Le Prince Solitaire 4 04

Chapitre Quatre : Apprentissages


Durant le thé de l'après-midi qui avait lieu comme d'habitude au pavillon blanc, dame Teshime put constater que son époux avait l'esprit ailleurs. Yatsu et Tetsuō s'étaient déjà éclipsés pour jouer dans les jardins en attendant que reprennent les leçons de l'après-midi. Le silence s'était installé depuis. Mitsuhide ne répondait que par des monosyllabes aux commentaires de son épouse. Elle se résolut alors à aborder le sujet qui, elle le savait, attirerait son attention.

« Le général Yama ne se joint pas à nous aujourd'hui ? s'enquit-elle en usant du nouveau titre.

Non, il est parti avec le général Shimada pour visiter une des casernes. »

Teshime retint un sourire en entendant enfin une réponse complète de la part de son époux.

« Mmm, comme c'est aimable au général Shimada de s'occuper de lui.

Cela n'a rien d'aimable ! contra aussitôt Mitsuhide. Ils doivent juste établir ensemble les modalités d'accueil et d'entraînement des nouvelles recrues.

Ah, je suis sûre qu'ils vont bien travailler ensemble. »


Mitsuhide se renfrogna quelque peu. Teshime dissimula son sourire derrière sa manche.

« Devons-nous préparer un premier cadeau ? demanda-t'elle d'un ton innocent.

Pourquoi un cadeau ? fit-il en la regardant.

Pour ta demande de cour. »

Il en resta sans voix puis, pour le plus grand délice de son épouse, il rougit légèrement.

« Tu... ne dis pas n'importe quoi ! se défendit-il.

Il a pourtant accepté la brioche que tu lui as tendue hier. Oh, cela voudrait-il dire que vous en êtes déjà...

Teshime, tu es vraiment scandaleuse ! Tant que tu y es, mentionne aussi les vêtements que je lui ai offerts ! »

Elle prit un air faussement choqué.

« Mitsuhide, je ne te savais pas aussi entreprenant ! Je me souviens que tes sœurs m'ont raconté que pour ta première cour, si elles ne t'avaient pas poussé, tu en serais resté à échanger des poèmes ! »

Songeant à ses sœurs et son enfance traumatisante, Mitsuhide préféra cacher son embarras en buvant du thé.


Au bout d'un moment, il soupira.

« Ne plaisante pas à ce sujet en présence de Yama. C'est un Vite qui ignore pratiquement tout de nos usages.

Il peut toujours apprendre.

Mais il restera toujours un Vite. Il a trente-six ans, l'âge d'un enfant !

Les Vites vieillissent plus rapidement que nous.

Justement, voilà pourquoi les relations entre humains et Vites sont fatalement vouées à l'échec. De plus, les Vites ont une conception différente de l'amour : pour eux, c'est réservé entre époux.

Quelle étrange idée, fit-elle en prenant un air perplexe.

Et peu d'entre eux acceptent les relations entre hommes. »

Teshime se dit en elle-même que son époux semblait s'être bien renseigné sur les mœurs des Vites en ce qui concernait l'amour.


Elle reprit sur un autre sujet pourtant lié :

« Et que dire alors de Tetsuō qui a offert un bijou de cheveux à Yatsu ? Devrons-nous nous attendre à une cour par la suite ? »

Mitsuhide eut un sourire amusé et attendri.

« Ne va pas trop vite, ils sont encore bien trop jeunes. Mais plus tard, qui sait ?

Qu'en penserait le général Yama ? »

Mitsuhide plissa le front.

« Je ne crois pas qu'il s'y opposerait en ce qui concerne Yatsu.

Bien. »

Elle n'insista plus mais nota qu'à aucun moment, son époux n'avait nié avoir des sentiments pour Yama. C'était donc à elle de creuser le sujet, comme il seyait à toute bonne épouse qui voulait le bonheur de son mari.


