Cent façons de tuer un prince charmant 86

Chapitre 86


En réalité, Xiang Wen qui était sorti avec le duc n’était pas non plus heureux, car Shen Jue était sorti pour acheter un cadeau d’anniversaire à Yu Qing.

« C’est l’anniversaire de Yu Qing aujourd’hui mais je ne sais pas quoi lui prendre comme cadeau. Aide-moi à choisir quelque chose, » avait fait Shen Jue à Xiang Wen.

Il avait ensuite marqué une pause puis ajouté :

« Tu peux aussi te prendre quelque chose, au fait. »

Ce n’était pas encore l’anniversaire de Xiang Wen mais il savait que Shen Jue avait peur qu’il ne se venge sur Yu Qing s’il n’achetait qu’un seul cadeau. Toutefois, Xiang Wen vit le bon côté des choses : au bout du compte, Shen Jue lui achetait quand même un cadeau alors on ne pouvait pas parler de favoritisme. Dans le manoir, Shen Jue ne traitait de cette manière que Yu Qing et Xiang Wen, ainsi que le majordome qui travaillait dur depuis des années.


Pendant que Xiang Wen choisissait les deux cadeaux, Shen Jue se contenta d’observer et n’exprima aucune opinion. Finalement, Xiang Wen opta pour une cravate pour lui et des boutons de manchette pour Yu Qing. Ces boutons de manchette coûtaient plutôt cher. Xiang Wen les choisit exprès afin de montrer sa générosité en présence du duc.

Comme prévu, dès que Shen Jue découvrit que Xiang Wen ne s’était pris qu’une cravate ordinaire, il lui acheta d’autres choses. Non seulement il lui prit deux costumes et des paires de chaussures, mais aussi une broche sertie de petits diamants.

Xiang Wen n’y tint plus de joie et après avoir contemplé la broche un long moment, il demanda à la vendeuse de l’accrocher à sa veste pour lui.


Sur le chemin du retour, Xiang Wen le remercia plusieurs fois. Shen Jue assura simplement :

« C’est bon, tu le mérites bien. »

Il était vrai que Shen Jue avait une très bonne impression de Xiang Wen. En effet, ce dernier était resté à ses côtés durant les vies précédentes jusqu’à ce que le manoir soit vendu. Après ça, Xiang Wen avait quitté la capitale impériale. En fait, avant son départ, Xiang Wen était même venu dans le quartier pauvre pour trouver Shen Jue mais à cette époque, Shen Jue avait voulu sauver la face alors il avait refusé de le voir.

Cependant, Shen Jue devait désormais faire certaines choses, des choses qui pourraient troubler Xiang Wen. Alors il pouvait bien lui acheter quelques cadeaux en guise de compensation.


Après que Shen Jue et sa suite soient revenus au manoir, Xiang Wen fut occupé à porter les gros sacs remplis de ses cadeaux dans sa chambre. Quand il vit Yu Qing, il perdit l’envie de se battre avec lui pour la première fois. Toutefois, il ne put s’empêcher de sourire délibérément en passant à côté de lui.

Yu Qing posa les yeux sur les gros sacs que l’autre serviteur portait et ne put s’empêcher de plisser les yeux. Il avait été comme enivré durant les jours passés dans la ville de A et à présent qu’il était revenu dans la capitale impériale, il redevenait progressivement sobre. Il n’était pas la personne qui comptait le plus aux yeux de Shen Jue. Même si Shen Jue l’avait emmené pour son voyage d’affaires, cela ne voulait rien dire, surtout après que Xiang Wen avait dit exprès devant Yu Qing :

« Le duc sait très bien que je ne supporte pas l’odeur quand on voyage en train, voilà pourquoi c’est toi qu’il a pris avec. Ne va surtout pas t’imaginer que tu es spécial. »

Shen Jue devait vraiment être bon envers Xiang Wen, autrement il n’aurait pas pris le temps de lui acheter des cadeaux à peine de retour. Ce devait donc être vrai que Xiang Wen ne supportait pas de voyager en train.


* * *


Avant le coucher, Yu Qing massa les pieds de Shen Jue, nettoya la chambre et fut sur le point de partir. Il entendit alors la voix quelque peu fatiguée du duc :

« Ton cadeau se trouve dans la poche de ma veste. Va le prendre. »

Yu Qing se figea un instant puis se retourna pour regarder Shen Jue avec des yeux brûlants.

