Cent façons de tuer un prince charmant 32

Chapitre 32


Ni Xinyan regarda Shen Jue avant de ramener son regard sur Murong Xiu. Ses yeux étaient trop paisibles comme s'il n'était absolument pas blessé.

« Sixième prince, prenez-vous en à moi si vous avez un problème mais laissez les autres en dehors de ça. »

Malgré tout il parlait avec beaucoup de mal et s'arrêtait presque sur chaque mot.

À ces mots, le sourire au coin des lèvres de Murong Xiu s'élargit. Il leva les mains et applaudit deux fois comme pour saluer le discours de Ni Xinyan, mais ce qu'il dit fut ironique :

« Tu n'as pas encore compris ? Comme c'est pitoyable, tu es exactement comme ton idiot de père. »

Quand Ni Xinyan entendit Murong Xiu mentionner le roi de Ning, ses yeux changèrent aussitôt. Il fixa Murong Xiu comme si ses yeux étaient devenus une lame invisible.

« Qu'est-ce que tu as fait à mon père ?

– Trois fois rien, je l'ai juste offert au royaume de Yong. Je pense que le peuple de Yong va bien traiter ce héros, après tout il a tué tellement d'entre eux, répondit Murong Xiu d'un ton gracieux.

– Toi ! »


Ni Xinyan tenta de se lever du lit mais en vain. Ses os étaient mous et son corps faible des pieds à la tête. Il ne put que lancer un regard féroce à Murong Xiu :

« Misérable ! Comment oses-tu ? En quoi mon père a-t'il jamais offensé ton clan Murong ? Pourquoi as-tu fait une chose pareille ? Sans mon père, auriez-vous pu vivre sans souci à la capitale ? »

Il prononça toutes ces phrases d'affilée, chaque mot accusateur, comme s'il voulait prouver tous les efforts de son père durant ces années.

C'était son père qui avait protégé le royaume de Murong et laissé la famille impériale occuper le trône. Son père n'avait jamais rien tenté contre eux alors pourquoi avaient-ils fait cela ?

Murong Xiu secoua légèrement la tête.

«  Tuer l'âne quand le blé est déchargé Un proverbe qui signifie se débarrasser de quelqu'un quand il n'est plus utile. (1). C'est le même principe à travers les âges. Si nous ne nous occupons pas de vous assez tôt, qui me dit que vous ne viendrez pas plus tard nous parler du vainqueur qui l'emporte et du perdant qui meurt ? »


Dans sa vie précédente, Murong Xiu s'était tenu dans le palais et avait regardé cet homme en armure non loin.

L'homme avait l'air sans aucun scrupule. Il avait pris la tête décapitée de son père et l'avait lancée à ses subordonnés comme si c'était un jouet. Ensuite devant lui, l'homme avait tué de ses propres mains ses frères.

Murong Xiu avait vu le clan Murong remuer la queue comme des chiens devant cet homme mais au bout du compte ils se retrouvèrent avec la tête séparée du corps.

À l'époque Murong Xiu lui avait demandé pourquoi il avait fait ça.

L'homme lui avait répondu :

« Le vainqueur l'emporte, le perdant meurt. Cela fait trop longtemps que ton clan Murong occupe le trône, je n'aime pas ça. »

Murong Xiu n'estimait pas avoir fait quelque chose de mal. Les gens étaient égoïstes. Il n'avait fait qu'agir en amont. D'un certain point de vue, il avait permis au roi de Yong et à ses sujets de vivre, n'était-ce pas un acte de merci ?


« Murong Xiu ! »

Les veines bleutées sur le cou de Ni Xinyan se gonflèrent.

« Sois certain que je te tuerai ! »

Il rugit tel un loup solitaire au bout de la route.

Murong Xiu eut un sourire méprisant puis il parut se désintéresser totalement de lui. Il se tourna et s'approcha de Shen Jue.

Ses yeux étaient splendides surtout quand il les baissait pour regarder les gens, ses longs cils les masquant légèrement. Ses yeux étaient alors légèrement bleus.

« Dois-je t'attacher pour t'emmener ? Ou bien acceptes-tu de me suivre ? » demanda-t'il doucement à Shen Jue.

L'adolescent se mordit la lèvre inférieure et répondit d'une toute petite voix :

« Je vous suis. »

Quand Shen Jue et Murong Xiu partirent, les yeux de Ni Xinyan restèrent braqués sur lui jusqu'à ce qu'il disparaisse de sa vue.

Son regard passa peu à peu de l'indignation à la tristesse. Une de ses mains trembla légèrement le long de son corps, comme s'il voulait attraper quelque chose mais ne pouvait le saisir.


* * *


Murong Xiu emmena Shen Jue dans un carrosse devant lequel se tenait un homme habillé comme un général. En voyant Murong Xiu, il montra un sourire plaisant.

« Votre Altesse, pourquoi ne pas rester quelques jours de plus ?

– C'est impossible, j'ai de nombreuses choses qui m'attendent à la capitale. Je ne peux vraiment pas rester plus longtemps. »

Murong Xiu leva la rideau de la voiture et lança un sourire réservé.