~*~


Lorsque Yama revint de la caserne, l'après-midi touchait à sa fin. Comme Shimada était reparti avec l'intégralité de leur escorte, les commandants avaient insisté pour qu'il soit raccompagné de cinq soldats. Un général ne se déplaçait pas seul. Yama s'était plié une fois de plus au protocole. Dans la cour du palais, un servant vint prendre sa monture tandis que les soldats repartaient après l'avoir salué. Yama se dirigea vers ses appartements et fut accueilli par ses servants, à l'exception de Ritsu qui accompagnait Yatsu dans toutes ses activités.

« Bon retour, maître, fit Tiko en s'inclinant respectueusement. J'espère que votre journée a été fructueuse.

Cela prend beaucoup trop de temps, soupira-t'il.

Ah, le seigneur Mitsuhide a demandé à être prévenu de votre retour. »

Yama donna son accord et ce fut Shiju qui fut envoyé porter la nouvelle.


Le général rangea son sabre sur le porte-sabre dans une des alcôves de la pièce avant d'aller se rafraîchir et se changer. Pendant ce temps, Shiju revint avec un autre message :

« Le seigneur Mitsuhide vous invite à dîner avec lui. »

Yama hésita. D'un côté, cela voulait dire qu'il ne pourrait pas manger avec son fils une fois de plus. De l'autre, ce serait l'occasion de faire son rapport à Mitsuhide et de partager ses premières conclusions.

« Entendu, accepta-t'il en retenant un soupir. Je suppose que ce sera de nouveau à la bibliothèque.

Hum non, fit Shiju d'un air incertain. Ce sera dans les appartements du seigneur.

Bon, » fit simplement Yama.

De leur côté, les servants comprenaient toutes les implications de ce geste et surent les spéculations que cela allait engendrer. Toutefois, ils ne désiraient pas outrepasser leur position en informant leur maître de cela.


Shiju repartit donc prévenir Yatsu de l'absence de son père au repas du soi et que par conséquent, il pouvait dîner de nouveau avec Tetsuō si celui-ci était d'accord. Yama dut se changer de nouveau car la tenue qu'il portait ne convenait pas pour un repas avec le seigneur de Hanajū. Toutes ces règles et protocoles contraignants commençaient sérieusement à l'agacer. C'était bon pour des gens qui vivaient plus de cent cinquante ans mais pas pour lui, surtout quand il y avait une guerre à préparer ! Il bouillonnait de l'intérieur et cela ne l'aidait guère de se dire que ce n'était que le deuxième jour ! Il allait falloir qu'il s'y habitue pourtant, d'une façon ou d'une autre.


~*~


Ce fut un Tiko tout impressionné qui le conduisit dans le Pavillon Principal où se trouvaient les quartiers du seigneur de Madare. Ils furent reçus par Tsuga et Yūta, deux des servants de Mitsuhide, qui s'inclinèrent profondément devant Yama et l'invitèrent à entrer. Tiko, quant à lui, resterait à l'extérieur jusqu'au moment du départ de son maître. Yama s'attendait à une abondance de luxe et d'objets inutiles dans les appartements, comme ce qu'il avait vu dans les siens à son arrivée, mais il fut agréablement surpris. La décoration était assez sobre et de bon goût : quelques papiers calligraphiés et la peinture d'un tigre sur un rocher au pied d'une cascade au mur. Les alcôves contenaient un jeu de sabres de trois tailles, des fleurs délicates, un arbre miniature et des livres reliés. Le sol était recouvert de riches tapis doux. Un pan de mur était constitué de portes coulissantes avec vue sur les jardins, un des privilèges du seigneur des lieux.


« Bonsoir Yama, l'accueillit son hôte qui finissait de lire un document à sa table de travail.

Bonsoir Mitsuhide.

J'ai entendu dire que tu avais eu une journée des plus intéressantes.

Ah, tu parles... »

Ce n'était pas surprenant que Mitsuhide soit au courant de tout ce qui s'était passé à la caserne. Yama s'assit en face de son ami qui lui lança un regard amusé.

