Chapitre 118 : Le commencement d’une nouvelle année
Quand l’épée lui transperça le cœur, la vie de Jiu Zhideng, qui était aussi ténue et étroite que les cordes d’un instrument, céda soudain dans un claquement sec.
Il gisait par terre, ses doigts et ses paumes se crispant vers le haut comme s’il voulait attraper quelque chose. En même temps, il ne cessait d’appeler doucement :
« … Grand frère martial, grand frère martial. »
Xu Xingzhi ne voulait pas écouter ses dernières paroles. Il se pencha pour ramasser sa propre épée, mais ses mains tremblèrent et sa vue se brouilla. Il laissa tomber son arme deux fois d’affilée. Il finit par la saisir fermement et sortit aussitôt, refermant la lourde porte du palais sur Jiu Zhideng.
… C’était la deuxième fois dans les souvenirs de Xu Xingzhi que le Palais de Bambou Vert était taché de sang : la première fois, c’était le maître qui l’avait élevé et la seconde fois, c’était le petit frère martial qu’il avait élevé.
Tous les deux avaient été tués de ses propres mains. Il n’y avait que le mot ‘injuste’ pour qualifier cela.
Xu Xingzhi s’assit le long de la porte.
Comme si ce coup d’épée avait ranimé sa mémoire poussiéreuse, il regarda tout autour avec hébétude, puis en direction du terrain d’entraînement au loin. Il se rappela la plate-forme en hauteur qui se trouvait là-bas et une fois, il avait soutenu la fine taille de Jiu Zhideng et avait tenu sa main droite, puis avait sauté dans tous les sens pour lui montrer comment manier une épée. Les deux tuniques avaient voleté comme des oiseaux et s’étaient emmêlées, comme un nœud concentrique formé par le vent.
Xu Xingzhi se demanda vaguement si c’était toujours la même main qui avait manié une épée avec Jiu Zhideng à l’époque et maintenant.
Tout à coup, il entendit le bruissement de vêtements qui frottaient par terre dans le palais derrière lui. Les échos des bruits de friction entre la chair et les dalles le firent serrer les dents tristement. Puis il détourna la tête et ravala toutes ses émotions.
La personne de l’autre côté se raccrochait de toutes ses forces à son dernier souffle. Il avait rampé jusqu’à la porte mais n’avait plus la force de l’ouvrir.
Il se cogna deux fois contre la porte avant de parvenir à se redresser en s’accrochant à la poignée. Il souleva son corps délabré en se tortillant les épaules, puis posa la tête sur le panneau en bois de santal.
Les deux hommes étaient séparés par une épaisse porte en bois. La lumière des étoiles qui remontaient à la nuit des temps tombait sur eux et s’infiltrait dans le palais, formant un jeu d’ombres et de lumières à l’intérieur comme à l’extérieur.
Xu Xingzhi sentit son cœur se serrer.
En cet instant, il lui aurait suffi d’entendre les mots ‘grand frère’ et son cœur exploserait. Mais Jiu Zhideng ne l’appela plus comme ça. Sa voix aussi faible qu’un moustique marmonna :
« … Grand frère martial. »
Le cœur de Xu Xingzhi tremblait, envahi par un grand froid, et il toucha son dos de sa main. Il y avait là autrefois une marque de serpent qui l’avait fait énormément souffrir. Bien qu’il avait tranché une bonne couche de peau et de chair à la surface, il pouvait sentir encore maintenant les fines lignes sinueuses.
Il se demanda : Tu le regrettes ?
Tu regrettes d’avoir intercepté la marque du serpent pour lui ? Tu regrettes de ne pas l’avoir tué quand son sang de Démoniaque s’est réveillé ?
Xu Xingzhi ouvrit la bouche pour poser la question à l’homme de l’autre côté de la porte.
« … Jiu Zhideng, laisse-moi te poser une question : as-tu jamais regretté ? »
À ces mots, une légère lueur apparut dans les yeux clairs de Jiu Zhideng.
… Tout dans le monde possédait une destinée. L’esprit des quatre grandes sectes s’affaiblissait de plus en plus. S’il les supplantait, il pourrait survivre aux luttes internes du Dao Démoniaque et le pousser vers le droit chemin. Il pourrait également purifier son statut et empêcher les quatre sectes de pourchasser et de vouloir tuer son grand frère martial, alors pourquoi pas ?
