Chapitre 7 : Zhang Shun en oublia aussitôt tous les dangers inconnus. Il ne pouvait plus sentir que ce baiser glacial.
Zhou Yi se tenait devant devant la porte vitrée qui était teintée de noir à cause de la nuit. Il parut attendre tranquillement, puis se décida soudain à ouvrir la porte pour entrer.
« Directeur Chu ? Ah, vous êtes là. Je me demandais où vous étiez passé. »
Quand Zhou Yi se retourna, il vit Chu He se tenir dans un coin, haletant un peu. Son visage était à peine moins blanc qu’une feuille de papier sous le clair de lune. Si on regardait attentivement, sa tenue était même un peu débraillée.
« Qu’est-ce que vous faites ici ? » demanda-t’il.
Zhou Yi répondit avec un léger rire.
« Quelle question étrange. C’est un restaurant très connu de la cité de H, alors pourquoi vous pourriez venir, et pas moi ? En parlant de ça, le homard braisé d’ici est vraiment très bon. Malheureusement, j’étais tellement pressé que je n’ai même pas pu y goûter…
– Alors vous pouvez retourner y goûter, répliqua Chu He. Je vous laisse. »
Tout en disant cela, il dépassa Zhou Yi pour gagner la sortie. Contre toute attente, son poignet se fit saisir quand il passa près de cet homme.
« Directeur Chu, fit Zhou Yi avec un grand sourire, votre cravate n’est pas droite. »
Il leva les mains pour redresser la cravate en question. Ses mouvements étaient très lents et prudents, voire même un peu gentils. À un autre moment et dans un autre lieu, ces deux hommes qui se tenaient ainsi seraient si charmants qu’on aurait presque dit un couple affectueux.
« … C’est bon ? » demanda Chu He.
Zhou Yi recula d’un pas pour admirer son œuvre, puis fit :
« Rien ne presse, rien ne presse. »
Il tendit de nouveau les mains pour aider soigneusement à remettre le col de l’autre homme en place, lissant doucement le moindre petit pli. Ses mouvements étaient aussi doux et considérés que s’il caressait la peau d’une femme.
Après avoir bien pris son temps, il releva la tête et sourit.
« Nous étions destinés à nous rencontrer. Avec un si beau temps et dans un si beau décor, parmi les fleurs et sous la pleine lune, pourquoi ne resterions-nous pas à discuter un peu ?
– … »
Chu He ne répondit pas et partit.
Zhou Yi ne l’arrêta pas cette fois et se contenta de le regarder avec un petit sourire. Ce ne fut qu’à un pas de sortir des jardins que Chu He fut bien obligé de s’arrêter — un mur transparent venait de se dresser devant lui ! Sans les ondulations bleues qui parcouraient le mur par moment, il serait passé totalement inaperçu dans la nuit noire !
« Que signifie ceci, M. Zhou ? »
L’interpelé avait conservé son air calme.
« Rien du tout. Je voulais juste vous dire que personne au monde ne peut aller et venir à sa guise en ma présence.
– Quelle coïncidence, M. Zhou, fit Chu He en riant de colère. Personne au monde ne peut me faire partir ou rester à sa guise. Voulez-vous essayer d’être le premier aujourd’hui ? »
— La brise nocturne parut tout à coup s’arrêter de souffler et l’air se condensa peu à peu, rempli de cristaux de glace étincelants tels des petits poignards.
Les fleurs et les arbustes autour émirent des craquements alors qu’ils se brisaient sous la forte pression.
« … Directeur Chu. »
À cet instant tendu, Zhou Yi éclata soudain de rire.
« La manière dont vous parlez me rappelle vraiment mon ex-femme… »
L’énergie émanant de lui se dissipa soudain, comme si la scène de confrontation de tout à l’heure n’avait été qu’une illusion. Il sourit et claqua des doigts. Aussitôt, une petite table avec du vin rouge surgit de nulle part à côté de lui. Il remplit un verre en cristal comme si de rien n’était.
« Directeur Chu, vous voulez un verre ? »
Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !
