Chapitre 51 : Quand il s’agenouillait devant le Bouddha, il songeait à comment cette personne allait surgir de la foule pour se présenter à lui
Le Phénix se mit subitement assis dans son lit et rétrécit les yeux. Fixant Trailokya, il demanda :
« Qu’est-ce que tu fais ici ? »
— Il se trouvait au sommet du mont Xuebao, très près du temple bouddhiste et dans une zone interdite du mont Meru. Normalement, les gens ordinaires n’étaient pas capables de monter jusque là. Seul le phénix, en tant qu’antique bête divine qui préférait vivre en altitude, avait grandi seul là-haut et n’avait pas l’habitude de vivre dans le niveau inférieur du Trente-troisième Ciel. C’était donc là qu’il avait vécu depuis tout ce temps.
Alors quelle que soit la manière dont on regardait les choses, ce n’était pas normal que le Troisième Véritable Roi de Clarté se présente là aussi tard dans la nuit.
« … On m’a demandé de monter te voir, » fit le visiteur inattendu.
Il ne dit plus rien un moment, puis demanda :
« Tu étais en train de rêver ? »
Le Phénix fronça les sourcils.
« Je t’ai vu sourire. »
Le Phénix cligna des yeux, ne sachant que répondre à ça. Il préféra demander après un moment :
« Qui t’a dit de monter ? »
L’autre homme ne répondit pas.
« … Si c’est pour ne rien dire, autant t’en aller. »
Cependant, Trailokya ne parla pas et ne bougea pas. Ses yeux étaient étrangement luisants dans l’obscurité, si brillants que ça donnait un mauvais pressentiment.
La respiration du Phénix se fit peu à peu plus profonde.
De tout le Royaume du Ciel, c’était lui qui avait eu le plus d’expérience dans la Mer de Sang. Bien des fois, il avait vu beaucoup de démons prendre une certaine posture avant d’attaquer. Ce sentiment était curieusement semblable à l’impression qui se dégageait de l’autre Roi de Clarté. Il se sentit glacé par un mauvais pressentiment.
Il rétrécit ses yeux fins, son corps se tendit automatiquement et il demanda d’un ton sec :
« Tu ne pars toujours pas ? »
Contre toute attente, juste après cette question, Trailokya se décida enfin à bouger… mais ce ne fut pas pour partir. Il tendit la main pour ramener une mèche de cheveux du Phénix derrière son oreille.
La réaction de ce dernier suite à ce geste ne fut pas de la vigilance ou de la colère, mais de la stupéfaction — le genre de stupéfaction qu’on éprouvait quand on était totalement perdu. Il ne réagit même pas et regarda sans rien faire l’autre homme mettre un genou sur le lit. La main qui avait caressé ses cheveux se posa doucement sur son épaule.
« Ne m’en veux pas, murmura Trailokya, je ne fais qu… »
Le Phénix se redressa soudain et repoussa l’autre homme d’une paume, le jetant hors du lit !
« Qu’est-ce que tu fais ? Va-t’en ! »
Trailokya tituba un moment avant de retrouver l’équilibre. Il avait l’air un peu attristé, mais c’était difficile à dire si c’était parce qu’il s’était fait vraiment repousser sans la moindre hésitation ou bien si c’était pour une autre raison.
Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !
À ce moment-là, le Phénix ne se souciait pas du tout de la réaction de l’autre. Il se leva du lit et se dirigea vers la porte. Quand ses manches se soulevèrent, le parfum des nénuphars se répandit sous le clair de lune. Quand il passa à côté de Trailokya, cette fragrance était si claire qu’elle flotta dans les narines de ce dernier. Le Troisième Roi de Clarté l’attrapa soudain par la main.
« Attends ! Phénix, attends, n’as-tu jamais… »
Il fixa le Phénix droit dans les yeux et pendant un moment, il paraissait presque souffrir d’une déviation de Qi. Il demanda :
« … N’as-tu jamais songé à moi pour de bon ? »
Pour toute réponse, le Phénix agita vivement la main pour la dégager.
