Chapitre Sept : L'incident du pont
Près de la plaine de Mara, sixième mois de l'année 2454
Haruni chevauchait déjà sur le dos de Yaji dans la forêt. Les Dieux ne le laissaient pas tranquille.
« Tu n’as quand même pas l’intention d’y aller seul ?! S’horrifièrent-Ils.
– Ne soyez pas stupides. Bakkushō ne va pas avoir d’autre choix que d’envoyer des soldats à ma poursuite. On n’aura plus qu’à attendre au pont.
– … Tu aurais pu t’y prendre autrement. »
Haruni renifla de dérision.
« Et comment ? Cet imbécile refusait de m’écouter.
– Tu aurais pu lui dire que Nous t’avons envoyé un avertissement.
– … Non merci. Les gens ont toujours eu tendance à me prendre pour un fou quand je parlais des voix dans ma tête.
– Nous ne sommes pas des voix, Nous sommes les Dieux !
– C’est encore pire, d’après moi ! »
Excédés, les Dieux ne lui dirent plus rien jusqu’à ce qu’il arrive au pont. La rivière faisait cinquante mètres de large et les eaux semblaient profondes. Le pont était le seul moyen de traverser dans les environs, alors la troupe ennemie n’avait pas d’autre trajet possible. L’ouvrage était en bois, assez large pour trois cavaliers de front, mais sa résistance laissait à désirer. Il n’était pas sur le point de s’écrouler non plus, mais si deux cents hommes voulaient passer, ils devraient y aller par petits groupes, ce qui prendrait un certain temps.
« Parfait, » songea Haruni.
Il descendit de Yaji et l’attacha à l’écart, avant de se poster dans les buissons à l’écart du pont, tout en le gardant visible. L’heure du repas était passée depuis un moment, mais il faisait encore clair. Haruni se cala contre un tronc, ses sabres à portée de main, ainsi qu’un arc et des flèches. Il était prêt à attendre toute la nuit s’il le fallait.
Il entendit soudain un bruit de galop, mais en provenance du sud. Il sourit devant le renfort qui arrivait enfin.
« Ils ont en mis du temps pour me trouver, » soupira-t’il.
Ils savaient pourtant où il se rendait ! Il se leva et se posta sur la route afin d’accueillir les soldats. Il se renfrogna soudain : pourquoi n’entendait-il qu’un seul cheval ? C’était un éclaireur ? Il eut rapidement la réponse en voyant Seiryū arriver, monté sur Senkō. Le Firal ne cacha pas son agacement en le voyant.
« Votre Altesse, le réprimanda-t’il dès qu’il s’arrêta. Votre façon d’agir est inacceptable !
– Peu m’importe votre opinion, répliqua sèchement Haruni. Où sont les autres ?
– Les autres ? fit Seiryū en feignant l’incompréhension.
– Vous n’êtes quand même pas venu seul me chercher ? » ironisa l’adolescent.
Seiryū ne dit rien mais haussa un sourcil. Haruni tiqua. Il n’entendait aucun autre cheval dans les environs. Non, ce n’était pas possible… Sa mine s’assombrit et il serra les poings en comprenant.
« Vous êtes vraiment venu seul ?!
– Même si vous êtes le Second Prince, ce n’est pas une raison pour…
– Pauvre imbécile. »
Seiryū en resta bouche bée. Même s’ils ne s’appréciaient pas, ils n’en étaient pas non plus au stade des insultes. Furieux, Haruni se mordit les lèvres en se tournant vers le pont. Il n’y avait toujours aucun signe de mouvement.
« Combien de temps avant l’attaque ? songea-t’il à l’intention des Dieux.
– Elle se produit de nuit, c’est tout ce que Nous savons. »
Il jeta un regard vers le ciel qui rougissait à l’ouest. La nuit ne tarderait plus, donc il n’avait plus le temps de retourner au campement chercher des hommes. Ce pont était un point stratégique, l’ennemi serait en position de faiblesse en le traversant. Une fois dans la forêt, ils pourraient se déployer et prendre l’avantage.
