Chapitre 6

Bien que Nigel se sentait touché de l’affection de Schumach, il estimait que ce n’était pas une bonne manière de penser.

S’il s’agissait simplement de mettre en priorité les siens par rapport aux autres, tout le monde était comme ça dans le fond.

Sauf que Schumach était du genre extrême. C’était ce genre de limite qui l’avait plongé dans le désespoir à la mort de sa famille. En effet, même si cela avait été tragique, cela n’aurait pas dû être une raison pour le pousser à conquérir le monde.

Bien que Schumach semblait solide en apparence, il était incapable de se plier et se brisait donc facilement. Si Schumach avait été attaché à d’autres personnes hormis sa famille, il n’aurait pas choisi de rassembler l’épée de Glarus pour conquérir le monde.

En fait, même en rassemblant les dizaines de milliers de sessions de Nigel et les cent mille sessions d’Inas, il n’y avait pas eu une seule fois où Schumach ne s’était pas lancé à la recherche des morceaux d’épée, alors Nigel savait que ce ne serait pas facile.

Au départ, il avait abordé Schumach juste dans le but de réaliser cette exception. Mais après plusieurs années passées ensemble, ils étaient devenus proches et à présent, Nigel souhaitait sincèrement son bonheur. C’était en plus la dernière session, alors il serait impossible de revenir en arrière.

« Pourquoi tu me regardes comme ça ? »

Schumach parut un peu agacé par le regard mélancolique et rempli d’espoir de Nigel. Ce dernier haussa les épaules.

« Pour rien, juste… Prends toujours bien soin de toi, Schumach.

– Qu’est-ce que tu racontes tout à coup… ? C’est plutôt à toi de prendre bien soin de toi ! C’est le comble.

– Mmm, je vais prendre soin de moi. Rien de mal ne va arriver. Alors même si les choses deviennent difficiles plus tard, ne renonce pas, Schumach.

– Je ne renoncerai pas. Alors toi non plus, ne laisse pas tomber.

– Bien sûr que non… »

… Cela dit, il avait déjà par le passé abandonné tout et refilé le fardeau à un autre.

Schumach jeta presque un regard noir à Nigel, puis lâcha un lourd soupir. Ses yeux qui dévoilaient clairement ses sentiments compliqués examinèrent Nigel en détail.

« Ne t’en fais pas pour moi. Mais toi…

– Quoi, moi ?

– Si le duc te martyrise, dis-le moi. Je ferais de mon mieux. »

Nigel eut un sourire crispé. Pourquoi diable l’autre disait ça… ?

Bien sûr, Nigel s’était senti un peu martyrisé la nuit dernière mais au bout du compte, cela avait été plutôt agréable. Il était impossible qu’Inas le martyrise vraiment. Si on regardait ça dans l’ensemble, c’était plutôt Nigel qui avait martyrisé Inas et le problème était que ce dernier en avait accepté bien trop de sa part.

Toutefois, les autres verraient sans doute une histoire totalement différente.

Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !

Le fils cadet du duc de Magnus, qui était maladif depuis l’enfance, avait été privé de son titre de duc par un homme qui avait été embauché comme son chevalier d’escorte et il n’avait pas pu revenir au duché avant l’âge adulte. Bien qu’il détenait le titre de Messager de Dieu, cette position était seulement honorifique, sans réel pouvoir. Pire encore, il avait dû accomplir plusieurs missions un peu partout malgré son corps fragile.

Si encore Inas avait été un duc incompétent, Nigel aurait eu une chance de récupérer son titre. Hélas, Inas était considéré comme le duc le plus compétent de tous les temps, alors c’était pratiquement impossible.

… Telle était l’opinion sur Nigel qui circulait parmi la noblesse.

Pour ces nobles, dont le but ultime était d’hériter du titre et de la fortune familiale, Nigel était vraiment dans une situation pitoyable. Luther avait entendu cette rumeur et avait souvent exprimé son désaccord. Mais puisqu’il se trouvait loin au nord, les gens de la capitale continuèrent de parler à leur guise.

Quant à Schumach, Nigel lui avait clairement expliqué que cela avait été son propre choix de renoncer au titre et qu’il était parvenu à un accord avec Inas. Mais depuis le début, Schumach avait tendance à imaginer ce que bon lui semblait sans écouter les explications de Nigel… Alors comme les nobles, il éprouvait de la pitié pour Nigel et trouvait ça injuste.

Schumach devait être complètement abattu à présent. Avec la mort de Luther et la position de Nigel diminuée en conséquence, il avait cru que le jeune homme pourrait se faire un nom en sauvant la cité mais là, il venait de se faire dévorer par Inas.