« Quoi ?! De quelle absurdité tu parles encore ?! »
Cette réponse sans la moindre hésitation parut stimuler le Troisième Roi de Clarté d’une certaine manière. Toutes son hésitation et sa culpabilité se transformèrent en colère subtile. Il saisit le Phénix par le poignet et le ramena en arrière. Ils tombèrent tous les deux au sol alors qu’ils se débattaient. Le Phénix le repoussa d’un coup de pied et se rua vers la sortie mais dans la précipitation, Trailokya le rattrapa par les cheveux et le fit de nouveau tomber sur les dalles lisses et froides du sol.
« Tu es malade ? Dégage de chez moi ! »
En guise de réponse, Trailokya pressa son corps fin au sol. La moitié de son visage était cachée par les ombres créées par le clair de lune, ce qui le rendait même un peu effrayant.
« Est-ce que tu sais pourquoi je suis venu ?
– Toi…
– C’est parce que tu n’éprouves rien pour moi. Non, tu n’éprouves rien pour personne, sauf cet homme. En plus, tu as toujours l’air ennuyé ou agacé avec moi, alors il y a le moins de chance que tu tombes amoureux de moi un jour. Tu fais toujours ce genre de tête… »
Le Phénix repoussa Trailokya, mais ce dernier se retourna et le pressa de nouveau au sol l’instant d’après. Dans la confusion, le crâne du Phénix heurta le sol dans un bruit sourd.
Le choc fut bien trop rude. La douleur intense rendit sa vision floue.
« … Tu as toujours l’air si innocent et indifférent. Personne ne s’intéresse à toi et tu ne t’intéresses à personne… »
Trailokya le saisit par les cheveux et l’obligea à lever la tête pour le regarder. Il fixa avec fascination sa nuque qui était si pâle qu’elle semblait presque translucide sous le clair de lune.
« Qui vas-tu aimer le plus, hein ? Seulement ce Shakya, ou bien aussi l’enfant à qui tu vas donner naissance ? »
À ce moment, les pupilles du Phénix, qui étaient floues et dilatées, se contractèrent. Il comprit enfin à quoi rimait toute cette absurdité, mais l’idée qui avait subitement surgi dans son esprit était bien trop terrifiante, alors sa première réaction fut de ne pas y croire.
Non… Impossible, ça ne peut pas être ça.
Même si tu Il s’adresse à Shakya, pas Trailokya. (1) m’as toujours menti, ça ne peut pas être ça…
« Si, c’est précisément ce à quoi tu penses, » fit cruellement Trailokya en contemplant le visage hébété du Phénix qui refusait fortement d’y croire.
Un plaisir malsain s’éveilla un instant dans son cœur.
« Je t’ai déjà dit que c’était cette personne qui m’a ordonné de venir ici, tu comprends ? Ton fils aîné va causer un énorme problème au Bouddha, alors la seule façon d’éviter cette terrible possibilité de manière sûre, c’est d’éliminer complètement la causalité et d’étrangler ce fameux fils aîné dans le berceau… C’est pour ça que je suis là. Plutôt que de te laisser donner naissance à l’enfant d’un inconnu, mieux vaut que ce soit avec quelqu’un que tu n’aimes pas du tout et qui ne pourra donc pas partager ton attachement aveugle… »
Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !
Les yeux du Phénix s’écarquillèrent et ses lèvres tremblèrent légèrement. Il semblait incapable d’émettre le moindre son.
« Regarde-toi, tu es si naïf. »
Trailokya eut un léger rire en lui caressant la joue.
« Tu espères naïvement que les autres vont bien te traiter et qu’ils vont te rendre tes sentiments, tu crois naïvement que tu ne seras jamais trahi ou blessé de toute ta vie… »
Il y avait actuellement une trace de pitié dans la voix de Trailokya, mais même lui ne la remarqua pas.
« Non… »
Le Phénix secoua inconsciemment la tête pour nier tout ça, mais il semblait un peu faible, sans la moindre assurance.
« Ce… ce n’est pas ça, je veux juste… »
Il haleta un moment, puis répéta avec hébétude :
« Ce n’est pas ça… »
Trailokya enfonça profondément les doigts dans l’épaisse chevelure un peu fraîche à l’arrière de son crâne. En contemplant le visage exsangue de l’autre homme, ses yeux se teintèrent d’une émotion très profonde et indéchiffrable. Au bout d’un moment, il baissa la tête pour embrasser les lèvres froides et tremblantes, mais le souffle chaud qui s’approchait soudain fit subitement trembler le Phénix. Il tendit les mains pour repousser violemment l’autre homme !
