Cent façons de tuer un prince charmant 26

Chapitre 26


Shen Jue reprit connaissance dans l'après-midi. À son réveil, il y avait quelqu'un assis près du lit. Le jeune homme était en train d'essorer un linge. Il se tourna ensuite pour le poser sur le front de Shen Jue et ce fut alors qu'il croisa le regard du garçon.

« Tu es réveillé ! s'écria Li Feng, agréablement surpris. Je t'apporte ton médicament, je l'ai laissé sur le fourneau pour qu'il reste chaud. »

Shen Jue ne se serait jamais attendu à ce que Li Feng prenne soin de lui. Il en resta interloqué. Avant qu'il ne puisse dire un mot, Li Feng était déjà parti comme s'il avait un diable ses trousses. Quand Shen Jue le vit sortir, il se redressa sur un coude.


Liu Anshun avait dit qu'il le ferait transférer hors du palais de Qizhang. Shen Jue devina que cela n'avait pas pu se faire. Après tout, Liu Anshun n'était que l'eunuque en chef des cuisines impériales. Tant que Murong Xiu refuserait de le laisser partir, il n'y avait rien que Liu Anshun ne pouvait faire. Shen Jue tâta la couverture humide sur lui et sentit toute la différence avec sa vie précédente. Il eut soudain envie de rire. Il avait été si déterminé à tuer Murong Xiu dans sa dernière vie. Comment aurait-il pu deviner que Murong Xiu en concevrait tant de ressentiment Shen Jue n'a vraiment aucun quotient émotionnel. 😓 (1) qu'il le ramènerait de force pour revivre tout cela  ?

Shen Jue avait compris que Murong Xiu n'allait pas le tuer dès qu'il entendit Li Feng parler de médicament. Cela ne voulait pas dire pour autant qu'il laisserait Shen Jue avoir une vie facile.


Il y réfléchit intensément. Quand Li Feng revint avec le médicament, il vit Shen Jue assis et s'écria :

« Aiyo ! »

Il accourut rapidement.

« Pourquoi tu t'es assis, tu n'as pas de vertige, ah ? »

Shen Jue secoua la tête.

Li Feng eut un rire nerveux et lui tendit le bol de médecine.

« Bois ça. »

Shen Jue prit le bol et fit d'une voix faible :

« Merci, frère Feng. »

Li Feng fit une drôle de tête mais ne dit rien. Il avait enfin récupéré le pendentif en jade aujourd'hui mais avait reçu un autre ordre — prendre bien soin de Shen Jue et faire en sorte qu'il se rétablisse.

Sinon il n'aurait qu'à se présenter de lui-même au service des punitions pour y recevoir son châtiment.

Comment Li Feng aurait-il osé se rendre au service des punitions ? Du coup il était venu s'occuper de Shen Jue avec une attitude aussi aimable et douce que la brise du printemps, comme si ce n'était pas lui qui avait martyrisé Shen Jue le matin même.


Shen Jue but une gorgée du médicament et s'arrêta. Son corps était beaucoup plus petit à présent, son endurance était bien moindre dans tous les domaines alors il n'arrivait même plus à avaler un médicament. Il contempla le liquide brun et n'eut plus du tout envie de le boire. Li Feng le regardait et attendait que Shen Jue finisse le bol. Les deux restèrent un moment dans cette position jusqu'à ce que Li Feng se décide à dire :

« Tu n'aimes pas, c'est amer ? »

Shen Jue y songea un moment. De toute manière, il était actuellement un enfant alors il poussa directement le bol vers Li Feng.

« C'est trop amer. J'ai juste besoin de dormir, je n'ai pas à boire ça.

– Qu'est-ce que tu racontes ? Ce médicament est précieux, soupira Li Feng. Tu dois le boire.

– Je ne veux pas, » rétorqua Shen Jue.


