Chapitre 4

Dans son rêve, Nigel lisait un livre.

Ce n’était pas vraiment lire. Il regardait juste une page du livre jusqu’à en avoir les yeux rougis.

La couleur de la couverture du livre que tenait Nigel était d’un noir étrange. On pouvait voir des sortes d’interférences bizarres semblables aux fenêtres d’informations qui se mélangeaient au noir et jaillissaient comme des étincelles. Ces interférences étaient d’une couleur intense qui donnait l’impression de brûler tout ce qu’elles touchaient, sauf qu’elles disparaissaient sans affecter quoi que ce soit.

C’était bizarre.

Nigel n’avait encore jamais vu ce livre, pourtant il avait la sensation de le connaître.

C’était peut-être un livre qu’il avait vu autrefois et dont il ne se souvenait plus.

Cependant, l’écriture dense sur la première page était illisible. La seule chose qu’il arrivait à déchiffrer, c’était le titre de ce livre :

Le titre de ce livre était Save Data. Bien qu’écrit dans un langage inconnu, Nigel pouvait naturellement le lire. Était-ce parce qu’il s’agissait d’un rêve ou bien une compétence ? Ou alors en avait-il déjà entendu parler auparavant ? Nigel put en tout cas comprendre de quoi il s’agissait : c’était une annale des sessions de ce jeu.

À partir du moment où il avait compris ces mots, ses souvenirs d’il y avait longtemps furent ramenés à la surface de force.

« Parce que tout ceci n’est qu’un jeu. »

C’était une voix calme qui avait toujours défini des limites.

« Je vais l’enregistrer ici. Bon, ça n’a vraiment pas beaucoup d’importance, pourtant… »

La voix ne termina pas sa phrase. Les paroles dans le souvenir de Nigel devinrent inaudibles. Qu’avait-il dit ensuite ?

Peut-être que ces paroles ne voulaient rien dire et qu’il était inutile d’achever une phrase sans le moindre intérêt.

Ce monde en lui-même n’avait aucun intérêt après tout. C’était toujours aussi vain que bâtir un château de sable sur une plage pendant une tempête. Cela ne tenait qu’un bref moment, avant de s’effondrer. Même si on recommençait des dizaines de milliers de fois, le château s’écroulait autant de fois.

Dans un monde qui n’avait pas de sens, les choses n’avaient aucune importance.

Dans ce rêve, Nigel, qui ignorait cela, tremblait un peu. Ses doigts agités se tendirent vers la couverture du livre. Il tenta de le remettre sur l’étagère, mais le livre tomba par terre.

« Aaah… »

Avec un faible gémissement, le visage pâle rempli de désespoir et de tristesse, le Nigel du rêve baissa la tête. Nigel put voir à travers ses yeux le sol taché du sang de quelqu’un. Nigel ferma les yeux et s’assit par terre.

« Sauve-moi, Inas… »

J’ai tellement peur.

Le Nigel du rêve se prit la tête entre les mains. Il haleta et se plia en deux comme s’il avait du mal à respirer.

«  Inas, Inas, Inas. »

Comme s’il ne connaissait que ce nom, il appela Inas. Soudain, le Nigel du rêve redressa la tête. Face à la terreur qui avait envahi ce visage…

Le vrai Nigel rouvrit les yeux.

Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !

« Seigneur Nigel. »

Dès qu’il ouvrit les yeux, la première chose qu’il vit fut le visage d’Inas. Nigel ne put résister à son désir ardent et il tendit les bras pour les passer autour du cou de l’adolescent.

« … Seigneur Nigel ? »

Presque par réflexe conditionné, Inas rendit son étreinte à Nigel en l’appelant d’une voix interrogative. Mais Nigel n’avait pas la force de lui répondre. Il se contenta de serrer plus fort ses bras autour de l’adolescent. En clignant des yeux, des grosses larmes coulèrent sur ses joues sans qu’il ne puisse les retenir.

L’angoisse de son rêve semblait l’avoir contaminé. Il ignorait ce qui se passait mais dans ce rêve, Nigel avait été vraiment désespéré. Même au beau milieu de ses tourments, l’existence d’Inas avait empli tout son être.

