Esprit Malin 181

Extra 3 : La petite sirène

Chapitre 181


Le royaume de Fan était une belle et riche nation au carrefour de l’Est et de l’Ouest. Les gens y menaient une vie prospère et le roi et la reine s’aimaient énormément. Ils n’avaient qu’un seul enfant, un fils du nom de Chi Yan. D’un côté, le roi et la reine avaient des exigences assez strictes envers le prince par rapport à son statut d’héritier mais de l’autre, ils n’avaient pas pu s’empêcher de gâter leur unique enfant. Par conséquent, le prince était capable de régler ses affaires de manière indépendante tout en conservant ses illusions naïves et innocentes.


Cela allait bientôt être le dix-huitième anniversaire du prince et ses parents lui avaient promis d’exaucer un de ses souhaits.

Chi Yan prit alors la main de ses parents et les secoua, les suppliant de le laisser aller en mer pour organiser sa fête d’anniversaire sur un bateau.

Bien que le territoire du royaume de Fan possédait une zone maritime, la capitale se trouvait à l’intérieur des terres. Chi Yan n’avait eu qu’une poignée d’occasions d’aller à la mer depuis sa naissance et était rempli d’idées romantiques et de rêveries mystérieuses sur la grande bleue.

Naturellement, le roi et la reine ne voulurent pas refuser à leur fils ce souhait tout simple, alors ils acceptèrent en souriant.


Seul un des précepteurs du prince, le grand prêtre du royaume de Fan, émit des réserves. Ce vieil homme savait effectivement à quoi leur jeune prince pensait.

« Votre Altesse, vous ne devez pas croire les histoires inventées par les poètes, ce ne sont que des absurdités. Il n’y a pas de belles et gentilles sirènes sous l’eau, pas plus que de splendides royaumes sous-marins. Il n’y a que de féroces monstres marins. Vous devrez être très prudent en mer.

– Je comprends, fit le prince d’un ton obéissant. Professeur, si vous n’êtes pas rassuré, vous n’avez qu’à venir avec moi. Mon père m’a procuré le plus confortable et moderne des bateaux actuels. »

Mais le prêtre s’empressa de refuser. Il avait un vieux corps épuisé et ne pourrait pas supporter le vent, les vagues et l’agitation de la mer.


* * *


Tandis que l’anniversaire du prince se rapprochait de plus en plus, le roi dut rester dans la capitale pour gérer quelques affaires. Alors ce fut la reine et un groupe de nobles qui accompagnèrent le prince à bord de son tout nouveau bateau de croisière de luxe. Le bateau partirait du port du Crépuscule Doré et reviendrait après dix jours au large. Dans l’espoir que le prince en profite pour mieux connaître leur territoire marin, le roi envoya également le meilleur officiel de la marine qui soit pour servir de guide à Chi Yan.

Toutefois, la reine ne se sentit pas bien peu de temps après être montée à bord, alors elle passa la majeure partie de son temps à se reposer dans sa chambre et ne fit qu’une apparition symbolique au banquet du premier soir.


Tout le monde avait bien conscience que le prince était désormais adulte et que la prochaine étape serait de se choisir une princesse. Du coup, ces nobles qui avaient perdu l’occasion de parler avec la reine — leur objectif premier — avaient inévitablement ramené leurs jeunes et belles filles pour les faire parader devant Chi Yan et se creusaient la tête pour trouver le moyen d’entamer la conversation avec lui.

Toutefois, Chi Yan n’aimait pas devoir gérer ce genre de choses alors tous les jours, en plus de tenir compagnie à sa mère dans la chambre de la reine, il faisait venir l’officiel de la marine sur le pont pour l’écouter lui expliquer la situation sur la mer de long en large. L’officiel et lui faisaient semblant de parler des affaires du gouvernement, ce qui obligeait les nobles à restreindre leurs agissements.


En tant que prince, Chi Yan avait naturellement droit au meilleur logement de tout le navire. Sa cabine se trouvait à la proue du vaisseau et il y avait un vaste balcon semi-circulaire relié à la chambre. La vue y était excellente et il pouvait englober d’un regard le ciel et la mer.