« Phénix ! » s’écria Trailokya d’un ton furieux.
Le Phénix tituba pour reprendre l’équilibre, puis se précipita vers la sortie. Trailokya courut rapidement à sa poursuite. Mais l’autre homme se tourna alors et un rosaire de perles en verre apparut dans sa main. Alors que sa tunique blanche voletait au vent, le rosaire se transforma subitement en un sabre d’un turquoise pur. Il le pointa vers Trailokya et s’écria :
« Plus un pas !
– Qu’est-ce que tu comptes faire, te rendre au temple pour demander des explications ? Ne sois pas stupide ! »
Trailokya était complètement furieux, ressentant un mélange inexplicable d’embarras et de colère. Cela rendit sa voix particulièrement irritée.
« Tu crois que tu peux simplement protester ? C’est dangereux pour le Bouddha ! Tu ne peux pas éviter ça juste parce que tu n’as pas envie ! Phénix, je… je vais bien te traiter. Tu ne veux pas simplement de quelqu’un pour te tenir compagnie ? Quelqu’un d’autre pourrait ne pas être comme moi, alors…
– Je ne compte pas me rendre au temple. »
Le Phénix haleta lourdement, mais son visage était plus calme.
« Je ne veux pas non plus de toi.
– Pourquoi ?! » demanda Trailokya avec virulence.
En cet instant, le Phénix se rappela des paroles du Vénérable Bhaddiya : “Tu vas donner naissance à deux fils avec quelqu’un qui ne fait pas partie de la causalité” — pas partie de la causalité, c’était des mots si simples, mais cela avait inspiré le rêve le plus doux et le plus splendide chez le Phénix.
Va-t’il me mépriser à cause de mon apparence extrêmement maléfique ? Sera-t’il gentil avec moi ?
Restera-t’il avec moi pour toujours ?
Cet étranger qu’il n’avait pas encore rencontré était comme un léger espoir dans cet avenir envahi par la neige et la glace. Le Phénix avait gagné une confiance infinie et de la force grâce à cet espoir. Alors subitement, il voulut désespérément lutter contre cette situation dangereuse et cette réalité sombre.
Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !
« Aucune raison en particulier. »
Le Phénix baissa les yeux et murmura fermement :
« Je veux partir d’ici. »
Trailokya en resta choqué, puis il devint anxieux et en colère sans raison particulière — L’humiliation et la fureur de s’être fait rejeter impitoyablement ne pouvaient pas se comparer à ce qu’il ressentit en entendant cette simple phrase : “Je veux partir d’ici.” Aussitôt, il se précipita et attrapa la main du Phénix, faisant d’un ton furieux :
« Et où est-ce que tu voudrais aller ? C’est le mont Meru ! Tu préférerais te rendre dans les quatre Dao du Mal — ?! »
L’autre homme se dégagea d’une torsion du poignet et il abattit sa lame, repoussant violemment le Roi de Clarté !
Puis il se tourna et s’envola hors du temple mais derrière lui, Trailokya invoqua soudain sa projection dharmique, une silhouette féroce avec trois têtes et huit bras. Il fit s’effondrer les piliers en pierre de la demeure, puis rattrapa le fuyard en un instant !
Le Phénix n’avait encore jamais vu la projection du Troisième Roi de Clarté. Devant lui, Trailokya s’était toujours présenté de manière normale, avec deux yeux et une seule paire de bras, et il n’y avait rien de bizarre chez lui.
Cependant, les apparences des Cinq Véritables Rois de Clarté du bouddhisme tantrique étaient toutes très terrifiantes. Alors que le Phénix volait au-dessus d’un lac gelé, il aperçut dans le reflet une ombre qui se rapprochait inexorablement de lui. Son cœur se mit soudain à battre très fort. Il se tourna et fendit l’air horizontalement. Avec un clang ! violent, il bloqua la hallebarde qui s’abattait dans son dos, maniée par Trailokya !