Chu He répliqua sèchement :
« Vous semblez avoir un sérieux problème au cerveau. Vous avez déjà songé à consulter ?
– Ah, je suis très bien comme je suis. Auriez-vous un problème avec moi ?
– Non, répondit l’autre homme. Je me dis juste que ce n’est pas étonnant que votre femme soit devenue votre ex-femme. »
Contre toute attente, Zhou Yi ne réagit pas à cette provocation. Au contraire, son sourire s’élargit.
« Vous avez mal compris. Le problème entre mon ex-femme et moi est très complexe et ne peut pas s’expliquer en quelques mots… Laissez-moi vous présenter ça de manière très simple : à votre connaissance, quelles sont les raisons principales pour lesquelles un couple humain divorce ? »
Chu He trouvait ça totalement ridicule mais après un moment, il répondit tout de même :
« L’infidélité, l’infertilité et le fait de ne plus s’entendre. »
Zhou Yi commenta :
« Le fait de s’entendre ou pas, chacun a son point de vue sur le problème. Nous avons eu deux fils, alors on peut rayer l’infertilité. Quant à l’infidélité, ça fait au moins huit cents ans que nous sommes ensemble. Même s’il y a eu une ou deux aventures, ça ne compte pas — Vous êtes sûr de ne pas vouloir un verre ? »
Chu He secoua la tête. Zhou Yi claqua de nouveau des doigts et tout disparut, hormis le verre qu’il tenait.
« J’y ai réfléchi après coup et je pense que la principale raison pour laquelle il Ça y est, les masques tombent alors plus besoin de faire semblant. (1) m’a quitté, c’est parce que notre fils aîné est mort. »
Zhou Yi vida son verre d’un trait avant de le jeter par-dessus son épaule. Il ajouta lentement :
« Il croit que c’est moi le responsable de sa mort. »
Chu He n’y tint plus :
« C’est à votre ex-femme que vous devriez dire ça ! À quoi ça sert de me raconter ça ?!
– Ah, peut-être que ça fait trop longtemps que je garde ça en moi, alors je veux trouver quelqu’un pour trancher, répondit lentement l’autre homme. Après tout, c’est vraiment trop horrible de tuer son propre enfant. Même moi, cette idée me met mal à l’aise… En plus, j’estime clairement que c’est plutôt lui qui a causé la mort de notre fils. S’il ne l’avait pas autant gâté pourri, cet enfant n’aurait jamais commis ce crime si horrible que les divinités des Six Royaumes ont fait appel au châtiment divin… »
Chu He se détourna de lui et partit. Le mur transparent à l’entrée du jardin s’illumina soudain de bleu, mais s’effondra aussitôt d’une pression du doigt d’un Chu He furieux !
Zhou Yi cria d’un ton rageur :
« J’ai dit que tu pouvais partir ?! »
Sa silhouette se volatilisa pour réapparaître l’instant d’après derrière Chu He, voulant lui saisir la gorge d’une main !
Chu He bloqua son attaque du revers de la main et de l’autre, il lui enfonça le poing dans le visage. Zhou Yi leva un genou et le frappa très fort dans l’abdomen — Cette fois, le coup était si puissant que si cela avait été une personne ordinaire, ses organes internes auraient été éjectés par sa bouche !
Malgré ça, Chu He ressentit tout de même le goût du sang au fond de sa gorge, mais il ne marqua aucune pause. Il ravala aussitôt son sang et frappa Zhou Yi d’un uppercut du coude en s’écriant :
« Dégage ! »
Zhou Yi cracha un peu de sang et devint aussitôt plus féroce.
« Qu’est-ce que tu as dit ?! »
Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !
Chu He recula d’un demi-pas — et rien que durant ce bref moment, Zhou Yi disparut de nouveau pour réapparaître dans son dos !