« Shimada n'a pas pu résister à l'envie de te défier en duel, hein ? J'aurais dû te prévenir à son sujet. Il ne juge les gens que par leur habileté au sabre. C'est une seconde nature chez lui.

Eh bien, je pense qu'il n'a pas été déçu de son duel !

Il est reparti furieux, à ce qu'on m'a dit. C'est pourtant lui qui a gagné.

Il y a différentes sortes de victoires. »

Mitsuhide le fixa d'un air intrigué mais ne pressa pas le sujet.


Le repas fut apporté et les deux hommes changèrent de table.

« Que penses-tu de mon intérieur ? s'enquit Mitsuhide en commençant à manger.

J'aime bien, le surprit Yama. Ce n'est pas trop chargé en décoration, contrairement aux appartements que j'ai reçus.

Eh bien, fit Mitsuhide avec un plaisir évident, il est naturel que les invités aient droit à ce qu'il y a de mieux. C'est une manière de les honorer.

Alors ne te sens pas vexé : j'ai fait retirer une bonne partie de ce qu'il y a de mieux.

Mmm, il faudra que je vienne voir ça.

Quand tu veux. »


La conversation revint sur des sujets moins badins.

« Au fait, j'ai reçu une réponse du seigneur Hiroki d'Omisū.

Une réponse à notre demanda d'alliance ? Déjà ? fit Yama avec perplexité.

Non ! Les lettres ont été achevées dans l'après-midi et les messagers ne partiront que demain à la première heure. Je parle du message que j'ai envoyé au seigneur Hiroki suite à l'invasion de ton village par ses hommes.

J'ignorais que tu l'avais fait. Pourquoi ?

Ah, un seigneur n'a pas le droit d'envahir une province voisine, c'est contraire à la loi ! Alors dès que j'ai appris pour ton village, j'ai envoyé aussitôt une protestation officielle accompagnée de la tête du commandant que tu as tué en guise de preuve. »

Yama fronça les sourcils.

« Et que dit-il, cet Hiroki ?

Il nie, évidemment. Il dit qu'il devait s'agir de bandits déguisés en soldats d'Omisū pour profiter de la confusion. »


Un sourire ironique étira les lèvres de Yama, partagé par l'autre homme.

« Ben voyons, des bandits à cheval, avec une formation militaire ainsi qu'une Horreur ? Bah, en même temps, tu t'attendais à quoi ?

La compensation financière qu'il va aimablement me proposer pour que je ne porte pas l'affaire devant l'Empereur.

Il achète donc ton silence ?

Nous avons besoin d'argent pour les troupes, se justifia Mitsuhide. En plus, vu ma réputation actuelle à la Cour, ma demande a peu de chances d'aboutir. »

Yama acquiesça. C'était effectivement la chose la plus pragmatique à faire. Cela l'étonnait seulement que les Autres, si portés sur l'honneur et le respect des lois, sachent contourner les règles en certaines occasions. Ils étaient plus subtils et complexes qu'il ne l'aurait cru — donc plus intéressants.


« L'argent sera le bienvenu, approuva-t'il, car il va falloir construire une nouvelle caserne. »

Mitsuhide prit un air ébahi.

« Pour les nouvelles recrues, précisa Yama. Les casernes actuelles ne pourront pas toutes les accueillir. Qui plus est, tes soldats ne voudront pas forcément tous être mélangés avec des Vites.

Tu ne vas pas un peu vite en besogne ? tempéra Mitsuhide. L'enrôlement n'a pas encore eu lieu, alors on ne peut pas savoir combien de recrues cela nous amènera.

Tu préfères attendre d'avoir des milliers de soldats dehors en hiver ? Je ne parle pas de construire du durable, des baraquements provisoires conviendront très bien. Mais il faut commencer dès maintenant pour pouvoir accueillir les nouveaux dans de bonnes conditions. Cela en dira long sur notre sérieux et notre organisation. »


Mitsuhide écouta tout cela de bonne volonté toutefois, comme Shimada plus tôt, il ne croyait pas vraiment qu'ils auraient autant de recrues.

