Seiryū l'avait saisi par les épaules pour le soutenir. En voyant Haruni rouvrir les yeux, le Firal prit un air soulagé et interrogateur. Haruni ne lui avait jamais dit ce dont il était capable et Seiryū savait juste qu'il pouvait manipuler le feu car il avait vu Yama le faire autrefois.


Le garçon se tourna vers Gugonjū qui arborait un sourire confiant, comme s'il connaissait déjà sa décision. Haruni se renfrogna. Jamais il ne pourrait apprécier ce type irritant.

« C'est d'accord, fit-il à contrecœur. Nous partons tout de suite. »

Gugonjū eut la bonté de ne rien dire et s'inclina. Seiryū, lui, était confus.

« Tu es sûr ? murmura-t'il à Haruni.

Pas le choix.

Et… comment on va faire pour les gardes ?

Ce ne sera pas un problème, Firal Seiryū, intervint Gugonjū avec un sourire. Mes collègues vont annoncer à sa Majesté l'Empereur que le Second Prince a dû obéir à la volonté des Dieux et s'est mis en route pour Madare. Personne ne nous poursuivra. »

Haruni dut reconnaître que c'était malin, mais jamais il ne l'aurait dit à voix haute.


« Le voyage sera rude, on ne se reposera qu'au minimum, avertit-il. Celui qui n'est pas content ou incapable de suivre ne pourra que faire demi-tour ! »

Il fixa surtout Gugonjū en disant cela, mais le prêtre conserva son sourire.

« Merci de votre inquiétude pour nous, votre Altesse.

Je ne m'inquiète pas, rectifia-t'il sèchement. Je viens de dire que je vous abandonnerai si vous me retardez !

Vos paroles de sollicitude nous vont droit au cœur. Nous serons à la hauteur de vos attentes, soyez-en sûr ! »

L'air écœuré, Haruni cessa de parler à ce type qui déformait ses propos. Il prit sa monture et se dirigea vers les portes du palais, suivi par Seiryū et les prêtres. Seul comptait Yatsu. Il espérait de tout cœur arriver à temps pour voir son fils.


~*~

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À une allure normale, le voyage de Kurojū à Madare prenait trois à quatre semaines, selon les conditions climatiques. Là, en chevauchant le plus possible, il ne leur fallut que huit jours. Les prêtres avaient prévu des vivres et tout ce qu'il fallait pour camper. Ils purent même changer de montures et reprendre des vivres au temple de Murōki, ainsi qu'à d'autres lieux de rendez-vous. Haruni commença à nourrir des soupçons.

« Vous pouvez vous adresser à tous vos prêtres ? » demanda-t'il mentalement aux dieux.

Ravis qu'il leur parle à nouveau, ils répondirent honnêtement :

« Pas tous. Les prêtres supérieurs sont le plus sensibles à notre présence, quoiqu'à des degrés divers.

– Mais vous pouvez quand même leur transmettre vos instructions ?

Oui, c'est d'ailleurs ce que Nous avons fait pour ce voyage. »


Haruni songea alors qu'il n'avait jamais eu la moindre chance d'échapper aux dieux. C'était même surprenant qu'ils n'aient pas agi avant contre lui. Mais bon, peu lui importait le passé, il s'inquiétait davantage de l'état de santé de Yatsu. Les dieux ne pouvaient rien lui dire, arguant que ce garçon n'était pas de leur sang.

« Mais c'est mon fils ! rétorqua-t'il.

Seuls les liens du sang comptent. »

Après les retrouvailles avec son père et son frère, Haruni ne pouvait pas nier ce fait. Cependant, cela ne diminuait en rien sa relation avec Yatsu.


Durant le voyage, les prêtres se contenaient de suivre et même Gugonjū respectait son inquiétude. Seiryū ne disait pas grand-chose, à part quelques mots d'encouragement. Quelque part, le Firal craignait que l'identité de Haruni ne soit dévoilée et qu'il décide de rester à Hanajū. Seiryū refusait de le perdre à nouveau. Toutefois, il ne pouvait pas montrer sa peur : il devait au contraire soutenir Haruni afin de ne pas perdre son amitié. De ce fait, il fut à la fois soulagé et anxieux quand ils arrivèrent en vue de Hanajū.