Parmi les éclairs, Chu He vit l’ombre de son adversaire changer de manière radicale sous le clair de lune. Ses pupilles se dilatèrent aussitôt. Il connaissait si bien ce processus que même sans l’avoir vu depuis des années, il ne pouvait pas se tromper au premier regard —
C’était sa projection dharmique Ou dharma-laksana. Tout comme la projection astrale, la projection dharmique fait apparaître un double. Voir le film d’animation chinois New Gods : Yang Jian. Ici, c’est le véritable corps qui apparaît et cela permet de libérer tout son pouvoir. (2) !
Parmi les Six Royaumes, le Royaume du Ciel était le numéro un. Zhou Yi venait d’invoquer sa projection dharmique directement du Royaume du Ciel !
« Seigneur Démon ! Montre-toi ! »
Il saisit Chu He et le pressa durement contre le sol. Quand il releva la tête, ses pupilles étaient devenues complètement rouges.
« — Je ne t’ai pas tué à l’époque dans le royaume infernal. Viens rencontrer ta mort maintenant — ! »
Il y eut plusieurs explosions retentissantes et toutes les vitres autour se brisèrent en mille morceaux !
Chu He haleta pour reprendre son souffle. Il se redressa parmi les débris de verre qui tombaient comme une pluie torrentielle et courut. Il n’avait cependant pas fait deux pas que Zhou Yi le rattrapa par l’épaule et le ramena en arrière. Il fit d’un air glacial :
« Reste sur le côté pendant que je… »
Il n’eut pas le temps de finir sa phrase qu’il entendit des bruits de pas derrière. Puis la voix de Zhang Shun s’éleva, horrifié :
« Grand frère ! »
Chu He retint son souffle.
Il se retourna soudain, mais il restait après tout dans un corps humain. Un gros morceau de verre avait entaillé son front et le sang recouvrait son visage, teintant son champ de vision de rouge. Du coin de l’œil, il ne put rien faire alors que Zhang Shun se précipitait vers lui, le tirait par le bras et le plaçait dans son dos.
Même si Chu He était en général très calme, il ne put s’empêcher de vouloir jurer à ce moment.
« Zhang Shun ! Qu’est-ce que tu fiches ici ?! »
Mais c’était trop tard. Le visage livide, Zhou Yi souleva Zhang Shun comme un sac de courses et voulut le jeter —
S’il avait pu employer toute sa force à ce moment, il l’aurait sûrement jeté directement à l’étage d’en-dessous. Mais il se produisit alors quelque chose de totalement inattendu. De la fumée noire apparut soudain à l’endroit où la main de Zhou Yi tenait Zhang Shun et il le lâcha aussitôt, comme brûlé !
« C’est — »
Zhou Yi reprit sa forme humaine en un instant. Il se releva en contemplant sa main, les sourcils haussés.
Une partie de sa paume était devenue un amas de chair et de sang et le sceau de Bouddha 卍 À ne surtout pas confondre avec la croix gammée ! Les branches sont dans le sens inverse. C’est le svastika, un symbole sacré dans plusieurs religions orientales. L’auteuse utilise constamment le symbole, peut-être à cause de la censure chinoise. J’emploierai plutôt le nom. (3) doré était vaguement visible sur la chair ouverte. Ce symbole disparut en un instant.
« La réincarnation de l’Os de Bouddha, murmura Zhou Yi. … Je t’ai vraiment sous-estimé.
– Qu’est-ce que tu as fait ? Grand frère, tu vas bien ? »
Choqué, Zhang Shun aida son frère à se redresser. En voyant le sang sur le visage de l’autre homme, il paniqua :
« Je vais te ressuyer ça ! C’est ce type qui t’a frappé ?! Sale charlatan ! Si tu veux mourir, putain, ce grand-père va t’arranger ça ! Ce grand-père va t’éjecter de la cité de H sans ton nom ! »
Chu He le saisit par l’épaule et fit :
« Partons.
– Mais tu…
– Quoi, tu ? s’énerva son frère. On s’en va maintenant ! »
À contrecœur, Zhang Shun aida son frère à avancer pas à pas. Chu He n’avait pas le temps de lui expliquer la situation, alors il garda Zhou Yi à l’œil, craignant que l’autre ne change d’avis et ne se jette à nouveau sur eux.