Parfois, il s’asseyait seul sur le canapé dans le séjour pour lire un livre et regarder la mer à travers les grandes vitres brillantes. Puis tout à coup, sans la moindre raison, il avait l’impression qu’il y avait quelqu’un derrière lui qui le tenait dans ses bras et lui murmurait de vagues mots doux à l’oreille. Il ne se rappelait pas de ces mots mais il se rappelait seulement de la chaleur qu’ils faisaient naître en lui.

Puis il se retrouvait tout seul avec son livre dans les mains et éprouvait alors une immense, inextricable solitude et un sentiment de perte.

Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !

Parfois encore, il ouvrait la porte du balcon seul au milieu de la nuit pour contempler le ciel étoilé et la mer sombre, sous la brise maritime. Il avait toujours eu le sentiment qu’il cherchait quelqu’un, qu’il attendait quelqu’un, mais il ne savait pas qui c’était. Au lieu de s’atténuer, ce sentiment n’avait fait que croître au fur et à mesure qu’il grandissait, lorsqu’il entra dans la puberté, puis l’âge adulte.

Alors il aimait entendre les récits fantastiques chantés par les bardes. Il aimait écouter les légendes de la mer et des sirènes. Il s’était même imaginé qu’une fois, une ravissante princesse sirène lui avait sauvé la vie mais lui, comme le prince stupide de l’histoire, avait complètement oublié la sirène à son réveil.


* * *


Cela faisait cinq jours que le bateau avait pris la mer. Il s’éloignait de plus en plus du port du Crépuscule Doré et la vaste mer devenait de plus en plus profonde. L’anniversaire du prince fut célébré à la date prévue.

Avant l’aube, les serviteurs commencèrent les préparatifs. Les serviteurs de Chi Yan l’aidèrent à revêtir une tenue blanche toute neuve. La servante lui ajusta le col et le complimenta :

« Votre Altesse, vous êtes vraiment splendide aujourd’hui. »

La reine allait également beaucoup mieux aujourd’hui. Elle portait une élégante robe raffinée pour célébrer la majorité de son fils bien-aimé.


Mais même si le lieu du banquet était passé du palais à un bateau en pleine mer, le déroulement et le style restaient similaires. Après le grand dîner avait lieu un bal, ce que Chi Yan détestait le plus. Il dansa quelques fois pour les apparences au tout début avant de profiter de la première occasion venue pour s’éclipser de la salle de bal et monter seul sur le pont.

Le ciel était nuageux, on ne pouvait pas voir les étoiles et il y avait une autre sorte d’humidité dans l’air. Chi Yan se rappelait de ce qu’avait dit l’officiel de la marine plus tôt dans la journée : il allait pleuvoir ce soir.


Tout était silencieux aux quatre coins. Le ciel et la mer étaient d’un noir terrifiant. Le vent et la houle devenaient de plus en plus violents. Visible à l’œil nu, un cyclone se forma en s’élevant de la mer, non loin du bateau de croisière !

En un instant, le vent souffla si fort que Chi Yan parvint à peine à rester debout. Toutes les chaises-longues sur le pont s’envolèrent et roulèrent un peu partout. Chi Yan dut s’accrocher à la rambarde au bord du pont afin de tenir debout. En titubant, il tâcha de retourner dans sa cabine.

Tout ce qui se trouvait sur le pont avait été dispersé par le vent furieux. C’était donc extrêmement difficile pour Chi Yan de revenir en arrière. À cet instant, un vent violent projeta une chaise vers lui. Il fut pris par surprise et tomba directement à l’eau…


* * *


À l’intérieur, le chaos régnait déjà. Les nobles se réfugiaient l’un après l’autre dans leurs cabines sous les instructions des intendants du palais. La reine se força à rester calme et s’assit dans la salle de bal, tout en tâchant de calmer les gens inquiets.

La scène était bien trop terrifiante : par les hublots, on pouvait voir cinq immenses cyclones noirs qui entouraient la coque, comme la gueule d’une bête gigantesque qui voulait les dévorer.

L’officiel de la marine bien informé expliqua à la reine avec le visage pâle :

« Votre Majesté, ceci est sans aucun doute l’œuvre du Triton C’est le masculin de sirène. (1). Nous avons dû entrer dans son terrain de chasse par accident. Le capitaine a déjà reçu l’ordre de changer de direction. »


Les sirènes et tritons, pour les gens ordinaires, n’étaient rien d’autre que de puissantes créatures légendaires. Ils pouvaient renverser les océans et les mers, provoquer des vagues gigantesques et dévorer des bateaux entiers avec les marins. Ils étaient brutaux, puissants, sanguinaires et inhumains. On pouvait les considérer comme les maîtres des océans. Ils se tenaient au sommet de la chaîne alimentaire et les rencontrer était synonyme de mort certaine.