« Quand le général sera intéressé par la visite de la capitale, je lui tiendrai compagnie à ce moment. »

Quand le général de Yong vit le sourire de Murong Xiu, il exprima d'abord de la stupéfaction puis quand il entendit ses paroles, une lueur de regret parcourut son visage.

« Je ne suis pas certain d'avoir cette opportunité plus tard. C'est un long voyage, votre Altesse, alors prenez bien soin de vous.

– Ne vous en faites pas, général. Quand je serai rentré à Beijing, je parlerai aussitôt à mon père de la relation entre nos deux pays et du commerce frontalier. »


Quand Murong Xiu s'adressa au général de Yong, il parla d'une voix douce et gentille. Si Shen Jue ne l'avait pas vu tout à l'heure dans la pièce, il aurait pu croire que le Murong Xiu de cette vie n'était pas si différent du précédent.

Non, il y avait bel et bien une différence.

Le Murong Xiu de la vie précédente n'aurait jamais profité de son apparence mais cela ne semblait plus être le cas à présent.

En quelques sourires à peine, il avait charmé le général de Yong comme si leurs deux pays avaient eu de bonnes relations diplomatiques depuis des années.


Le général de Yong escorta le carrosse hors de la ville. Dès que Murong Xiu baissa le rideau, son visage redevint glacial. Il se lava le visage et les mains avec de l'eau dans la voiture puis ferma les yeux et s'adossa contre la paroi pour se reposer.

Il y avait seulement une douzaine d'homme qui escortaient Murong Xiu mais leur niveau d'art martial était de toute évidence supérieur et ils avaient été entraînés de manière ordonnée, même le bruit des sabots de leurs chevaux étaient coordonnés.

Durant ces six années, Murong Xiu avait grandi tellement vite.

Cela ne dérangeait pas Shen Jue de s'être fait capturer par lui. Après tout son but avait toujours été Murong Xiu. S'il avait suivi Ni Xinyan auparavant, c'était juste pour que Murong Xiu haïsse ce dernier. Il semblait à présent que les deux hommes étaient devenus des ennemis mortels alors il n'avait plus besoin de rester avec Ni Xinyan.


Pendant que Shen Jue réfléchissait à ce qu'il allait faire ensuite, Murong Xiu sur le côté parla soudain :

« À quoi tu penses ? »

Sa voix était glaciale.

Shen Jue baissa légèrement les yeux.

« Cet esclave ne pense à rien. »

Murong Xiu avait toujours les yeux clos. Le coin de sa lèvre inférieure se tordit légèrement et il fit d'un ton sarcastique :

« Pourquoi tu t'appelles encore un esclave ? Je n'ai pas d'esclave aussi audacieux que toi qui ose suivre un autre sans mes ordres.

– C'était un ordre de l'Empereur. Cet esclave n'aurait jamais osé... »

Avant que Shen Jue ne puisse poursuivre, Murong Xiu ouvrit brusquement les yeux. Il saisit la nuque de l'adolescent et le força à lever la tête.


Murong Xiu le fixa avec arrogance.

« La ferme ! Tu ferais mieux de t'inquiéter pour ta propre vie. Ne dis rien qui pourrait me mettre en colère. »

Shen Jue leva la tête pour croiser le regard du prince.

« Que voulez-vous entendre alors ? »

Les yeux de Murong Xiu se figèrent et il se rapprocha du visage de Shen Jue.

« Je veux t'entendre gémir de plaisir, qu'en dis-tu ? »

Shen Jue en resta interloqué un moment. De ce qu'il en savait, Murong Xiu devrait plutôt avoir envie de le tuer. Après tout Murong Xiu venait juste d'anéantir Ni Xinyan et de l'abandonner dans le pays de Yong. Shen Jue n'avait pas besoin de trop réfléchir pour imaginer la vie misérable qu'il aurait là-bas.

Mais à en juger par la réaction présente de Murong Xiu, s'il l'avait récupéré, ce n'était donc pas pour le torturer ?


« Tu ne peux pas ? »

Murong Xiu pencha légèrement la tête sur le côté, l'air innocent.

« Tu n'as vraiment pas couché avec Ni Xinyan ? Ou bien se peut-il qu'il n'ait pas aimé ton corps mutilé et n'ait pas voulu de toi ? »

Shen Jue fronça les sourcils. Il trouvait que Murong Xiu était allé trop loin cette fois. Bien que tout ceci ne soit qu'une illusion, Murong Xiu avait bel et bien tué plein de gens. Bien que ce ne soit pas des gens réels, tout comme Murong Xiu en face de lui, Shen Jue se sentait quand même un peu furieux.

Peut-être qu'il avait conservé le sang d'immortel dans ses veines et ne supportait pas de voir le côté méprisable de ces créatures.

Du coup Shen Jue ne prit plus la peine de faire semblant et se dit qu'au pire, il n'aurait qu'à tout recommencer à nouveau.

« Son Excellence et moi sommes innocents alors je prierais votre Altesse d'éviter de faire des suppositions hasardeuses, » répliqua-t'il d'un ton détaché.