Shen Jue portait un pyjama en soie blanche ce jour-là, brodé avec des bambous et des chrysanthèmes d’automne. Il se dégageait de sa personne un air extraordinairement élégant. Yu Qing ne s’attardait pas en général sur l’apparence des gens car il était un peu blasé à force de voir son propre visage. Toutefois, pour une raison inconnue, plus il regardait Shen Jue, moins il parvenait à détourner les yeux de lui. Il avait même l’impression que le mieux serait de devenir comme Shen Jue en grandissant.


« Comment le duc sait-il que c’est mon anniversaire aujourd’hui ? » murmura-t’il avec une joie impossible à dissimuler.

Shen Jue parut un peu mal à l’aise face au regard ardent du jeune homme. Il détourna légèrement la tête.

« C’est quelqu’un qui me l’a dit.

– Qui ça ? »

Il n’y avait pas tant de gens que ça qui connaissaient sa date de naissance et Yu Qing ne pouvait pas trouver qui aurait bien pu en parler à Shen Jue. Mais il n’obtient pas de réponse précise. Shen Jue sembla un peu agacé et baissa les sourcils en faisant d’un ton impatient :

« Pourquoi tu poses autant de questions ? Prends ton cadeau et file. »


Néanmoins, Yu Qing n’avait plus peur du visage en colère de Shen Jue. Il se contenta de sourire et s’approcha du canapé pour prendre la veste que Shen Jue avait retirée tout à l’heure. Ce n’était donc pas étonnant que Shen Jue ait refusé qu’il l’emmène avec le linge à laver aujourd’hui, c’était sûrement parce qu’il craignait que Yu Qing ne tombe sur le cadeau à l’intérieur.

Il mit la main dans la poche, tâtonna deux fois puis en sortit la petite boîte à l’intérieur.

Yu Qing contempla d’abord la boîte attentivement avant de l’ouvrir avec soin. La paire de boutons de manchette qui fut dévoilée attira aussitôt son attention. Il n’avait jamais reçu un cadeau aussi cher de toute sa vie et il ne put retenir un grand sourire sur ses lèvres.


L’homme derrière lui parut estimer que Yu Qing était resté immobile trop longtemps et il le pressa :

« Pourquoi tu n’es pas encore parti ? »

Yu Qing referma la boîte, fit demi-tour puis retourna auprès de Shen Jue. Il fut aussi preste qu’une alouette et la lueur de joie dans ses yeux refléta toute la gaieté de cette alouette.

Quand Shen Jue le vit revenir brusquement et même se pencher vers lui, il recula automatiquement mais avant qu’il ne puisse dire un mot, les lèvres de Yu Qing avaient déjà effleuré les siennes.

« Merci, mon seigneur. Ça me plaît vraiment beaucoup. »

Après ça, il tourna les talons et s’en alla sans laisser à Shen Jue l’occasion de placer un mot ou de se fâcher.


* * *


Une fois qu’il eut refermé la porte, Yu Qing s’adossa contre et inspira profondément plusieurs fois. Il tint très fort la petite boîte dans ses mains, comme si jamais il se détendait, la boîte allait lui échapper des mains.

Shen Jue se souciait de lui et avait même demandé sa date d’anniversaire.

Yu Qing dormit à peine ce jour-là. Il ne pouvait s’empêcher de regarder la boîte qu’il avait posée à côté de son oreiller et de l’ouvrir de temps en temps pour voir si les boutons de manchette étaient bien toujours à l’intérieur.

En fait, il n’avait encore jamais reçu de cadeau pour son anniversaire. Les gens dans le manoir qui savaient la date lui souhaitaient son anniversaire tout au plus. Personne ne lui avait jamais acheté un cadeau exprès. Pour les vampires, la vie était bien trop longue alors c’était rare de fêter les anniversaires.

Mais Yu Qing y prêtait une attention toute particulière. C’était parce qu’il avait grandi sans ses parents et qu’il avait toujours envié les autres enfants qui recevaient des cadeaux le jour de leur anniversaire. Aujourd’hui, après avoir attendu si longtemps, il avait enfin eu droit à un cadeau à son tour.


