Le Prince Solitaire 4 Épilogue

Épilogue : Le miracle


Kuji, simple moine au temple de Myūjin, accomplissait sa corvée quotidienne : prendre soin du corps du Second Prince. Il commença par lui faire une rapide toilette — ce n'était pas comme si l'enfant avait l'occasion de se salir ! Ensuite, il plia les bras et les jambes afin de conserver leur souplesse, et fit jouer chaque articulation du corps inerte. Il le revêtit ensuite d'une tunique simple, mais bien plus élaborée que celle que les prêtres portaient d'ordinaire. Après ça, il s'occupa de le nourrir.


Le corps se trouvait dans une salle à l'écart dans le temple, loin des éventuels curieux. Seuls quelques prêtres étaient au courant de la présence du Second Prince à Myūjin mais sinon, c'était le grand secret du temple depuis bientôt vingt-cinq ans. Cela aurait donc dû être un honneur pour Kuji d'être en charge du Second Prince et dans le secret, mais c'était tout le contraire : c'était sa punition pour ne pas s'être montré assez humble dans ses apprentissages. Kuji avait quarante-six ans. Ses parents l'avaient déposé au temple tout bébé car ils étaient trop pauvres pour nourrir une bouchée de plus. Le jeune adolescent s'était vite orienté vers la médecine et entretenait le rêve de succéder au prêtre guérisseur lorsque ce dernier rejoindrait le monde des esprits.


Hélas, Kuji avait l'esprit vif, trop vif, et n'hésitait pas à contredire son maître afin de défendre ses idées jugées farfelues. Alors depuis vingt ans, il devait s'occuper trois fois par jour du Second Prince, sans pour autant négliger ses autres corvées et apprentissages. C'était bien long pour une punition, aussi Kuji se demandait souvent si le grand prêtre Amonji ne trouvait pas ça plus commode de lui laisser cette tâche plutôt que de désigner un autre moine. Et Kuji avait certainement raison.

Œuvre originale écrite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé mon histoire !

Au début toutefois, il avait été fasciné d'un point de vue de la foi comme de la médecine. Les Dieux avaient apporté de nulle part le corps du Second Prince. C'était la preuve tangible et indubitable de leur pouvoir immense. Étrangement, le bébé était comme endormi et rien ne semblait pouvoir le réveiller. Le grand prêtre avait préféré attendre plus de directives de la part des Dieux avant de prendre une décision au sujet du bébé. Mais quelques semaines plus tard, Kurojū avait annoncé discrètement que le Second Prince était mort à la naissance. Le grand prêtre avait alors compris les intentions des Dieux et avait décidé de protéger le bébé aussi longtemps qu'il le faudrait.


Bien qu'inconscient, le bébé tétait le lait quand les prêtres firent appel à une nourrice. Il urinait et déféquait normalement aussi, bref le corps fonctionnait... mais c'était tout. Et il grandissait aussi, évoluant toutefois à un rythme un peu plus lent qu'un enfant ordinaire. Kuji avait longtemps cherché à percer le mystère de cet état, en vain. Du coup, son enthousiasme du début avait peu à peu disparu, et s'occuper du Second Prince était simplement devenu une corvée.


~*~


Après avoir nourri l'enfant — il était capable d'avaler les aliments coupés très fins ou les liquides si on les déposait dans sa bouche — Kuji récupéra les plats et se prépara à partir. Il entendit soudain un bruit sourd et se retourna. Le plateau lui échappa des mains dans un bruit sec et il retint un cri. Un immense amas d'ombres avait surgi au centre de la pièce, tandis qu'une pression intense se faisait sentir. Kuji recula jusqu'aux portes sans avoir la force de les ouvrir. Il se laissa glisser le long des panneaux jusqu'à être accroupi, les yeux écarquillés, la bouche ouverte en un cri inarticulé.


Parmi les ténèbres profondes, un éclat de lumière se dévoila subitement, une petite sphère qui brillait pourtant autant qu'un soleil. Kuji la fixa sans ciller et des larmes lui piquèrent les yeux. Les ombres se placèrent au-dessus de la sphère et la poussèrent vers le bas... vers le corps du Second Prince. La tension s'accrut dans l'air alors que la lumière paraissait résister, mais elle finit par se faire submerger et insérer de force dans le corps inerte de l'enfant. Le corps parut s'illuminer un moment et ses longs cheveux noirs s'élevèrent tout autour de lui, puis il reprit son aspect normal. Les ombres reculèrent alors dans les recoins de la pièce, et la pression disparut d'un coup.


Kuji s'entendit soudain hurler. En fait, cela faisait déjà un moment qu'il hurlait mais il ne s'était pas entendu. La gorge irritée, il se tut d'un coup, pantelant. Ses yeux se rivèrent sur le prince.

« Je devrais aller voir comment il va, songea-t'il avec hésitation. C'est... C'est mon devoir, après tout. »

Il avait toutefois bien du mal à se remettre debout. Il finit par marcher à quatre pattes, avançant vers le lit au centre de la pièce. Il se redressa à genoux pour voir l'enfant et fut rassuré — et quelque peu déçu — de ne constater aucun changement chez lui.

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Soudain, l'enfant inspira un grand coup. Kuji retomba en arrière sous l'effet de la surprise, avec un petit cri rauque. Le Second Prince ouvrit les yeux, de grands yeux dorés, et agita les bras autour de lui. Ses mains se crispèrent sur les draps tandis que son corps se tendait. Kuji n'attendit pas un moment de plus : il se remit debout sans même y penser et ouvrit les portes de la salle. Il cria aux deux prêtres de garde devant :

« Allez prévenir le Très Saint Amonji ! Il doit venir au plus vite ! »



Note de Karura : Vous pensez que c'est la fin de l'histoire ? Eh non, cela ne fait que commencer !






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