Les trois têtes et les neuf yeux du Roi de Clarté plongèrent dans le regard apeuré du Phénix.
« Si tu ne t’arrêtes pas, je vais devoir appeler à l’aide.
– … »
Le Phénix leva la tête avec du mal, tentant de se distancier du regard perçant du Troisième Roi de Clarté.
L’instant d’après, il l’entendit répliquer froidement :
« Tu crois que tu seras sauvé si tu appelles quelqu’un ? Non, tu resteras quand même promis à moi — Ou bien si tu ne te soumets toujours pas, les autres Rois de Clarté se montreront encore plus terrifiants et violents que moi… »
Le Phénix devint furieux :
« Tais-toi ! »
D’un mouvement de son épée, il fit sauter la hallebarde des mains de son adversaire dans un éclair éblouissant !
Le Troisième Roi de Clarté fut pris au dépourvu. Après avoir reculé de deux pas pour reprendre son équilibre, il vit que le Phénix s’était déjà échappé après cette attaque. C’était comme un oiseau aussi blanc que la neige qui glissait sur la terre glacée et il vola à l’extrémité de la pente givrée en un instant. Trailokya ricana, puis fila comme une flèche en s’écriant :
« Arrête-toi — »
La puissance du Phénix n’était pas comparable à celle des Cinq Véritables Rois de Clarté. Bien qu’il avait exterminé plus de démons et avait plus de victoires à son actif, il s’agissait juste d’expérience. En plus, il avait été gravement blessé par les quatre-vingt-dix-huit coups de la Cloche de Diamant : ses os et sa chair avaient été brisés et il n’avait pas encore complètement récupéré. Il n’était donc pas avantagé dans cette course poursuite sur la glace. Quand Trailokya le rattrapa, il fut projeté par un coup de hallebarde à la hanche et s’écrasa aussitôt dans l’immense étendue de glace.
Dans un grand bruit, il tomba dans l’eau du lac sous la glace. Trailokya plongea à son tour et nagea dans l’eau glacée. Il saisit un pan de la tunique blanche qui flottait dans l’eau.
L’instant d’après, le Phénix déchira sa tenue pour se précipiter de l’autre côté du lac. Dégoulinant, il se rua sur le pont en bois, laissant des flaques derrière lui !
Ce pont en planches de bois reliait le sommet du mont Xuebao au pic principal du mont Meru. Plus bas se trouvait un ravin sans fin.
Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !
Trailokya se posa à son tour sur les planches en bois avec un rugissement assourdissant. Tout le pont se mit à trembler violemment et le cri résonna même jusqu’au lointain ruisseau !
« Arrête, cesse de t’enfuir ! fit-il d’un ton sévère. Tu ne peux pas quitter le mont Meru ! »
Le Phénix remonta sa tunique externe complètement trempée. Ses cheveux étaient plus sombres à cause de l’eau et son visage en paraissait d’autant plus pâle. À contre-jour de la lune immense, il semblait aussi translucide que de la fine glace.
Ses splendides joues étaient un peu pâles à cause du froid et la pointe de sa lame était abaissée. Des gouttes d’eau en tombaient pour geler aussitôt à cause du vent glacial.
Cette apparence était encore plus misérable, sauf que Trailokya savait parfaitement que l’autre n’allait pas abandonner ou se soumettre.
Il connaissait bien ce petit Phénix qui avait l’air si frêle et faible. Bien des fois, il avait cru que l’autre n’allait pas pouvoir tenir le coup et allait s’effondrer devant de tels mensonges et coups mais à chaque fois, le Phénix n’était pas tombé. Il s’était obstinément accroché au faible espoir avec une attitude résolue et entêtée et jamais il ne s’était agenouillé face à la réalité douloureuse.
La violente colère dans le cœur du Troisième Roi de Clarté se calma progressivement et il fit d’une voix profonde :
« Reviens, Phénix. Tu n’as nulle part où aller hormis le mont Meru. Tu as besoin de temps pour m’accepter ? Je prendrai bien soin de toi, je t’ai toujours… »
Mais le Phénix secoua la tête.
