Chapitre 7

Rimera pencha la tête sur le côté. Elle semblait avoir du mal à reconnaître tout de suite son fils à cause de sa forme instable de fantôme. Ce n’était pas non plus bizarre parce qu’elle était morte sans même avoir pu serrer Nigel dans ses bras, lui qui n’était alors qu’un nouveau-né.

« Mère, c’est moi. »

[Mère,] marmonna clairement Rimera.

Puis la silhouette blanchâtre devint un peu plus nette et son regard se fit plus lucide. Rimera fixa directement Nigel.

[Mon garçon.]

« Oui, c’est Nigel. »

[Etna, mon bébé…]

La voix de Rimera devint triste. Elle ne cessa de répéter :

[Etna, Etna, Etna…]

Elle baissa la tête tout en marmonnant. C’était vraiment très bizarre parce que la nuque fine et blanche était pliée dans un angle qui aurait été impossible pour un être humain.

[Où est Etna ?]

Sans doute parce qu’Etna avait vécu plus longtemps avec elle, il avait plus d’importance à ses yeux. Nigel pouvait comprendre, alors il ne fut pas trop déçu. Il se sentit simplement désolé pour sa mère qui recherchait son frère décédé.

« Mère, mon frère… »

Rimera releva subitement la tête. Le cou qui était à présent tordu en deux endroits était si effrayant que Nigel prit peur, même s’il s’agissait de sa mère. Voyant Nigel hésiter, Rimera agita les lèvres :

[Etna n’est pas dans son cercueil.]

« Ah ? »

[Etna n’est pas dans son cercueil…]

« Mère, que dites-vous… ? »

Son grand frère n’était pas dans son cercueil.

Nigel avait pourtant assisté à ses funérailles… Non, vraiment ? Il n’arrivait pas à s’en rappeler clairement. À l’époque, Nigel avait eu une forte fièvre à cause du choc, alors ses souvenirs pouvaient être confus.

Malgré ça, il se rappelait très bien de la tombe d’Etna. C’était son devoir de déposer des fleurs sur les tombes de son père et de son grand frère dès qu’il se rendait au duché.

Le fait que son frère ne se trouvait pas dans sa tombe devait être un délire raconté par un fantôme. Il aurait dû normalement s’en convaincre, mais quelque chose l’embêtait : la dernière phrase dans la fenêtre d’informations de Rimera.

Que voulait dire cette histoire de secret ? S’agissait-il d’un secret que même Nigel, le duc, ignorait… ?

Rimera fixa Nigel qui était confus. Elle agita soudain la tête.

[Mais qui es-tu ?]

« C’est moi, Nigel. Je suis votre second fils, mère. »

[Toi…]

La femme ouvrit de grands yeux comme pour mieux voir. Mais très vite, elle secoua la tête avec agitation.

[Non, tu, tu…]

Tandis qu’elle marmonnait, le visage de Rimera se tordit peu à peu en une expression sombre. Puis elle se jeta sur Nigel.

Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !

« Mon seigneur ! » s’écria Kei qui avait observé la situation en attendant, sur ses gardes.

Mais il était trop tard pour intervenir. Il avait réussi à éviter la première attaque de Rimera mais cette fois, il n’arriverait pas à éviter la seconde…

Subitement sous ses yeux, Rimera disparut dans un nuage de fumée.

« Que… ! »

Confus quant à ce qui venait de se produire, Kei commença à crier, puis il s’effondra tout à coup comme une marionnette dont on venait de couper les fils. C’était une situation familière et évidente.

Et un homme surgit hors des ténèbres avec une noblesse absolue.

« Inas. »

C’était Inas Idenbach, son bien-aimé.

« Vous allez bien ? »

Je croyais que tu ne pouvais pas venir ce soir…

Même si Inas venait de le sauver, Nigel ressentit plutôt de la colère en cet instant que du soulagement. Il regarda l’endroit vide un peu nerveusement.

« Qu’est-ce que tu as fait ? Qu’est devenue ma mère ?

– Je l’ai juste chassée d’ici parce qu’elle a tenté de vous attaquer.