L’officiel de la marine trembla. Il existait deux sortes de peur : la première était la peur de l’inconnu ; la seconde était la peur du connu. Personne ne connaissait mieux que lui les horreurs que pouvaient commettre ce genre de monstres. Il savait qu’ils étaient déjà tombés dans une situation presque fatale. Leur seul recours à présent était la barrière de protection autour de bateau que le grand prêtre avait dressée avant leur départ. Il n’y avait plus qu’à espérer que celui puisse stopper ce monstre marin.

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L’inquiétude était évidente sur le beau visage de la reine. Elle posa avec anxiété la question qui lui tenait le plus à cœur :

« Vous avez retrouvé le prince ? »

Dès que la tempête s’était déclarée, ils s’étaient rendus compte de l’absence du prince. Un des serviteurs de Chi Yan avait rapporté que le prince était monté seul sur le pont peu de temps avant. Mais quand ils se rendirent sur le pont pour le chercher, malgré le vent violent, ils ne virent personne. Ils étaient alors retournés le chercher dans la cabine dans l’espoir que ‘le prince était déjà retourné dans sa cabine’.

Le capitaine de la garde qui était responsable des recherches n’osa pas regarder la reine en face, alors il baissa la tête bien bas et répondit :

« … Je suis sûr que son Altesse va s’en sortir sain et sauf. »

La reine ferma les yeux et se laissa retomber dans sa chaise — pour le moment, elle ne pouvait que prier le Seigneur de les protéger de cette catastrophe et de faire en sorte que son unique fils reste en vie.


* * *


Après avoir été projeté dans l’eau, l’impact fit perdre connaissance à Chi Yan.

Il reprit peu à peu connaissance, mais seulement pour sentir l’eau glaciale autour de lui. Ses membres devenaient de plus en plus lourds et faibles. Il tenta de remuer les doigts, en vain.

Il n’arrivait pas à ouvrir les yeux. Les alentours étaient trop silencieux. Il avait terriblement froid mais n’arrivait pas à s’extirper de cette mer glaciale.

À un moment, Chi Yan songea même à la mort. Il se dit que c’était ça, mourir, et qu’il allait finir dans ces eaux glacées.


Tout à coup, une paire de bras tout aussi gelés s’enroula autour de lui par la taille, puis l’entraîna plus profondément dans la mer.

À cause de l’immense pression et l’eau qui le pénétrait jusqu’aux os, Chi Yan se débattit de nouveau. Désespérément, il gifla l’homme qui le retenait, dans le but de se libérer.

L’autre partie le prit soudain dans ses bras et le serra très fort.

Quelque chose se pressa contre ses lèvres et tenta d’y entrer —


Quand un liquide froid se versa dans sa bouche, la pression disparut instantanément de son corps. Il commença même à se réchauffer de l’intérieur, tandis que le corps enveloppé autour de lui restait froid.

Il s’accrocha instinctivement à l’autre et lui en exigea davantage.

Toutes ses demandes avides et sans scrupule furent satisfaites. Dans une tendresse confuse et l’obscurité, il ne fit plus qu’un avec l’autre et ensemble, ils sombrèrent au fond de la mer infinie…


* * *


La nuit de l’anniversaire du prince, les cyclones noirs disparurent sans crier gare, aussi subitement qu’ils étaient apparus. Les nobles se dirent que c’était la barrière du grand prêtre qui avait fait effet, mais le vieil officiel de la marine contempla la mer et murmura :

« Le Triton a attrapé la proie qu’il désirait. »

Ils eurent beau faire, ils ne retrouvèrent pas le prince.

Le roi envoya vingt autres navires pour continuer les recherches et le sauvetage éventuel du prince, et il se rendit personnellement sur les lieux pour superviser les opérations. Le navire de croisière ramena les nobles au port du Crépuscule Doré, mais la reine refusa de rentrer avec eux. Elle voulait continuer à rester en mer pour attendre les résultats des recherches du prince.

Tout le monde était déjà convaincu que le prince ne s’en était sûrement pas sorti mais tant qu’il n’y avait pas de preuve, le roi et la reine refusaient d’y croire et d’abandonner.