Œuvre originale écrite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé mon histoire !
Haruni regagna son poste d’observation. Seiryū, toujours vexé par l’insulte, descendit de cheval et le rejoignit, tenant sa monture par la bride.
« Votre petit jeu n’a rien donné, fit-il d’un ton sévère. Suivez-moi, nous retournons au campement.
– Quel petit jeu ? lança Haruni sans le regarder, les yeux rivés sur le pont.
– Vous vouliez attirer des soldats ici pour je ne sais quelle raison, sûrement un piège !
– Je vous l’ai dit, l’ennemi va tenter une attaque surprise en passant par ici. »
Seiryū partit d’un rire sarcastique.
« C’est un très mauvais mensonge. Vous pensiez vraiment que j’allais laisser le général Bakkushō sacrifier cinquante hommes pour vous ? »
À ces mots, Haruni se tourna vivement vers lui, incrédule.
« Quoi ?! »
Le Firal renifla, son hostilité visible.
« Le général était prêt à céder, mais je me suis dévoué pour venir vous récupérer. Alors ne faites plus d’histoires et venez bien gentiment. »
Même la deuxième fois, Haruni n’y croyait toujours pas.
« Vous dites que… c’est à cause de vous qu’il n’y a pas de renfort ?
– Des renforts pour quoi ? Il n’y aura pas d’attaque ce soir ! »
Haruni le fixa un long moment sans rien dire, tremblant de rage, puis il se reprit et se détourna.
« J’espère que vous avez raison. Vous pouvez dégager maintenant.
– Qu-quoi ? »
La patience de Seiryū était à bout devant l’obstination du bâtard, sans parler de son manque de respect. Pour qui se prenait-il, par les Dieux ?
« Dégagez, répéta simplement Haruni. Vous ne me servez à rien. »
L’ultime fil de la patience du Firal claqua. Il lâcha la bride de Senkō, s’avança vers le Second Prince et le saisit rudement par le bras.
« Vous allez venir… »
Il n’eut pas le temps de finir sa phrase qu’il ressentit un coup violent au visage. Il tituba en arrière, choqué.
« Vous… vous m’avez frappé ! »
Il ne s’était pas attendu à ça ! Il aurait cru que l’adolescent allait crier, se débattre, mais pas lui envoyer un coup de poing au visage ! Et c’était qu’il avait de la force, en plus !
Furieux, Seiryū s’avança de nouveau mais cette fois, Haruni dégaina son sabre.
« Je reste ici, » déclara-t’il fermement.
Seiryū en resta de nouveau bouche bée. Décidément, ce sale gosse n’en démordait pas !
« Votre comportement est inadmissible ! L’Empereur en sera informé, soyez-en sûr !
– Peu importe, » répliqua Haruni comme si la menace ne l’effrayait guère.
Ils restèrent un moment à se défier du regard. Aucun ne voulait céder. Cependant, Seiryū était réticent à l’idée de dégainer son sabre à son tour. S’il venait à blesser Haruni, ce serait très grave : malgré le comportement désagréable du Second Prince, ce serait Seiryū qu’on blâmerait. En dépit de tout cela, le Firal était sur le point de dégainer son épée lorsque…
Œuvre originale écrite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé mon histoire !
Un hennissement se fit entendre, mais il ne provenait ni de Yaji, ni de Senkō. Seiryū se dit d’abord que le général Bakkushō était finalement revenu sur sa décision, mais Haruni se détourna de lui pour observer le pont. L’ennemi était là, comme annoncé par les Dieux.
« Que…
– Chut ! » lui intima l’adolescent sans se tourner vers lui.