Inas lui manquait. Il avait envie de le serrer dans ses bras et de l’embrasser. Ses pensées étaient focalisées sur Inas mais en même temps, il désespérait car l’autre homme n’était pas là.

… Que s’était-il passé ? Nigel n’avait aucune idée de la situation au moment de sa vision. Pour qu’il soit aussi angoissé alors qu’il n’avait fait que compatir avec les émotions de son autre lui en rêve, il avait vraiment dû se produire quelque chose de terrible.

« Inas… »

Nigel frotta sa tête contre la joue et l’épaule d’Inas. Comme s’il était embarrassé, l’adolescent tenta de le repousser. Alors que Nigel continuait de s’accrocher à lui de plus belle, il ne put que soupirer et il murmura doucement :

« Seigneur Nigel, sire Estora et le médecin sont là… »

Ce fut seulement à ce moment que Nigel reprit ses esprits.

Surpris, il repoussa Inas. Ce dernier recula avec un sourire gêné. Après ça, Nigel put voir Roshan, qui fait une drôle de tête, et Léona, sa doctoresse.

« Ah, euh, hum, ça fait longtemps que j’ai perdu connaissance ?

– Vous avez dormi pendant une demi-journée. Vous avez fait un cauchemar ? » demanda Léona avec un sourire.

Nigel commença à secouer la tête, gêné, puis se ravisa et hocha la tête.

« Ah oui, en quelque sorte… Je veux dire, j’ai rêvé d’un fantôme.

– Un fantôme ?

– Oh oui.

– Et le jeune seigneur Nigel a très peur des fantômes.

– C’est bien ça. »

Léona suivit ce que racontait Nigel, bien qu’il se montrait assez vague. Elle le regardait d’un air gentil, mais le torse de Nigel était comprimé par la tension. Il ne voulait pas que cette fois encore, son père oblige Inas à prêter serment, menaçant de faire nécroser ses parties génitales. Peu importait qu’Inas soit capable de défaire ce sort.

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« S’il vous plaît, ne dites rien à mon père. J’ai eu tellement peur que j’ai pris Inas dans mes bras…

– Pas de problème, je n’ai aucune raison de lui raconter ça, fit Léona.

– Ça me va aussi, » renchérit Roshan.

Malgré tout, Nigel ne se sentait pas rassuré. Il soupira même après que les deux adultes lui aient fermement répondu plusieurs fois. Léona rassura tranquillement Nigel qui était nerveux :

« Pourquoi vous êtes aussi anxieux ?

– Parce que je ne veux pas que mon père s’inquiète.

– Ne vous en faites pas, jeune maître, parce que je ne dirai rien. Maintenant, rallongez-vous confortablement. Vous vous êtes subitement évanoui. Vous n’êtes pas encore complètement rétabli.

– Hum, oui… »

Nigel se rallongea docilement. Cependant, malgré la douleur ressentie quand il s’était évanoui, il allait bien à présent. De son côté, Roshan avait observé en silence Nigel et gardait un air grave.

« Dame Léona, pouvez-dire de quoi souffre le jeune maître ?

– En fait, je ne connais pas la cause exacte, désolée. Je pense qu’il vaudrait mieux consulter un prêtre.

– … Je suppose que vous avez raison, » grommela Roshan.

C’était devenu plus difficile de voir le prêtre qui s’occupait en général de Nigel, certainement depuis que le garçon était devenu le messager de Dieu.

« Si je dois y aller, alors j’irais, intervint Nigel. Mais je ne vais pas si mal que ça, alors ce ne sera pas utile. »

Quand Nigel s’exprima calmement, Léona prit un air grave.

« Pas si mal que ça ? Vous avez perdu connaissance ! Et mademoiselle Danica a même dit que vous sembliez énormément souffrir !

– Oh, ça va vraiment beaucoup mieux maintenant… Au fait, qu’est devenue mademoiselle Danica ?

– Elle est retournée chez elle, » répondit Roshan d’un ton sombre.