À cette pensée, il ne put retenir un doux sourire. Toutefois, la bonne humeur de Yu Qing disparut aussitôt qu’il vit Xiang Wen juste après son réveil.

Au premier coup d’œil, Yu Qing vit la broche sertie de petits diamants au torse de Xiang Wen. La broche était si brillante qu’elle semblait presque aspirer l’attention générale. Même le majordome expérimenté et connaisseur fit un compliment à Xiang Wen après avoir vu sa broche :

« Cette broche est vraiment magnifique. Elle doit avoir beaucoup de valeur. »

Xiang Wen redressa légèrement le menton, très fier de lui.

« Je ne connais pas son prix, c’est le duc qui l’a achetée en cachette pour moi. Quand je m’en suis rendu compte, il avait déjà payé. »


Cela faisait des années que le majordome travaillait avec Xiang Wen alors il connaissait naturellement son tempérament et fit un autre compliment sur la broche. Une fois que Xiang Wen montra bien sa broche à tout le monde, il se tourna vers Yu Qing qui se tenait dans un coin. Il eut un sourire triomphant :

« Yu Qing, que penses-tu de ma broche ? Elle est jolie, hein ? C’est le duc en personne qui l’a choisie pour moi. Au fait, tu aimes ta paire de boutons de manchette ? Ça m’a pris un temps fou pour les choisir. »

Xiang Wen avait fait exprès de porter sa broche ce soir car il savait que Yu Qing avait déjà reçu son propre cadeau. Il voulait simplement faire savoir au jeune homme que sa propre position dans le cœur de Shen Jue n’était pas si fragile que ça. Ne va pas croire que juste parce que tu as fini plusieurs fois dans son lit et que tu as voyagé avec lui, que tu es si spécial. Après tout, c’est juste une histoire de coucherie.


L’ironie dans son regarda était si évidente que Yu Qing ne put en faire abstraction.

Le jeune homme réalisa tout à coup que sa joie de la journée n’avait été qu’une vaste blague. Il avait tellement chéri son cadeau, mais il découvrait à présent que c’était Xiang Wen qui l’avait choisi. Peut-être même que Shen Jue avait acheté ces boutons de manchette pendant qu’il achetait la broche à Xiang Wen, craignant que les autres ne trouvent que c’était du favoritisme.

Yu Qing resta silencieux un bon moment puis sourit.

« Elle a vraiment l’air joli. Le duc est vraiment si bon envers toi, frère Xiang Wen. C’est vraiment très enviable. »

À ces mots, la satisfaction de Xiang Wen augmenta encore plus. En voyant qu’il avait atteint son objectif en se vantant de son cadeau, il cessa de parler à Yu Qing. Quand la clochette dorée à l’étage retentit, Xiang Wen monta les escaliers le premier, Yu Qing derrière lui.


Xiang Wen aurait pensé que Yu Qing n’aurait pas été de bonne humeur ce soir-là mais sans qu’il ne comprenne pourquoi, le jeune homme se comporta comme d’habitude. Xiang Wen ne put même pas voir la moindre tristesse dans ses yeux. Pourtant de toute évidence, il avait réagi en voyant la broche.

Il sait vraiment jouer la comédie, pas étonnant que le duc se fasse avoir par lui.

Xiang Wen estima donc qu’il en allait de son devoir de démasquer le petit jeu de Yu Qing devant le duc. Alors dans les jours qui suivirent, il porta sa broche tape-à-l’œil tous les jours jusqu’à ce qu’un jour, Xiang Wen se rendit compte que sa broche avait disparu.


Xiang Wen paniqua et chercha plusieurs fois les endroits où il avait été avant la disparition, sans parvenir à la retrouver. Finalement, son regard tomba sur Yu Qing.

« C’est toi, pas vrai ?! C’est toi qui as volé ma broche ! » s’écria-t’il en le foudroyant du regard.

Yu Qing lui renvoya un regard surpris.

« Frère Xiang Wen, qu’est-ce qui te fait dire ça ? Pourquoi j’aurais pris ta broche ?

