Cent façons de tuer un prince charmant 12

Chapitre 12


Il ne fallait pas oublier que le régent pratiquait les arts martiaux. Après avoir été assommé par le chandelier, il reprit lentement connaissance.

Il toucha l'arrière de son crâne et inspira. Il s'assit et son visage faisait peur à voir. Il avait pratiquement dessaoulé à cause de la douleur, cependant il ne se rappelait pas qui l'avait battu. Il se souvenait seulement être venu au palais de Murong Xiu pour l'inviter à admirer les feux d'artifices. Cependant, l'Empereur s'était montré très désagréable alors il avait apparemment tenté de passer à l'acte avec lui...

Il lui semblait également que Murong Xiu l'avait injurié.

Voyant qu'il ne se rappellerait pas de plus, le régent cessa d'y songer. Il lança un regard à la personne assise à côté de lui mais fut aussitôt stupéfait de ce qu'il vit.

« Tu... »


Le visage de l'autre personne était complètement lacéré et ensanglanté. Le revers de ses vêtements était couvert de sang et la personne tenait entre ses mains une épingle dorée d'où gouttait encore du sang.

Sans les vêtements familiers, le régent aurait été bien en peine de reconnaître que cet homme ensanglanté était Murong Xiu à la beauté de jade d'un immortel. Il arracha aussitôt l'épingle des mains de l'Empereur et fit d'un ton furieux :

« Murong Xiu, as-tu perdu la tête ? »

Les yeux de Murong Xiu vacillèrent avec hébétude avant de se poser sur le régent.

« Je n'ai pas perdu la tête. »

La voix était rauque, comme extirpée d'entre ses dents.


Le régent fut si furieux qu'il ne sut que répondre. Il jeta l'épingle dorée par terre. La tête de l'épingle se décrocha en heurtant le sol. Murong Xiu vit cela. Il se mordit les lèvres puis eut un sourire béat.

Son visage couvert de blessures couplé à ce sourire, cela n'aurait pas pu être plus effrayant.

Le régent vit cela et ressentit de la douleur et de l'angoisse dans son cœur. Il souleva Murong Xiu dans ses bras et quitta la pièce en criant :

« Gardes ! Allez chercher le médecin impérial. »

Pendant que Murong Xiu fut transporté hors du palais, il garda le regard fixé en arrière.

Nul ne savait ce qu'il pouvait bien regarder.


* * *


Murong Xiu resta défiguré. Le régent eut beau menacer de mort tout l'office des médecins impériaux, il fut impossible de sauver le visage de Murong Xiu.

Pour la première fois de sa vie, le régent se sentit impuissant. Il contempla Murong Xiu qui se trouvait devant lui et se mit à jurer de colère :

« Murong Xiu, tu es malade ou quoi ? Tu avais vraiment besoin de ruiner ton propre visage ? »

Le visage du jeune homme était complètement recouvert de bandages, on ne voyait que ses yeux.

Ces yeux étaient aussi brillants que les eaux limpides d'automne C'est un compliment en Chine pour décrire de beaux yeux. (1) et les longs cils étaient comme des plumes. C'étaient vraiment des yeux magnifiques sauf qu'ils étaient à présent ternes, privés de leur brillance.


« C'est vous qui m'y avez contraint, fit doucement Murong Xiu. Les descendants du clan Murong ne seront jamais des jouets. »

Les mains du régent tremblèrent légèrement à ces mots.

Murong Xiu le haïssait tellement qu'il préférait encore se défigurer pour le repousser.

Il ferma les yeux, ses émotions extrêmement compliquées. Murong Xiu était devenu comme une statue de jade dans son cœur. À présent que ce jade était brisé, il faisait de son mieux pour en recoller les morceaux mais il ne pourrait jamais effacer les craquelures de la statue.

Le régent fut vaincu par Murong Xiu pour la première fois.

La détermination de Murong Xiu à rompre avec lui était cinglante, désormais il craignait de s'approcher de trop près.


Dans les deux mois qui suivirent, tandis que Murong Xiu récupérait de sa blessure, le régent ne vint pas le voir en privé une seule fois. Il prenait juste de ses nouvelles auprès du médecin impérial tous les jours. Les cicatrices sur le visage de l'Empereur ne disparaîtraient jamais mais au moins, il était en vie. Le régent ordonna alors à un artisan de fabriquer un masque des plus exquis. Quand ce masque fut envoyé à Murong Xiu, ce dernier n'y jeta qu'un coup d'œil et demanda calmement :

« Pourquoi dois-je porter un masque ?

