Chapitre 42 : Attaquer le mal
Le cœur de Chi Yan redescendit complètement dans sa poitrine bien qu'il avait déjà choisi inconsciemment de faire confiance à Ye Yingzhi avant.
Il tourna la tête et regarda les étagères derrière lui. Sans surprise, Hu Xing n'était plus là.
Chi Yan rangea son portable puis vit que Ye Yingzhi avait rangé les livres et le gâteau dan son sac.
Il leva la tête, quelque peu surpris.
« On part maintenant ? Tu... ne veux plus réviser ? »
Ye Yingzhi hocha la tête.
« Fini d'étudier, rentrons à la maison. Il est encore tôt mais il y a du trafic à cette heure et il faut encore qu'on achète à manger et que je cuisine.
– Oh. »
Chi Yan le suivit, confus. Il eut le sentiment inexplicable d'être une sorte d'être une beauté fatale qui distrayait l'empereur de son audience du matin.
Une fois dans la voiture, Chi Yan retira son sac à dos pour le tenir dans ses bras. La petite renarde noire ne voulut pas rester de côté et elle tendit la tête pour le regarder attentivement.
Ye Yingzhi lui lança un regard distrait.
« C'est quoi ? »
Chi Yan se souvint que Hu Xing avait fait délibérément partir Lao Yuan afin qu'il ne soit pas impliqué dans ce genre d'histoire étrange et qu'elle avait dit que ce n'était pas bon pour les gens ordinaires. Il n'avait pas compris ces choses avant alors à chaque fois qu'il avait vu un fantôme, il avait appelé Ye Yingzhi et lui avait tout raconté. Maintenant qu'il était conscient des risques, il ne voulait plus impliquer l'autre homme alors il inventa d'un ton nonchalant :
« Lao Yuan court derrière une fille ces derniers temps et elle lui a confié la renarde qu'elle élève car elle devait s'absenter. Mais il doit aller à son stage toute la journée et ne peut pas s'occuper d'elle alors il m'a refilé la garde de la renarde. C'est pour ça qu'il m'a invité à manger aujourd'hui, d'ailleurs. Je dois m'en occuper quelques temps. »
Il y avait toutes sortes d'animaux de compagnie de nos jours. Bien que les renards soient rares, ce n'était pas non plus trop étrange.
Arrivé à ce point, Chi Yan demanda à Ye Yingzhi avec circonspection :
« … J'ai oublié de te demander d'abord, je peux emmener cette renarde chez toi ? »
Il se souvint que Ye Yingzhi avait dit qu'il louait la maison.
Ye Yingzhi ne s'en soucia pas et fit :
« Aucune importance, ma maison ne craint pas les petits animaux mais ce sont les petits animaux qui me craignent beaucoup. »
Chi Yan se dit seulement qu'il plaisantait et n'y attacha pas d'importance.
De retour chez Ye Yingzhi, Chi Yan prépara un nid pour la petite renarde dans la cuisine. Comme l'avait dit Ye Yignzhi, dès qu'il entra dans la cuisine pour préparer à manger, la petite renarde invitée s'enfuit aussitôt sans demander son reste. Elle n'avait plus son air paresseux ordinaire, elle fila tel un éclair noir, ce qui fit rire Chi Yan.
Il était déjà dix-sept heures quand ils rentrèrent après avoir fait les courses. Après que Ye Yingzhi ait fini ses préparatifs dans la cuisine, il s'assit à la table à manger. Il sortit le gâteau que Chi Yan lui avait acheté, le posa sur une assiette, prit une fourchette à dessert et mit un petit morceau en bouche. Il pencha la tête pendant qu'il y goûtait.
Assis en face, Chi Yan le regardait avec empressement. Il demanda :
« C'est bon ? »
Ye Yingzhi prit un autre morceau et le porta à la bouche de Chi Yan. Après l'avoir vu mangé, il demanda lentement :
« Ça te plaît ? »
Il partagea le gâteau en petits morceaux avec sa fourchette et mangea le tout sans faire de manière.
« Moi aussi je peux faire pareil. Je t'en ferai un une autre fois.