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Mais il n’en fit rien. Il resta sur place comme s’il s’était subitement calmé. Il leva même la tête pour adresser un sourire à Zhang Shun :
« Désolé, beau-frère, j’ai perdu le contrôle et je t’ai laissé voir cette farce. Mais regarde un peu la mine de ton grand frère. Laisse-moi te dire qu’il a presque épuisé tout son sang de cœur — Si tu ne trouves pas rapidement le moyen de le sauver, alors laisse-le manger tout ce qu’il veut dans les deux prochains mois, histoire de bien le traiter pour ses derniers jours.
– Qu’est-ce que tu as dit ? s’écria le jeune homme, choqué.
– Ce n’est qu’un malade ! répliqua Chu He d’un ton furieux. Qu’est-ce que tu fais encore là ? »
Le second jeune maître Zhang aurait bien aimé posé encore quelques questions, mais son frère avait repris son avancée en titubant. Il n’eut pas d’autre choix que de le suivre rapidement. En plus, les gens du restaurant commençaient à venir ici en courant, alertés par la commotion. La tête remplie de doutes, Zhang Shun se tourna une dernière fois vers Zhou Yi. Il le vit debout parmi les débris de verre, tendant sa paume ensanglantée vers lui et un sourire glacial ornant ses lèvres.
« Ton frère a déjà un petit ami.
« C’est lui qui hante ta maison. Si cette affaire n’est pas réglée proprement, vous allez tous les deux mourir de ses mains.
« Ton grand frère a épuisé tout son sang de cœur. Si tu ne trouves pas une solution, il n’en a plus que pour deux mois à vivre. »
Zhang Shun se tourna dans son lit avec irritation et fixa le plafond blanc de la chambre privée d’hôpital. Plusieurs poissons exotiques de toutes les couleurs nageaient dans l’aquarium du coin, créant des reflets irisés sur le mur dans la nuit sombre.
— Son frère avait déjà un petit ami, comment se faisait-il qu’il n’était pas au courant ?
Aussi loin que Zhang Shun se souvenait, il n’avait jamais vu de
femme aux côtés de son frère — Si Chu He
avait vécu au Moyen Âge, il aurait été un
moine ascétique. Au contraire de lui, le second jeune maître
Zhang était beau, riche, jeune, il adorait s’amuser et
appréciait la beauté. Il y avait eu de nombreuses
femmes très séduisantes à son bras au fil des
années, mais son frère avait toujours regardé
ces gens comme s’il regardait un film à la télévision.
Zhang Shun s’était dit autrefois que si son frère continuait comme ça, il allait soit finir sa vie seul, soit il allait subitement rencontrer un jour une jeune femme de bonne famille qui serait vertueuse, sage, élégante et avec la même grâce que lui. Tous les deux pourraient alors se jurer fidélité et loyauté, puis devenir un couple modèle selon les standards de la haute société.
Mais il se trompait.
Un homme était arrivé sans crier gare et était devenu le “petit ami” de son grand frère, comme une épée magique tombée du ciel. Le problème, c’était que cet homme semblait être un sale type.
Zhang Shun se retourna de nouveau pour se mettre assis. Puis il regarda son frère en serrant les dents.
Chu He était allongé sur le lit, inconscient, avec un bandage blanc vaguement visible sous ses mèches.
En fait quand il y réfléchissait bien, bien que son grand frère avait une apparence ordinaire, que son visage était aussi pâle que s’il avait perdu tout son sang, que ses paroles et ses gestes étaient seulement polis et sans la moindre flatterie, il attirait en réalité bien des regards. Zhang Shun ne comprenait vraiment pas pourquoi. Il se rendait souvent dans la société de son grand frère, alors il savait que tout le monde, des jeunes filles qui venaient juste d’être engagées aux employées compétentes et expérimentées de la gestion, épiait en cachette les moindres faits et gestes du directeur Chu. Elles se mettaient même à rougir et leurs cœurs battaient plus vite à cause de son regard indifférent. Cette aura qui agitait les cœurs semblait encore plus efficace que lorsque le second jeune maître Zhang venait flirter avec sa montre en diamants et sa voiture de luxe.