– Qui d’autre, à part toi ? Il n’y a que toi dans le manoir qui ne t’entends pas avec moi. Tu dois être jaloux de moi, pas vrai ? Tout ça parce que toi, tu n’as reçu qu’une paire de boutons de manchette bon marché, fit-il avant de renifler. Je te conseille de me rendre rapidement ma broche. Si je la trouve sur toi ou dans ta chambre après, je devrai le rapporter au duc et il t’enverra au tribunal. »


Yu Qing se contenta de secouer la tête à ces mots.

« Frère Xiang Wen, je n’ai vraiment pas volé ton bien.

– Tu oses encore mentir ! »

Xiang Wen s’avança dans l’intention de le fouiller mais Yu Qing recula.

Son visage s’assombrit.

« Frère Xiang Wen, tu ne peux pas me fouiller sans raison. Si tu me soupçonnes, tu peux aller en parler au majordome. S’il croit aussi que je t’ai volé, alors tu pourras me fouiller. »

Les sourcils de Xiang Wen tressautèrent mais il dut aller voir le majordome. Quand ce dernier l’entendit dire que Yu Qing avait volé sa broche, sa première réaction fut de rire.

« Quoi ? Mais Yu Qing est un brave garçon, comment aurait-il pu voler ta broche ? Tu as bien regardé partout où tu es allé ?

– Je n’ai pas arrêté de chercher mais je n’ai rien trouvé. C’est Yu Qing qui a dû la voler. Il doit l’avoir cachée soit sur lui, soit dans sa chambre. Si on la trouve pas tout de suite, il va sûrement aller la vendre. C’est un cadeau du duc, » fit Xiang Wen d’un ton angoissé.


Le majordome trouva que Xiang Wen ne se montrait pas du tout raisonnable mais puisqu’il avait fait mention du duc, le majordome n’eut pas d’autre choix que d’aller trouver Yu Qing avec Xiang Wen.

Yu Qing s’était douté qu’il allait se faire fouiller alors il garda son calme. Il répéta toutefois à Xiang Wen :

« Frère Xiang Wen, je n’ai vraiment pas pris ce qui était à toi.

– Humph, on verra ça après t’avoir fouillé. »

Xiang Wen tâta aussitôt les poches du jeune homme.

Il n’y avait rien sur Yu Qing alors Xiang Wen se rendit dans la chambre du jeune homme, toujours suivi du majordome. Il eut beau retourner la chambre sens dessus dessous, il ne trouva toujours pas sa précieuse broche en diamants. Quand le majordome vit ça, il soupira.

« Xiang Wen, puisqu’elle n’est pas dans la chambre de Yu Qing, tu ferais mieux de chercher ailleurs. Et arrête de soupçonner autant les gens du manoir dorénavant. »

Xiang Wen était vraiment convaincu que c’était Yu Qing qui avait volé la broche, toutefois il n’avait pas la moindre preuve. Rien déjà que le fait que la broche soit perdue, cela l’avait rendu triste et fâché. Et maintenant qu’il voyait le majordome prendre la défense de Yu Qing, cela le rendit encore plus furieux. Il ne présenta aucune excuse à Yu Qing et sortit directement.


Le majordome vit Xiang Wen partir ainsi et secoua la tête avec impuissance. Il se tourna vers Yu Qing.

« Désolé que tu aies été accusé à tort. Je vais devoir rapporter l’affaire au duc. Le tempérament de Xiang Wen doit vraiment changer. Le vol est un crime très grave, et pourtant il se permet d’accuser n’importe qui sans la moindre preuve. C’est vraiment exagéré. »

Yu Qing secoua légèrement la tête.

« C’est bon, frère Xiang Wen... »

Il marqua une pause avant de reprendre :

« Frère Xiang Wen ne m’a jamais beaucoup apprécié, j’ai l’habitude. »

Le majordome soupira de nouveau, tapota l’épaule de Yu Qing puis sortit.

Le jeune homme qui était resté dans sa chambre contempla toutes ses affaires qui avaient été jetées par terre et lâcha soudain un rire.

Ses yeux splendides et limpides étaient remplis de froideur.