– Okay, » répondit Chi Yan en souriant et en hochant la tête.
En fait, bien que le gâteau soit délicieux, c'était sans plus. On finissait par être écœuré à force d'en manger trop. La fondue chinoise de Ye Yingzhi était nettement plus délicieuse. On pouvait en manger une tonne sans jamais s'en lasser.
Mais il était trop gêné pour le dire car cela donnerait l'impression qu'il convoitait sa fondue chinoise tous les jours.
Le soir, Chi Yan s'installa sur sa moitié du lit de Ye Yingzhi et était prêt à dormir après sa douche. Le temps que Ye Yingzhi finisse sa douche, il était déjà à moitié endormi.
Ye Yingzhi s'allongea et éteignit la lumière. Il plissa les yeux un bon moment pour l'observer sous le clair de lune puis il tendit la main et caressa gentiment ses cheveux. Il fit d'un ton doux :
« Brave garçon. Tu n'as pas négligé ton époux en te disant que la protection de cette renarde suffirait. »
Sa voix était grave et contenait une teinte d'amusement. Puis il se pencha, repoussa en arrière les cheveux sur le front du jeune homme et y déposa un baiser. Il s'allongea ensuite de nouveau à côté de lui et le tint fermement dans ses bras.
Chi Yan émit deux fois un léger son avant de poser la tête contre l'épaule de Ye Yingzhi et de dormir à poings fermés.
Rien ne se passa cette nuit-là. Le lendemain, ils travaillèrent tous les deux dans le bureau. Ye Yingzhi travaillait sur dieu sait quoi sur son portable. Chi Yan faisait de même à côté de lui et arrangeait ses notes. Bien que son directeur de thèse ne soit pas là pour le moment, il devait lui envoyer régulièrement des e-mails pour l'informer de l'avancée de son travail, alors évidemment il ne pouvait pas se permettre de trop fainéanter.
Les deux jeunes hommes étaient assis côte à côte, comme deux voisins de table à l'école primaire.
Quand c'était l'heure des repas, ils allaient manger ensemble. Pour ce qui était de se doucher et de se coucher, ils se reposaient ensemble. Leur travail et tout le reste étaient très synchronisés.
Chi Yan était en train de dormir au beau milieu de la nuit quand il entendit soudain un léger cri d'animal de l'autre côté de la porte. Il resta allongé et tendit l'oreille. Il se rendit alors compte que cela devait être les cris de Ah Sheng, la petite renarde. Les renards étaient moins fréquents que les chats et les chiens, c'était donc la première fois qu'il entendait un renard glapir.
Le cœur de Chi Yan fit badoum. Il se rappela que Hu Xing avait dit que la petite renarde pouvait chasser le mal et devina vaguement qu'il se passait quelque chose. Il jeta un coup d'œil à Ye Yingzhi qui dormait à côté puis alluma silencieusement la lampe de chevet de son côté. Il prit son portable, sortit du lit sans faire de bruit et ouvrit la porte de la chambre.
Les gens s'adaptaient vraiment à leur époque. Autrefois ils utilisaient des torches ou des bougies pour se sentir en sécurité. Ensuite ils prirent plutôt des lampes-torches et maintenant les portables étaient devenus les objets les plus rassurants.
Ils pouvaient éclairer et plus important encore, ils permettaient de contacter le monde extérieur et les autres. Dans le fond, peut-être que ce que les gens craignaient le plus n'était pas les monstres et les désastres mais plutôt l'isolement et le désespoir, le désespoir que personne ne pourrait venir à leur secours s'ils se trouvaient dans une situation désespérée.
Le son provenait des escaliers. Chi Yan se rendit au bord des marches puis baissa les yeux en direction du son. La petite renarde était arrêtée dans les escaliers et regardait fixement le bas de ses yeux bruns écarquillés. En entendant du bruit, elle se retourna et aperçut Chi Yan. Elle monta de deux marches pour se placer devant lui. Elle avait les quatre pattes par terre, les poils autour de son cou étaient légèrement hérissés et sa tête penchait en avant comme si elle était prête à attaquer à tout moment.