« Fais-moi confiance là-dessus, » insista Yama.

Le seigneur soupira profondément et finit par acquiescer.

« C'est entendu. Nous porterons cette décision au prochain conseil pour que les travaux débutent au plus vite. Il faut déterminer un emplacement, débloquer les fonds, engager les ouvriers… Ce sera fait au plus vite.

Merci. »


Mitsuhide continua de le fixer avec gravité.

« J'espère que tu te rends compte de tout ce que je risque en m'en remettant à toi. Tu as sans doute constaté que mon autorité n'est pas si absolue que ça. Mes conseillers déplorent ma jeunesse et cherchent à me tempérer. Ma protestation de l'an dernier ne leur avait déjà guère plu, alors ma déclaration de guerre aux Hikari ne peut que les consterner. Si jamais cela tourne mal, je suis certain qu'ils me destitueront au profit de Tetsuō et qu'ils nommeront un régent en attendant sa majorité. »

Yama avait plus ou moins saisi la situation dans sa globalité. Les détails apportés confortaient sa compréhension. Il rendit son regard à son ami.

« J'en ai tout à fait conscience. Je t'ai dit que je serai à tes côtés jusqu'au bout, quoi qu'il arrive. Tu es le seul à qui j'ai fait un tel serment. Je ne ferai donc rien qui puisse te nuire. »

Le seigneur resta figé un moment, le visage indéchiffrable, puis il hocha la tête en déglutissant.


~*~


Une fois le repas terminé, deux servants débarrassèrent la table tandis que d'autres préparèrent le thé. Mitsuhide invita Yama à prendre place en face des jardins afin de profiter de la vue apaisante.

« En tout cas, je suis surpris de la rapidité avec laquelle tu t'es adapté à cette nouvelle vie. Tu as l'air dans ton élément. »

Yama haussa les épaules.

« Ce n'est pas complètement nouveau pour moi, nuança-t'il. Et puis, à force de changer de vie si souvent, j'ai fini par développer des capacités d'adaptation. Le tout, c'est de rester soi-même quoi qu'il arrive.

On dirait que tu n'as pas eu la vie facile. »

Ya ma haussa de nouveau les épaules sans commenter.

« Chez moi, on dirait que les Dieux t'ont maudit. »

Sentant les ombres s'agiter, Yama tiqua et leur lança un regard mauvais.

« On peut dire ça, marmonna-t'il plus à leur intention qu'à celle de son ami.

Ah ? une idée de la raison ? plaisanta l'autre homme.

Je vois beaucoup de raisons. C'est difficile d'en choisir une en particulier. »


Mitsuhide lâcha un léger rire, pensant qu'il plaisantait. Cependant, il s'arrêta en voyant sa mine sérieuse.

« Non, vraiment, quoi que tu aies pu faire, cela ne peut justifier une vie d'errance.

Tu ignores ce que j'ai pu faire. »

Malgré le ton assuré de Yama, Mitsuhide secoua la tête, incapable d'y croire. Yama soupira et enchaîna sur un sujet proche mais moins délicat :

« La seule chose qui m'ennuie dans cette nouvelle vie, c'est que je n'ai pratiquement plus le temps de voir Yatsu. Ça me fait bizarre.

Ah, et toi qui trouvais étrange que je ne passe pas trop de temps avec ma famille. Tu vois que c'est difficile.

Cela dit, c'est mieux ainsi, » soupira Yama.


Cela lui valut un regard intrigué de la part de l'autre homme.

« Pourquoi tu dis ça ?

Yatsu doit apprendre à se passer de moi, soit parce qu'on retrouvera sa famille, soit parce que je serai mort. »

Le seigneur se renfrogna. Yama abordait ces sujets graves d'un ton un peu trop léger. C'était peut-être ainsi que les Vites réagissaient mais pour les humains, cela portait malheur d'en parler avec insouciance et désinvolture.

