Comment élever un sacrifice 8 02

Chapitre 2


Son père était mort.

Il ne se sentait absolument pas coupable de sa mort. S’il ne l’avait pas tué, ce serait Inas qui aurait fini par être tué un jour. Son père n’avait rien d’un être humain, ce n’était qu’un animal. Non, il était encore pire qu’un animal !

Étrangement, ce fut plutôt du regret qu’Inas ressentit. S’il avait su que son père allait mourir aussi facilement sans que personne ne le soupçonne, Inas l’aurait tué depuis très longtemps. Sans son père, sa mère aurait pu mener une vie un peu plus confortable.

Au milieu des regrets et de la faible culpabilité d’Inas, l’enterrement de son père eut lieu de manière bien plus discrète que celui de sa mère. Voyant que l’adolescent ne pleurait pas autant que pour sa mère, les gens murmurèrent entre eux qu’il devait être trop sonné pour réagir. Mais en réalité, Inas éprouvait un immense sentiment de libération.


Cependant quand il prit conscience de la dette colossale de son père, il se rendit compte qu’il se trouvait vraiment dans une situation pitoyable.

Il savait que son père devait de l’argent, mais le montant dépassait tout ce qu’il aurait pu imaginer. Son père ne savait rien faire de ses dix doigts, mais il savait s’y prendre pour emprunter. Il avait demandé de l’argent à plusieurs personnes, se servant des montants reçus pour Inas comme garantie et assurant que le jour où il vendrait son fils une bonne fois pour toutes, il aurait encore plus d’argent.

Plusieurs nobles vinrent donc voir Inas, accompagnés par des créanciers à la mine patibulaire. Inas était à présent le baron Idenbach. Bien qu’encore mineur, il était en droit de décider pour lui-même. Ces nobles offrirent donc pas mal d’argent en échange de la loyauté d’Inas.

Parmi eux, Inas choisit la baronne Latizen, qui était envoyée par le duc de Magnus.


Il n’avait plus besoin de s’en faire pour les dettes de son père, car la baronne Latizen fut celle qui lui proposa le plus. Même si Inas était extrêmement talentueux, seul le duc de Magnus était prêt à payer une sacrée somme pour quelqu’un qui n’était encore qu’un adolescent.

« Ce sera difficile pour toi si tu vas là-bas, » l’avertit la baronne d’un regard étrangement rempli de pitié.

Inas trouva ça très drôle. Il allait devenir chevalier afin d’éviter d’avoir à payer des dettes. Sa situation ne pouvait donc pas être pire que ça.

Il s’était simplement vendu au plus offrant.

Autrement dit Luther, le duc de Magnus.


* * *


La première fois qu’Inas rencontra Luther, cet homme semblait aussi fort que le disaient les rumeurs et c’était quelqu’un de très effrayant. Pourtant, les paroles qui sortirent de sa bouche furent très inattendues pour un homme qui donnait l’impression de ne pas saigner même si on le transperçait :

« Je veux que tu assumes les devoirs de duc au nom de mon fils. »

En disant cela, on pouvait voir la profonde affection de Luther pour son fils sur son visage. Son amour était si profond qu’il avait été prêt à dépenser une somme colossale pour acheter quelqu’un à son fils. Cela semblait très étrange à Inas, qui avait récemment tué son père qui l’avait toujours frappé.

En tout cas, cela arrangeait bien les affaires d’Inas. Le rôle que voulait lui donner Luther n’était pas juste celui d’un chevalier, mais d’un adjoint pour le duc. Et puisque Inas aurait à représenter le futur duc, Luther n’allait pas lui infliger des violences physiques qui laisseraient des traces comme son père, le priver de nourriture ou bien le laisser porter des vêtements miteux.

Naturellement, il se sentait tout de même écrasé par l’ampleur de la tâche qui était bien plus grande que ce qu’il avait pensé.

Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !

Sa première impression de Nigel Grau Montstein, qu’il avait rencontré pour la première fois très nerveusement, était correcte. Le garçon ressemblait à Luther, mais semblait plus faible et ombrageux comparé à lui. Ce Nigel n’avait rien de spécial, mais peu importait à Inas. Il se moquait bien de qui il allait servir, juste de ce qu’il allait devoir faire.

Après ça, il dut subir un entraînement et une éducation vraiment très difficiles.

Luther se montra extrêmement sévère avec lui. Les standards qu’il exigeait étaient si stricts que n’importe quel noble aurait eu bien du mal.

Inas devait être parfait dans tous les domaines. Il apprit non seulement l’escrime, mais aussi la stratégie, l’étiquette et tout ce qui était nécessaire à un noble. Son planning quotidien était géré à la minute près et il n’avait même pas un instant à lui pour se reposer. Inas fit de son mieux pour se montrer à la hauteur.