~*~


Haruni fixa la ville autrefois familière, mais il ne ressentit pas de nostalgie et encore moins la joie de revenir chez lui. Il semblait s'être totalement détaché de son ancienne vie, sauf en ce qui concernait Yatsu. Durant leur voyage, ils s'étaient renseignés sur cette épidémie, mais personne n'en avait entendu parler en dehors des frontières de Madare. Sans le message de Tetsuō, Haruni ne l'aurait sans doute su que trop tard. D'humeur sombre, il rabattit sa capuche sur son visage afin de ne pas se faire remarquer. Ses compagnons de route l'imitèrent.

« Suivez-moi, » ordonna-t'il.

Il contourna la ville et passa par les champs d'entraînement des casernes, profitant de sa connaissance des lieux pour éviter les patrouilles et la foule. Il conduisit le groupe vers l'entrée secrète du palais sans même y penser.


Les deux gardes postés là furent très surpris de leur apparition, encore plus lorsque Haruni montra son visage, ce qui se passait de présentations.

« V-votre Altesse ! fit l'un des gardes en se prosternant, imité par son collègue.

Conduisez-moi à votre seigneur, » fit simplement le garçon.

Les gardes ne discutèrent pas. Descendant de leurs montures, les voyageurs traversèrent le palais. Seiryū observa Haruni avec attention, cherchant des signes de tristesse ou de nostalgie, mais le Second Prince était seulement inquiet pour Yatsu.


Ce fut un Mitsuhide un peu pâle et amaigri qui les reçut dans la grande salle. Haruni plissa les yeux en revoyant son ami pour la première fois depuis trois ans. Les cheveux qui avaient été coupés court en signe de deuil avaient naturellement repoussé depuis, mais le seigneur de Madare semblait avoir vieilli brutalement, ses traits marqués pas seulement par la fatigue. Il se prosterna devant le garçon, ce qui fit naître un sentiment d'étrangeté dans le cœur de ce dernier.

« Votre Altesse, c'est un honneur de vous recevoir dans mon humble Hanajū, mais je ne m'attendais pas à votre venue ! Je dois hélas vous dire que ce n'est guère le bon moment pour visiter ma province. »

Malgré la gravité de la situation, Haruni sentit un léger sourire lui monter aux lèvres. Son ancien ami ne mâchait pas ses mots, même en présence du Second Prince.


« Vous pouvez vous relever, seigneur Mitsuhide, » lui fit-il en reprenant un air neutre.

En se redressant, Mitsuhide examina le reste du groupe et hocha la tête en voyant Gugonjū : voilà qui expliquait leur arrivée par l'entrée secrète, connue de seulement quelques personnes. C'était du moins son interprétation. Le prêtre le salua à son tour et passa aussitôt au but de leur venue :

« Seigneur Mitsuhide, nous avons bien connaissance de l'épidémie qui frappe votre province. Quelle est précisément la situation ?

C'est une catastrophe, fit franchement le seigneur avec un tic de la bouche. La maladie touche environ une personne sur dix et tue trois personnes infectées sur cinq. Les médecins sont dépassés.

Yatsu… Le Firal Yatsu est-il encore en vie ? » intervint Haruni, incapable de supporter tout autre délai.

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Mitsuhide le fixa d'abord avec stupeur, puis son visage s'assombrit. Haruni cessa de respirer.

« Il est encore vivant, mais son état est très grave. Cela fait presque un mois qu'il lutte contre la fièvre et il s'affaiblit de jour en jour. Mais comment vous…

Je dois le voir, le coupa Haruni.

Votre Altesse, non ! » s'écria Mitsuhide, choqué et oubliant un moment le respect qu'il lui devait.

Il déglutit et expliqua patiemment :

« Yatsu n'a plus repris conscience depuis plus de deux semaines. Le médecin nous a interdit de le voir pour ne pas risquer de nous faire infecter à notre tour. Il a dit aussi… qu'il n'y a plus beaucoup d'espoir. »

Haruni s'était figé, et pas seulement à cause de la dernière phrase.