Objectivement, c’était vraiment agaçant. Mais en même temps, Nigel se sentit d’humeur malicieuse et demanda exprès, les yeux étincelants :

« Même si je te le dis, tu pourras vraiment m’aider ? Alors même que ton adversaire serait le duc de Magnus, l’épéiste le plus fort de tout le royaume ?

– Bien sûr ! répondit Schumach sans la moindre hésitation.

– Mmm, merci. Je t’en suis reconnaissant, mais comment tu pourrais m’aider ? »

Schumach fronça les sourcils et fut bien embêté car il ne s’attendait clairement pas à ce que Nigel lui demande ce qu’il pourrait faire. Il était impossible que cet homme, qui avait été écarté du pouvoir à cause de son manque de tact, puisse concocter un plan plausible.

« Je pourrais dévoiler la véritable nature du duc.

– Il n’y a aucune preuve puisque Inas est quelqu’un de bien en réalité. »

Schumach, qui n’avait jamais apprécié le duc, fronça les sourcils, créant des rides profondes.

« Il est gentil ? Tu dis ça parce qu’il te menace ou quoi ?

– Il est impossible qu’Inas me menace. Il est comme un saint à mes yeux.

– …

– Je m’inquiète plutôt du fait qu’Inas soit trop naïf et se laisse facilement berner.

– … »

Le regard éberlué de Schumach se posa sur lui. Avec le chevalier qui faisait une tête comme s’il lui demandait s’il était sérieux, Nigel répondit calmement :

« Quoi ? C’est la vérité. »

Schumach se passa une main dans la nuque, comme si sa pression sanguine était en train de monter en flèche.

Même si Nigel avait un peu exagéré pour taquiner Schumach, ce n’était pas non plus complètement faux. Inas était un héros sans égal dans ce monde dont la vie avait été complètement ruinée, tout ça parce qu’il était tombé amoureux d’une ordure comme Lee Jiwoon. En plus, sa vie n’avait pas été gâchée qu’une fois, il avait souffert plusieurs dizaines de milliers de fois.

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Pendant que Nigel était en train de méditer en silence sur le salaud qu’il avait été, Schumach aboutit à la conclusion que Nigel se payait sa tête et il se plaignit :

« Ce n’est pas bien de se moquer des gens. Ce n’est pas vraiment ton opinion. Tu t’es disputé avec le duc à chaque fois…

– Oui bon, j’ai exagéré un peu, d’accord ? Mais c’est tout de même vrai dans une certaine mesure.

– Si tu es vraiment sérieux, je pense qu’il vaudrait mieux faire venir ton médecin.

– Non, vraiment, Inas est gentil. Il a toujours accepté tout ce que j’ai fait sans jamais discuter.

– Comment ça, le duc a toujours tout accepté ? C’est lui qui a pris ce qui te revenait de droit !

– Comme je l’ai déjà dit, je lui ai laissé le duché parce que je n’en avais pas besoin.

– Alors reprends-le.

– Ça ne se fait pas, tu ne trouves pas ? Comment oserais-je reprendre quoi que ce soit à Inas ? » murmura Nigel d’un ton sérieux.

Schumach reprit aussi un air sérieux. Il donnait l’impression d’essayer de deviner ce que Nigel avait bien pu faire de mal à Inas, mais il était impossible qu’il y arrive, étant donné qu’il ne se rappelait que de cette session.

Nigel continuait de se sentir frustré de devoir s’inquiéter tout seul dans son coin. Alors après un moment d’hésitation, il confia honnêtement :

« En fait, j’ai fait quelque chose d’affreux à Inas. C’est une horrible erreur que je ne peux pas réparer. Mais Inas n’en sait rien. Alors je me demande ce que je dois faire.

– Continue à faire comme si de rien n’était, » répondit tout de suite Schumach sans même réfléchir.

Nigel aurait bien aimé être aussi nonchalant que lui.

« Mais je ne veux pas continuer à faire semblant, protesta-t’il. Je me sentirais bien trop honteux de faire ça. Je regrette énormément ces erreurs que j’ai commises par le passé.

– Alors dis-lui. Parle franchement et demande pardon au duc.

– Même si ça veut dire informer Inas de ce que j’ai fait ?

– Quelle que soit la faute que tu as commise, je suis sûr que le duc te pardonnera.

– C’est encore pire s’il me pardonne. Comment pourrait-il me pardonner une chose pareille ? Ce que j’ai fait, c’était…

– Eh bien, montre-toi méchant pour qu’il ne te pardonne pas.