Vexé, le Firal n’était pas stupide pour autant. Il s’avança à côté du Second Prince et fut choqué de voir des éclaireurs ennemis traverser le pont en regardant autour d’eux. Heureusement que Haruni avait pris soin de se dissimuler à l’écart de la route et à distance du pont. Les éclaireurs poursuivirent leur route, l’un d’eux restant au pont. Peu de temps après, une troupe de soldats de Dekita arrivèrent. Il était impossible de dire combien ils étaient car ils s’avançaient en une longue file, deux par deux.
Dans les premiers rangs, on pouvait distinguer un jeune homme d’environ soixante ans, aux longs cheveux orange et à l’allure noble. Haruni sentit les Dieux s’agiter de nouveau :
« Lui, il est important ! Tu dois le capturer !
– Avec quels hommes ? » songea Haruni avec ironie.
Confus, les Dieux se turent. Le Second Prince soupira et commença à chercher la meilleure façon d’agir dans cette situation des plus défavorables. À côté de lui, Seiryū avait le visage figé de stupeur.
« Ils sont là… Par les Dieux, c’était donc vrai ? »
Haruni ne prit pas la peine de commenter. Évidemment, Seiryū avait cru qu’il mentait et là, il était confronté à son erreur. Haruni n’était cependant pas du genre à triompher et en plus, il avait bien d’autres soucis en ce moment !
Les premiers soldats s’engagèrent prudemment sur le pont, tenant leurs chevaux par la bride. Le bois craqua légèrement dans la nuit silencieuse, mais l’ouvrage ne semblait pas menacer de céder. Toutefois, cela prendrait du temps de faire passer tout le monde et Haruni en profita pour réfléchir à toute vitesse.
« Dans mon état actuel, je peux sans doute affronter… quinze ou vingt hommes. »
S’il laissait passer suffisamment d’hommes pour que sa cible en fasse partie, il pourrait ensuite mettre le feu au pont en utilisant discrètement ses pouvoirs. C’était encore jouable ! Il sentit soudain une main saisir son bras.
« Votre Altesse, il faut immédiatement retourner au campement pour les avertir, chuchota Seiryū.
– D’accord, allez-y. »
Seiryū commença à reculer lorsqu’il se rendit compte d’une chose :
« Vous venez aussi ! fit-il.
– Pas question. »
Le Firal se retint de jurer devant l’entêtement de cet adolescent.
« Vous ne comptez pas les affronter tout seul, quand même ?!
– Pas tous. J’ai un plan. Vous pouvez partir, je n’ai pas besoin de vous ! »
Seiryū étouffa un cri d’indignation. Un plan ? Mais qu’est-ce que ce gamin s’imaginait ?
« Je ne peux pas vous laisser seul ! Et s’il vous arrivait malheur ?
– Votre père vous félicitera et il ne sera sûrement pas le seul. »
Le Firal rétrécit les yeux. Ce n’était pas la première fois que Haruni lui lançait une telle réplique avec autant de désinvolture.
Œuvre originale écrite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé mon histoire !
« Restez si ça vous donne bonne conscience, ajouta Haruni, mais n’intervenez pas !
– Vous êtes vraiment impossible ! »
Haruni l’ignora et se concentra de nouveau sur la progression des ennemis. Le jeune homme aux cheveux orange allait être le prochain à passer. Néanmoins, il y avait déjà une trentaine de soldats de leur côté de la rivière.
« Tch’, songea Haruni, je vais vraiment devoir utiliser mes pouvoirs. »
Il saisit son arc et guetta le bon moment. Cependant, quand il voulut faire appel au feu, rien ne se passa ! Inquiet, il chercha en lui et ce fut alors qu’il se rendit compte qu’il était bien trop en colère à cause de Seiryū pour manipuler le feu. Cela demandait un état d’esprit calme et composé, tout le contraire de ce qu’il était en ce moment !