Cela aurait été bien difficile de décrire ce genre de grâce et de charme avec de simples mots. C’était une attirance qui remuait l’âme, bien plus qu’un beau visage et de douces paroles. Zhang Shun avait même l’impression que Zhou Yi, qui ressemblait pourtant à une star d’Hollywood, était légèrement désavantagé lorsqu’il se tenait à côté de Chu He.
— Alors qui était cet homme qui avait bien pu gagner le cœur de son frère ?
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Zhang Shun avait eu envie de poser directement la question, sauf que Chu He était tombé malade dès leur retour du restaurant.
Dans ses souvenirs depuis tout petit, Chu He n’avait jamais été malade. Mais cette fois, il était gravement atteint. À leur retour à l’hôtel, la fièvre avait presque atteint les 40°C et il ne s’était pas réveillé même après qu’un médecin l’ait examiné à plusieurs reprises dans la nuit. Le lendemain, il n’était donc pas allé à la réunion avec les investisseurs japonais et le maire Huang. Il était dans un état complètement comateux et ne pouvait ni manger ni boire. Il avait besoin d’injections de glucose par intraveineuse pour continuer à survivre.
Zhang Shun était si affolé qu’il avait failli faire irruption dans le bureau du directeur de l’hôpital pour taper du poing sur la table. Mais les médecins n’y pouvaient vraiment rien. Le coup de genou de Zhou Yi n’avait provoqué aucune blessure interne et Chu He n’avait que des plaies superficielles sur ses paumes et son front. Pourtant, il ne se réveillait pas. Au bout du compte, le directeur de l’hôpital ne put qu’ordonner de surveiller la respiration et le rythme cardiaque du patient en permanence et qu’on l’envoie tout de suite aux soins intensifs s’il y avait le moindre changement.
Heureusement, la chambre privée possédait tous les équipements de pointe. De plus, le second jeune maître Zhang était inquiet de tout cœur pour son grand frère, alors ça ne le dérangeait pas de veiller sur lui non-stop.
« Cela fait déjà trois jours, putain, » marmonna le jeune homme en consultant la date sur l’horloge LCD de la table de chevet.
Au fur et à mesure que durait le coma de son frère, Zhang Shun devenait de plus en plus irritable. Il faisait déjà chaud en temps normal dans la cité de H mais durant les deux dernières nuits, on se serait cru dans un sauna. La clim avait beau tourner, elle ne faisait pas beaucoup effet et le second jeune maître Zhang avait l’impression que son cœur était en feu.
Il appela donc par l’interphone une infirmière de garde de nuit et lui demanda de venir surveiller son frère un moment. Il décida ensuite de sortir faire un tour.
Il n’y avait personne dans le couloir d’hôpital. Les néons éclairaient faiblement les murs, les teintant de bleu pâle. Sans doute parce que le couloir était très long, le vent qui soufflait faisait presque comme un sifflement aigu. Si on voulait tourner un film de fantôme, il n’y aurait même pas besoin d’effets spéciaux : il suffirait de prendre sa caméra et de filmer.
Le second jeune maître Zhang resta un moment devant la fenêtre au bout du couloir. Il commença à se sentir un peu nerveux et voulut descendre acheter un paquet de cigarettes.
La chambre privée était au dixième étage. Quand il prit l’ascenseur, il y avait déjà quelqu’un dedans : un homme portant une chemise verte d’opération qui se tenait immobile dans un coin. Zhang Shun entra sans plus regarder. Quand il allait presser le bouton, il vit que l’ascenseur devait déjà monter au dernier étage.
« … »
Zhang Shun ne réfléchit pas plus et pressa directement le bouton du rez-de-chaussée.
Ding !
Les portes s’ouvrirent lentement au dernier étage, mais l’homme derrière lui ne bougea pas.