Toutefois, un mois plus tard, alors que tout le monde avait lentement perdu tout espoir, le prince réapparut subitement.

Sur un radeau, il apparut non loin d’un des bateaux de recherche. Il avait le visage pâle et ses cheveux noirs et courts étaient trempés et collaient à son visage. Ses yeux étaient tout aussi humides, remplis d’une certaine hébétude et impuissance. Il portait une tunique chinoise blanche, qui était sèche et très chaude, et qui l’enveloppait tout entier.

Les gardes s’empressèrent de le faire monter à bord. La reine vint le voir dès que possible. Elle le serra très fort dans ses bras en pleurant.

« Maman, je suis revenu, » murmura Chi Yan à sa mère comme quand il était tout petit.

Puis avec hésitation, il rendit son étreinte à sa mère.

Il était revenu.

Il était enfin revenu.


* * *


Cinq ans plus tard, le vieux roi et la reine abdiquèrent et se mirent à voyager autour du monde. Chi Yan monta officiellement sur le trône et devint le nouveau roi du royaume de Fan. Inévitablement, le sujet de son mariage revint sur le tapis. Et de nouveau, Chi Yan fit tout son possible pour éviter ce sujet.

De retour dans sa chambre, il congédia tous ses serviteurs. Une fois seul, il se dirigea vers le bassin pour se passer de l’eau froide sur le visage.

Il n’avait jamais raconté à personne ce qui s’était passé cinq ans plus tôt. Devant le reste du monde, même ses parents, il s’était toujours contenté de dire des choses comme ‘je ne sais pas’, ‘je suis tombé à l’eau depuis le pont cette nuit-là, puis j’ai perdu connaissance après ça’, ‘quand je me suis réveillé, j’étais là’… Il avait prétexté l’inconscience pour se dérober à toutes question et les autres n’avaient pas demandé plus de détails. Ses parents avaient été si bouleversés, puis fous de joie quand ils l’avaient retrouvés, alors ils n’allaient pas exiger de savoir.

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Il était donc le seul à savoir ce qui s’était passé durant ce mois en mer il y avait cinq ans — petit à petit, il s’en était clairement rappelé.

Il se rappelait de cette créature, de ses bras froids et puissants, de son visage pâle et splendide, du sourire mauvais sur ses lèvres, de sa puissante queue de poisson et du gargouillement qui imitait la voix humaine et avec lequel il l’appelait ‘Ah Yan’ juste contre son oreille… Il se rappelait de leurs étreintes intimes et incessantes, libres et chaotiques, au fond de cette mer sombre et glaciale.

Il savait ce qu’était l’autre partie — en dépit du fait d’avoir la même apparence exceptionnelle, ensorcelante et qui semait la confusion dans le cœur des gens, il n’était pas une douce et gentille sirène comme dans les histoires des bardes, mais plutôt le monstre marin cruel et au sang froid contre qui le grand prêtre n’avait cessé de le mettre en garde.

Chi Yan se rappelait comment il avait été incapable de faire la différence entre le jour et la nuit, comment il avait pleuré, satisfait, flatté l’autre tout en le suppliant de bien vouloir le laisser partir, le laisser rentrer chez lui… L’autre partie ne lui avait jamais répondu. Il n’avait fait que ressuyer de ses lèvres froides les larmes qui coulaient de ses yeux.

Alors il n’aurait jamais pensé que cette créature finirait vraiment par le laisser repartir.


Après s’être lavé le visage, Chi Yan s’habilla proprement et se rendit au temple.

Tous les jours, il allait prier pour implorer le Seigneur de pardonner ses péchés — le péché de chair avec ce monstre sombre et cruel… le péché de continuer à penser à ce monstre et de ne pas pouvoir s’en détacher.

Parfois, il rêvait même qu’il flottait sous la mer et qu’une paire de bras glacés s’enroulaient tout à coup autour de lui, l’entraînant sans cesse vers les profondeurs, l’entraînant… Il rêvait ensuite de lèvres froides et d’une respiration qui s’abattaient silencieusement sur son corps…

Dans son rêve, il ne pleurait pas et n’implorait pas sa pitié mais au contraire, il tendait les bras pour répondre à son étreinte en soupirant :

« Tu m’as tellement manqué… »

Cette intimité était comme un amant qui minaudait après avoir été longtemps séparé de son bien-aimé.