L’adolescent jeta un regard rageur au Firal qui continuait de marmonner entre ses dents. Décidément, ce Seiryū n’avait pas fini de contrarier ses plans ! Sans le pouvoir du feu, Haruni n’avait aucun moyen de détruire le pont. Il maîtrisait les ombres, mais c’était trop difficile de les manipuler de nuit, même pour les Dieux. Il aurait fallu une source de lumière plus brillante que la lune mais puisqu’il ne pouvait pas faire appel au feu, il était impuissant. Serrant les dents, il reprit ses réflexions alors que sa cible avait presque franchi le pont. Si seulement il pouvait calmer sa colère, mais ce n’était pas aussi simple, surtout quand la raison de son énervement était juste à côté de lui. Seiryū avait vraiment le don de l’énerver… S’énerver…
« Firal Seiryū, murmura-t’il, redites-moi encore ce que le général Bakkushō allait faire. »
Seiryū lui jeta un regard interloqué, mais répondit tout de même :
« Il voulait envoyer des hommes à votre poursuite, mais je lui ai dit que ce serait inutile. Après tout… »
La colère monta en Haruni au fur et à mesure du récit de Seiryū. Il la concentra avec maladresse, puis se dirigea vers le bord de l’eau à quelques pas de là. Il s’accroupit, plongea sa main gauche dans la rivière, puis relâcha sa colère.
« Arrête ! firent les Dieux. Tu vas…
– Oh, fermez-la ! » songea-t’il rageusement.
Il entendit Seiryū pousser une vague exclamation et entretint sa fureur en pensant à lui.
Tout à coup, une immense vague se forma, haute comme deux hommes, et se rua vers le pont. Elle s’abattit sur la structure en bois qui ne résista pas et se disloqua, les planches et cordages emportés par le courant. Haruni connut un soulagement… puis une douleur atroce au bras gauche. Il eut l’impression que son bras explosait et sentit même des gouttes humides sur son visage. La souffrance fut si violente qu’il ne put même pas crier. Paralysé, il arrivait à peine à respirer, les yeux écarquillés, le corps tendu. Au bout d’une éternité, il tourna doucement la tête sur le côté, certain de ne plus avoir de bras. Mais il vit son membre à sa place, la main encore dans l’eau à présent calme. Quand il tenta de le bouger, la douleur s’intensifia et il se mordit les lèvres pour ne pas s’évanouir.
Derrière lui, Seiryū fixait le pont détruit avec stupeur, sans faire attention à lui. Les ennemis n’en revenaient pas non plus, mais ils ne soupçonnaient pas un seul instant que cela puisse être volontaire, pas quand ils avaient pu voir la vague dévastatrice de leurs propres yeux. Pour eux, c’était… une catastrophe naturelle, peut-être une forte pluie en amont qui aurait provoqué un afflux d’eau extraordinaire ? En tout cas, leur détachement était à présent séparé en deux par une large rivière et le pont le plus proche était à une heure de là. Leur plan était sérieusement compromis.
« Votre Altesse, murmura soudain Seiryū. Cette vague… »
Haruni se força à se relever, tentant de faire abstraction de la douleur dans son bras gauche. Il verrait cela plus tard, il y avait nettement plus urgent pour le moment. Une quarantaine de soldats à vaincre, même avec l’effet de surprise, cela allait être compliqué. Qui plus est, il n’était plus en état d’utiliser son arc.
Œuvre originale écrite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé mon histoire !
Son regard se posa sur Seiryū, clairement réticent à l’idée de lui demander son aide. Il connaissait déjà la réponse.
« Allez prendre mon arc et tâchez d’en tuer un maximum, » fit-il tout de même.
Il dégaina ensuite son sabre avec difficulté, puis s’élança vers les soldats ennemis. Seiryū en resta interloqué.
« Il ne va pas les combattre, quand même ?! »
Mais c’était exactement l’intention du Second Prince.
« Il a perdu la tête ! »
Malgré cela, son devoir lui dicta d’aller à son secours. Dégainant son sabre, il partit à la suite de l’adolescent.