Même encore aujourd’hui, il referait exactement la même chose.
Il fit donc :
« … Je n’ai jamais regretté d’avoir attaqué les quatre grandes sectes. »
La gorge de Xu Xingzhi le brûla. Avant qu’il ne puisse ravaler l’amertume qui en était remontée, la voix de Jiu Zhideng s’éleva de nouveau derrière lui :
« La seule chose que je regrette, c’est… Pourquoi ai-je perdu tant de temps pour rien avant de comprendre ce que désirait mon cœur… ? »
Jiu Zhideng pressa une main sur son cœur qui irradiait d’un air glacial, puis il pencha la tête et sourit.
Grand frère martial, ce cœur est couvert de mille blessures et cent trous, il est rempli de pus, mais il t’a vraiment aimé.
Xu Xingzhi pencha la tête en arrière et des larmes coulèrent du coin de ses yeux, aussi brûlantes que du sang.
Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !
L’énergie de Jiu Zhideng s’épuisa peu à peu et sa vue s’assombrit. Il tendit la main pour tâtonner dans les ténèbres et ses ongles bien manucurés grattèrent le sol avec des petits bruits.
Il se mit à délirer, lui-même incapable d’entendre clairement ce qu’il disait.
Il savait juste que Wen Xuechen, le cadavre réveillé, lui manquait terriblement, ce cadavre réveillé qui connaissait tous ses secrets honteux et qui était devenu son ami après sa mort.
Il se disait que Sun Yuanzhou avait aussi l’air d’être quelqu’un de très bien, mais il n’avait appris à vraiment le connaître que durant le dernier mois de sa vie, ce qui était trop tard.
Il marmonna :
« Wen Xuechen, j’ai laissé du thé pour lui… »
Il avait fait infuser du thé pendant un mois mais il était dommage qu’il n’avait pas pu tenir le coup jusqu’à ce que l’autre homme revienne des Terres Sauvages et qu’il puisse le revoir une dernière fois.
Dès qu’il eut prononcé le nom ‘Wen Xuechen’, la porte du palais s’ouvrit brusquement de l’extérieur. Il se fit frapper au torse et tomba par terre, glissant sur quelques pas.
Le fait d’entendre ce nom de la bouche de Jiu Zhideng réveilla une colère infinie en Xu Xingzhi qui n’avait plus qu’une envie : le frapper.
Alors c’est exactement ce qu’il fit.
Il saisit le col de Jiu Zhideng de sa main en bois et le releva soudain du sol. Il le frappa ensuite au visage d’un puissant crochet du gauche.
Tout de suite après, il pressa de nouveau Jiu Zhideng au sol et le frappa plusieurs fois sans réfléchir. Chaque coup visait les parties les plus vulnérables de sa tête et il avait vraiment envie de le frapper à mort.
Cependant, il ne put abaisser son poing une fois qu’il le releva.
Le sang rose pâle qui avait presque séché et qui tachait le creux de son poing appartenait à Jiu Zhideng.
… Il appartenait au garçon qu’il avait élevé depuis tout petit et chéri comme un trésor au creux de sa paume.
La gorge de Xu Xingzhi se serra et il haleta plusieurs fois. Il se pencha en serrant les poings, puis abattit son poing à côté du visage de Jiu Zhideng. Sa voix tremblait au point qu’elle ne semblait plus humaine.
« Jiu Zhideng, espèce de putain d’enfoiré, ah… »
Le jeune homme gisait par terre immobile. Son corps vidé de son sang était aussi léger qu’une plume. En entendant l’accusation de Xu Xingzhi, il fronça tristement les sourcils.
« … Grand frère martial, je suis désolé. »
… Désolé.
Les treize terribles années qu’avaient vécues Chongguang, Beinan, Qu Chi et Ruzhou, la vie des deux mille disciples de la Vallée de la Pure Fraîcheur et tous les cultivateurs honorables qui s’étaient retrouvés sans ressources ni abri, aux yeux de Jiu Zhideng, tout ça n’avait même pas mérité un ‘désolé’, seulement un ‘je ne regrette pas’.
Qui était-il pour accepter les excuses de cette personne ?
Xu Xingzhi ressentit un profond sentiment d’impuissance.