Hormis son emploi du temps toujours chargé, Luther se souciait le plus de l’entraîner à être loyal. C’était en fait plus du lavage de cerveau que de l’éducation. Luther n’était pas insouciant au point de ne pas envisager qu’Inas puisse trahir Nigel un jour quand il aurait le contrôle de l’armée de Magnus. C’en était à tel point qu’il arrivait parfois à Inas de regretter les jours avant son arrivée au duché.

Luther était très malin. Il entoura volontairement Inas d’un mur avec les autres en le rabaissant ou en le félicitant devant les gens. Incités par Luther, les autres soit ignoraient Inas ou bien étaient jaloux et envieux de lui. Si quelqu’un se montrait un tant soit peu gentil avec Inas, il disparaissait dès le lendemain et Inas ne pouvait plus jamais le revoir.

Cette loyauté inculquée ne fut qu’à moitié efficace. Jamais il ne ressentit la loyauté absolue où il serait prêt à sacrifier sa vie pour Nigel. Par contre, l’idée qu’il ne devait pas le trahir resta gravée dans son esprit.


Ce ne fut pas une période des plus faciles. Cependant contrairement à l’époque où il avait été maltraité par son père, ses efforts pour le duché étaient payants.

Inas se tailla une réputation de chevalier extraordinaire et remplit toutes les attentes de Luther. Tandis qu’Inas devenait un chevalier digne de confiance, Luther se montra également plus généreux avec lui. Avec la reconnaissance du duc, les gens commencèrent également à changer d’attitude envers Inas. Les soldats ordinaires qui l’avaient ignoré jusque là se mirent à s’incliner en le voyant. Les chevaliers et les vassaux du duché acceptèrent aussi sa présence.

Quand Nigel hérita du duché, Inas était déjà devenu l’un des chevaliers les plus renommés de tout le royaume.

Inas Idenbach. Un chevalier loyal. Un commandant en chef des plus compétents. Inas était très satisfait de ces qualifications.

Il n’était plus le pauvre garçon qu’on avait soupçonné vol quand il avait eu trois cents rubels sur lui. Il avait gagné suffisamment de richesses et d’influence pour vivre dans l’aisance et il était devenu un chevalier qui avait gagné le respect de tous.

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Une vie stable s’offrait à lui, comme il l’avait toujours espéré. Même s’il devait se rendre sur le champ de bataille où sa vie était en danger, cela avait aussi une certaine stabilité en soi. Cela convenait parfaitement au tempérament d’Inas de simplement accepter et de gérer ce qui venait à lui en silence.

Les gens lui demandaient souvent s’il avait l’intention de se marier un jour. À chaque fois, il secouait la tête.

Inas n’avait pas besoin d’amour. Il ne voulait pas éprouver de sentiments ou recevoir de l’affection de qui que ce soit.

Il ne croyait tout bonnement pas en l’amour.

L’exemple le plus affreux avait été ses parents. Son père et sa mère étaient tombés amoureux, puis s’étaient mariés. Sauf que la fin avait été horrible. L’amour de son père avait vite dégénéré en autre chose.


L’amour pouvait sembler magnifique et parfait mais en réalité, c’était aussi fragile qu’un château de sable. L’amour fleurissait partout de nulle part avant de disparaître tout aussi vite.

Aveuglée par l’amour, sa mère avait fait les mauvais choix et avait ainsi gâché sa vie. Inas ne voulait pas perdre la position à laquelle il s’était hissé après tous ses efforts.

Ses sentiments n’étaient pas si importants que ça. Le mariage n’était pas nécessaire. Vivre en silence tout en servant son maître, telle était sa place. Ce n’était pas la vie qu’il avait choisie, mais c’était une vie et un avenir qu’il avait acceptés.

Inas était donc pleinement satisfait. Il voulait juste passer sa vie ainsi et mourir en paix.


* * *


Inas avait beau avoir la réputation d’un chevalier loyal, il ne pensait rien du tout de Nigel. Afin de remplir son rôle, il avait seulement offert sa loyauté au “duc de Magnus”.

L’individu nommé Nigel Grau Montstein n’avait en réalité aucune importance pour Inas. Il aurait sûrement montré la même loyauté si quelqu’un d’autre était devenu le duc.

Puis vint le jour où sa conception du monde fut entièrement chamboulée.

C’était le jour où il était revenu à la capitale après une grande bataille. Son seigneur l’avait subitement fait mander.

Tout comme Inas ne considérait Nigel que comme le seigneur qu’il servait, ce dernier considérait également Inas juste comme un simple chevalier et vassal. Leur relation était purement professionnelle, alors c’était rare que le duc demande subitement à Inas de venir, à moins qu’il ne se soit passé quelque chose d’exceptionnel.


Se sentant nerveux, Inas se rendit au manoir, mais l’atmosphère semblait très paisible.

Le duc avait toujours un air impassible mais ce jour-là, l’homme qui accueillit Inas lui adressa un sourire brillant, comme si c’était la première fois qu’il le voyait.