Chi Yan alluma la lumière du couloir de l'étage et put distinguer vaguement deux silhouettes pâles dans l'ombre au coin du rez-de-chaussée — ils se tenaient là, l'un sans son nez et l'autre sans ses oreilles.
Cette fois, il y avait deux victimes qui apparaissaient ensemble.
La petite renarde montra les dents et jappa en prenant un air menaçant. Toutefois les deux choses ne parurent pas la remarquer et montèrent peu à peu les marches d'un pas rigide.
Chi Yan recula inconsciemment d'un pas et étonnamment, la petite renarde l'imita et recula d'un pas.
Chi Yan contempla la petite chose à ses pieds et songea : Dis donc, miss, tu as l'air balèze et même ta maîtresse a fait des compliments sur toi en disant que tu pouvais l'aider. Mais en fait tu es juste une renarde féroce en apparence mais faible au fond, non ?
Son cœur battait à tout rompre. Les yeux fixés sur les deux silhouettes humaines dans les escaliers, il résista à l'envie de fuir, de se cacher dans la chambre, de fermer à clef et de se planquer sous la couverture aux côtés de Ye Yingzhi.
Le couloir s'illumina soudain à ce moment. Chi Yan tourna la tête et vit que Ye Yingzhi avait ouvert la porte de la chambre qu'il avait silencieusement refermée en sortant. Il était adossé contre la porte vêtu de son pyjama et le regardait. Son visage était calme, avec une touche d'élégance rassurante et de tranquillité.
La lumière de la chambre était puissante. Elle débordait de la porte ouverte et illuminait le couloir un peu sombre.
Chi Yan sentit aussitôt sa peur s'envoler.
Il se tourna vers les escaliers et les deux silhouettes avaient disparu, comme il s'y attendait.
Ye Yingzhi pencha la tête sur le côté pour le regarder.
« Pourquoi tu es sorti au beau milieu de la nuit au lieu de dormir ? »
Chi Yan prit rapidement la petite renarde dans ses bras et inventa une excuse :
« Ce n'est rien... J'ai juste entendu la renarde japper, j'avais eu peur qu'elle ait faim ou qu'elle soit malade. »
Puisque Hu Xing avait dit que les gens ordinaires ne devaient pas être impliqués dans ce genre d'histoires, il voulait délibérément garder Ye Yingzhi à l'écart de ces choses. Il n'osa dont pas lui dire qu'il avait encore vu ce genre de chose à l'instant.
Ye Yingzhi le regarda longuement avant de dire :
« Ne la prends pas dans tes bras. Cet animal n'est pas un chat ou un chien. Elle peut très bien avoir des maladies ou des parasites. En plus les hommes et les femmes ne devraient pas avoir de contact direct. J'ai entendu dire que tous les renards ont un esprit. C'est une petite femelle alors ce n'est pas convenable que tu la portes dans tes bras. »
Si la première partie de son discours semblait logique, le reste était du pur n'importe quoi. Malgré tout Chi Yan posa immédiatement la petite renarde par terre, obéissant.
Ah Sheng courut immédiatement en bas sans protester. Elle semblait être retournée toute seule dans son panier.
Chi Yan poussa discrètement un soupir de soulagement. Il avait vu ces deux choses au coin des escaliers alors il n'aurait jamais osé descendre pour ramener la renarde dans son panier.
Ye Yingzhi l'observa en silence. Chi Yan avait si peur qu'il n'osait pas parler. Tout à coup, Ye Yingzhi lui sourit et lui fit signe.
« Ne reste pas planté là bêtement. Reviens vite te coucher. »
Chi Yan le suivit et veilla à bien fermer la porte de la chambre à clef avant de se mettre au lit et d'éteindre la lumière de son côté. La chambre fut de nouveau plongée dans l'obscurité. Après un long moment, Chi Yan jeta un regard discret à son colocataire qui semblait s'être rendormi. Il se rapprocha discrètement de son côté en croyant que l'autre ne remarquerait rien.
Dans le noir, la bouche de Ye Yingzhi s'étira en un sourire presque imperceptible.
Tôt le lendemain, Chi Yan se cacha sur le balcon pour appeler Hu Xing et l'informer des événements de la nuit.