« On nous attaque ! » s’écria un des premiers soldats qui aperçut Haruni.
Il n’eut guère le temps d’en dire plus, la gorge tranchée. Les autres dégainèrent aussitôt leurs sabres, reprenant le cri d’alerte. Ils s’attendaient à des volées de flèches, des soldats ennemis s’élançant vers eux en nombre… aussi restèrent-ils confus devant leurs deux assaillants. Deux contre quarante ? Sérieusement ?! La confusion augmenta d’autant plus lorsque leurs torches révélèrent clairement l’identité d’un des deux fous suicidaires.
« C’est l’un des princes, capturez-le ! » ordonna le jeune homme aux cheveux orange qui semblait être le meneur.
C’était plus facile à dire qu’à faire. Haruni frappait pour tuer et ne gaspillait pas son énergie en mouvements inutiles. Qui plus est, il n’hésitait pas à frapper du poing ou du pied, un style de combat efficace mais peu princier ! De son côté, Seiryū était plus stylé, mais ne se croyait pas pour autant dans un duel. Il visait pour tuer ses adversaires tout en essayant de rejoindre le Second Prince. Dans sa tête, il l’injuriait copieusement et s’en voulait aussi de ne pas avoir laissé ce fou courir seul à sa perte. Dans son état, Haruni aurait dû être vite capturé, mais les Dieux intervinrent du mieux qu’Ils purent grâce aux ombres formées par la lueur des torches des ennemis, bloquant les pieds de ses adversaires au bon moment, l’avertissant d’une attaque dans le dos… Il finit par se retrouver à court d’adversaires et mit un temps à comprendre ce qui se passait. Aussitôt, il regarda dans tous les sens et vit Seiryū en train de se battre avec sa cible.
« Ne le tuez pas ! » ordonna-t’il.
Seiryū était blessé à divers endroits, ses bras semblaient peser des tonnes et il ne parvenait plus à penser correctement. Quand il entendit la voix de l’adolescent, il fut à la fois soulagé de le savoir en vie et de nouveau furieux contre lui. Haruni combattit les trois soldats restants pendant que Seiryū se concentrait sur son adversaire qui avait un bon niveau au sabre.
« Firal Seiryū, le reconnut ce dernier, je n’aurais jamais pensé vous rencontrer ainsi ! »
Seiryū n’avait plus la force de parler et il se contenta d’attaquer de nouveau. Son talent lui permit de désarmer son adversaire malgré les conditions extrêmes, puis il l’assomma avec la poignée de son sabre.
Il n’eut pas le temps de se réjouir que des flèches sifflèrent autour de lui.
« Baissez-vous ! » lança Haruni en s’abritant derrière un tronc.
De l’autre côté de la rivière, le reste des soldats n’était pas intervenu jusque là de crainte de blesser leurs compagnons. Mais à présent, ils avaient pris leurs arcs et tiraient sans hésiter. Seiryū saisit le bras de son adversaire inconscient et le tira avec lui derrière les arbres tous proches.
« Et maintenant ? » lança-t’il au Second Prince.
Il était à bout de souffle, en sueur et couvert de sang, en partie le sien. Mais il était vivant.
« Je vais chercher les chevaux, » répondit Haruni.
Œuvre originale écrite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé mon histoire !
Il revint avec les montures, toujours en évitant de se mettre à couvert. De l’autre côté de la rive, entre les flèches qui pleuvaient toujours, certains soldats avaient commencé à retirer leurs armures pour se jeter dans l’eau et tâcher de traverser à la nage. Haruni indiqua à Seiryū le jeune homme inconscient :
« Prenez-le avec vous.
– Vous voulez qu’on le ramène ?! s’ébahit le Firal.
– Oui. »
Seiryū n’avait même plus la force de jurer.
« Aidez-moi à le mettre sur Senkō, » fit-il simplement.
Haruni lui lança un regard avant de s’exécuter. Même à deux, ce fut compliqué. Seiryū put enfin monter à son tour, imité par Haruni qui eut plus de mal.