Zhang Shun regarda à l’extérieur par hasard et vit que l’ascenseur se trouvait au début d’un long couloir avec une salle d’opération au bout. À ce moment, la lumière rouge au-dessus de la porte de la salle d’opération s’éteignit. La porte s’ouvrit et un groupe de médecin et infirmières sortirent en poussant un brancard.
Un drap blanc recouvrait le patient transporté.
« Mince ! » s’écria Zhang Shun, choqué.
Par réflexe, il voulut presser le bouton pour refermer les portes. Mais dès qu’il leva la main, il entendit le médecin crier :
« Attendez, ah !
– Oui, ah, pourquoi vous êtes si pressé, monsieur ? renchérit l’une des infirmières.
– Vous êtes si pressé, la mort est à vos trousses ou quoi ?
– Les gens qui se réincarnent sont moins pressés que vous ! »
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Alors que les paroles morbides échangées entre le médecin et les infirmières commençaient à filer la chair-de-poule à Zhang Shun, il vit soudain une main sortir de sous le drap pour le retirer. Le patient se mit assis et s’écria :
« Attendez-moi, ah !
– Bordel de merde ! »
Le second jeune maître Zhang explosa aussitôt. De panique, il pressa plusieurs fois le bouton des portes. Elles se refermèrent lentement, mais ce fut alors qu’une voix rauque s’éleva derrière lui :
« Attendez-moi, ah ! »
Zhang Shun se retourna lentement, choqué, et vit l’homme en tenue d’opération relever la tête. Son visage était livide et recouvert de taches cadavériques. Il le fixait droit dans les yeux.
« Pourquoi vous êtes si pressé ? Pourquoi vous ne m’attendez pas ? »
Zhang Shun eut l’impression de recevoir une bassine d’eau glacée en pleine figure — cet homme était clairement le patient de tout à l’heure sur le brancard qui avait été recouvert d’un drap blanc !
« Attendez-moi ! »
Le patient fit un pas en avant, puis tendit soudain une main pour se jeter sur lui.
« Attendez-moi et partons ensemble pour de bon !
– Oh puuuuuuuuuuuuuuuutain !!! »
Zhang Shun faillit se faire dessus de terreur. Par réflexe, il leva une main pour bloquer l’autre personne. Son coude percuta les boutons des étages sans même qu’il ne s’en rende compte.
« Àààààà l’aide ! À l’aide, aaaaaah ! Grand frère ! Grand frère ! Putain — ! »
Le patient fendit l’air de ses longs ongles, visant frénétiquement le visage de Zhang Shun. Ce dernier fit appel à une force surhumaine dans cette situation désespérée : il donna un coup de pied dans le torse de cette chose qui était soit un fantôme, soit un zombie, et qui heurta la paroi du fond de l’ascenseur avec un gros bang. Aussitôt, le patient se releva en titubant et en grognant, puis se rua de nouveau vers lui, une odeur de décomposition émanant de son corps. Ding ! L’ascenseur était revenu au dixième étage et les portes s’ouvrirent.
Zhang Shun sortit de là sans perdre de temps. À son grand dam, le patient le suivit dans le couloir, regardant droit devant lui de ses deux yeux grisâtres et turbides :
« Attendez-moi, attendez-moi…
– Comme si j’allais t’attendre ! »
Parfois, quand les gens étaient en proie à une frayeur extrême, cela pouvait se manifester par de la fureur. Zhang Shun n’avait plus peur à présent. Sa fureur envers Zhou Yi, envers le petit copain de son grand frère et envers le fait que Chu He n’avait pas repris conscience depuis des jours lui monta soudain à la tête.
Sans même réfléchir, il fila un bon coup de poing à ce zombie, puis se précipita et le piétina de son pied.
« Je vais te faire attendre, moi ! Je vais te faire attendre ! Sale fils de pute, ce grand-père est prêt à prendre ton nom s’il ne te fait pas partir pour de bon les deux pieds devant ! »
À force de se faire piétiner, le zombie devint furieux à son tour. Il sauta sur Zhang Shun avec un grognement et baissa la tête pour lui mordre le cou. Le jeune homme hurla et repoussa des deux mains le visage gris et en décomposition du zombie. Dans la mêlée, il se fit gravement griffer au visage par les ongles acérés de son assaillant et du sang jaillit aussitôt.