Une fois sa faiblesse passée, ses membres tendus se détendirent peu à peu. Ravalant l’amertume qui remontait à flot dans sa bouche, il passa les bras autour de la tête de Jiu Zhideng et se balança d’avant en arrière comme pour bercer un bébé.
Il savait que Jiu Zhideng était vraiment sur le point de mourir.
Xu Xingzhi le haïssait vraiment et l’aimait vraiment. C’était le même homme qu’il haïssait et lui avait fait du mal, il ne pouvait pas le nier.
Après l’avoir tué et frappé, il n’avait plus la force de haïr. Au contraire dans sa lassitude, des traces de tendresse naquirent dans son cœur.
Allongé dans les bras de Xu Xingzhi, Jiu Zhideng avait pratiquement perdu connaissance.
Il avait l’impression de flotter dans un rêve tendre et confortable.
Ses doigts glacés et bleus saisirent le col de Xu Xingzhi. Il pencha la tête dans les bras de l’autre, ouvrit à moitié les yeux et demanda :
« Grand frère martial, si je n’étais pas né chez les Démoniaques, à quoi je ressemblerai ? »
Xu Xingzhi répondit intérieurement : Dans ce cas, tu aurais été un enfant parfait.
Mais il ne dit rien et se contenta de le serrer contre lui.
Jiu Zhideng était totalement confus. Il croyait que Xu Xingzhi était encore de l’autre côté de la porte, alors il tourna la tête vers la porte en bois qu’il ne voyait presque plus et demanda du ton d’un enfant qui cherchait à comprendre :
« … Grand frère martial, le Livre du Monde… Y a-t’il vraiment un Livre du Monde ? Il peut rendre vrai ce qui est écrit à l’encre et au pinceau, peut influencer le cœur des gens et changer l’Histoire… »
C’était une chose qu’il n’avait jamais comprise.
Il voulait en avoir le cœur net avant de mourir.
Après un long silence, Xu Xingzhi émit un En grave en guise de réponse.
Les yeux de Jiu Zhideng s’illuminèrent un peu. Il lutta un moment pour rouvrir ses yeux alors que son visage était rouge et blanc à cause des coups qu’il avait reçus.
« Alors… grand frère martial, tu pourrais réécrire un meilleur commencement pour moi ? »
La main gauche de Xu Xingzhi posée sur l’épaule de Jiu Zhideng se crispa lentement.
Le jeune homme fit d’un ton doux :
« … Xiao Deng n’en veut pas de trop. Il veut juste une famille ordinaire. À l’âge de treize ou quatorze ans, il va se disputer avec ses parents et partir de chez lui. Sans un sou pour manger, il sera recueilli par grand frère martial qui l’emmènera sur la Montagne de la Tombe du Vent… Dans ce cas, tout ce qui s’est passé ne se produira jamais, n’est-ce pas ? »
Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !
Xu Xingzhi lâcha un léger sanglot coincé dans sa gorge en écoutant sa vision enfantine remplie d’espoir.
Mais il réussit à dissimuler ce sanglot en toux. Il toussa tout en serrant fort la tête de Jiu Zhideng et fit :
« Entendu. Je vais écrire ça pour toi. Grand frère martial… va t’écrire ça. »
Les oreilles de Jiu Zhideng ne pouvaient plus bien entendre. Il sentit seulement que cette promesse flottait dans ses oreilles en provenance de toutes les directions, résonnant sans fin. Sans le savoir, il tendit joyeusement la main vers la porte, comme si sa sombre histoire venait d’être effacée d’un coup par un pinceau aussi gros qu’une poutre.
« Ce… Jiu Zhideng purifié et non souillé attendra alors que son grand frère martial vienne le recueillir à ce moment-là. Grand frère martial, tu dois venir, ah. »
De son dernier souffle, il expira lentement en prononçant les mots ‘venir, ah.’
Les yeux d’un noir d’encre de Xu Xingzhi croisèrent ces yeux légèrement rouges, la lueur dans ces derniers disparut progressivement.
… Xu Xingzhi avait menti à Jiu Zhideng qui était allé au royaume des morts avec de faux espoirs.
Mais en fait, Jiu Zhideng ne sut jamais qu’il était en train d’expirer dans les bras de son grand frère martial.