* * *


Xiang Wen eut beau chercher plusieurs jours, il ne retrouva pas sa broche. Le majordome rapporta également l’affaire à Shen Jue. Quand le duc apprit ça, il garda le silence un moment puis convoqua Xiang Wen. Yu Qing vit l’autre serviteur entrer dans le bureau de Shen Jue. Si Xiang Wen avait eu un regard paniqué en entrant, il parut être une toute autre personne en ressortant.

« Tu es là, ah ? »

Quand Xiang Wen vit Yu Qing, il le rejoignit. Il savait très bien que c’était à cause de Yu Qing que le majordome avait informé Shen Jue de cette histoire de broche.

« Au fait, merci d’avoir demandé au majordome de rapporter ce que j’ai fait, mais tu sais quoi ? Le duc m’a dit que ce n’était plus la peine que je cherche ma broche et qu’il allait m’en acheter une encore mieux cette nuit. »

En voyant l’expression sur le visage de Yu Qing se modifier légèrement, il fut encore plus content de lui. Il se pencha près du visage de l’autre jeune homme et baissa la voix :

« Ton petit stratagème n’a pas fonctionné. Tu es très fâché, ah ? Puisque tu aimes tant ma broche, tu n’as qu’à la garder. De toute façon, ce n’est pas pour toi que le duc l’avait achetée, espèce de sans-gêne. »


Quand Xiang Wen eut fini sa diatribe, il se tourna pour partir mais une voix derrière lui l’arrêta :

« Frère Xiang Wen. »

Il s’arrêta mais ne regarda pas derrière lui.

« Quoi ?

– Frère Xiang Wen s’est trompé, fit doucement Yu Qing. Je n’ai vraiment pas volé ta broche. Peut-être que la broche se trouve toujours sur toi, non ? »

À ces mots, Xiang Wen ressentit un sentiment d’étrangeté inexplicable. Il se tourna vers Yu Qing et fronça les sourcils d’un air suspicieux.

« De quoi tu parles ? Comment pourrais-je avoir encore la broche sur moi ? Ça fait des jours que je la cherche. »

Yu Qing se pinça les lèvres et eut un léger sourire, les yeux particulièrement limpides.

« Je me disais juste qu’il se pouvait que la broche soit toujours sur frère Xiang Wen, rien de plus. »


Voyant l’expression qu’arborait Yu Qing, Xiang Wen sentit son malaise augmenter.

Ils se trouvaient actuellement tous les deux dans une galerie dont une des lampes avait récemment été cassée et n’avait pas encore été réparée. L’éclairage n’était donc pas très brillant et Yu Qing se trouvait justement sous la lampe cassée. Les ténèbres dissimulaient la majeure partie de son visage mais le sourire au coin de ses lèvres était bien éclairé. Avec son visage splendide, cela lui donnait un air étrange et magnifique.

Xiang Wen sentit soudain son cœur s’affoler de manière inexplicable alors il agita la main.

« Je ne comprends absolument rien à tes absurdités. »

Il fit demi-tour et se dépêcha de s’éloigner.

Ce ne fut qu’après avoir descendu la moitié des escaliers qu’il ne put s’empêcher de jeter un regard en arrière.

Yu Qing avait émergé des ténèbres et se tenait au sommet des escaliers, le regard baissé sur Xiang Wen.


En voyant que l’autre homme avait tourné la tête, le sourire sur les lèvres de Yu Qing s’élargit. En un instant, il effaça de nouveau ce sourire puis fixa Xiang Wen d’un air glacial. Il entrouvrit les lèvres pour prononcer un mot en silence.

Xiang Wen sursauta mais Yu Qing avait déjà fait demi-tour pour entrer dans le bureau de Shen Jue. Xiang Wen s’élança automatiquement pour lui courir après, mais il s’arrêta au bout de quelques pas en se rappelant que Shen Jue lui avait demandé d’aller poster une lettre. Aucune importance, il ferait juste comme si ce Yu Qing était cinglé.

Xiang Wen avait l’habitude de considérer Yu Qing comme petit et faible, alors il ne prêtait aucune importance à ce misérable semi-vampire.


* * *


Une fois que Yu Qing fut entré dans le bureau, il déposa le thé de sang à droite de Shen Jue puis posa un bonbon sur la délicate soucoupe en dessous de la tasse.

« Cela fait trop longtemps que le duc lit ce livre. Et si vous faisiez une pause ? » fit-il doucement.