– Votre Majesté, répondit Liang Rong mal à l'aise, c'est de la part du régent. Il dit que c'est... un cadeau d'anniversaire pour votre Majesté. »

Murong Xiu écouta cela puis prit le masque exquis. Il était doré et orné de motifs de dragon. Il mit le masque sur son visage et se rendit compte qu'il épousait très bien la forme de son visage. Quand Liang Rong vit Murong Xiu essayer le masque, il s'empressa de sourire et de flatter :

« Ce masque est vraiment superbe. Il convient tout à fait à votre Majesté. »


Dès qu'il eut fini de parler, il vit Murong Xiu jeter le masque par terre.

Le masque n'en fut pas brisé alors l'Empereur se leva et le piétina. Liang Rong réagit et se rua vers lui.

« Votre Majesté, votre Majesté, calmez-vous. Ce masque a été soigneusement conçu et a demandé beaucoup d'efforts. »

Shen Jue, qui se tenait en silence aux côtés de Murong Xiu, ajouta :

« Votre Majesté ne doit pas marcher dessus. Vous risquez de vous faire mal au pied. Si vous n'aimez pas ce masque, laissez simplement l'intendant Liang le rapporter. »

En entendant les paroles de Shen Jue, Murong Xiu arrêta aussitôt de piétiner le masque. Il retira son pied en souriant.

« Tu as raison. »

Ses yeux splendides se posèrent sur Liang Rong.

« Liang Rong, ramène cela au régent. Mon anniversaire est passé, aussi n'a-t'il pas besoin de m'offrir un cadeau. »


Les gens n'avaient pas pu détacher le regard du visage originel de Murong Xiu mais à présent, ils avaient peur de le regarder dans les yeux.

Liang Rong avait beau se considérer comme courageux, il n'osait quand même pas regarder directement le visage de l'Empereur. Ce visage ressemblait désormais à celui d'un Yaksha Un démon chinois au visage effrayant. (2).

« Bien, cet esclave comprend. »

Liang Rong lança un regard à Murong Xiu puis baissa aussitôt la tête. Il ramassa rapidement le masque par terre et quitta le palais.

Quand Murong Xiu le vit partir, son sourire retomba. Il se tourna vers Shen Jue :

« Shen Jue, suis-je hideux à présent ? »

En voyant cela, Shen Jue s'avança doucement et sourit tendrement à Murong Xiu.

« Peu importe ce que votre Majesté est devenu. Aux yeux de cet esclave, votre Majesté est le fil du Ciel, le dragon impérial. Pourquoi un monarque devrait-il se soucier de son apparence ? En plus, le régent n'ose plus se montrer trop intime avec votre Majesté à présent, ce qui est une bonne chose, ah. »


Murong Xiu acquiesça en songeant au régent.

« En effet, tous les gens dans le monde sont superficiels et ne jugent les autres que par leur apparence.

– Toutefois, poursuivit Shen Jue, votre Majesté ne peut pas se relâcher. Vous devez en profiter pour accroître votre pouvoir. Ce n'est qu'une fois le régent éliminé que votre Majesté pourra être le véritable empereur. »

Murong Xiu le regarda avec une lueur de frustration dans les yeux.

« Tu n'es pas sans ignorer que pour le moment, tous les gens de la Cour sont dans le camp du régent. Comment pourrai-je accroître mon pouvoir ?

– Votre Majesté, les examens impériaux vont bientôt débuter. Pourquoi ne choisiriez-vous pas un groupe de gens talentueux parmi les candidats ? Qui plus est, le régent est brutal et arrogant. Bien qu'il ait des subordonnées à la Cour, il y a aussi des jeunes gens de nobles caractères et d'intégrité incontestable. Ces gens voudront naturellement servir votre Majesté, » fit Shen Jue.

Le front plissé de Murong Xiu se détendit au fur et à mesure.

« Tu as raison, les examens impériaux vont bientôt débuter. C'est une bonne opportunité. »


* * *


Depuis que Murong Xiu était défiguré, son tempérament avait peu à peu changé. Avant, il détestait quand les autres le regardaient, surtout ceux qui avaient les yeux rivés sur son visage. À présent, quand quelqu'un n'osait pas le regarder, il avait l'impression que c'était parce que l'autre avait peur de son visage et cela le rendait furieux. Murong Xiu devint progressivement ombrageux et volatile, il punissait constamment les serviteurs autour de lui.

En tant qu'eunuque en chef sous ses ordres, Liang Rong fut le plus puni. Murong Xiu punissait désormais les gens en se focalisant sur le visage : avec des lamelles de bambou trempées dans l'eau, le puni était frappé au visage jusqu'à ce que ses joues saignent abondamment.

Liang Rong fut si malheureux qu'il allait voir le régent en douce.

« Votre Excellence, sauvez cet esclave. Cet esclave craint de bientôt mourir. »

Liang Rong se lamenta avec des larmes et de la morve. Couplé à son visage enflé, l'ensemble était vraiment affreux. Comme ses joues étaient enflées à cause des coups, il n'articulait pas bien.