Xu Xingzhi serra son corps qui se refroidissait peu à peu. Des millions de pensées défilèrent dans son esprit, mais il ne donnait pas l’impression de penser à quoi que ce soit.
Il remit de l’ordre dans la tenue de Jiu Zhideng qui était froissée, puis toucha son torse où il avait creusé un trou. Les bords de la plaie étaient orientés vers le haut, d’un blanc bleuâtre et légèrement enflés. Xu Xingzhi sentit encore un peu de chaleur à cet endroit, alors il le recouvrit de sa paume.
Très vite, ce restant de chaleur se dissipa dans les airs.
… Mort, il était vraiment mort.
Xu Xingzhi déposa le corps de Jiu Zhideng par terre. Il contempla ses yeux à moitié clos et à moitié ouverts, puis fit comme pour lui-même :
« Jiu Zhideng, écoute-moi bien. Quand moi, Xu Xingzhi, aurai quitté le Palais de Bambou Vert aujourd’hui, je ne verserai plus jamais la moindre larme pour toi de toute ma vie. »
Après ça, Xu Xingzhi se cacha la visage, ses épaules tremblèrent et il se mit à pleurer fortement.
Au loin, les feux d’artifices et la cloche du soir retentissaient ensemble. Parmi les crépitements, les lourdes portes du Palais de Bambou Vert s’ouvrirent de nouveau.
Xu Xingzhi émergea du palais avec un éventail en bambou à sa ceinture et l’épée de Jiu Zhideng dans sa main gauche. Il s’éloigna sans un regard en arrière.
Comme il l’avait dit, ses yeux étaient secs et il ne versa plus de larmes.
Il s’avança sous le ciel étoilé et infini, comme s’il était revenu en arrière l’année où Jiu Zhideng avait intégré la secte et qu’ils avaient regardé les étoiles ensemble pour la première fois. Le ciel avait été aussi dégagé et brillant, le paysage pittoresque et les étoiles remplissaient tout le ciel de leur splendeur aussi loin que le regard pouvait porter.
Mais Xu Xingzhi savait très bien quelle année on était.
La seizième année de la dynastie Tianding s’était achevée et le premier jour de la dix-septième année était arrivé sans encombre. Le pinceau géant de l’Histoire n’avait jamais été fait pour être dans les mains d’une seule personne. Il s’avançait lentement, sans se soucier de ceux qui étaient passés ou de ceux qui allaient venir. D’un simple coup de pinceau, il projetait la lueur dorée de l’aube dans le ciel.
… Bien que la beauté changeait aisément, le sang chaud était heureusement difficile à refroidir.
En une nuit, tout changea sur la Montagne de la Tombe du Vent. Les visages des disciples qui allaient et venaient n’étaient plus les mêmes. En regardant ce que cela avait été treize ans plus tôt, cela avait effectivement bien changé.
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Sur une colline non loin de la Montagne de la Tombe du Vent, Sa Si était assis dans un arbre et regarda ces disciples affairés de loin. Il sut dans son cœur que les sectes Daoïstes avaient une fois de plus modifié le monde de manière invisible.
Il cueillit nonchalamment un jujube recouvert d’un peu de givre Juste après en avoir pris une demi-bouchée, ses sourcils tressautèrent à cause de l’acidité et il faillit vomir. Il recracha le fruit.
Heureusement, il contrôla rapidement son expression faciale. Il lécha le jus acide de ses dents et cacha le fruit à moitié mordu dans la paume de sa main, faisant semblant de l’avoir fini. Il cueillit un autre fruit et le jeta à Xu Pingsheng qui était assis sur un autre arbre bas.
« Tiens. »
Xu Pingsheng prit le jujube et mordit bien dedans.
Même s’il ne ressentait pas la douleur, sa langue continuait de fonctionner. Après avoir mordu dans le fruit, les larmes faillirent couler sur ses joues. Il émit un sifflement en inspirant, comme s’il venait d’avaler tout pleins de piments.
Sa Si regarda Xu Pingsheng qui était en larmes tellement c’était acide et il en fut si ravi qu’il éclata de rire en se tapant la cuisse.
Xu Pingsheng le foudroya du regard, avec deux coulées de larmes le long de ses joues. Pourtant, il se pencha pour ramasser des jujubes couverts de glace.