Nigel s’était évanoui au moment où il avait appris cette histoire de fiançailles. Même si les choses ne s’étaient pas bien terminées avec Danica, cette situation allait forcément devenir confuse. Heureusement dans ce malheur, Nigel n’avait plus besoin de dissuader son père de lui trouver une fiancée.

« Mais je vais vraiment bien, insista Nigel. Je ne suis pas du genre à m’entêter à prétendre ne pas être malade.

– Que voulez-vous dire par être têtu ? fit Léona. Mais c’est vrai que vous avez l’air d’aller bien… Reposez-vous pour le moment et nous en reparlerons plus tard. Prenez ce médicament. »

La doctoresse lui tendit un bol rempli d’un liquide brun épais. Nigel allait vérifier de quel médicament il s’agissait, mais il se ravisa et vida le bol d’un trait. Le goût était vraiment affreux.

Léona se leva après avoir confirmé qu’il avait bien pris son médicament.

Elle fit :

« Je vais demander à ce que vous ayez un repas léger après. Heureusement qu’il reste du temps avant l’audience avec le roi. Profitez bien de ces jours pour vous reposer.

– Entendu. »

Roshan, qui allait sortir à la suite de Léona, fit un clin d’œil à Inas qui gardait un air impassible.

« Tu restes ici pour veiller sur lui.

– À vos ordres, messire, » répondit calmement Inas.

De son côté, Nigel rougit. Roshan retint un soupir en le regardant.

« Avant que vous veniez ici, son Excellence le duc était extrêmement inquiet.

– Oui, j’imagine.

– Il est bien plus inquiet que tout ce que vous pouvez imaginer, jeune seigneur ! Si une chose pareille se produit de nouveau, vous pouvez être sûr qu’il viendra ici au triple galop ! »

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Ah non, impossible… Mon père pourrait vraiment faire ça ?

Bien que Nigel était rempli de doute, Roshan conservait un air grave. Nigel ne pouvait donc pas prendre ça comme une plaisanterie alors que quelqu’un d’aussi sérieux le fixait en silence.

« … Vous êtes sûr ? demanda-t’il tout de même.

– Oui, absolument sûr et certain ! Alors vous devez prendre soin de vous.

– Bien, je vois. Je vais faire plus attention et je vais bien me reposer aujourd’hui. Alors dites-lui de ne pas s’inquiéter.

– Entendu. »

Ce ne fut que là que Roshan parut un peu tranquillisé.

Dès que Roshan et Léona partirent, Inas grimpa rapidement dans le lit. Le fait de le revoir rappela à Nigel la manière honteuse et horrible à voir dont il venait de se comporter. Ses joues devinrent rouges et brûlantes. Peu importait que cela avait été à cause de ce rêve, il ne pouvait pas croire qu’il s’était mis à pleurer et à faire le bébé devant les autres. Cela aurait déjà été embarrassant à mort pour un garçon de douze, treize ans, alors c’était encore pire pour Nigel qui était mentalement adulte.

« Seigneur Nigel…

– Oh, j’ai perdu la tête. Je suis sûr que tout le monde va le savoir…

– Vous n’avez rien à craindre. Aucun de ces deux-là n’est du genre à parler à tort et à travers, » le réconforta Inas en l’embrassant légèrement.

Il semblait que ce qui était honteux et humiliant pour Nigel l’avait rendu très heureux. Ignorant le garçon qui voulait le repousser, Inas s’accrocha à lui.

« Plus important, Nigel. Vous vous sentez bien ? J’ai été surpris que vous perdiez ainsi connaissance. »

Nigel le regarda, mais renonça à trouver toute trace de doute ou de folie sur son visage. Il était inutile de supposer que les inquiétudes et questions d’Inas servaient à chaque fois à repérer un coupable. Nigel supposa qu’il était sincèrement inquiet pour lui.

« J’ai juste encore un peu mal.

– Juste un peu, c’est tout ?

– Mmm. »

Cela semblait avoir un rapport avec Glarus, mais Nigel ne dit rien. Il ne voulait pas voir la situation empirer comme la dernière fois : cela avait été très effrayant de voir Inas pressé de tuer Nigel juste pour réinitialiser ce monde.

« Dis, Inas.