« Ce n’est pas un endroit pour moi, fit-il d’une voix douce mais ferme. Et tu n’as pas non plus la personne dont j’ai besoin. »
Sous ses longs cils, ses yeux se posèrent sur l’abîme sans fond en-dessous du pont de planches, là où le vent violent sifflait. Trailokya eut soudain un mauvais pressentiment et il se précipita.
« Ne fais pas ça — »
Mais c’était trop tard.
Le Phénix saisit la rambarde noire soulignée d’or et sauta dans le profond abîme !
Trailokya se précipita vers la rambarde et vit l’autre homme chuter rapidement dans le vide, comme un cerf-volant dont la corde s’était brisée. Il devint rapidement un petit point flou au loin.
L’instant d’après, ce petit point explosa dans une lumière dorée qui illumina même tout le ravin. Dans la lumière, le Phénix se transforma en oiseau, les plumes de sa queue répandant des étincelles comme la Voie Lactée. Son cri pur et cristallin résonna à tous les niveaux du mont Meru, puis l’oiseau plongea dans l’abîme !
Les mains du Troisième Roi de Clarté se resserrèrent sur la rambarde.
« Phénix — »
Mais l’instant d’après, une voix glaciale résonna dans le vide.
« Ne le pourchasse pas. »
Trailokya redressa subitement la tête, ses pupilles se dilatant.
Il n’y avait rien dans la nuit obscure, entouré de montagnes des deux côtés et les pics couverts de neiges scintillant sous le ciel nocturne. Après un moment, le sifflement du vent parvint des pics, comme un très léger soupir venu du ciel noir.
Trailokya ne bougea pas, les mains tenant toujours fermement la rambarde, et il attendit. Mais il eut beau attendre longtemps, l’autre homme ne parla plus et ne lui donna pas d’autres instructions.
Le Phénix avait disparu dans l’abîme et il n’y eut pas de nouvelle de lui pendant très longtemps.
Il n’était sans doute pas allé dans les quatre Dao du Mal, mais s’était rendu au pied du mont Meru pour se reposer dans une faille spatio-temporelle à la frontière entre le Ciel et les Enfers.
Trailokya n’avait parlé à personne de ce qui s’était passé cette nuit-là et personne sur le mont Meru ne songea à demander des nouvelles du Roi de Clarté Phénix. Après tout, les gens avaient une opinion très complexe sur lui. Cet antique oiseau divin, qui était né avec une apparence extrêmement maléfique, avait autrefois apporté des choses bien trop menaçantes dans le royaume du Ciel. Quiconque entrait en contact avec lui souffrait de malchance, comme frappé par une malédiction. Au fil du temps, c’était devenu un sujet à moitié tabou.
Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !
La répression longue et continue des quatre Dao du mal causée par le royaume du Ciel avait fini par déclencher une énorme résistance de la part des Ashura.
Depuis les temps anciens, la Terre Pure au pied du mont Meru était un lieu où les démons et les dieux pouvaient coexister. Quand le mont Meru échoua dans son attaque de la tribu des Ashura, le nouveau puissant roi des Ashura, Fan Luo, rassembla les bêtes démoniaques et démons de sa tribu et des enfers, puis lança une attaque contre le Ciel. Il envahit presque toute la Terre Pure en une nuit.
Trailokya reçut l’ordre du mont Meru de se diriger vers la Terre Pure. Sans surprise, la cité principale était entourée d’une nuée dense de bêtes démoniaques et un Qi noir recouvrait le ciel. Le terrain au-delà des murailles de la cité s’était déjà transformé en mer de sang.
Les douves au pied des murailles étaient teintées de sang et sous le ciel sombre, on aurait dit un immense œil sans vie qui contemplait fixement le ciel.
À la frontière de la Terre Pure, dans une zone déserte.
Trailokya entra doucement dans le temple bouddhiste et vit de la légère fumée s’élever dans la grande salle un peu sombre. Le sol en dalles bleues était chaud et légèrement brillant à force d’avoir été longuement frotté. Le parfum du bois de santal flottait dans les airs, apaisant instantanément toute l’atmosphère dorée et fastueuse qui descendait du mont Meru.
Une fine silhouette était agenouillée près de la lanterne, portant une tunique de prêtre blanche comme la neige avec une tunique extérieure gris clair. Ses longs cheveux étaient attachés sur le côté, la pointe légèrement incurvée et frôlant le bas de sa tunique.