« D’autres plans pour ce soir ? railla le Firal malgré son état.
– Retournons au campement, » fit simplement Haruni.
Seiryū renifla avant de lancer Senkō au galop, s’assurant que le Second Prince le suivait bien.
Au bout d’un quart d’heure au même rythme, Haruni dévia soudain son cheval qui vint heurter Senkō.
« Attention ! » cria-t’il.
Seiryū ne comprit pas tout de suite, mais vit ensuite un homme bondir d’un arbre pour atterrir devant eux.
« Un des éclaireurs ennemis, » expliqua Haruni entre ses dents.
L’homme déploya sa main devant lui et Seiryū aperçut le reflet de la lune sur des dagues à lancer. Il regarda devant lui et repéra quatre dagues plantées dans le sol à quelques pas de là. Voilà pourquoi Haruni l’avait poussé.
Le Second Prince bondit de sa selle. Il tituba quelque peu à la réception, mais dégaina son sabre et se rua vers leur attaquant. Il évita les lames lancées — grâce à l’aide des Dieux — et lui entailla le torse d’un coup de sabre. L’éclaireur tomba à terre et Haruni lui enfonça le sabre dans le cœur pour être bien sûr de sa mort. Il regarda ensuite autour de lui, à l’affût.
« Votre Altesse, que…
– Ils étaient trois éclaireurs, » fut la réponse.
Seiryū se tendit à son tour, une main sur son sabre et inspectant les alentours.
Tout à coup, deux formes surgirent des buissons pour attaquer Haruni. Ce dernier se défendit comme il le put. Seiryū descendit de cheval pour se précipiter à son aide mais le temps qu’il arrive, le Second Prince avait déjà éliminé un de ses agresseurs. Quant au second, il tomba soudain à terre dans un râle, révélant plusieurs dagues plantées dans son dos. Haruni fixa les arbres et une personne apparut de derrière un tronc. C’était un de leurs soldats. Il s’avança et mit un genou à terre devant l’adolescent.
« Votre Altesse, la route est libre jusqu’au campement.
– Bien, tu peux disposer. »
Le soldat s’enfonça de nouveau dans la forêt.
Œuvre originale écrite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé mon histoire !
Seiryū s’avança, le visage rempli de questions mais aussi de suspicion. Le Second Prince avait-il des agents parmi leurs soldats ? Voilà qui confirmaient les doutes du général Kenryū ! Haruni surprit son regard et se renfrogna aussitôt.
« C’est une Ombre, expliqua-t’il sèchement. Vous avez entendu parler d’eux, je suppose. »
Les yeux de Seiryū s’écarquillèrent : l’Armée des Ombres ! Son existence était bien connue de tous, mais auréolée de mystère. Gardes du corps, espions ou assassins, leur loyauté envers l’Empereur était inconditionnelle et ils ne répondaient qu’à lui. Kenryū assurait exceptionnellement la transmission des ordres. Ce rôle aurait dû revenir au Second Empereur, mais étant donné que Tegami était seul, il avait confié cette responsabilité à la personne en qui il avait le plus confiance.
Voilà qui expliquait bien des choses.
« Ce sont eux qui vous ont mis au courant de l’attaque ? » devina Seiryū.
Les Ombres devaient agir dans le plus grand secret, même le général Bakkushō ne devait pas savoir qu’elles se cachaient parmi ses troupes, quoiqu'il s’en doutait naturellement. Haruni lança un regard au Firal avant de dire simplement :
« On repart. »
Seiryū en resta muet un moment, puis l’observa remonter à cheval avec difficulté.
« Vous êtes blessé ? » comprit-il enfin.
L’adolescent lui jeta un regard peu amical.
« Ce n’est pas le moment ! »
Le Firal acquiesça et se remit en selle à son tour, vérifiant que le jeune homme inconscient et allongé en travers du cheval ne risquait pas de tomber. Ils se remirent en route.