Il se plaça de nouveau derrière Shen Jue et lui massa les épaules et la nuque. Tout en pressant et malaxant, une main froide se glissa peu à peu sous le col.

Shen Jue se renfrogna et saisit la main intruse. Il fit à voix basse :

« Arrête tes histoires. Qu’est-ce que Xiang Wen vient de te dire dehors ? »

Il avait entendu un peu d’agitation.


En fait, cela ne l’avait guère surpris que Xiang Wen perde sa broche. Shen Jue l’avait trouvé bien trop m’as-tu-vu ces derniers temps. Ce n’était donc qu’une question de temps avant que Xiang Wen ne la perde. Il n’avait pas non plus été surpris que Xiang Wen fasse fouiller la chambre de Yu Qing. Par contre, cela l’avait étonné que le majordome vienne l’en avertir.

Bien qu’en général, le majordome veillait tout particulièrement sur Yu Qing, il n’émettait jamais la moindre critique sur la conduite de Xiang Wen pour défendre Yu Qing. Mais cette fois, il était venu voir le duc à cause de ses deux valets personnels, ce qui était de toute évidence un peu étrange. Il était clair que le majordome aurait pu régler ça tout seul.


Que le majordome règle l’affaire ou qu’il le dise au duc, c’étaient deux choses bien différentes. Dans tous les cas, Shen Jue était prêt à protéger Xiang Wen. Bien que ce dernier ait été un peu trop vantard, il n’avait pas de mauvaises intentions. En plus, à présent que la broche avait disparu, on pouvait dire que c’était Xiang Wen le plus triste dans tout ça. Si Shen Jue le punissait par-dessus, ce serait vraiment de trop.

Bien entendu, tout cela était du point de vue de Shen Jue. Il ne prit pas cette affaire au sérieux et décida même d’acheter une nouvelle broche à Xiang Wen. Toutefois, aux yeux des autres, Shen Jue se montrait clairement partial envers Xiang Wen.


* * *


La main de Yu Qing se fit attraper mais il ne résista pas. Il enlaça simplement Shen Jue par derrière avec son autre bras et son splendide visage manifesta un air de victime d’une injustice.

« Frère Xiang Wen me soupçonne toujours de lui avoir volé sa broche et vient de me dire de ne pas trop faire le malin. Mon seigneur, je ne l’ai vraiment pas volée, plaida-t’il en fixant Shen Jue de ses yeux limpides. Vous me croyez, n’est-ce pas ?

– En. Xiang Wen vient de perdre sa broche, c’est pour ça qu’il se comporte ainsi. Ne te rends pas malade pour lui. »

Shen Jue lâcha la main de Yu Qing et prit le bonbon sur la soucoupe.

« Je me souviens que ça fait un moment que j’ai fini les bonbons. Où les as-tu trouvés ? »

En fait, peu de gens dans le manoir savait que Shen Jue aimait manger des bonbons. Il n’en demandait jamais spécifiquement aux cuisines.


Yu Qing sourit et se redressa pour continuer à masser l’autre homme.

« C’est moi qui les ai achetés en ville. Vous les aimez, mon seigneur ? Si c’est le cas, j’en achèterai plus la prochaine fois. »

À ces mots, Shen Jue reposa le bonbon.

« Ce ne sera pas la peine. »

Ces derniers temps, il avait mangé bien trop de bonbons. Il devait donc lever un peu le pied. Cet incident avait aussi prouvé que Yu Qing était quelqu’un de très attentif aux détails. Il avait soigneusement observé ses préférences et savait même que Shen Jue aimait manger des bonbons quand il ingérait quelque chose relatif au sang. Quand Yu Qing lui avait apporté un en-cas la veille au soir, il n’avait pas non plus oublié de placer un bonbon à côté.


Yu Qing fixa le bonbon qui fut posé à l’écart et son regard se modifia légèrement. Toutefois, il n’en laissa rien paraître dans son ton et ses gestes.

« Entendu. »

Il continua à masser Shen Jue un bon moment, puis prit congé tandis que Shen Jue continuait à consulter des livres de comptes dans son bureau. Récemment, Shen Jue avait beaucoup à faire. Il ne s’était jamais soucié de ces choses-là dans ses vies précédentes et c’était un calvaire que de s’occuper des affaires dans cette vie. Il avait dû donc demander au majordome d’engager un comptable pour gérer ça.


