Chapitre 5
Toutefois, il ne pouvait guère demander à Inas ce qu’il faisait pendant qu’il épousait Danica. C’était un homme qui réagissait toujours à l’extrême et qui n’avait plus qu’une mince coquille intacte sur lui. Même si Nigel ne savait pas exactement comment il allait réagir, une chose était certaine : la vie de Danica serait en danger. Nigel avait beau aimer Inas, il ne lui faisait pas confiance.
En plus, il n’était même pas sûr d’obtenir une réponse même s’il posait la question.
Et même en dehors des sentiments actuels de Nigel, Inas était du genre à hérisser le poil comme une mère chat protégeant son petit dès que quelqu’un s’approchait d’un peu trop près de Nigel. Il suffisait que Nigel montre la moindre affection envers quelqu’un pour qu’Inas intervienne aussitôt. Danica était donc la personne dont il aurait dû le plus se méfier, mais en le voyant si tranquille… Inas ne semblait donc pas savoir que Danica et Nigel s’étaient mariés.
Cela conduisit Nigel à une supposition.
Se pouvait-il qu’ils se soient mariés à un moment du jeu où Inas n’était pas encore possédé ?
La moindre petite chose pouvait changer le cours de l’avenir. Il semblait que la présence d’Inas avait changé énormément de choses.
Dans un monde où le <Inas Idenbach> actuel n’existait pas, le Nigel d’origine avait épousé Danica. Cependant, quand il avait rencontré Inas et était tombé amoureux de lui, cette route menant au mariage avait été complètement bloquée.
C’était une explication assez convaincante. Bien qu’il était absolument impossible de le vérifier.
« À quoi pensez-vous, Nigel ? »
Ce chevalier qui ne manquait pas d’air saisit le menton de Nigel. Ses yeux étaient remplis de doutes et de jalousie. Nigel répondit nonchalamment :
« Rien de spécial.
– Rien de spécial ?
– Je pensais à toi.
– Ne me mentez pas, » répondit Inas d’un ton assez certain.
Les sourcils de Nigel se froncèrent en signe de mécontentement.
« Pourquoi je te mentirais ? Tu te bases sur quoi pour dire ça ?
– À cause de ça, » murmura tranquillement Inas.
Il passa le bout de ses doigts sur le visage de Nigel. Les doigts qui touchaient ses yeux descendirent lentement. Nigel frémit involontairement à ce contact délicat qui semblait le chatouiller.
« Mmm, » gronda-t’il inconsciemment quand les doigts d’Inas effleurèrent ses lèvres.
Inas sourit et retira sa main.
« Si vous étiez vraiment en train de penser à moi, vous ne feriez pas une tête si effrayante.
– Je faisais une tête qui faisait peur à voir ?
– Bien sûr, ça ne me faisait pas peur à moi. C’était un air très sérieux.
– Et je fais quelle tête quand je pense à toi ? »
Il savait qu’il était en train de creuser sa propre tombe en posant cette question impulsive. Inas eut un large sourire. Son sourire était toujours très beau mais aujourd’hui, il était particulièrement splendide. Ses yeux, qui étaient terrifiants quand ils luisaient parfois de folie, étincelaient à présent et brillaient comme de l’obsidienne. Ses lèvres s’élevaient juste en une douce ligne en-dessous des joues au teint rosé et sain. Le printemps était déjà là dans la capitale et on pouvait voir des fleurs éclore partout mais aux yeux de Nigel, le sourire d’Inas était bien plus beau que n’importe quelle fleur.
Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !
Tandis que Nigel le contemplait d’un air complètement charmé, Inas posa les mains sur les joues du garçon d’un air taquin.
« Voilà la tête que vous faîtes, » murmura-t’il avec amusement.
Avant même que les joues de Nigel n’aient eu le temps de lui brûler, Inas pressa leurs lèvres ensemble jusqu’à ce qu’un léger bruit se fasse entendre, puis il recula. C’était un baiser espiègle, mais les joues de Nigel rougirent et se mirent à le brûler comme en feu à cause des actions d’Inas.
« Arrête, ne te moque pas de moi.
– Je suis toujours sérieux pour tout ce qui concerne le seigneur Nigel, » répondit effrontément Inas.
Il baissa les mains, un léger rire se mêlant à sa voix. Il n’avait pas usé trop de force en posant les mains sur les joues de Nigel, pourtant ce dernier pouvait encore sentir ses mains. Il frotta ses joues brûlantes dans l’espoir de les refroidir.
« Alors, à quoi pensiez-vous ? insista Inas.
– Tu y tiens vraiment… Bon, je pensais à cette histoire de fiancée. »
Les sourcils d’Inas se froncèrent de mécontentement, comme si la réponse de Nigel ne lui plaisait pas du tout. Nigel se hâta de rajouter :
« Je me disais juste que ce serait pénible de me retrouver avec tout un défilé de fiancées potentielles.