« Pour ce qui est de la famille de Yatsu, la guerre ne va pas nous aider à avancer dans nos recherches. Et ta mort prochaine... Je pense sincèrement que tu vas vivre encore un bon moment.

N'oublie pas que je suis un Vite. Techniquement, je suis en âge d'avoir mon premier petit-enfant. »

Cela fit rire son ami.

« Tu n'as rien d'un grand-père ! Même avec ta barbe ! »

Yama secoua la tête en souriant.


Mitsuhide poussa vers lui l'assiette de douceurs à laquelle Yama n'avait pas touchée.

« Mange, lui fit-il. Le thé est meilleur si tu l'accompagnes de sucré.

Je l'aime amer. Et je ne suis pas sucré.

Tu vas avoir besoin d'énergie pourtant. »

Avec un soupir, Yama céda et eut un regard amusé en prenant un des gâteaux.

« Encore une de ces fameuses brioches au lotus, hein ?

À Madare, il faut en manger une par jour. C'est la loi, » affirma Mitsuhide d'un ton faussement sérieux.

Yama s'exécuta sans grand enthousiasme sous le regard satisfait de son ami.


~*~


Le lendemain matin, Yama se sentit obligé de s'excuser auprès de son fils pour son absence. Quand il était revenu de chez Mitsuhide la veille, le garçon dormait déjà depuis un moment.

« Ce n'est pas grave, Papa, fit l'enfant avec générosité. Je sais que tu as un travail important.

Ce n'est pas une raison. Dis-moi, tu te plais au palais ?

Oui ! »

La réponse spontanée réchauffa le cœur de Yama. Son fils poursuivit :

« Les leçons sont un peu difficiles mais Tetsuō est là pour m'aider. Tout le monde est très gentil, même quand je fais des gaffes. Ritsu est tout le temps là pour m'aider. Et toi, tu te plais ici ? »

Le fait que Yatsu lui retourne la question le prit un peu au dépourvu.

« Il y a beaucoup de choses à faire. Je n'ai pas vraiment le temps de me poser ce genre de questions, » soupira-t'il.

En plus, étant donné que tôt ou tard il finissait toujours par devoir quitter l'endroit où il s'était installé, il ne se posait plus la question.


« Et le papa de Tetsuō ? poursuivit Yatsu. Tu l'aimes bien ? Vous ne vous fâchez plus ? »

Yatsu semblait encore avoir en mémoire leur dispute à Misato. Yama sourit pour le rassurer.

« Tu sais, même si je me fâche avec lui, on sera toujours amis. C'est normal pour des amis de se disputer parfois. Cela n'a rien de grave.

Moi, je n'aime pas les disputes. »

Yama soupira devant cette attitude typique des Autres. Yatsu avait toujours été doux de nature, et Yama comprenait à présent que c'était dans l'esprit de son peuple d'éviter tout conflit superflu. Mieux valait chercher les compromis que la confrontation directe.


Ce fut l'heure pour l'enfant de partir à ses leçons, accompagné de Ritsu. Yama resta dans ses appartements pour travailler au programme d'entraînement des recrues. Il le rédigea en langue des Vites, n’ayant pas encore de scribe sous la main. En plus, ce n’était qu’une ébauche : il se basa sur l’entraînement des Templiers tout en l’adoptant aux usages de l’Empire. Il eut droit à des interruptions de la part des Diables qui voulaient s’en mêler.

« Cela ne vous concerne en rien ! finit-il par leur lancer, excédé.

On peut t’aider, protestèrent-ils. Nous avons appris la stratégie de Notre vivant. »

Méfiant, il préféra les repousser. Il ne prêta pas attention à ses servants qui échangèrent des regards ébahis en le voyant parler tout seul.


Il envoya Tiko lui chercher une carte de Madare, puis une de Hanajū afin d'avoir une meilleure vue d'ensemble de la province. Son servant revint au bout de la seconde fois avec un message inattendu :

« Maître, le général Shimada est là pour vous voir.