« Ne me dites pas qu'il est tout seul ?! s'indigna-t'il.

Non, les servants lui font la toilette et lui donnent à boire tous les jours. »

Le Second Prince n'en revint pas : non seulement Yatsu était mourant, mais on le laissait agoniser seul ? Personne ne méritait ça !


Haruni quitta brusquement la salle pour se rendre à ses anciens appartements. Confus, Mitsuhide mit un temps à réagir.

« Votre Altesse ! » s'écria-t'il en s'élançant derrière lui.

Seiryū et les prêtres firent de même. Ils s'arrêtèrent devant les portes closes du pavillon. Haruni ne marqua qu'un temps d'arrêt avant de les ouvrir et d'entrer, au grand dam de Mitsuhide.

« Votre Altesse ! » s'écria-t'il de nouveau, ne se demandant même pas comment Haruni avait pu savoir où se rendre.

Il voulut entrer à son tour, mais Gugonjū s'interposa calmement. Mitsuhide lui jeta un regard abasourdi.

« Saint Gugonjū, vous devez faire quelque chose ! le supplia-t'il. Si le Second Prince tombait malade à son tour…

Il n'y a rien à craindre à ce sujet, seigneur Mitsuhide, assura le prêtre. Les Dieux protègent Leur descendant. »


Mitsuhide n'était pas plus croyant qu'un autre, alors il trouva ces paroles absurdes. Si la foi pouvait les protéger, Madare n'aurait pas subi une telle calamité ! Cependant, il se retint de partager ses doutes avec le prêtre.

« Qu'il soit protégé ou pas de la maladie, reprit-il, pourquoi est-il entré ? Quelle est précisément la raison de votre venue ? »

Gugonjū garda le silence un moment, puis répondit de manière vague :

« Les Dieux ont confié une mission au Second Prince. C'est à lui qu'il appartient de vous expliquer ou pas. »

Cela ne rassura pas du tout Mitsuhide qui continua de jeter des regards anxieux à l'intérieur du pavillon, ne pouvant rien voir. Il ordonna soudain à son servant de faire venir le médecin tout de suite.

« Ce ne sera pas nécessaire, fit de nouveau Gugonjū. Son Altesse ne doit pas être dérangé. »

Il referma les portes du pavillon et se posta devant, imité par les autres prêtres. Mitsuhide ne put que s'incliner, mais son cœur saignait douloureusement.


~*~


Alors que la nuit était pratiquement tombée, Gugonjū, qui avait senti la présence des Dieux se retirer, ouvrit de nouveau les portes du pavillon. Mitsuhide n'avait pas quitté les lieux, anxieux de savoir ce qui se passait. Les servants avaient apporté des tables et des repas durant la journée, mais personne n'avait mangé de bon appétit.

« C'est terminé, » fit simplement le prêtre.

Le seigneur de Madare se figea, lui pour qui cette phrase avait un tout autre sens. De son côté, Seiryū n'hésita pas et se rua dans le pavillon pour retrouver le Second Prince. Gugonjū se prépara à le suivre, mais se fit retenir par Mitsuhide.

« Mais… et l'infection ? balbutia-t'il.

Nous ne risquons plus rien. »

Incrédule, Mitsuhide le suivit néanmoins.

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Ils trouvèrent Haruni allongé à côté de Yatsu, sa tête sur son torse, leurs mains jointes. Les deux étaient très pâles. Seiryū redressa délicatement le Second Prince et l'appuya contre lui.

« Haruni, » appela-t'il doucement.

Le Second Prince finit par battre des paupières, visiblement épuisé.

« Et Yatsu ? » demanda-t'il faiblement.

Seiryū lança un regard au fils de Yama qui avait l'air en tout point moribond, puis à Gugonjū.

« Tout va bien, votre Altesse, » répondit ce dernier.

Haruni acquiesça légèrement, puis sa tête retomba contre le torse de Seiryū. Ce dernier repoussa une mèche noire de son visage.