Le régent le vit pleurer jusqu'à ce que de la morve coule sur ses lèvres. Ses sourcils se tortillèrent, il était un peu dégoûté.

« Que se passe-t'il ?

– Sa Majesté haït cet esclave désormais, s'écria Liang Rong en sanglot et d'un ton misérable. Depuis que cet esclave a apporté le masque à sa Majesté, il punit cet esclave à la moindre occasion. Parfois, même si cet esclave ne fait rien de mal, sa Majesté veut quand même le punir. Bien que cet esclave est l'eunuque en chef, il ne vaut guère mieux en réalité qu'un petit eunuque qui vient à peine d'intégrer le palais. Tout le monde ose à présent marcher sur les pieds de cet esclave. Cela n'a aucune importance si cet esclave est misérable mais cet esclave est quand même un homme de votre Excellence, alors ces gens ne respectent même pas votre Excellence ainsi. »


À ces mots, le régent fut un peu amusé.

« Alors que veux-tu que cette Excellence fasse ? »

Liang Rong arbora un sourire hideux.

« Cet esclave n'oserait pas vouloir quoi que ce soit et supplie seulement votre Excellence de sauver la vie de ce chien d'esclave.

– Tu sais donc que tu as une vie de chien, fit le régent d'un ton sarcastique. Cette Excellence n'élève jamais des chiens inutiles. Si tu es si inutile que ça, va vite te réincarner au plus vite. »

Dès qu'il prononça ces mots, Yang Xu saisit aussitôt le sabre qu'il portait à la taille.

En voyant cela, Liang Rong se mit aussitôt à crier :

« Épargnez-moi, votre Excellence, cet esclave est utile ! Il est utile ! »

Il vit Yang Xu s'approcher de plus en plus et son esprit fonctionna à la vitesse de l'éclair. Quand l'autre homme fut devant lui, il hurla soudain :

« Maître, tout ceci doit avoir quelque chose à voir avec Shen Jue ! »


Quand le régent entendit ce nom, il émit un son.

Yang Xu lança un regard glacial à Liang Rong, menaçant silencieusement de le tuer si ses prochaines paroles n'étaient pas utiles.

Menacé de mort, Liang Rong montra plus d'intelligence qu'en temps ordinaire.

« Le jour où sa Majesté a été blessé, Shen Jue servait à ses côtés mais quand le médecin impérial arriva, il était parti. Cet esclave a trouvé ça étrange et a spécifiquement demandé à un serviteur de voir où se trouvait Shen Jue. Ce dernier n'était pas dans sa chambre. Et maintenant, sa Majesté prête énormément d'attention à tout ce que dit Shen Jue et le laisse même être à ses côtés plutôt que les autres serviteurs. Cet esclave pense que sa Majesté doit avoir été troublé par Shen Jue.

– Shen Jue ? fit le régent en prononçant doucement ces deux mots. Il était présent ce jour-là ? »

Il ne se souvenait toujours pas de qui l'avait assommé mais cela n'avait pas semblé être Murong Xiu. Ensuite, comme Murong Xiu avait été blessé, le régent s'était focalisé sur lui et avait oublié cette histoire.

Apparemment, les événements de cette nuit-là ne sont pas ordinaires, ah.

Le régent étira ses lèvres en un sourire glacial.


* * *


À peine Shen Jue avait-il regagné sa maison qu'il vit Dao Zhan et Yang Xu.

Dao Zhan ne souriait pas pour une fois et le regardait avec froideur. Les yeux de Shen Jue se figèrent imperceptiblement puis il sourit.

« Pourquoi êtes-vous tous deux là, mes seigneurs ? »

Dao Zhan sortit une petite dague fine de sa manche et la lueur de la lame se refléta sur les yeux de Shen Jue.

« Nous sommes ici sur ordre de son Excellence pour interroger ce petit eunuque. Nous espérons que ce petit eunuque saura tout nous dire, » fit-il d'un ton neutre avant de finalement lécher la dague dans ses mains du bout de sa langue.

À ces mots, le sourire de Shen Jue s'accentua.

« Entendu. »

Il savait qu'il ne pourrait pas cacher ses actes au régent.

Tôt ou tard, l'autre homme viendrait à sa porte cependant il était un peu en retard.

Il semblait que le régent était vraiment soucieux et confus.


La parole à l'auteur :

Aujourd'hui, mon éditeur m'a dit que je ne peux pas aller trop dans le côté sombre alors j'ai changé mon script.

Je crois que je vais me lancer dans un récit plus léger.


Note de Karura : Si c'est ça le récit léger, je n'ose pas imaginer ce que ça devait être au départ !



Notes du chapitre :
(1) C'est un compliment en Chine pour décrire de beaux yeux.
(2) Un démon chinois au visage effrayant.






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