Child of the Night 11

Partie Onze : Soin

L'an de grâce 1460
Château Varga, Roumanie




Simion avait pris un rapide déjeuner et il retournait à sa chambre dans les quartiers des serviteurs. Il comptait se rafraîchir rapidement lorsqu'il vit le jeune homme. Nicolae se trouvait dans un couloir menant à une partie encore plus obscure des quartiers domestiques. Simion s'arrêta au tournant, l'observant plus bas dans le couloir. Le jeune bibliothécaire intéressait son seigneur ; par conséquent il intéressait aussi Simion.

Le jeune homme se tenait immobile un peu plus loin dans le couloir. Il tournait le dos à Simion et s'appuyait contre le mur comme s'il avait besoin d'un soutien. Tandis que Simion regardait, un petit paquet de linge blanc glissa de ses mains et Simion vit qu'il était taché de sang. Baissant les yeux, il vit plusieurs filets de sang courant le long de la jambe du jeune homme sous sa bure.

Le ventre de Simion se crispa.

« Oh, Maître, murmura-t-il. Ne pouviez-vous pas attendre ? Je pense qu'il serait venu à vous sans ça. »


Nicolae savait qu'il ne devait pas être loin de sa chambre à présent mais il avait du mal à penser clairement. La douleur parcourait tout son corps. Il était à mi-chemin dans le couloir lorsqu'il avait senti le gris se refermer sur lui et il avait dû s'arrêter un moment. La pierre était rude et froide, mais elle était solide.

Il était trop hébété pour réagir lorsqu'une main se posa sur son épaule. Il fut tourné et se retrouva à regarder un homme plus âgé aux cheveux blonds cendrés.

« Nicolae ? »

Il tenta de se redresser mais retomba contre le mur.

« C'est moi. »

L'homme pressa quelque chose dans ses mains, quelque chose de doux. Baissant les yeux, Nicolae vit le linge maculé de sang.

« Oh, fit-il tristement. Le cadeau de Beta. »

Il regarda l'homme.

« Je l'ai gâché. »


Simion prit le bras du garçon et le guida vers le couloir qu'il venait de quitter.

« Viens avec moi. Je vais t'aider.

– Ne prenez pas cette peine, Domn. Si je pouvais seulement regagner ma chambre... Je sais que c'est horriblement paresseux au beau milieu de la journée, mais si je pouvais m'allonger un moment...

– Nicolae.

Le ton était de réprimande. »

Un tremblement le secoua si violemment qu'il serait tombé si l'homme n'avait pas encerclé sa taille avec un bras solide. Abandonnant finalement sa mascarade, Nicolae murmura :

« Oui, je vous en prie. Aidez-moi. »

Remerciant le Ciel que sa chambre soit tout près, Simion y conduisit le jeune homme qui boitait. Durant ce temps, son esprit fonctionnait à toute vitesse. Cela ne semblait pas possible. Il savait que Draculea avait vraiment envie du garçon, et si le bibliothécaire s'était un peu trop débattu pour préserver sa vertu, les choses avaient pu devenir... rudes. Mais ça... Vlad Draculea était un homme rempli de désir mais pour autant que Simion le sache, il n'avait jamais déchiré à ce point un partenaire.

Dans sa chambre, Simion aida Nicolae à s'allonger sur le lit, le plaçant sur le ventre. Il aurait aimé avoir de l'eau chaude mais il sentait qu'il ne pouvait pas quitter le jeune homme pour aller aux cuisines et il n'y avait pas de feu dans sa chambre. Il fallait que de l'eau froide fasse l'affaire. Heureusement il y en avait un grand broc rempli à ras bord sur sa table de nuit.


Tandis qu'il versait l'eau dans une petite cuvette et prenait un linge, Simion étudia le visage du jeune homme. Il nota le bleu d'une couleur foncée naissant sur l'une des joues et les coupures à l'intérieur. Cela ne collait pas. Draculea avait été si fasciné par la beauté de cet enfant qu'il semblait à peine crédible qu'il puisse le marquer ainsi.