« Il a besoin de repos, » fit-il.


Cela fit réagir automatiquement Mitsuhide :

« Je… je vais faire prépare une chambre pour son Altesse. Hélas, je n'ai rien de digne à lui proposer.

Le Second Prince n'est pas comme ça, » assura Gugonjū.

Tout en donnant les ordres à ses servants, Mitsuhide ne pouvait détacher son regard de Seiryū qui gardait le Second Prince dans ses bras. Tout dans ses gestes trahissait une immense affection. Cela éveilla son ressentiment.

« Tch', il ne lui aura pas fallu bien longtemps pour oublier Yama, » songea-t'il.

Déjà aux funérailles, le Firal n'avait offert qu'une simple mèche de cheveux pour le bûcher du Vite. Cela voulait bien dire que ses sentiments n'étaient pas si profonds que ça. Mitsuhide, au contraire, continuait de pleurer la mort de son ami, même s'il se forçait à vivre afin de prendre soin des enfants.


« Mon servant va vous conduire à la chambre prévue, » fit-il d'un ton neutre une fois que ce fut prêt.

Seiryū sortit en portant le Second Prince, suivi par les prêtres. Une fois seul avec Yatsu, Mitsuhide s'agenouilla à côté du garçon alité et il sentit les larmes lui monter aux yeux. À quoi rimait cette visite, si ce n'était le torturer et lui rappeler son impuissance ?

« Yatsu, fit-il d'un ton faible, tu vas rejoindre ton père avant moi, hélas. Dis-lui bien que je lui demande pardon de tout mon cœur pour ne pas avoir su te protéger. »

Il serra la main froide de Yatsu en versant une larme, puis il se releva pour quitter la pièce. Tout à coup, il entendit un bruissement derrière lui, puis une faible voix qui était presque un murmure :

« Papa ? »

Il se retourna et n'en crut pas ses yeux.


~*~


Haruni dormit deux jours entiers. Seiryū s'en inquiéta d'abord, mais Gugonjū le rassura :

« La guérison du Firal Yatsu lui a demandé beaucoup d'énergie, sans parler du rude voyage pour venir. Il se repose simplement.

Mais ce sont les Dieux qui ont guéri Yatsu, non ? répliqua Seiryū.

Il n'y a que peu de différence entre l'énergie des Dieux et celle de son Altesse, pas après trente ans de symbiose. »

Cela laissa Seiryū songeur. Pendant ce temps, Madare honorait les Dieux qui avaient mis fin à l'épidémie et guéri le fils du général-héros Yama. Gugonjū s'était arrangé avec son confrère du temple de Tomaru, le Saint Fūdo, pour organiser plusieurs cérémonies de reconnaissance. La rumeur courut bientôt que le Second Prince avait fait le déplacement depuis la capitale pour implorer ses Ancêtres de sauver la province et que les Dieux avaient exaucé ses prières. De ce fait, la réputation de Haruni s'orna de sainteté.

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Tetsuō vint rendre visite à Seiryū, le soulagement visible sur son visage.

« J'ai enfin pu voir Yatsu ce matin, fit-il. Il a un peu plus de forces, mais il porte encore les marques de sa longue fièvre.

Loués soient les Dieux pour l'avoir sauvé, » répondit Seiryū.

Cela lui valut un regard spéculateur de la part de son ami.

« C'est toi qui as parlé de l'état de Yatsu au Second Prince, pas vrai ? Père ne voulait pas informer la capitale de l'épidémie tant que ce ne serait pas réglé, donc ma lettre était la seule à en parler. »

Seiryū acquiesça.

« Tu as aussi convaincu son Altesse de venir, c'est bien ça ?

Non, Haruni a voulu venir de lui-même, rectifia le Firal.

Pourquoi ? s'étonna Tetsuō. Il ne connaît pas Yatsu. »


Seiryū fut bien embêté car il ne pouvait pas révéler le secret de Haruni.