« Ah, salut ? »

C’était un ton léger et informel qu’Inas n’avait encore jamais entendu chez lui. Le duc avait été éduqué depuis tout petit pour hériter du duché, alors il parlait toujours d’un ton digne qui convoyait une certaine gravité.

Inas se demanda si son maître ne se comportait pas aussi bizarrement à cause du surmenage. Pendant ce temps, le duc, qui ignorait tout des soupçons d’Inas, continuait de sourire brillamment avec un visage qui semblait étrangement plus beau aujourd’hui. Son seigneur avait-il toujours ressemblé à ça ? C’était un visage capable de percer les défenses des autres.

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« Je t’ai fait venir aujourd’hui parce que je voulais te voir… déclara le duc. Tu es occupé ?

– Non. Il est arrivé quelque chose ? »

Le duc éclata de rire devant cette question inattendue. Il avait toujours eu le tempérament froid typique d’un duc du nord mais à présent, le tempérament du seigneur ne faisait pas penser à l’hiver, mais au printemps.

« Non, désolé, il ne s’est rien passé. Mais hum, ça te dérange si on parle simplement ?

– Non, bien sûr que ça ne me dérange pas. »

Bien que mal à l’aise, Inas se plia aux souhaits de son maître. Tout en s’asseyant en face de lui, il examina attentivement le moindre de ses mouvements.

De toute évidence, le duc ne se comportait pas normalement aujourd’hui. S’ils se trouvaient au nord et non dans la capitale, Inas aurait soupçonné un monstre des Montagnes Impies d’avoir pris l’apparence et la place du duc. Cependant, ils se trouvaient dans un manoir au beau milieu de la capitale, alors il y avait très peu de chances qu’un monstre soit venu prendre l’apparence du duc.


Pendant qu’Inas envisageait calmement les autres possibilités, son seigneur l’observa sans un mot et eut tout à coup un grand sourire.

« Tu es vraiment très beau.

– … »

C’était un compliment qu’Inas avait souvent entendu, mais jamais de la part de son seigneur. Son esprit connut un moment de blanc.

Sans se soucier de l’absence de réponse d’Inas, le duc but du thé et mangea un biscuit tout en parlant de choses et d’autres. Après un moment, il commenta dans un murmure :

« Ma grande sœur t’aimerait vraiment. »

Comment ça, une grande sœur ? Inas serra les dents pour que sa mâchoire ne se déroche pas, masquant de justesse son air choqué.

Pour autant qu’il sache, les seuls enfants de Luther étaient feu Etna et Nigel. Se pouvait-il que Luther avait eu en plus un enfant illégitime ?

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Pourtant, Nigel resta très calme par rapport à ce sujet des plus renversants.

« Vous avez une grande sœur ? » demanda Inas sans s’en rendre compte.

Il le regretta aussitôt. Il n’avait aucun droit de s’intéresser aux secrets de son maître. Il était l’outil fidèle du duc de Magnus. C’était clairement une faute grave de demander ça, pourtant Nigel répondit négligemment avec un petit rire :

« Oui, en effet.

– … »

Ce secret de famille nonchalamment dévoilé était tout bonnement choquant, mais le duc resta calme. Il prit de nouveau un biscuit pour le manger, puis soupira.

« Ma grande sœur me manque. J’aimerais vite rentrer à la maison. »

Est-ce qu’il voulait parler de renoncer à sa position de duc plus tôt que prévu ? En parlant de maison, le manoir de la capitale était également la maison du duc à proprement parler. Comme la santé de Nigel n’était pas bonne, il préférait rester ici plutôt qu’au duché.


* * *


Le duc n’était vraiment pas dans son état normal. Inquiet, Inas fit quelques sous-entendus au médecin et le convainquit d’examiner Nigel. Il s’inquiétait que son maître à la santé fragile ne soit devenu aussi étrange à cause d’une immense fatigue. Pourtant, le médecin estima qu’il n’y avait rien de grave. Qui plus est, elle ne se rendit même pas compte que le duc était soudain devenu plus souriant et amical. Ce fut pareil pour les autres chevaliers et vassaux.

Inas finit par en conclure que c’était lui qui se faisait des idées.

Même si le duc continuait à vouloir le voir tous les jours. Même si le duc était étrangement désorganisé et avait besoin de l’aide d’Inas.

« Merci. »

Même si le duc lui disait toujours merci, ce qui n’était guère dans ses habitudes.

« Inas. »

Même si le duc l’appelait d’une voix tendre et douce, le genre qui convoyait de la bonne volonté, quelque chose qu’Inas n’avait encore jamais entendu.

Quoi qu’il en soit, Inas n’avait jamais eu de relation personnelle avec son seigneur. Il se pouvait donc que quelque chose ait changé chez l’autre homme, en tout cas ce fut ce qu’Inas se dit.


Note de Karura : Vous avez bien sûr compris ce qui a changé chez le duc, non ?







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