Un peu surpris, Sa Si lui demanda :
« Ai, ne me dis pas que tu as aimé ? »
Xu Pingsheng ramassa environ une vingtaine de jujube d’un coup, puis fit :
« Il aime ça. Je vais les garder pour lui. »
Avec ce rappel de Xu Pingsheng, Sa Si se souvint que Xu Xingzhi avait effectivement des goûts particuliers et adorait tout ce qui était acide.
Il se gratta la tête et demanda à l’autre homme :
« Hé, tu te rappelles de ce type à l’éventail qui est venu avec nous au mont Qiemo l’autre jour ? »
Xu Pingsheng baissa la tête et fit le tri dans les jujube. Il retira le givre et jeta les fruits les plus abîmés.
« … Celui qui ressemble à Xingzhi.
– C’est Xingzhi, » lui révéla Sa Si.
Malheureusement, les cadavres réveillés étaient tous très obstinés et avec des idées bien arrêtées. Xu Pingsheng ne faisait pas exception à la règle.
« Ce n’est pas lui. Xingzhi n’est pas plus grand que ça, fit-il en levant la main à hauteur de son genou. … Tandis que cet homme, il est grand comme ça. »
Il leva la main à trois cun au-dessus de sa tête, puis regarda Sa Si comme s’il était stupide.
Sa Si fronça les sourcils, démuni, mais se dit ensuite que tout ça était bien trop problématique. Alors il agita simplement la main et fit :
« Laisse tomber. Xingzhi t’apprendra ça lentement quand tu seras revenu, hein ? »
Il sauta ensuite de la branche.
« On y va. »
Xu Pingsheng resta assis au sommet de l’arbre et lui demanda :
« On va où ?
– Je te ramène chez toi. »
Xu Pingsheng en fut très surpris.
« On ne vient pas juste de quitter le mont Qiemo ? »
Sa Si désigna la Montagne de la Tombe du Vent où des files de disciples entraient et sortaient.
« Non, c’est là-bas. »
Xu Pingsheng pencha la tête sur le côté.
« Quel est cet endroit ? »
Sa Si fit claquer sa langue.
« Tss. Ne joue pas les imbéciles, ah. À chaque fois que tu perdais la tête avant, tu ne demandais pas toujours en hurlant de rentrer ? C’est chez toi. En plus après toutes ces années, ces disciples de la Montagne de la Tombe du Vent t’ont déjà accepté. Ils sont tous revenus là-bas, pourquoi tu ne les suis pas rapidement ?
– … On déménage ? »
Après un long moment de réflexion, Xu Pingsheng émit cette conjecture compte tenu de son ignorance.
En y réfléchissant bien, Sa Si ne put comprendre ce qu’il voulait dire, alors il le suivit :
« C’est ça, tu déménages. »
Xu Pingsheng s’accrocha à la branche et baissa les yeux vers Sa Si. Les marques rouges grossières de couture autour de sa nuque avaient l’air particulièrement hideux.
« Mon lit… »
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Sa Si en avait assez de lui parler en se tordant le cou, alors il se massa la nuque tout en disant :
« Quand tu seras dans ta nouvelle maison, ils te donneront un nouveau lit. Alors ne t’en fais pas pour ta couverture en coton déchirée. … Aïe, tu pourrais pas bouger ton cul et descendre vite ? J’ai mal à la nuque. »
Xu Pingsheng était naturellement plus sensible que les autres. Il remarqua avec acuité que Sa Si ne semblait pas s’inclure dans tout ça.
« … Et toi alors ? »
Cela surprit l’autre homme.
« Quoi, moi ?
– Tu ne déménages pas non plus ? »
Sa Si se gratta l’arrière de la tête et lâcha un rire dénué de joie.
« Je ne fais pas partie des quatre grandes sectes, alors pourquoi je devrais y emménager, ah ? »
À ces mots, Xu Pingsheng tressaillit et sans s’en rendre compte, sa main se serra autour d’une branche épineuse. Du sang jaillit de sa paume.
Sa Si ne remarqua pas le liquide rouge vif qui tombait goutte à goutte de la main de l’autre homme. Il fit :
« En plus dorénavant, j’ai bien peur qu’il va y avoir de plus en plus de gens pour vouloir me défier à l’épée. Tu as un endroit où rentrer, alors tu n’as pas besoin de vagabonder dans tous les sens avec moi. Tu ne trouves pas ça logique ? »
Xu Pingsheng n’en démordit pas :
« Pourquoi il va y avoir plus de gens pour te défier à l’épée ?