« Haruni est généreux et compatissant, fit-il. Dès qu'il a su ce qui se passait à Madare, il a tout de suite voulu venir. »

Bien que peu convaincu, Tetsuō n'insista pas plus. Seiryū sourit à son ami avec compassion.

« Cela n'a pas dû être facile pour toi ces dernières semaines. »

Le Fieur lâcha un lourd soupir.

« Jika et Yatsu sont tombés malade à trois jours d'intervalle. Quand ma petite sœur s'en est remise, j'ai… j'ai d'abord cru que Yatsu irait mieux également. Mais son état n'a fait qu'empirer. En plus, Père m'avait interdit de lui rendre visite. J'ai plusieurs fois failli lui désobéir.

Tu aimes beaucoup Yatsu, n'est-ce pas ?

Nous ne nous sommes pas quittés depuis notre rencontre. Il est comme l'autre moitié de mon âme, répondit naturellement Tetsuō.

Je connais ça, » répondit Seiryū.


Automatiquement, son regard se posa sur l'alcôve plus loin où dormait Haruni. Tetsuō le fixa un moment, puis la surprise l'envahit.

« Toi et le Second Prince ? »

Seiryū prit aussitôt un air embarrassé, ses joues un peu rouges.

« Ce… ce n'est encore qu'un enfant, voyons ! protesta-t'il pour la forme.

Yatsu aussi. Décidément, nous sommes tous les deux attirés par des garçons plus jeunes que nous ! plaisanta Tetsuō.

L'écart d'âge se fait énormément sentir en ce moment. Dire que je dois encore attendre dix ans pour le courtiser, soupira Seiryū.

Ah, tu ne choisis jamais la facilité, on dirait ! »

Du point de vue de Tetsuō, entre un Vite et un enfant, Seiryū semblait aimer se compliquer la vie. Le Firal ne pouvait pas lui dire qu'il s'agissait en fait de la même personne !


~*~


Lorsque Haruni reprit connaissance, la première chose qu'il fit fut de s'enquérir de la santé de Yatsu. Devant les bonnes nouvelles de Seiryū, il sourit avec soulagement.

« Bon, Ils ont tenu parole.

Qui ça ?

Les Dieux. »

Seiryū garda un silence révérencieux. Depuis le jour où il avait vu l'âme de Yama regagner son corps, poussée par les Dieux, et qu'il avait pu sentir Leur présence imposante, il éprouvait un respect teinté d'effroi pour les Ancêtres de la famille impériale. Les événements de ces derniers jours lui avaient prouvé que Haruni entretenait un lien très étroit avec Eux.

« Le seigneur Mitsuhide voudra sûrement organiser un banquet en ton honneur ce soir, fit-il pour changer de sujet. Les prêtres racontent partout que tu es venu sauver Madare.

Je sais, c'était l'objectif des Dieux. »


La conversation fut interrompue par Gugonjū, qui avait monté la garde à la porte de la chambre depuis la veille.

« Votre Altesse, le salua-t'il, quelle joie de vous voir rétabli.

Gugonjū, répliqua-t'il en ayant peu de patience pour sa fausse courtoisie. Tu as fait ce que les Dieux ont demandé ? »

Le prêtre s'inclina de nouveau en signe d'acquiescement. Haruni hocha la tête.

« Alors nous n'avons plus rien à faire ici. »

Avant que Seiryū ne puisse s'étonner, un servant entra et s'inclina.

« Votre Altesse, mon maître souhaite vous inviter pour le déjeuner. »

Haruni haussa un sourcil : à peine était-il réveillé que Mitsuhide était déjà au courant ? Il avait oublié à quel point les servants de Hanajū étaient efficaces.

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Il fut tenté de refuser l'invitation, mais cela aurait été un manque de respect envers son hôte. Le Second Prince de l'Empire de l'Aube ne pouvait pas se comporter ainsi.

« Tu veux que je vienne ? proposa Seiryū à voix basse, qui avait remarqué sa réticence.

Non, ça ira, » se décida-t'il.