La voix de cette dernière semblait très fatiguée :
« On dirait qu'on ne peut pas les arrêter. Il y a eu de nouvelles victimes, deux cette fois... Cette chose devient vraiment très impatiente. »
Chi Yan se rendit compte que Hu Xing avait passé les deux derniers jours sur cette affaire : elle avait tenté de trouver une trace de l'esprit maléfique chaque nuit, en vain.
« Au fait, Mlle Hu, il y a autre chose. Depuis hier, la petite renarde semble un peu abattue. Elle n'a pas trop mangé quand je l'ai nourrie ce matin. Que lui arrive-t'il ? »
Chi Yan n'avait absolument pas l'habitude de s'occuper d'un animal de compagnie, encore moins d'un renard. Quand on rencontrait un problème, mieux valait voir aussitôt avec le propriétaire.
Hu Xing eut l'air très affolé à cette nouvelle. Elle demanda à Chi Yan l'adresse de Ye Yingzhi et assura qu'elle arriverait aussitôt.
Effectivement, elle fut là dans l'heure. Chi Yan dut de nouveau mentir à Ye Yingzhi et lui dire qu'il s'agissait de la fille que Lao Yuan voulait séduire et qu'elle venait récupérer sa renarde. Il sortit ensuite de la maison avec Ah Sheng dans les bras.
Paniquée, Hu Xing prit le petit animal dans ses bras et lui caressa les oreilles. La petite renarde s'appuya contre elle en tout confiance, gémit et frotta sa tête contre ses bras.
Elle serra Ah Sheng contre elle et l'examina plusieurs fois, puis elle soupira.
« Heureusement ce n'est rien de grave. Toutefois c'est le contrecoup de l'énergie maléfique.
– Un contrecoup de l'énergie maléfique ? » répéta Chi Yan avec étonnement.
Cette petite renarde n'est pas censée chasser les esprits maléfiques ? Comment peut-être avoir un contrecoup ?
Hu Xing hocha la tête.
« Ah Shen est beaucoup plus sensible à ce genre de choses que nous, les humains. Elle peut aussi sentir de l'énergie maléfique que je ne peux pas détecter. Si on y réfléchit... Il se peut que tu ais été exposé à de l'énergie extrêmement maléfique ces deux derniers jours. Je n'aurais pas cru que l'énergie maléfique de cette chose puisse être aussi puissante, que les fantômes vengeurs engendrés par les victimes de cette chose charrient autant d'énergie maléfique condensée et que cette énergie puisse même causer un contrecoup chez Ah Sheng.
« Mais dans ce cas, je dois reprendre Ah Sheng pour qu'elle cultive, je ne peux plus la laisser rester ici. Tu devras être extrêmement prudent tout seul, » l'exhorta Hu Xing.
Chi Yan lui assura que tout irait bien. Il ne pouvait pas supporter de voir cette petite renarde souffrir ici. En plus pour être honnête, il estimait que la petite renarde n'était pas aussi efficace que son propre colocataire.
En y songeant, il ne put s'empêcher de demander à Hu Xing :
« Mlle Hu, qu'en est-il de mon colocataire ? Vous avez dit que c'est une personne ordinaire mais à chaque fois qu'il apparaît, les fantômes disparaissent. »
Hu Xing secoua la tête et eut un léger sourire.
« Je n'en sais rien. Les gens sont des créatures très complexes. Certains ont un destin prospère, d'autres ont leur huit caractères Les caractères du nom, prénom et la date de naissance. C'est utilisé dans les horoscopes chinois et aussi pour tester la compatibilité d'un couple. (1) très puissants et certains sont nés avec la capacité à repousser le mal. Rien n'est jamais clair. L'étude de l'homme et de l'univers est justement l'essence du Dao. J'ai étudié l'art de combattre les démons et d'éliminer le mal depuis toute petite mais je n'ai appris que des sorts. Je suis peu compétente dans ces domaines transversaux. »
Notes du chapitre :
(1) Les caractères du nom, prénom et la date de naissance. C'est utilisé dans les horoscopes chinois et aussi pour tester la compatibilité d'un couple.
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