– … Tu sais ce qu’est un traître ? » demanda Sa Si avec un sourire détendu.
Bien que le Dao Démoniaque avait été vaincu, il n’avait pas dit son dernier mot. Il y avait bien des personnes féroces et assoiffées de vengeance dans le Dao Démoniaque. Ce ne serait pas difficile pour eux de remonter la piste et découvrir que ces plus de deux mille ‘guerriers descendus du Ciel’ étaient en fait restés sur terre et venaient du mont Qiemo. Mais qui monopolisait cette montagne depuis des années pour cultiver et s’entraîner ? C’était très facile de comprendre qui avait offert asile et protégé ces membres survivants des quatre grandes sectes.
En tant que coupable aux yeux du Dao Démoniaque, il était temps de partir en exil puisqu’il avait rempli sa promesse faite à son ami Daoïste. Il était inutile d’emmener Xu Pingsheng avec lui pour souffrir ensemble à cause de ce crime.
Voyant que Xu Pingsheng restait perplexe, Sa Si agita la main et lui offrit un sourire nonchalant.
« Laisse tomber, tu ne comprends même pas de quoi je parle. Descends, je te ramène. »
Mais Xu Pingsheng resta comme un vieux corbeau sur un arbre perché. De ses yeux l’un noir et l’autre bleu, il l’observa en silence, sans bouger et émettre le moindre son.
Sa Si donna un coup de pied à l’arbre, ne comprenant pas ce qui arrivait à l’autre.
« Allez, descends… Ne m’oblige pas à monter et à te faire descendre à grands coups de pied dans le cul, ah. »
Xu Pingsheng ne bougea toujours pas, comme un cochon mort qui ne craignait pas l’eau bouillante.
Voyant que la manière forte avait échoué, Sa Si se lécha les lèvres et passa à la manière douce.
« Tu ne sais pas ? Xingzhi… Non, celui qui ressemble énormément à ton petit frère et ta grande sœur martiale Yuan sont tous les deux sur la Montagne de la Tombe du Vent. Tu n’as pas envie de les rejoindre ? »
En apprenant que ces deux personnes se trouvaient là-bas, le cadavre réveillé se bougea enfin les fesses. Malgré tout, ses yeux restaient remplis de suspicion.
« … Tu mens. »
Face à un cadavre réveillé qui n’écoutait pas du tout, Sa Si eut l’impression que sa tête allait exploser. Il continua à l’amadouer :
« Je ne mens pas, vraiment. Je vais t’emmener les voir. Viens, descends. »
Après ça, il lui tendit la main et lui fit gentiment signe de le rejoindre.
Sa Si se disait que puisque lui-même n’avait jamais eu de père depuis son enfance, c’était comme ça qu’un père agissait, et rien de plus.
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Xu Pingsheng se laissa enfin un peu convaincre : il se tordit le corps et laissa pendre une jambe par-dessus les branches couvertes de givre.
Mais dès qu’il remarqua une lueur dans les yeux de l’autre homme, il se dit aussitôt que quelque chose clochait. Au moment où il allait remonter sa jambe, Sa Si attrapa sa cheville.
« Descends ! »
Xu Pingsheng tomba de la branche comme un gros oiseau frappé par une pierre et atterrit dans les bras de Sa Si.
Il fut si furieux qu’il se mit à le frapper sans retenue. Sa Si passa un bras autour de sa taille et emprisonna ses mains qui s’agitaient dans son autre main. Il partit d’un grand éclat de rire.
« Tu manques encore de force, ah. »
Comme Xu Pingsheng était fermement retenu, il le foudroya du regard. Mais dans sa colère, il y avait aussi une pointe de panique face à un futur incertain. Il tira le devant de sa tunique qui avait été déchiré par les branches de l’arbre à jujube, tentant de rejeter sur Sa Si la responsabilité de son état piteux.
« Mes vêtements sont déchirés. »
Sa Si fourra le cadavre réveillé sur son épaule comme un matelas roulé et descendit de la montagne à grands pas.
« Je vais te les coudre pour les réparer.