– Oui ? »

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Nigel ouvrit la bouche, prêt à parler de son rêve d’épouser Danica, mais il ne sut trouver les mots et hésita.

Cette illusion semblait très lointaine tout à coup. Elle manquait de réalité, comme si cela n’avait été vraiment qu’un simple rêve.

C’était vrai, Nigel avait toujours aimé seulement Inas. Il ne pouvait pas croire qu’il aurait pu épouser une autre personne que lui. Pourtant, c’était clair que Nigel avait vécu ça. Alors il était un peu perdu.

Inas vit la tête que faisait Nigel, puis il saisit sa main glacée et la pressa. Ce fut peut-être grâce à ce contact que l’esprit de Nigel se calma peu à peu.

« J’ai déjà été marié à quelqu’un d’autre ? » demanda-t’il.

Aussitôt, le visage d’Inas se tordit en une grimace violent.

« Aaah… ! »

Nigel poussa un léger cri de douleur alors qu’Inas lui broyait la main sans s’en rendre compte. Même s’il ne déploya pas tout son pouvoir, la force d’un apprenti chevalier qui allait bientôt avoir dix-sept n’était pas rien.

« Pardon, j’ai été surpris… »

Confus, Inas retira aussitôt sa main, mais la main de Nigel était déjà rouge. L’adolescent employa aussitôt un sort de soin, cependant la douleur ne disparut pas d’un coup. Alors que Nigel avait les larmes aux yeux, Inas parla d’un ton grave :

« Dois-je couper ma main ?

– Quoi ?!

– Après tout, c’est la main qui a osé faire du mal au seigneur Nigel… »

Nigel eut un rire ironique.

« Alors tu peux me tuer, mais pas me faire du mal ?

– C’est totalement différent. Est-ce que je ne vous élimine pas sans la moindre douleur ? C’est parce qu’il s’agit d’un acte nécessaire.

– … »

Nigel se demandait où diable était la différence, mais Inas semblait bien clair sur ce point. Nigel renonça à tenter de le dissuader.

« Non, ce n’est rien. C’est moi qui ai dit quelque chose de stupide.

– Nigel, vous songez à vous marier ? » demanda Inas avec un sourire.

C’était un peu douteux qu’il ne montre aucune envie de meurtre en mentionnant le mariage de Nigel. On aurait dit qu’il faisait ça exprès pour cacher ses intentions.

Au vu de la conversation jusqu’à présent et de la direction qu’elle prenait… Il y avait 100 % de chances que Danica meurt si Nigel ne répondait pas correctement. Il secoua donc la tête avec résolution.

« Non, non… Absolument pas ! D’ailleurs, Danica a bien dit elle aussi qu’elle ne voulait pas se marier.

– Alors pourquoi vous demandez tout à coup une chose pareille ? Si vous avez déjà épousé quelqu’un d’autre… » demanda Inas tout en arborant à nouveau un sourire aimable qui n’était pas de circonstances.

Pendant ce temps, il avait légèrement éloigné ses mains de Nigel, peut-être parce qu’il s’en voulait encore de ce qui venait de se passer.

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Nigel haussa les épaules, regardant cet adolescent qui semblait soucieux de son bien-être, quoiqu’en suivant des normes un peu arbitraires.

« C’est juste que… Je viens d’y penser : est-ce que me marier ne compterait pas comme une Réussite ?

– Il n’y a que le personnage principal qui peut accomplir des Réussites concernant l’amour. Alors ne songez même pas à une chose aussi inutile.

– Ah bon, mais je n’allais pas le faire pour de bon. Je demandais juste.

– Ne faites jamais ça, absolument pas.

– Mmm, je ne le ferai pas. »

Inas insista encore quinze fois pour être sûr que Nigel ne le ferait pas, puis il s’arrêta seulement à ce moment. Nigel, quant à lui, avait certains doutes.

Il était strictement impossible qu’Inas laisse tranquillement Nigel se marier sans réagir. Alors que faisait-il donc tandis que Nigel épousait Danica ? Telle était la question.

Note de Karura : Le pauvre Inas doit étouffer de jalousie !

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