Il se réveillait souvent à ce moment-là dans son rêve, mais cela exprimait le désir secret dans son cœur qu’il n’osait pas admettre.


* * *


Tout cela avait commencé dès son retour de la mer à dix-huit ans, et cela s’acheva enfin six mois après son accession au trône.

Ce n’était pas parce qu’il avait soudain oublié ce qui s’était passé et le Triton, mais parce qu’il rencontra quelqu’un.

C’était un étranger extrêmement riche, dont la fortune dépassait l’imagination et rivalisait avec celle d’une nation. Il dit qu’il venait du continent de l’autre côté de l’océan, qu’il était un noble dans son pays d’origine et qu’il dirigeait une affaire familiale. Il pouvait facilement produire des trésors qui auraient fait pâlir d’envie le plus riche des nobles du royaume de Fan. Avec son apparence extraordinaire, ses vastes connaissances, sa manière de parler distinguée et éloquente, et ses ressources financières impressionnantes, il devint rapidement la coqueluche du cercle de la haute noblesse du royaume de Fan.


Chi Yan avait déjà entendu des rumeurs sur lui au palais avant, mais il ne s’en était guère soucié, jusqu’au jour où il vit cet homme pour la première fois durant un banquet organisé par son oncle.

Cet homme avait effectivement une apparence noble et sublime. Il tint gracieusement la main de Chi Yan et déposa un baiser poli dessus.

« Votre Majesté, je me nomme Ye Yingzhi. »

En cette fraction de seconde, l’esprit de Chi Yan fut violemment secoué.

Et la seule et unique raison était que le visage de cet homme était exactement le même que celui du Triton dans ses souvenirs. Mais il n’était plus étrange, mauvais et glacial. Il était au contraire noble et distingué, doux et aimable.

C’était comme si le Triton au sang froid dans les profondeurs de l’océan avait revêtu une couche de peau exquise sur lui.

Chi Yan ne put s’empêcher de regarder le bas de son corps — il y avait bel et bien une paire de jambes humaines longues et bien droites, et pas du tout la queue de poisson froide et puissante de ses souvenirs.

L’homme lui adressa un sourire gentil et poli :

« Votre Majesté, qu’est-ce que vous regardez ? »

Chi Yan fit de son mieux pour rester calme, mais il se retira tôt du banquet.

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Le soir venu, il fit un autre cauchemar. Il rêva qu’il était prisonnier des bras du Triton et pressé contre le lit sombre et désert de l’océan. Le monstre profitait de lui sans aucune retenue et fit à son oreille en riant :

« Bébé, je t’ai enfin attrapé. »

C’était la voix de cet homme du nom de Ye Yingzhi.

Chi Yan se réveilla en sursaut de son rêve. Il se redressa sur le lit, la tête baissée, et se força à se calmer. Il resta un moment en silence dans le noir, plongé dans ses pensées, et resta ainsi jusqu’à l’aube.


* * *


Après ça, Chi Yan commença à faire venir cet homme au palais, intentionnellement ou non. Parfois il jouait aux échecs avec lui, parfois il buvait du thé avec lui, parfois il allait voir un spectacle avec lui… Tout le monde sut rapidement que cet étranger du nom de Ye Yingzhi était devenu le nouveau favori du roi.

Chi Yan n’aurait pas su vraiment dire ce qu’il voulait de l’autre. Essayait-il de percer à jour son déguisement d’humain ? Ou bien voulait-il prouver que cet homme était juste un simple étranger qui n’avait absolument rien à voir avec le Triton ?

Il ne pouvait pas dire et il ne savait pas s’il voulait prouver que Ye Yingzhi était humain ou bien prouver qu’il ne l’était pas.


Mais en cours de route, son cœur succomba à l’autre sans s’en rendre compte. Il se mit à rêver de moins en moins du fond de l’océan froid et sombre, et de plus en plus au chemin dallé où ils avaient marché tous les deux ensemble et aux paysages des quatre saisons qu’ils avaient vus ensemble.

Très vite, une année s’écoula et les rencontres entre les deux hommes se firent de plus en plus fréquentes. Chi Yan avait même prévu une chambre au palais pour l’autre homme. Il se demandait de moins en moins si cet homme était un humain ou un Triton. Il savait seulement que Ye Yingzhi pouvait aisément occuper toutes ses pensées et que le temps avec lui le remplissait toujours de chaleur et de plénitude, comme si quelque chose lui avait manqué et était comblé par la présence de l’autre.