– Tu cous trop mal, c’est moche. »
À la grande surprise de Xu Pingsheng, Sa Si ne répliqua pas. Alors qu’il descendait tout droit le long d’un sentier, il promit :
« On retourne d’abord à la Montagne de la Tombe du Vent. Une fois là-bas, je recoudrai ta tunique. »
… Et ce sera la dernière fois.
La parole à l’auteuse :
Voici toute la vie de Jiu Zhideng d’un point de vue objectif.
Comme son sang de Démoniaque ne s’est pas réveillé étant jeune, il ne valait rien aux yeux du Dao Démoniaque et fut envoyé comme otage dans les quatre grandes sectes.
Là-bas, il a bénéficié de la gentillesse de son maître et de la protection de Xu Xingzhi, mais les sectes ne l’acceptèrent pas et le considéraient comme un étranger. (Rappelez-vous quand il s’est fait humilier par Cheng Ding durant la Compétition Céleste. Personne n’a pris sa défense, excepté son grand frère martial.)
Plus tard, à cause d’une malheureuse pensée, son sang de Démoniaque se réveilla et il se retrouva impliqué dans la guerre interne du Dao Démoniaque. Une personne influente le menaça avec la vie de sa mère et il fut ainsi emmené loin de la Montagne de la Tombe du Vent.
Afin de se tenir sur un pied d’égalité avec Xu Xingzhi, il se démarqua dans la guerre interne et devint le seigneur du Dao Démoniaque. Ce fut durant cette période qu’une obsession naquit progressivement dans son cœur.
Pendant le mariage de Wen Xuechen, il découvrit la relation entre son grand frère martial et Meng Chongguang. Fou de douleur, il perdit la raison. Alors qu’il était ivre, il révéla par accident le secret de son grand frère martial à l’ambitieux Liu Yunhe.
Par la suite, il se retrouva dans une situation difficile. Le Dao Démoniaque était en effervescence, le pressant d’attaquer le Dao honorable afin de prouver sa loyauté. Il réprima les fauteurs de troubles un par un pour ne pas créer de problèmes.
Le plan de Liu Yunhe réussit : Xu Xingzhi fut accusé à tort et maître Qing Jing mourut. Jiu Zhideng sombra dans une spirale d’auto-accusations mais stimulé par Liu Yunhe, son ambition de tout dominer se réveilla.
Le maître et son grand frère martial étaient partis. Il avait envoyé plusieurs demandes de visite, mais n’obtint aucune réponse.
Comme il lui était impossible de retourner dans les quatre grandes sectes, il changea d’avis et se mit à faire des projets pour lui-même, pour le Dao Démoniaque et pour son grand frère martial qui était pourchassé par les quatre grandes sectes.
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Il massacra la Vallée de la Pure Fraîcheur, causant sans le vouloir la mort de Wen Xuechen.
Après ça, il s’empara de son corps, le fit transformer en cadavre réveillé et le garda à ses côtés comme compagnon.
Il jeta dans les Terres Sauvages un groupe de rebelles comprenant les frère et sœur Zhou. Il fut la cause indirecte du fait que Qu Chi se fit battre et la cause directe de la folie de maître Guang Fu. Il fit prisonnier son grand frère martial et piégea Chongguang, le tout d’une main de maître très féroce et cruelle.
Il régna ensuite pendant treize ans. Le monde connut la paix et les ailes de la secte de sang, la plus nocive, furent coupées. Il fit de son mieux pour maintenir la position orthodoxe du Dao Démoniaque et que ce dernier agisse pour le bien des gens ordinaires. Mais cela lui attira la méfiance des autres Démoniaques. Il œuvra dur ainsi pendant plus de dix ans, marchant sur des œufs.
Treize ans plus tard, Xu Xingzhi qui se trouvait dans un monde illusoire se fit jeter dans les Terres Sauvages par Wen Xuechen. Quand le jeune homme rencontra de nouveau Meng Chongguang, Jiu Zhideng comprit que tout était fini et il choisit de mourir de l’épée de Xu Xingzhi, complètement épuisé.
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Telle fut la vie de Jiu Zhideng. Qu’elle fut écœurante et haïssable, qu’elle fut pitoyable et difficile, il a vécu et causé assez de bonheurs et de malheurs dans cette vie.
Qu’il repose en paix.
Note de Karura : Cela reste difficile de complètement haïr Jiu Zhideng.
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