– Mais s’il finit par me haïr ? »

Cette conversation tournait en rond. Comme l’avait dit Nigel, il n’y avait pas vraiment de réponse à ça. Il n’aimait pas la première option, il n’aimait pas non plus la deuxième. Le fait qu’Inas pouvait continuer sans jamais rien savoir du moment que Nigel ne disait rien continuait de le faire hésiter.

Impitoyable, Schumach fronça les sourcils en voyant que Nigel ne faisait que donner des réponses déterminées.

« Ne serait-ce pas pour le mieux ? Tu crois vraiment que j’allais vous souhaiter d’être heureux ensemble ?

– … »

Effectivement, c’était vrai.

« Je ne sais pas ce que tu as bien pu faire pour commencer, mais… Si je devais juger de manière objective ce que tu viens de dire, le fait que tu continues à te taire au sujet de ton erreur, cela revient à dire que tu mens au duc. Tu dis que tu as commis une seule erreur mais avec ça, tu en accumules d’autres.

– Oui, tu as raison… »

Nigel ne le savait que trop bien. C’était pour ça qu’il n’arrêtait pas de s’en faire.

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Mais même s’il s’en faisait énormément, il ne pouvait pas blesser Inas davantage. Oui, il devait parler. Qu’Inas se sente trahi et repousse Nigel, ou bien qu’il le prenne dans ses bras, cette décision devait revenir à Inas seul. Ce n’était pas à Nigel de prendre arbitrairement la décision pour lui.

Ayant remarqué la décision de Nigel, Schumach l’encouragea :

« Peu importe ce qu’en dira le duc, je suis de ton côté. Je suis sûr que tu n’as rien fait de mal.

– Merci de dire ça, » fit Nigel en lâchant un faible rire.

En tout cas, il décida d’attendre jusqu’au surlendemain où il avait prévu de sortir avec Inas pour lui dire la vérité et d’en profiter en attendant.

Au moment où il arriva à cette conclusion…

Brrrrrrrrr.

Le sol se mit soudain à trembler violemment avec un grondement sourd qui venait de loin.

« Qu-qu’est-ce qui se passe ? s’écria Nigel.

– Un tremblement de terre ? »

Un séisme ? Comme ça, tout à coup ?

Dans les souvenirs de Nigel, il n’y avait jamais eu de tremblement de terre naturel dans ce monde. En général, c’était toujours provoqué par quelque chose.

Les possibilités auxquelles il pouvait penser à ce point étaient… Se pouvait-il qu’Odelarth, le dragon de lumière, avait été ressuscité ? Dans ce cas, il aurait dû surgir d’Intusnica et voler par-dessus les Montagnes Impies.

Alors que Nigel tentait de consulter la fenêtre de prédiction, il perdit l’équilibre et tituba dangereusement.

« Oooh… »

Schumach le saisit par le poignet et le tint contre lui. Le chevalier était également un peu paniqué car il y avait rarement des tremblements de terre dans le royaume.

« Fais attention ! Et si on se tenait aux montants du lit ?

– Non, il ne faut pas s’accrocher à un pilier quand la terre tremble. »

… Alors que fallait-il faire en cas de séisme ?

Nigel était sûr d’avoir appris les bons gestes en Corée, mais il était incapable de s’en souvenir. Bon, vu qu’il avait même oublié son nom, il était impossible qu’il se rappelle du comportement à adopter en cas de tremblement de terre…

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« Aaah !

– Nigel ! »

Perdu dans ses pensées un moment, Nigel ne put résister au tremblement continu et tituba de nouveau. Cette fois, Schumach serra encore plus fort contre lui le jeune homme qui avait failli tomber.

Contrairement à Nigel qui tremblait comme une feuille de papier, Schumach se tenait bien les pieds fermement collés au sol. Alors que Nigel s’accrochait à lui, il eut l’impression d’être passé d’un petit radeau qui naviguait sur une mer agitée à un gros voilier.

Il savait que s’il se séparait à peine un peu de Schumach, il perdrait de nouveau l’équilibre, alors il s’accrocha fermement à lui dans le but de survivre. Ils se tinrent l’un à l’autre un long moment, comme des cigales sur un vieil arbre. Le tremblement diminua progressivement. Schumach finit par lâcher Nigel avec un soupir de soulagement.

« Reste prudent.

– Ah, merci… »

Pendant que Nigel se redressait en le remerciant, il croisa soudain par-dessus l’épaule de Schumach une paire d’yeux qui le foudroyait du regard. Il se figea.

« I-Inas. »

Inas était revenu à ce moment-là et il fixait les deux autres avec un regard noir.

Note de Karura : Faisons tous brûler un cierge pour Schumach qui va connaître une fin atroce ! 🕯

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