Ah ? »

Vu comme l'autre homme était parti brusquement la veille, Yama ne pensait pas le revoir de si tôt. Cela dit, c'était peut-être pour le défier de nouveau au sabre...

« Fais-le venir, Tiko, » fit-il en soupirant.

Le regard horrifié de son servant lui fit immédiatement comprendre qu'il avait commis un impair.

« Quel est le problème ? demanda-t'il directement.

M... Maître, je ne voudrais pas me mêler de ce qui ne me regarde pas mais...

Tu peux parler librement. »


Le servant déglutit et se lança :

« Vous ne devez pas inviter n'importe qui dans vos quartiers, maître. C'est réservé aux amis proches, à la famille et les amants. J'ignore quelle est votre relation précise avec le général Shimada.

Je vois, fit Yama en constatant une fois de plus que ce sujet était tout sauf tabou dans l'Empire. Dans ce cas, où puis-je recevoir le général Shimada ?

Je vous recommande un pavillon dans les jardins ou bien, s'il est question de travail, la bibliothèque.

Ce sera donc la bibliothèque, » décida Yama.

Il indiqua à Shiju, un second servant, d'y apporter les cartes ainsi que son ébauche d'entraînement.


~*~


Shimada avait été conduit à la bibliothèque. Après s'être salués, les deux hommes s'installèrent dans une partie baignée de lumière, au milieu des ouvrages. Le général ne semblait pas encore avoir digéré sa victoire / défaite de la veille toutefois, fidèle à sa parole, il était venu poursuivre leur travail. Yama étala sur la table basse les deux cartes ainsi que sa proposition.

« J'ai commencé à dresser un plan d'entraînement et je serai intéressé d'avoir votre opinion, » fit Yama.

Il préférait laisser de côté l'incident de la veille pour se concentrer sur leur tâche. Shimada se raidit, toutefois il joua le jeu.

« Laissez-moi voir, » fit-il en se penchant sur le document.

Il fut consterné en voyant l'écriture des Vites qui était illisible pour lui. Yama retint un soupir.

« Ah oui, je ne sais pas écrire dans votre langue. Je vais donc vous faire la lecture. »


Shimada s'abstint de commentaire. Ses yeux verts plissés, il écouta le résumé de son pair, les bras croisés. À la fin, il resta silencieux un bon moment.

« C'est ainsi que les soldats Vites s'entraînent ? s'enquit-il.

À peu près. J'ai dû adapter à vos méthodes.

Mmm, c'est particulier. »

Yama ne s'était guère attendu à un compliment.

« Cependant vous ne prévoyez aucun entraînement aux manœuvres ?

C'est parce que je n'y connais rien à vos manœuvres.

Oh ? Alors comment vont les commandants Vites pour diriger leurs troupes ?

Ils donnent des ordres directs. Il existe trois ou quatre types de manœuvres, c'est tout.

Mmm. »

Le général Shimada ne semblait pas comprendre comment on pouvait diriger efficacement une armée avec si peu.


Yama en profita pour lui demander son avis :

« Vous qui êtes versé dans les manœuvres, lesquelles sont les plus importantes selon vous ?

Toutes, » répondit spontanément l'autre homme.

Yama se retint de rouler des yeux. Il aurait dû s'attendre à une telle réponse !

« Il n'y en a vraiment pas qui vous semblent plus essentielles que d'autres ? insista-t'il.

Non. L'art de la guerre a été étudié pendant des millénaires. Les trente formations sont la quintessence même. Ce serait un sacrilège de les réduire. »

Trente manœuvres ? C'était encore pire que l'art du sabre ! Yama retint un lourd soupir.

« Dans ce cas, vous serait-il possible de me faire un résumé de ces manœuvres ?

Il faut des années pour en comprendre les subtilités et le moment opportun dans une bataille où il convient de les appliquer, objecta Shimada d'un ton presque outré.

Ça, d'accord. Mais je demande juste une description des manœuvres. C'est possible ? »

Shimada le fixa avec un début d'agacement puis céda.







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