– Où est-ce que tu l’as chassée ?

– Pourquoi vous êtes dans un tel état ? Nigel, calmez-vous. »

Inas s’approcha de lui et le saisit fermement par les bras. Ce ne fut qu’à ce moment que Nigel se rendit compte qu’il tremblait.

De la confusion et une inexplicable nervosité le poussèrent à insister :

« Je t’ai demandé où est ma mère ?

– Je pense qu’elle est quelque part dans le manoir, mais je ne peux pas la retrouver tout de suite.

– Tu ne peux vraiment pas ?

– Pas pour le moment, mais je pourrai le faire demain soir. Alors calmez-vous, Nigel. »

C’était un peu douteux, mais Nigel hocha la tête au lieu de l’interroger plus en détails. Puis son regard se posa sur Kei qui gisait par terre.

« Je ne l’ai pas tué, fit Inas avant même que Nigel ne pose la question. Je l’ai juste rendu inconscient un moment. Quand il se réveillera, il faudra lui donner une bonne excuse.

– D’accord… »

Sa tête l’élançait. Il continua de fixer l’endroit où s’était tenue Rimera.

« Inas.

– Oui ?

– Je dois retourner au duché… Il faut que je vérifie la tombe de mon frère.

– La situation au nord est bien trop instable en ce moment. Ce serait dangereux. »

À ces mots étranges, Nigel leva la tête pour regarder Inas. L’expression sur le visage du chevalier était la même que d’habitude, mais cela rendait les choses encore plus étranges.

« Comment cela peut-il être dangereux ? Tu es avec moi de toute manière.

– Même si je viens avec vous, les gardes vont trouver ça bizarre.

– Ça va aller. Allons-y. »

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Inas ne répondit pas. Une étrange et sombre certitude remonta le long des jambes de Nigel pour s’emparer totalement de lui. Il fit une grimace et regarda son bien-aimé.

« Inas. »

Ce dernier ne répondit pas à cet appel qui était comme un avertissement. C’était comme s’il savait ce que pensait Nigel et ce qu’il allait dire, et qu’il tâchait ainsi de l’éviter.

Nigel serra les poings. Son corps se mit à trembler violemment sous le coup de la colère et la confusion.

« C’est quoi le problème avec les gardes ? Tu n’as qu’à les tuer tous. Ce n’est pas comme ça que tu fais d’habitude, hein ?

– Ce n’est pas ça, Nigel.

– Alors dis-moi, Inas, qu’est-ce qui t’inquiète ? »

Bien que Nigel avait posé la question, il en était intimement convaincu :

« Tu sais quelque chose, pas vrai ? »

Se pouvait-il qu’Inas, qui avait dit avoir fait toutes sortes de choses pour remplir sa jauge de Réussites et qui avait vécu très longtemps, aurait pu ignorer qu’il y avait le fantôme de sa mère dans le manoir ? Se pouvait-il que lui, qui pouvait consulter les fenêtres d’informations, aurait simplement négligé les mots Récompense spéciale : Obtenir la quête cachée <Le secret de la famille ducale> ?

Impossible.

S’il avait eu affaire à ça au moins une fois, Inas aurait toujours pu essayer de découvrir la vérité dans la session suivante. Quel que soit ce secret, Inas avait forcément dû vouloir s’approcher de la vérité.

« Nigel. »

La voix douce, comme s’il le réprimandait ou voulait lui donner un bonbon, était plutôt suspicieuse. À en juger par la réaction d’Inas, il était clairement en train de cacher quelque chose à Nigel.

« Dis-moi tout, Inas.

– Ce serait mieux que vous ne sachez rien. »

La manière dont Inas parlait, comme si c’était pour le bien de Nigel, le mit en colère. Il n’avait absolument pas l’intention de se laisser prendre par l’enrobage sucré d’Inas, alors il secoua fermement la tête.

« C’est à moi seul d’en juger. Dis-moi tout maintenant.

– Nigel.

– Et vite. »

Inas le regarda comme s’il avait affaire à un enfant entêté qui refusait d’entendre raison.