Quand Simion souleva la bure du jeune homme, Nicolae s'y accrocha désespérément, lançant à Simion un regard suppliant qui lui déchira le cœur.

« Tout va bien, Nicolae, je ne vais pas te faire du mal. Mais je dois voir ce qu'on t'a fait pour te nettoyer. Tu comprends ça, hein ? Tu ne dois pas prendre le risque d'avoir du poison dans ton sang. »

Avec réticence, Nicolae relâcha sa prise sur l'habit. Il tourna son beau visage battu contre le fin oreiller de Simion, agrippant le doux coussin avec des mains tremblantes.


Simion souleva la robe. Il avait vu des hommes violés avant, et violemment. Il pensait être prêt pour ce qu'il allait voir mais il ne l'était pas.

Il ne put retenir un cri de dégoût, d'horreur et de compassion douloureuse. Le garçon avait presque été écorché de la base du dos aux genoux. La peau était coupée et déchirée en ce qui semblait être une centaine d'endroits. Au bord des coupures, Simion put voir que c'était le genre de marques laissées par un bâton fin mais il était impossible de dire où commençait une blessure et où terminait une autre. Elles étaient toutes fraîches et la plupart d'entre elles suintaient toujours du sang épais.

Il n'y avait maintenant plus aucun doute dans son esprit — Draculea n'avait pas fait ça. Il savait que son maître pouvait être cruel mais cette torture vicieuse et délibérée d'un jeune homme innocent et inoffensif, surtout d'une telle beauté, était au-delà de ses capacités.


Simion essaya de garder une voix calme alors qu'il commençait à nettoyer le sang.

« Mon garçon, qui t'a fait ça ? »

Il n'y eut pas de réponse, seulement un faible gémissement alors que le linge passait sur la peau en lambeau. Il tenta à nouveau :

« Nicolae, pourquoi as-tu été battu ? »

Mis à part du haut vol ou attaquer un noble, rien ne pouvait justifier une telle correction et Simion doutait sincèrement que Nicolae soit capable de l'un ou de l'autre.

« J'ai... déplu à mon gardien. »

Varga, bien sûr ! Le bâtard.

« Qu'as-tu fait, Nicolae ? »

Et peu importe ce que c'était, c'est un monstre de t'avoir fait ça.


À son plus grand choc, le jeune homme eut un faible rire presque hystérique.

« Ce n'est pas ce que j'ai fait, Domn. C'est que je n'ai pas fait. Ce que j'ai refusé de faire. »

Simion rinça le chiffon. Voyant que l'eau était trouble, il se leva pour la jeter dans le couloir. À la porte, il se figea en entendant la faible réponse de Nicolae.

« J'ai refusé le prince, Draculea. »

Simion se retourna lentement et alla remplir une autre cuvette d'eau. Il avait refusé Vlad ? Et son père l'avait battu car il ne s'était pas débauché. Oh, Varga, vous avez fait une grave erreur. Pensiez-vous que mon seigneur vous serait reconnaissant de jeter le garçon dans ses bras et son lit ? Vous ne savez rien de Draculea et de sa fierté.


Simion continua à nettoyer Nicolae. Il poussa la bure un peu plus haut pour l'ôter du chemin et il découvrit les anciennes cicatrices. Il les toucha, parcourant d'un doigt une trace blanche et étroite, et le jeune homme frémit.

« Je vois que ce n'est pas la première fois que tu as été puni, Nicolae.

– Oh non. »

Sa voix était monotone et déconnectée.

« J'étais une source d'ennuis pour mon patron lorsque j’étais petit. Une semaine ne s'écoulait pas sans que le bâton ne quitte sa place. Je n'aimais pas avoir à le lécher pour le nettoyer. Le sang était si salé. »


Simion dut s'arrêter un moment pour passer une main sur son visage. Inconscient de la détresse de l'autre homme, Nicolae poursuivit :

« Depuis mon retour, ce n'était pas aussi dur. Seulement quelques coups et rarement avec son poing. Sauf la fois où je n'ai pas voulu recopié cette histoire paillarde. »

Il toucha son nez.