Quand ils arrivèrent au campement sans avoir rencontré d’autres soucis, Seiryū remercia chaudement les Dieux. Les gardes de service avaient d’abord tiré leurs sabres en entendant les bruits de sabot, mais ils prirent vite un air médusé.
« Firal Seiryū… Vot-votre Altesse ? »
Seiryū ne pouvait qu’imaginer son état lamentable à la lueur des torches. Il se tourna vers Haruni et grimaça en voyant le sang sur l’armure du Second Prince, ainsi que son air très pâle.
« Qu-que s’est-il passé ? s’enquit un des gardes, alarmé.
– Une embuscade au nord, répondit Seiryū. C’est réglé.»
Le garde qui était prêt à donner l’alerte hocha la tête. Haruni intervint alors :
« Une partie des troupes ennemis est restée sur l’autre rive. Ils risquent peut-être d’attaquer d’ici quelques temps. Restez quand même sur vos gardes. »
Les gardes acquiescèrent nerveusement.
Seiryū se tourna vers Haruni et suggéra :
« Votre Altesse, nous devons en informer le général Bakkushō. »
Haruni eut un sourire ironique, mais qui manquait de force. Seiryū craignait qu’il ne s’effondre à tout moment.
« Nous devrions peut-être d’abord appeler le médecin ? hasarda-t’il. Vous êtes…
– Le général nous attend, » le coupa Haruni en faisant avancer sa monture.
Seiryū soupira et le suivit sans plus insister. Ils descendirent de cheval à la périphérie des tentes et confièrent leurs montures à des soldats. Quant au prisonnier, il n’avait toujours pas repris connaissance.
« Que faisons-nous de lui, votre Altesse ? demanda un garde.
– Attachez-le quelque part et surveillez-le bien. Je m’occuperai de lui quand il aura repris connaissance.
– À vos ordres ! »
Œuvre originale écrite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé mon histoire !
Comme il faisait nuit depuis longtemps, la plupart des soldats étaient en train de dormir, alors ils ne croisèrent que les patrouilles de garde. Il y avait encore de la lumière sous la tente du général Bakkushō et un soldat annonça leur présence. Le général était toujours en armure et n’avait pris aucun repos. Il semblait même nerveux et agité. Quand il vit les deux jeunes gens arriver, son regard vacilla un peu, avant qu’il ne prenne un air sévère.
« Votre Altesse, votre attitude est inadmissible ! Vous serez dorénavant consigné dans votre tente et interdiction de… »
Il se tut soudain en prenant conscience de l’apparence du prince et ses yeux s’écarquillèrent.
« Vous… que s’est-il passé ?
– L’ennemi a tenté de franchir le pont de la rivière Morishiwa au nord, répondit Haruni d’un ton las, dépourvu de tout triomphalisme.
– Et… vous avez pu vous enfuir alors ? Où sont-ils à présent ?
– Morts. Les autres ont dû rebrousser chemin. »
Le général était plus qu’incrédule et chercha confirmation auprès de Seiryū. Ce dernier acquiesça et Bakkushō déglutit, visiblement agité.
« Je… je vois. Dites-moi ce qui s’est passé.
– Général, intervint Seiryū, cela ne pourrait-il pas attendre ? Le danger est passé et nous ne sommes pas en état de faire un rapport complet tout de suite. »
L’excitation du combat et de la fuite commençait à s’estomper pour faire place à une grande fatigue. Le Second Prince n’était en guère meilleur état.
« Je comprends, Firal Seiryū. Retournez dans vos tentes, je vais faire chercher le médecin.
– Pas besoin pour moi, j’ai ce qu’il faut pour me soigner, » répliqua Haruni en se retournant et en quittant la tente.
Le général ne se formalisa même pas de ce nouveau manque de respect. Seiryū le salua et sortit à son tour.
Commentaires :