– Si ce n’est que ça, ne vous en faites pas. La sécurité du manoir n’est pas encore totalement au point. Il va bien y avoir un ou deux domestiques qui vont parler et bientôt, la rumeur comme quoi vous avez fait une crise circulera largement. »
Nigel avait effectivement perdu connaissance sans même avoir pu terminer correctement la conversation avec son invitée. Aucun père ne voudrait donner sa fille à un garçon maladif, même s’il s’agissait du second fils du duc de Magnus. En effet, s’il arrivait quoi que ce soit, la jeune femme se retrouverait coincée avec un époux malade et impotent, ce qui lui gâcherait la vie.
C’était une bonne chose, sauf que Nigel n’appréciait guère qu’Inas en rit comme si ça lui faisait plaisir. De toute manière, n’était-ce pas bien connu que la santé de Nigel n’était pas bonne ? Nigel lui fila un coup de pied à la cheville, ce qui fit soupirer l’adolescent.
« Il suffirait que ces jeunes demoiselles sachent que vous êtes si violent pour s’enfuir à toutes jambes.
– Qui est violent ?! C’est de ta faute ! De toute manière, ça ne te fait même pas mal…
– Qu’est-ce qui est le plus important : l’intention de faire mal ou bien la douleur en elle-même ? »
Il n’avait pas tort, mais cela restait méchant. Quand Nigel le foudroya du regard, Inas soupira.
« Peu importe, car il suffit que n’importe qui voit votre visage pour avoir envie de vous épouser, seigneur Nigel, quelles que soient les circonstances. Vous êtes vraiment trop splendide.
– Non, je ne suis pas si beau que ça, alors je ne risque pas de me marier, » grommela Nigel d’un ton morose.
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Mais Inas ne l’écouta pas. Comme un lunatique qui avait vécu si longtemps, il tomba dans sa propre fantaisie et devint aussitôt abattu.
« J’aimerais être une femme, fit-il. Si j’étais une femme… Je pourrais vous épouser tout de suite, sans avoir à m’embêter à modifier les lois en frappant les nobles opposés sur la tête et en vous faisant reine. »
Tu as vraiment déjà fait ça ?
Sans se soucier du choc de Nigel, Inas poursuivit calmement, comme pour lui-même :
« Pour commencer, quand je suis arrivé au duché, ça aurait pu être en tant que fiancée et non chevalier d’escorte.
– Euh… Mais dans ce cas, je ne serais pas tombé amoureux de toi tout de suite, non ?
– Pourquoi ça ?
– Parce que je préfère les hommes. »
C’était une évidence. Pour qu’il tombe amoureux à l’âge de douze ans du premier garçon qu’il voyait, cela voulait clairement dire que les goûts de Nigel penchaient plus vers les hommes. Bien qu’il n’était pas du genre à tomber souvent amoureux, toutes les personnes par qui il aurait pu se laisser tenter ne serait-ce qu’un moment avaient été des hommes. Même les rivaux dont Inas avait fait toute une histoire à propos de ces drapeaux plantés étaient des hommes.
Quand il avait vu cette illusion où il épousait Danica, il avait ressenti un sentiment très fort d’incompatibilité. Il ne s’attendait pas à l’épouser elle, mais rien que le fait qu’il épousait une femme était bizarre en lui-même.
Inas parut cependant choqué devant ce fait évident.
« Qu’est-ce qui te choque autant ? demanda Nigel.
– Même si je devenais une femme, cela ne changerait pas pour autant qui je suis, non ? »
Cela serait normal de lui répondre oui. Cependant, Nigel avait peur que s’il hochait la tête, Inas serait capable de découvrir le moyen de se transformer en femme et qu’il changerait vraiment de genre.
« Je t’aime en tant qu’homme, affirma-t’il.
– En tant qu’homme, » murmura Inas inutilement sombre.
Puis il releva la tête et jeta un regard de défi à Nigel :
« Et si je devenais un chat mâle, que feriez-vous ? »
Nigel fut pris par surprise par cette remarque à laquelle il ne s’attendait pas du tout.
« Qu’est-ce que tu racontes encore comme bêtises ?
– Vous ne m’aimeriez pas si j’étais un chat mâle ?
– Je, si, je t’aimerais. J’aimerais ce chat… Mais ce ne serait pas comme maintenant, non ?
– Moi, j’aimerais le seigneur Nigel même s’il devenait une femme, un nain ou un géant, un chat, une fleur au bord de la route, ou même un tendom. »
Un tendom était un monstre qui ressemblait à un visage humain qu’on aurait écrasé. Il avait une odeur caractéristique qui était très pestilentielle, comme des vêtements trempés de sueur qui auraient mariné dans du lait tourné pendant une semaine. Il avait l’honneur d’occuper le haut de la liste des monstres que les chevaliers évitaient à tout prix.
Si Nigel devenait un monstre pareil ? Il ne tenait pas du tout à imaginer ça. Nigel secoua la tête en conservant un air sérieux.