« Il a cassé quelque chose là, je pense. J'avais du mal à respirer pendant un bout de temps. »

Simion ne voulait pas causer plus d'inquiétude au jeune homme mais avec ce qu'il avait appris sur le seigneur Varga et sa relation avec son fils bâtard, il savait qu'il devait vérifier une dernière chose. Il devait s'assurer que Nicolae n'avait pas été violé. Il pouvait soigner les coupures mais si le jeune homme était blessé à l'intérieur...


Quand Nicolae sentit des mains agripper ses fesses, il se raidit avec un cri aigu. Mais Simion fit rapidement :

« Détends-toi, mon garçon. Mon but n'est pas charnel. Je dois voir si tu n'es pas blessé à cet endroit. »

Nicolae enfonça à nouveau son visage, son corps tout entier tremblant. Simion écarta la fente aussi gentiment qu'il le pouvait et examina le jeune homme. Il fut soulagé de voir que le sang semblait entièrement venir des coupures à la surface. L'anus du jeune homme était un petit pli d'un rose tendre. Ce n'était pas le trou béant et déchiré qu'il avait craint de voir. Apparemment, on lui avait épargné cette horreur mais à quel point, Simion n'en était pas sûr.

Il laissa la chair se refermer à nouveau et prit une petite jarre d'huile médicinale dans ses affaires. Il l'avait toujours avec lui, ne faisant pas confiance aux médecins locaux. Elle contenait des herbes spéciales qui non seulement nettoieraient les blessures et empêcheraient l'infection de s'installer mais en plus elles calmeraient un peu la douleur.


Pendant qu'il appliquait gentiment la lotion sur les endroits à vif, Nicolae fit :

« Père... Père allait faire quelque chose de vraiment terrible, je pense. Mais Dieu m'a protégé et il a répandu sa semence avant qu'il ne le souhaite.

– Attends, mon garçon. Je vais revenir. »

Simion sortit dans le couloir, fermant la porte. Puis il tapa du poing le mur de pierre jusqu'à ce que ses jointures soient meurtries, se mordant la lèvre jusqu'au sang pour ne pas crier des injures à la bête qui dévasterait ainsi son propre enfant. Quand il put enfin se maîtriser, il retourna dans la chambre.

« Je dois retourner dans ma chambre. On peut me vouloir et je dois être là quand ils appelleront, bredouilla Nicolae.

– Non, mon garçon. Tu es trop malade pour partir maintenant. Tu vas dormir ici. »


Simion servit un verre de brandy provenant d'une petite flasque de son sac. Hors de la vue du garçon, il versa une poudre blanche dans la liqueur ambrée, s'assurant qu'elle soit bien dissoute.

Il fit tourner Nicolae sur le côté et porta la coupe à ses lèvres. Quand le jeune homme sentit l'alcool fort, il essaya de reculer. Mais Simion fit fermement :

« Mon garçon, je suis ton ancien. Tu vas boire ça. Dieu ne t'en voudra pas et ça va te faire beaucoup de bien. Ça t'aidera à dormir. »

Nicolae le fixa, perplexe.

« Mais je ne vais plus jamais dormir, fit-il simplement, comme si c'était trop évident pour en parler.

– Si, tu y arriveras. »

Simion pencha le verre à sa bouche et Nicolae but.

« Et le sommeil te guérira. Au moins un peu. »


Le métabolisme du jeune homme était tellement sous le choc que la drogue agit encore plus rapidement et efficacement que d'habitude. En un instant, il dormait profondément, si profondément que c'était presque de l'inconscience. Simion lui retira complètement la bure puis le recouvrit d'un drap propre. Puis il se mit à la recherche de son prince. Il avait beaucoup de choses à lui dire.







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