« Putain… Va te faire foutre… »
Zhang Shun avait bien du mal à repousser le zombie, mais il fallait dire que la force d’un être vivant ne pouvait vraiment pas se comparer à celle d’un mort-vivant. Les dents du zombie, d’où se dégageait une odeur rance, se rapprochaient peu à peu de la gorge de Zhang Shun.
Putain, pourquoi personne ne vient à mon secours… ? Ce jeune maître va-t’il mourir… ?
Zhang Shun serra les dents et sentit que ses bras perdaient peu à peu de la force. Au moment où il n’en pouvait plus, tout le poids sur son corps disparut soudain. Il vit le zombie soulevé dans les airs dans une position anormale, puis avec un crac strident, la tête retomba sur le côté.
Zhang Shun en resta sous le choc.
« Grand frère ! »
Chu He respira avec du mal tout en serrant la nuque du zombie par derrière. Il exerça soudain plus de pression et lui broya le cou décomposé, coupant effectivement la tête.
Le corps du zombie tomba par terre avec un ploum et s’embrasa rapidement. En un instant, il ne restait plus qu’un tas de cendres noires.
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Zhang Shun tenta aussitôt de se relever mais il eut beau essayer, sa vision devint noire et les griffures sur son visage lui brûlaient. Quand il voulut porter une main à ses joues, il se rendit compte qu’il avait perdu la moitié de sa perception sensorielle.
« Grand frère, grand frère, que se passe-t’il ? »
Allongé par terre et incapable de se relever, la voix du jeune homme se mit à trembler.
« Pourquoi je… Qu’est-ce qui m— »
La respiration saccadée, Chu He s’agenouilla devant lui, puis l’aida à se relever pour retourner dans la chambre en titubant. C’était difficile pour lui de soutenir le second jeune maître Zhang, qui faisait une demi-tête de plus que lui, et l’aider à avancer. Il avait à peine fait quelques pas qu’il perdit complètement ses forces et tomba à genoux avec un poum.
La voix de Zhang Shun vira dans les aigus.
« Oh putain ! À l’aide ! Venez vite — ! »
Cependant, l’étage tout entier semblait s’être subitement vidé. Non seulement il n’y avait pas âme qui vive mais en plus, on n’entendait plus rien. Seule la voix stridente de Zhang Shun résonnait dans le couloir.
« Grand frère ! Grand frère, qu’est-ce qui t’arrive ?! »
Zhang Shun se rendit enfin compte que ça allait mal. Il s’empressa de soutenir son frère avec son corps à moitié insensible. Il vit que le visage toujours pâle de ce dernier avait pris à présent une teinte maladive bleu cendré et que ses lèvres n’avaient plus la moindre couleur. Ses yeux flous s’arrêtèrent un moment sur le visage de Zhang Shun et il ouvrit la bouche, comme pour dire quelque chose.
« Qu’est-ce que tu dis ? Grand frère ? »
Zhang Shun baissa la tête pour approcher son oreille, mais Chu He lui tourna soudain la tête et ses lèvres froides se pressèrent contre sa bouche, expirant vers lui.
« … »
Zhang Shun en resta complètement ébahi.
Comme le ciel qui tombait, la terre qui se fendait et des rochers volant à travers les airs, il était complètement impossible de décrire l’ampleur de son choc en cet instant. Il parut tout oublier en cet instant. Les dangers inconnus et la situation chaotique disparurent d’un coup. Tout devint vide, excepté pour ce baiser.
Rien d’autre que les lèvres froides, douces et légèrement tremblantes de son grand frère.
Zhang Shun s’agenouilla automatiquement et saisit Chu He par les épaules. Un souffle enivrant passa dans tout son corps à partir de l’endroit où les lèvres et les langues s’entremêlaient, comme un courant d’air chaud en plein hiver. Où qu’il passait, les gens se sentaient bien et tremblaient d’aise.