« Phénix… » murmura Trailokya.
L’interpelé avait les yeux légèrement clos, lui tournant le dos. Il égrenait doucement des perles en verre entre ses doigts.
Il avait l’air d’aller beaucoup mieux. En tout cas, son visage n’était plus aussi pâle qu’il l’avait été durant la fameuse nuit. Trailokya resta à côté de lui, contemplant son profil en silence, notant même les cheveux soyeux autour de ses oreilles.
Au bout d’un moment, le Phénix égrena une dernière perle et s’arrêta.
« Qu’est-ce que tu es venu faire ici ? » demanda-t’il d’un ton léger en rouvrant les yeux.
Il ne se leva pas, pas plus qu’il ne tourna la tête pour regarder Trailokya. Cette attitude distante n’était pas différente d’avant, comme si cette nuit intolérable avait complètement disparu, au moins en apparence, sans laisser la moindre trace.
« Je suis venu te proposer un mariage, répondit Trailokya après un moment de silence. Il s’agit de ma sœur, Shakti, la déesse des Monts Enneigés… Tu l’as déjà rencontrée. Puisque tu ne ne veux pas d’un Roi de Clarté mâle, peut-être qu’elle… »
Il marqua une pause et vit seulement l’autre homme jouer avec une perle du rosaire, paraissant un peu ennuyé.
« Elle ne pratique pas la double cultivation avec toi ? »
Il y avait bien des manières de cultiver dans le Royaume du Ciel et la double cultivation était très répandue, alors ça n’avait rien d’étrange.
Le ton du Phénix était normal, comme s’il n’avait fait que poser une question ordinaire. Pourtant, ce fut précisément à cause de ce ton normal que Trailokya se sentit soudain extrêmement embarrassé. Il expliqua après un moment :
« C’était il y a très longtemps. Maintenant, je ne —
– Non, l’interrompit le Phénix, pas la peine de m’expliquer. »
Il ferma les yeux et recommença à égrener son rosaire. Les perles turquoise entre ses doigts fins et blancs étaient aussi pures et splendides qu’un tableau.
Trailokya se dit que l’autre était en train de réciter des sutra dans sa tête. Il ne savait pas s’il devait se lever et partir, alors il resta planté là sans savoir que faire.
— Mais il ignorait que le Phénix n’était en fait pas en train de prier.
Quand le Phénix fermait les yeux, il songeait à cette personne qui ne faisait pas partie de la causalité. Il savait que ce n’était pas Trailokya, ni Shakti, et encore moins quelqu’un qu’il aurait entraperçu sur le mont Méru. Chaque jour, il imaginait avec tendresse et ferveur à quoi ressemblerait cette personne, comment seraient ses yeux et son visage, comment il allait surgir de la foule pour se tenir face à lui.
Quand il s’agenouillait devant le Bouddha, il songeait à comment cette personne allait apparaître. Quand il égrenait les perles du rosaire, il s’imaginait que cette personne allait prendre sa main et l’emmener loin de la mer du lotus infinie.
Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !
Trailokya contempla son visage paisible, ne sachant que dire. Le visage de l’autre homme était doux, mais il semblait séparé par un mur invisible, l’isolant du moindre contact curieux et des regards indiscrets, empêchant quiconque d’explorer son cœur profond.
« Shakti… c’est vraiment le meilleur choix pour toi, » fit-il enfin après un long moment.
Il délivra un dernier conseil :
« Tu es le phénix qui a absorbé son frère. Même si tu refuses la déesse des Monts Enneigés, tu risques de rencontrer bien plus de gens que tu n’aimes pas une fois de retour sur le mont Meru et tu ne sais pas comment ils vont te traiter… »
Ces paroles étaient très sincères, mais même Trailokya pouvait sentir à quel point ces mots étaient ternes et impuissants devant le Phénix.
Sans surprise, ce dernier n’ouvrit pas les yeux. Il se contenta de secouer légèrement la tête pour signifier son refus, puis égrena une nouvelle perle.
La colère secrète émergea soudain de nouveau dans le cœur de Trailokya.
— Tu persistes autant pour un étranger qui risque de ne pas se montrer bon envers toi ?!