« Non, tu n’as pas besoin de m’aimer à ce point… Pourquoi faut-il toujours que tu penses à des choses si extrêmes ? Ce que nous avons maintenant, c’est largement suffisant.
– Ce n’est pas suffisant, répondit Inas d’un ton morne. Alors je vous en prie, aimez-moi afin que je sente que c’est suffisant… »
Il murmura doucement ces derniers mots, de crainte qu’ils ne se brisent à tout moment. Même si sa voix était devenue un peu plus grave une fois la mue passée, elle était plus aiguë et moins forte que la voix d’un adulte. On aurait dit un petit animal gravement blessé.
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Inas prit la main de Nigel et déposa un baiser sur chaque doigt. Ses mouvements étaient légers et doux, comme s’il ne voulait pas blesser ces petits doigts. Cependant, les émotions dans son regard étaient plus intenses que n’importe quoi d’autre au monde.
« Seigneur Nigel, je… »
Sa voix était faible et n’arrivait pas à aligner correctement les mots. Cela exprimait toute sa sincérité quand il disait qu’il aimerait Nigel quelle que soit son identité. Sans s’en rendre compte, Nigel tendit la main vers lui.
Puis il songea à se raviser. Il était impossible que cet homme qui pouvait poignarder Nigel et aller bien puisse être blessé juste par quelques plaisanteries.
« Toi, tu… N’essaie pas de m’attendrir !
– Mmm. »
Inas attrapa la main que Nigel voulait retirer. Il frotta ses lèvres sur le dos de la main, puis recula.
« Vous m’avez percé à jour. »
En un instant, l’attitude d’Inas changea complètement. L’atmosphère triste autour de lui se dissipa aussitôt. Abasourdi par son attitude éhontée, Nigel le pointa du doigt.
« Toi, tu n’as donc pas honte… ?!
– Il n’y a rien de honteux ou pas. Je suis toujours sincère. Bien sûr que le seigneur Nigel n’irait pas m’aimer si j’étais une femme, un nain ou un géant, un chat, une fleur au bord de la route ou bien un tendom.
– Inas… »
L’adolescent eut un léger sourire en le voyant froncer les sourcils, troublés.
« Je plaisante. Il est hors de question que je devienne quelqu’un d’autre de toute manière. Le seigneur Nigel aime mon visage et mon corps, alors pourquoi je m’en débarrasserais ? Je dois profiter au maximum de mes atouts. »
Qu’est-ce que tu veux dire ? Je serais juste attiré par les visages ?…
Cependant, Nigel ne pouvait pas complètement nier au vu des circonstances qui avaient eu lieu dans le passé et le présent. Le visage du garçon rougit de honte pendant un moment.
Puis subitement, une question surgit dans son esprit.
Le <Inas Idenbach> devant lui était la personne qui s’était emparée du corps du Inas Idenbach d’origine. Alors quand Inas n’était pas encore ce <Inas Idenbach>, il devait avoir une toute autre apparence que maintenant.
Était-ce pour cela qu’Inas avait abordé le sujet ? Au cas où son apparence changerait totalement ?
Nigel n’avait jamais été très curieux au sujet de l’Inas d’origine. Le monde de Nigel était là et l’Inas qu’il connaissait serait et resterait à tout jamais <Inas Idenbach>. On pouvait plutôt dire qu’il avait consciemment bloqué toute pensée à ce sujet parce qu’il le fallait bien. Même si Inas ne reprenait pas son apparence d’origine, il ne devait pas avoir oublié sa véritable essence.
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Nigel n’y songeait que maintenant, alors il regretta sa réponse un peu cavalière. Il devint plus sérieux :
« Bien sûr… Peu importe ton apparence, tu restes toi. Même si tu deviens moins beau que maintenant… Je t’aimerai toujours.
– Que voulez-vous dire ? Ne vous en faites pas, je resterai un homme avec un visage et un corps au goût du seigneur Nigel pour le restant de ma vie, » répondit calmement Inas.
Il haussa les épaules comme si ses paroles n’avaient pas d’importance.
Peut-être que Nigel s’en faisait de trop pour rien. Il en fut un peu déçu, mais il était content qu’Inas n’ait pas été blessé par sa réponse.
Inas tendit de nouveau la main vers Nigel. Cependant, contrairement à tout à l’heure, il posa légèrement la main sur le front du garçon, puis la baissa.
« J’ai l’impression que vous avez de nouveau un peu de fièvre à cause de votre agitation. Ce n’est rien de grave, mais veuillez vous reposer.
– Et à cause de qui tout ça… ? » grommela Nigel.
Malgré tout, il se mit docilement assis sur le lit.
« Je vais vous chercher votre repas tout de suite, alors mangez bien avant de dormir.
– Très bien, » répondit Nigel en s’allongeant.
Inas revint rapidement, nourrit Nigel de ses propres mains puis prit attentivement soin de lui.
Note de Karura : J’ai dû choper trois caries rien qu’en lisant ce chapitre si mielleux. Aaah…
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