Malgré la tentation, il ne pouvait pas s'enfuir comme un voleur. Il fit donc une rapide toilette et remit sa tunique par-dessus sa tenue d'intérieur. Il n'avait ramené aucun vêtement de rechange et il se dit avec un léger sourire que Kaname en aurait été horrifiée. À Kurojū, il n'avait pas eu d'autre choix que de se plier aux règles vestimentaires complexes.


~*~


Le servant le conduisit jusqu'à la salle de repas qu'il connaissait bien. C'était étrange d'arpenter ces lieux autrefois familiers tout en se sentant à présent un étranger.

« Yama est bel et bien mort, » songea-t'il avec un sourire ironique.

Pourtant si c'était vrai, il ne ressentirait pas ce tiraillement dans son cœur. Une fois sur place, Mitsuhide se leva pour le saluer respectueusement. Tetsuō et Yatsu étaient également présents. Le visage de Haruni prit inconsciemment un air affectueux en voyant son fils bien vivant, quoique encore éprouvé par sa maladie. Comme tous avaient la tête inclinée, personne ne vit cette expression incongrue.


« Relevez-vous, fit Haruni qui ne s'était toujours pas habitué aux prosternations.

Votre Altesse, s'écria Mitsuhide, je vous suis éternellement reconnaissant pour avoir guéri Yatsu !

Ce sont les Dieux qui l'ont guéri, rectifia le garçon.

À votre demande, » insinua le seigneur.

Reconnaissant le caractère têtu de son ami, Haruni retint un rire amusé. Il prit place à table et le service commença. Le repas fut simple, mais copieux. Yatsu mangea de bon appétit, ce qui ravit secrètement le Second Prince.

« J'espère que le logement est à votre satisfaction, votre Altesse, fit Mitsuhide en bon hôte.

C'est… »

Il se retint de dire 'bien' car ce genre de réponse pouvait le trahir auprès de ceux qui le connaissaient bien. Il fit plutôt :

« Convenable. »


Mitsuhide l'interpréta comme un reproche et s'en excusa aussitôt :

« Nous n'avons pas eu le temps de préparer des appartements dignes de vous, votre Altesse. Veuillez me pardonner !

Ce n'est rien, fit Haruni, mal à l'aise devant cette attitude humble. Nous allons repartir dans la journée, de toute façon.

Déjà ? s'étonna le seigneur. Mais je souhaitais organiser un banquet en votre honneur. »

Haruni roula des yeux.

« Votre province sort d'une épidémie. Vous avez une foule de choses à régler. Je n'ai pas besoin d'un banquet, songez plutôt à vous ménager ! »

La légère remontrance venant d'un enfant plus jeune que son fils laissa Mitsuhide interloqué un bref moment. Il s'inclina ensuite en souriant.

« Son Altesse est tellement soucieux du bien-être de ses sujets. »

Haruni retint une réplique sarcastique. De son côté, Tetsuō masqua un sourire amusé : le Second Prince n'était pas du tout comme il se l'était imaginé. Il commençait à comprendre l'affection de Seiryū pour ce garçon.

Œuvre originale écrite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé mon histoire !

Avant de prendre congé, Haruni s'adressa à Yatsu avec un peu de difficulté :

« Firal Yatsu, prends bien soin de toi dorénavant.

Oui, votre Altesse, répondit le garçon en souriant. Je ne veux plus faire de la peine à Tetsuō, oncle Mitsuhide et mon papa. »

Haruni se figea, troublé. Les deux autres personnes présentes l'imitèrent.

« Yatsu ? s'enquit Tetsuō d'un ton soucieux.

J'ai senti la présence de papa juste avant de me réveiller, expliqua le Firal. Je suis sûr qu'il s'inquiétait pour moi ! »

Haruni serra les poings pour ne pas réagir. Yatsu avait toujours été très perceptif.

« Je suis certain que ton père veille sur toi depuis l'autre monde, fit-il doucement. Alors tâche de ne plus l'inquiéter.

C'est promis ! » assura Yatsu.

Haruni quitta la salle avec un sourire teinté de peine.