Cependant, avant qu’il ne puisse parler cette fois, on entendit des bruits de pas précipités par la porte, puis un prêtre se rua dans le temple et s’inclina profondément :
« Votre Majesté ! Les Ashura ont conduit une armée de bêtes démoniaques pour envahir le palais de la Terre Pure. Ils sont arrivés aux murailles ! »
La colère dans le cœur de Trailokya remonta subitement à son cerveau.
« Qu’est-ce que tu as dit ?! »
Dans la Terre Pure, devant la tour.
L’immense ombre noire d’un démon à neuf têtes planait dans les airs. Les vagues rouges des douves s’agitaient et il en sortait continuellement des têtes de poissons bizarres qui crachaient du feu. Trailokya prit son apparence à trois têtes et huit bras, puis se tint sur les remparts de la cité. Il lança sa hallebarde droit vers le ciel et l’instant d’après, l’arme transperça le front immense du démon à neuf têtes. Le cri strident de la créature déchira aussitôt le ciel !
« Misérables bêtes ! rugit Trailokya, sa voix se répandant en vagues le long du terrain occupé par les monstres. Si vous ne vous rendez pas tout de suite, je vous exterminerai tous ici même — ! »
Shakti, la déesse des Monts Enneigés, se tenait à côté de son frère, mais ses yeux se détournèrent du champ de bataille pour se poser sur le Phénix qui se trouvait de l’autre côté de la tour.
Contrairement à l’image de la légende qui avait plusieurs fois franchi la Mer de Sang pour vider les Enfers, le Roi de Clarté Phénix semblait indifférent à tout cela. Le vent puissant soulevait les manches de sa tunique gris clair et de la tenue de prêtre en-dessous. Bien qu’il se trouvait en pleine bataille, on aurait cru qu’il allait se fondre dans le vent et partir à tout moment.
Il est vraiment magnifique, songea la déesse.
Comme le disait la légende, il était si splendide qu’il donnait aux gens une impression… extrêmement inquiétante.
Elle pencha la tête sur le côté avec intérêt et l’instant d’après, elle vit subitement le Phénix regarder au loin, comme s’il avait repéré quelque chose. En même temps, l’expression de son visage changea de manière très subtile.
— Bien que ce changement était minime et extrêmement difficile à noter, Trailokya s’en rendit également compte de son côté. Il tourna aussitôt la tête pour regarder le Phénix, puis suivit son regard le long du champ de bataille.
Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !
Par-delà la foule compacte de bêtes démoniaques, un homme en armure d’acier se tenait dans les airs. L’espace derrière lui semblait rempli d’un brasier ardent. Dans le tourbillon reliant la terre et le ciel, il émanait de lui une aura démoniaque puissante et glaçante.
Il se tenait bien trop loin pour qu’on voit clairement son apparence, mais ses gestes étaient bien visibles. L’homme avait levé un long sabre, du sang dégoulinant de la lame, et le pointait directement vers les murailles de la cité —
Vers le Phénix qui se trouvait sur les remparts.
Ce dernier fronça les sourcils, légèrement perplexe.
L’instant d’après, l’homme bondit en avant avec son sabre, charriant une aura noire, puissante et brûlante. Il se précipita vers le Phénix telle une flèche sifflant dans le vent qui traversait le monde !
La parole à l’auteuse :
Zhou Hui : 55555 Ça se prononce comme Bouh ouh ouh. C’est une façon de retranscrire des pleurnichements. (2) Mon amour, tu m’as lancé onze flèches alors que je venais simplement te demander en mariage. Je suis si malheureux et déçu…
Phénix : Tu as foncé sur moi avec un sabre, okay ?!
Note de Karura : Bon, si Trailokya n’était pas déjà mort, je pense que Zhou Hui serait déjà parti l’exterminer en prenant tout son temps… Et Trailokya l’aurait bien mérité !
Dans le prochain chapitre, la fameuse demande en mariage, version complète cette fois !
Notes du chapitre :
(1) Il s’adresse à Shakya, pas Trailokya.
(2) Ça se prononce comme Bouh ouh ouh. C’est une façon de retranscrire des pleurnichements.
Commentaires :