Quand Nigel lui jeta un regard encore plus féroce, Inas n’eut pas d’autre choix que de parler :

« Votre grand frère, Etna, n’est pas dans son cercueil. »

Il s’y attendait déjà, vu que sa mère l’avait dit, mais un frisson le parcourut quand il en eut la confirmation.

« Pourquoi mon frère n’est pas dans son cercueil ? Je suis sûr qu’il a bien été enterré lors de ses funérailles.

– Le corps que vous avez récupéré à l’époque n’était plus qu’une coquille vide, l’âme d’Etna se trouvait ailleurs. Après l’enterrement, le corps a traversé l’espace pour rejoindre l’âme. »

Bien qu’il s’était déjà préparé mentalement après avoir entendu que son grand frère n’était pas dans son cercueil, les mots qui suivirent furent incroyables et au-delà de la compréhension de Nigel.

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« Tu dis que son âme est allée ailleurs ?

– En réalité, Etna n’est pas mort d’une maladie. Il se trouve qu’il a découvert par hasard le donjon que Kei avait trouvé en dernier dans les montagnes : le Temple de l’Éternité. Et il a été maudit là-bas. »

En jetant un regard de regret à un Nigel choqué, Inas poursuivit :

« Etna est endormi dans le Temple de l’Éternité depuis ce jour. Il est probablement encore en état de sommeil en ce moment même. Si certaines conditions sont réunies, il pourra se réveiller en tant que serviteur d’Odelarth, le dragon de lumière.

– Impossible, imp… »

Le mot ‘résurrection’ résonna bien plus dans les oreilles de Nigel que tous les autres mots réunis.

« Alors mon grand frère est encore en vie. »

Son cher grand frère était toujours vivant. Dès qu’il apprit ça, une bouffée d’émotions déferla et envahit Nigel. Il voulait voir son grand frère tout de suite car cela faisait si longtemps.

« C’est à présent un serviteur d’Odelarth, Nigel. »

Inas fut celui qui versa de l’eau froide sur l’enthousiasme de Nigel.

Le dragon Odelarth, qui était censé être au service du dieu maléfique Ederta, avait été scellé par Glarus il y avait fort longtemps. Cette entité titanesque qui invoquait tous les deux ans une quantité innombrable de monstres était scellée dans les terres de la région au nord qui longeait le duché de Magnus. Odelarth était l’ennemi juré de Nigel, duc de Magnus, et le mal absolu qui restait dans le monde.

Intellectuellement, Nigel savait qu’Inas disait vrai, mais ses émotions prirent le contrôle.

« Il est encore en vie !

– Nigel. »

Cette voix froide et implacable diminua l’excitation de Nigel.

« Comme vous le savez si vous avez bien observé le fantôme de votre mère, réveiller Etna est un événement qui n’apparaît que lorsque certaines conditions bien précises sont remplies. C’est un boss caché qu’on ne peut affronter qu’après avoir rempli toutes les conditions requises, et il s’agit d’un ennemi qu’il faut vaincre à tout prix.

– Je suis pourtant sûr que tu l’as déjà réveillé malgré tout ça. »

Inas ne répondit pas tout de suite. Cela mit Nigel en colère et le soulagea à la fois. Il taisait la vérité mais comme il l’avait promis à Nigel, il ne lui mentait pas. Alors si Nigel soulignait la vérité et posait les bonnes questions, il obtiendrait ses réponses.

« Dis-le moi. Tu as bien dû réveiller mon frère et nous nous sommes vus.

– Oui, en effet.

– Que s’est-il alors passé ?

– Il n’y a rien de bon à attendre de ces retrouvailles. Il ne peut pas coexister avec nous.

– Rien ne s’est produit. »

Nigel et Inas tournèrent tous les deux la tête quand cette autre voix les interrompit subitement. C’était nul autre que Kei.

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Note de Karura : Qui avait oublié que Kei était dans la pièce, inconscient ?

Quand Inas et Nigel sont ensemble, c’est vraiment comme s’ils étaient dans leur petit monde à eux deux.

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