Murong Xiu vit le regard indifférent de Shen Jue et ses pupilles se contractèrent légèrement tandis qu'une lueur ardente brilla dans ses yeux. Il dévora pratiquement Shen Jue du regard et après un moment il éclata de rire.

« C'est ça, c'est bien cette expression. »

Dans sa vie précédente, Shen Jue avait eu la même expression en le tuant, comme s'il n'était qu'une misérable fourmi.

Mais il était l'Empereur. Il avait clairement comblé Shen Jue de faveurs, lui avait donné un statut et l'avait sauvé, alors pourquoi Shen Jue le regarderait ainsi ?

Le grand rire de Murong Xiu se transforma en un ricanement. Il pencha la tête et ses lèvres froides effleurèrent soudain celles de l'adolescent.

« Tu ignores comment j'en suis arrivé là pendant toutes ces années mais cela n'a aucune importance. Toutes les choses que j'ai désirées durant ces années, je les obtiendrai bientôt une par une. »


Il murmura le nom de Shen Jue entre ses lèvres comme s'il appelait son amant.

Shen Jue voulut tuer Murong Xiu sur-le-champ mais il se retint.

À ses yeux, Murong Xiu était comme un paon en pleine parade nuptiale. Il exprimait frénétiquement son amour aux autres mais si cette parade venait à être interrompue, le paon pourrait devenir complètement fou et agir de manière totalement imprévisible.

Après tout Shen Jue ne voulait pas encore vivre cette expérience de se faire ramener en arrière.


* * *


Murong Xiu pressa ses gens nuit et jour et ils revinrent à la capitale à grande vitesse. Pendant le trajet, soit Murong Xiu se reposait les yeux fermés soit il lançait un regard brûlant à Shen Jue, comme si Shen Jue allait disparaître sous son nez s'il ne le surveillait pas attentivement.

Shen Jue était très calme ces temps-ci. Il avait toujours été de nature silencieuse. Quand Ni Xinyan était avec lui, c'était ce dernier qui parlait beaucoup. Murong Xiu n'était manifestement pas très bavard alors ils restèrent la majeure partie du temps assis en silence dans le carrosse.

Du coup l'atmosphère à l'intérieur du carrosse était étrange et silencieuse.

Ce fut de cette manière qu'ils voyagèrent précipitamment vers la capitale.


Murong Xiu tira Shen Jue hors du carrosse et continua à le tirer par la main tout du long. Il y avait de nombreux serviteurs et gardes à l'entrée du palais. Quand ils virent Murong Xiu, ils le saluèrent :

« Sixième Prince. »

Murong Xiu agita la main et emmena Shen Jue avec lui dans le palanquin Une chaise ou une litière portée par des hommes. (2).

Normalement, Shen Jue n'aurait pas dû pouvoir prendre place dans le palanquin avec le prince mais personne n'osa ouvrir la bouche pour protester.

Quand le palanquin s'immobilisa, Shen Jue se rendit compte qu'ils étaient arrivés aux portes du palais de Qizhang.


Murong Xiu descendit d'abord puis tourna la tête vers Shen Jue. Ce dernier se pinça les lèvres puis descendit à son tour du palanquin.

Seulement là Murong Xiu détourna les yeux et s'avança. Shen Jue n'eut pas d'autre choix que le suivre.

Il y avait aussi des serviteurs aux portes du palais de Qizhang et Shen Jue se rendit compte qu'il ne reconnaissait aucun visage, même Feng Qingbao n'était pas dans la foule.

« Tu cherches quelqu'un ? » murmura soudainement Murong Xiu en se rapprochant de lui.

Shen Jue recula d'un pas.

« Non, votre Altesse. »

Murong Xiu le regarda puis l'attira soudain vers lui par la main. Il tint la main de Shen Jue dans la sienne et la caressa gentiment. Après un moment, il la porta à ses lèvres pour y déposer un léger baiser.

Il n'avait pas peur qu'on le voie faire cela, c'était même comme s'il voulait que les autres le voient.

« Au fait, je t'ai aussi préparé une chambre. Tu vas l'adorer. »

Le beau visage de Murong Xiu se fendit d'un doux sourire, comme s'il offrait un présent à son amant.


Quand Shen Jue vit la pièce spécialement préparée pour lui, son visage changea de couleur.

Murong Xiu se colla contre lui par derrière et posa son menton sur l'épaule de l'adolescent.

« Tu aimes cette chambre ? »

Murong Xiu tendit la main et secoua les fers et les menottes sur la chaise près de lui d'un air nonchalant.

Les chaînes émirent un son cliquetant.

Bien que ce soit Shen Jue, son visage devint horrible à voir quand il vit les menottes, les fouets et les vêtements rouges, verts et turquoises faits en gaze partout dans la pièce.

Que voulait exactement faire Murong Xiu ?


La parole à l'auteur : Une prison dorée pour son coton noir


Note de Karura : Que veut exactement faire Murong Xiu ? Ah, Shen Jue, à ton avis ? En tout cas les lecteurs vont adorer le prochain chapitre !


Notes du chapitre :
(1) Un proverbe qui signifie se débarrasser de quelqu'un quand il n'est plus utile.
(2) Une chaise ou une litière portée par des hommes.






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