* * *


Le lendemain soir, Shen Jue sortit avec Xiang Wen pour lui acheter une nouvelle broche. Cette fois, elle n’était plus sertie de petits diamants mais carrément d’une pierre précieuse : une émeraude de grande valeur. La pierre avait la pureté du cristal et elle étincelait à la lumière. Cette fois, Xiang Wen avait retenu la leçon et il cessa de se montrer avec sa broche ; il la rangea proprement.

Toutefois, Yu Qing semblait vraiment intéressé par la broche de Xiang Wen et lui posa plusieurs question. En voyant que l’autre jeune homme ne disait rien, Yu Qing se tourna et demanda directement au duc :

« Mon seigneur, est-ce que la broche de Xiang Wen est vraiment très belle ? J’ai entendu dire qu’elle comporte une grosse pierre précieuse. »

Shen Jue prit le livre de comptes mis en ordre des mains du comptable et répondit laconiquement à la question de Yu Qing :

« Elle est correcte. Yu Qing, si tu n’as rien de mieux à faire, va aux cuisines aider à préparer le dîner. »


Yu Qing émit un son d’assentiment mais avant de partir, il lança à Xiang Wen :

« Frère Xiang Wen, je suis vraiment jaloux. Tu as une broche en diamants, et maintenant, tu as une autre broche avec une pierre précieuse. »

Xiang Wen plissa le front et jeta un rapide coup d’œil en direction de Shen Jue avant de répondit à Yu Qing :

« De quoi tu parles ? Je n’ai qu’une broche. J’ai perdu la première, tu as oublié ? »

Yu Qing sourit.

« Je sais mais si tu perds celle-ci, le duc va sûrement t’en acheter une autre encore plus jolie. »

Après avoir fini de parler, il sortit rapidement et Xiang Wen fixa son dos qui s’éloignait, fronçant encore plus les sourcils. Yu Qing ne s’était jamais préoccupé de sa broche avant, mais à présent que Shen Jue lui en avait acheté une nouvelle, ce Yu Qing n’arrêtait pas de se montrer curieux. C’était vraiment agaçant, Xiang Wen ne comprenait pas quelles étaient ses intentions.


* * *


Xiang Wen ne se serait jamais attendu à ce que quelques jours plus tard, le jour de la paie, il était en train de faire des courses quand il se fit dépouiller en pleine rue. Ces gens étaient un groupe de bandits qui le coincèrent brusquement au détour d’une allée et lui demandèrent de leur remettre tout son argent. Xiang Wen craignit pour sa vie et sortit rapidement tout l’argent de ses poches en voyant ces gens. Heureusement, même s’il avait une bonne paie, il n’avait pas tout pris avec lui pour sortir.

Le chef du groupe vit l’argent qu’il leur tendit et ricana froidement.

« C’est tout ? Il paraît que tu es le valet personnel d’un duc qui t’apprécie beaucoup, pas vrai ? Alors tu dois avoir d’autres choses de valeur sur toi, non ? »


Xiang Wen n’aurait jamais pensé que ces gens connaissent son identité, alors il comprit qu’ils en avaient spécialement après lui. Il pâlit inconsciemment et s’empressa de dire :

« Je suis juste sorti faire quelques course, je n’ai pas pris beaucoup d’argent avec moi. Je n’ai vraiment rien d’autre de valeur sur moi.

– Tu en es sûr ? Si on trouve quelque chose, ça finira mal pour toi, » fit le chef.

Paniqué, Xiang Wen secoua la tête.

« Je n’ai vraiment plus rien, croyez-moi ! »

Il retourna les deux poches de son pantalon et elles étaient vides.

« Il n’y a plus rien d’autre. »

Le regard du chef parcourut le corps de Xiang Wen pour finalement se poser sur ses bottes à la semelle épaisse.


Note de Karura : Et c’est ainsi que Yu Qing, ayant le cœur brisé, entra dans le côté obscur de la force. Il va régler son compte à Xiang Wen et après ça…. Shen Jue, prépare-toi !







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