Avec le passage de ce courant chaud, il sentit que son corps avait retrouvé toute sa sensibilité. Les battements de son cœur redevinrent stables, ses membres retrouvèrent leur force et même les griffures sur son visage avaient cessé de saigner.
« Grand frère… »
La voix remplie d’affection de Zhang Shun mourut soudain. Son grand frère l’avait repoussé de ses mains tremblantes et le souffle d’air qui le parcourait fut aussitôt interrompu — En cet instant, le visage de Chu He ne semblait plus appartenir à un être vivant. S’il fallait le décrire, on dirait qu’il ressemblait presque à celui du zombie de tout à l’heure. Zhang Shun fut choqué en le voyant. Il le souleva aussitôt dans ses bras et se précipita vers la chambre d’hôpital.
« Grand frère ! Reste conscient ! Ne t’endors pas ! Docteur, docteur ! Putain, où ils sont tous passés ?! »
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Chu He agita un peu la tête en tremblant. Il saisit la main de Zhang Shun et ouvrit gentiment sa paume.
Les pupilles de Zhang Shun se dilatèrent en cet instant —
Il vit un svastika doré gravé dans sa propre paume.
« Le, le sceau de Bouddha ?!
– Je… Je t’ai rendu l’Os de Bouddha… »
Chu He le saisit par le col, incapable de concentrer son regard. Mais ses doigts glacés se tenaient à lui comme un homme s’accrochait à sa planche de salut.
« Tu… Tu veux… »
L’esprit de Zhang Shun était complètement vide, pourtant la voix tremblante de son frère lui parvint mot à mot :
« Tu veux bien me rendre la vie… la vie de… Mahā Un terme sanskrit qui signifie ‘grand’. (4) ? »
Mahā ?
Qui était Mahā ?
Nageant dans la confusion la plus totale, Zhang Shun tenait à moitié son grand frère inconscient. Il entendit soudain la sonnerie retentissante d’un portable sur la table de chevet, ce qui le fit sursauter. Il vit l’identité de l’appelant affiché sur l’écran du portable de son frère — Li Hu.
En temps normal, il n’aurait pas du tout décroché, mais dans cet hôpital où tout le monde avait brusquement disparu et où personne ne répondait à ses appels à l’aide, il aurait été prêt à répondre même s’il s’agissait de Zhou Yi. Il décrocha donc rapidement et fit comme s’il venait subitement de voir son sauveur :
« Allô ?!
– Second jeune maître Zhang, lui parvint la voix calme de Li Hu. Ne raccroche pas et écoute-moi. Quelqu’un a lancé un sort pour éliminer le directeur Chu et le danger n’est pas encore passé. Reste près de ton frère et ne bouge pas. Vous ne devez pas sortir !
– Je sais ! répliqua Zhang Shun d’un ton furieux. J’étais descendu m’acheter des cigarettes et je suis tombé sur un fantôme ! Qu’est-ce que je dois faire maintenant ?!
– Ferme la porte de la chambre à clef et n’ouvre à personne, fit Li Hu. Attends que j’arrive. »
Note de Karura : Hum, donc on ne va pas du tout parler de ce baiser ? Ce baiser torride avec la langue ?
Chu He, perplexe : Je n’ai jamais mis la langue.
Zhang Shun : ( ﹁﹏﹁)
Notes du chapitre :
(1) Ça y est, les masques tombent alors plus besoin de faire semblant.
(2) Ou dharma-laksana. Tout comme la projection astrale, la projection dharmique fait apparaître un double. Voir le film d’animation chinois New Gods : Yang Jian. Ici, c’est le véritable corps qui apparaît et cela permet de libérer tout son pouvoir.
(3) À ne surtout pas confondre avec la croix gammée ! Les branches sont dans le sens inverse. C’est le svastika, un symbole sacré dans plusieurs religions orientales. L’auteuse utilise constamment le symbole, peut-être à cause de la censure chinoise. J’emploierai plutôt le nom.
(4) Un terme sanskrit qui signifie ‘grand’.
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