Finalement, entre la fin de l’été et le début de l’automne de cette année, le jeune roi du royaume de Fan demanda la main du mystérieux étranger inconnu.

Il lui prit la main dans les jardins du palais et demanda avec un sourire :

« Yingzhi, est-ce que tu veux rester avec moi pour toujours ? Jusqu’à ce que la mort nous sépare ? »

Il avait la confiance et l’assurance que Ye Yingzhi allait dire oui. Après tout, l’amour de cet homme et son dévouement pour lui étaient plus qu’évidents.

Et le résultat ne fut pas contraire à ses attentes.

Ye Yingzhi déposa un doux baiser sur son front et répondit à voix basse :

« Je ne crois pas que même la mort pourrait nous séparer. Nous resterons ensemble pour l’éternité. »


* * *


Chi Yan était impatient de célébrer leurs noces alors avant la venue de l’hiver, il organisa un grand mariage splendide et accueillit officiellement sa reine au palais.

Il embrassa sa reine dans la chambre à coucher puis se fit pousser sur le lit par l’autre qui arborait un sourire. Ye Yingzhi se rendit ensuite dans la salle de bain.

Assis seul sur lit qui appartenait dorénavant à deux personnes, Chi Yan se sentit un peu intimidé, gêné, mais également empressé. Finalement, il ne put se retenir plus longtemps et ouvrit en silence la porte de la salle de bain pour se glisser à l’intérieur.

En tant que roi, il avait une salle de bain que l’on ne pouvait qualifier que de ‘somptueuse’. Le bassin à l’intérieur était assez grand pour contenir dix adultes.

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Une fois que Chi Yan fut entré, il referma la porte sans un bruit puis regarda autour. La salle de bain était envahie par une brume blanche dense, la vapeur d’eau qui s’était dispersée. Il eut beau y regarder à deux fois, il ne vit pas sa reine.

Tout à coup, une main glacée surgit hors du bassin et l’entraîna précipitamment dans l’eau —

Chi Yan fut pris par surprise et tomba dans une étreinte gelée.

Il se figea sur place, ahuri, en sentant le contact familier d’un froid glacial qui était resté gravé dans son être. Un vague pressentiment naquit dans son cœur, mais il n’osa pas tourner la tête pour voir.


Puis tout à coup, l’autre homme posa gentiment son menton sur son épaule et fit avec un léger rire :

« Bébé, je t’a enfin attrapé. »

Chi Yan déglutit et baissa les yeux pour regarder. Les bras qui l’entouraient étaient pâles et musclés, avec de longs doigts fins, et les ongles bleu marine étaient longs et extrêmement pointus, brillant de l’éclat d’un prédateur.

La puissante queue de poisson se courba légèrement, se pressant contre lui et jouant avec ses mollets et ses chevilles.


Le Triton serra très fort le jeune homme dans ses bras puis le fit se retourner. Chi Yan fut ainsi forcé de voir l’apparence familière du Triton avec ses oreilles pointues, ses yeux écarlates et son sourire mauvais.

Il referma la bouche et émit un faible gémissement du fond de sa gorge. Il n’arrivait même pas à réaliser ce qui se passait juste devant lui.

Le Triton l’embrassa de manière irrésistible, exactement comme il l’avait fait cinq ans plus tôt.

Nous resterons toujours ensemble et même la mort ne pourra pas nous séparer.

D’après la légende, quand le bien-aimé d’un Triton mourait, le Triton le prenait dans ses bras pour s’enfoncer au plus profond de l’océan, là où personne d’autre ne pouvait aller. Puis il le rejoignait dans la mort.

Alors je resterai à tes côtés en tant qu’humain jusqu’à ce que ce jour arrive.


* * *


Les légendes racontaient que le jeune roi du royaume de Fan avait pris pour reine quelqu’un d’une terre étrangère et qu’il l’aimait énormément. L’histoire de leur amour fut largement répandue par les poètes.

Mais personne ne sut jamais si c’était un homme ou un démon qui était assis sur le trône voisin.


Note de Karura : Une histoire courte sans plus, à mon avis. Le prochain extra sera plus long (4 très longs chapitres).


Notes du chapitre :
(1) C’est le masculin de sirène.






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