~*~


Le voyage de retour se fit à un rythme normal et prit par conséquent trois semaines. D'un côté, ils n'étaient pas pressés de rentrer et de l'autre, Haruni était encore un peu affaibli, donc ils faisaient régulièrement des haltes et dormaient dans des auberges en ville plutôt qu'à la belle étoile. L'hiver avait commencé à s'installer à Hanajū tandis qu'à la capitale, il faisait encore bon. À peine arrivés, Haruni, Seiryū et Gugonjū furent prévenus qu'ils devaient se présenter devant le conseil restreint dans une heure. Leur brusque départ n'avait pas été apprécié, malgré l'excuse de la mission divine. Personne n'y croyait, en fait. Cependant, Gugonjū expliqua ce qui s'était passé à Madare. Son ton tranquille ébranla les certitudes.

« Les Dieux auraient éradiqué l'épidémie à Madare ? fit le seigneur Hatochi.

Douteriez-vous de Leur pouvoir ? renvoya le prêtre en le fixant droit dans les yeux.

Hum… Non, évidemment que non ! » se rétracta le seigneur, mal à l'aise.

Les autres n'osèrent pas protester.


Seul Kenryū critiqua son fils :

« Seiryū, pourquoi tu es parti avec eux sans m'en informer ?

J'étais présent quand le Saint Gugonjū a informé le Second Prince de la mission divine, expliqua le jeune homme sans mentir. Je n'allais pas le laisser partir seul ! »

Kenryū n'y trouva rien à redire, à son plus grand déplaisir. Il savait que son fils s'était beaucoup attaché au Second Prince et bien qu'il n'y voyait aucune objection, cela l'inquiétait un peu. Seiryū avait prouvé par le passé qu'il pouvait aller à de grandes extrémités par amour, ce qui n'était pas sans rappeler feu le prince Kodōtaro. En tant que père, Kenryū redoutait ce qui se passerait si le Second Prince ne partageait pas les sentiments de son fils. Mais il restait plusieurs années avant que le problème ne se présente.

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De son côté, Tegami fixa son fils cadet avec inquiétude. Son absence n'avait duré que quelques semaines, mais cela avait ravivé la douleur d'avoir été séparés pendant trente ans. Il avait été même jusqu'à s'emporter contre ses Ancêtres durant le rituel d'Invocation, arguant qu'un tout petit garçon ne devait pas être jeté sur les routes à l'approche de l'hiver ! Les Dieux l'avaient laissé s'époumoner avant de répliquer que Haruni n'était pas si fragile que ça. Tegami n'était pas convaincu, mais la bonne mine de son fils malgré ce voyage éprouvant le rassura quelque peu.

« Haruni, fit-il simplement, je te demande de me prévenir si une chose pareille se reproduit.

Je vous le promets, Père, » répondit le garçon en s'inclinant.

Pour les conseillers, c'était un signe que l'Empereur reconnaissait que son fils avait agi au nom des Dieux et qu'il approuvait ses actions. Cela donna naissance à bien des rumeurs : si les Dieux favorisaient ainsi le Second Prince, cela voudrait donc dire qu'il était destiné à monter sur le trône plutôt que son frère aîné ? Il en fallait peu pour alimenter les spéculations en tout genre.


Ne remarquant absolument pas les rumeurs médisantes, Chiharu accueillit son frère à la sortie du Conseil en le serrant dans ses bras. Lui aussi avait souffert de la séparation.

« Tu ne dois plus recommencer ! le gronda-t'il ensuite, endossant le rôle du grand frère.

Cela ne dépend pas de moi, argua calmement le garçon.

Dans ce cas… la prochaine fois, je viendrai avec toi ! Après tout, tu as bien emmené Seiryū. »

Haruni retint un sourire amusé devant la pointe de jalousie non dissimulée.

« Si c'est possible, je t'emmènerai, grand frère, » promit-il.

Comme toujours, Chiharu fondit de bonheur en entendant l'appellation dont il ne se lasserait jamais.


Note de Karura : Malheureusement, je ne pourrai publier qu'un chapitre de cet extra toutes les trois semaines. J'ai pris du retard pour taper les chapitres, toutes mes excuses !







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