Li Feng regarda le médicament d'un air bien embêté. Il aurait bien voulu se fâcher contre Shen Jue mais il se souvint de l'ordre de Murong Xiu alors il tenta de le convaincre. Cependant Shen Jue ne voulut rien entendre. Comme Li Feng craignait que le médicament ne refroidisse, il dut sortir de nouveau avec le bol. Contre toute attente, il tomba sur Murong Xiu pendant qu'il se rendait aux cuisines. Quand le prince posa les yeux sur lui, Li Feng s'inclina rapidement, effrayé, et baissa la tête pour le saluer.

Murong Xiu nota le bol de médicament à peine touché et après un moment, il fit :

« Je t'ai demandé de bien t'occuper de lui. Comment se fait-il que tu ne sois même pas capable de lui donner ses médicaments ? »

Li Feng répondit avec une expression amère :

« Votre Altesse, Shen Jue a trouvé que ce médicament était amer et il a refusé de le boire. Cet esclave a tenté en vain de le convaincre et cet esclave avait peur que le médicament ne refroidisse alors il voulait le remettre d'abord sur le fourneau. »

Murong Xiu ne dit rien puis il s'approcha de Li Feng et lui prit le bol des mains.

Li Feng n'aurait jamais pensé que Murong Xiu prendrait vraiment le bol. Il fut ébahi en voyant le prince porter le bol et se diriger droit vers les quartiers des serviteurs.


* * *


Quand Shen Jue avait vu que Li Feng avait quitté la pièce, il s'était de nouveau allongé mais peu de temps après, la porte fut à nouveau ouverte en grand. Il crut que c'était Li Feng qui revenait alors il voulut faire semblant de dormir et ferma les yeux. À sa grande surprise, il entendit la voix glaciale de Murong Xiu.

« Shen Jue. »

Shen Jue rouvrit brusquement les yeux, tourné vers le mur.

« Lève-toi et bois le médicament, » fit le prince.

Shen Jue se mordit les lèvres et se mit à sortir du lit docilement. Au moment où il allait se lever du lit pour saluer Murong Xiu, il entendit ce dernier dire :

« Si tu oses sortir du lit, je te ferai couper les jambes.

– ... »

Shen Jue remit sa jambe en place sans rien dire. Le Murong Xiu de cette vie avait vraiment un sale caractère.


Le prince portait une magnifique tenue jaune clair aujourd'hui. Si on s'arrêtait à son apparence, on avait l'impression que cet adolescent était aussi beau qu'un immortel et on avait envie de s'approcher. Mais quand on regardait dans les yeux de Murong Xiu, il n'avait plus rien d'un immortel, seulement un démon à l'apparence d'un immortel.

Il s'avança vers le lit, prit le bol qu'il tenait et fit d'un ton indifférent :

« Ouvre la bouche. »

Shen Jue se renfrogna et contempla le médicament dans les mains de Murong Xiu avec réticence. On dirait qu'il devrait boire ce médicament aujourd'hui. Il serra les dents et tendit la main pour prendre le bol mais à sa grande surprise, Murong Xiu leva les mains pour l'empêcher d'atteindre le bol.

Le prince lui lança un regard impérieux :

« Je t'ai dit d'ouvrir la bouche, tu n'as pas entendu ? »

Shen Jue dut alors ouvrir la bouche à ces mots et Murong Xiu porta le bol à ses lèvres. En voyant ça, Shen Jue se pinça le nez et commença à boire.


Ce n'était pas une expérience très agréable de se faire donner un médicament par Murong Xiu, surtout quand les yeux de l'autre étaient fixés sur lui.

Shen Jue ne put qu'ignorer l'amertume dans sa bouche et fit en sorte d'avaler le médicament aussi vite que possible. Cependant à chaque fois qu'il buvait trop vite, Murong Xiu retirait le bol. Après plusieurs allées et venues, Shen Jue se résolut à ne prendre que des petites gorgées. Son petit visage se tordit comme pour en faire sortir toute l'eau.

Quand le bol fut enfin vidé, Murong Xiu le fourra dans les mains de Shen Jue et fit d'un ton indifférent :

« La prochaine fois que tu oses tomber de nouveau malade, tu iras au service des punitions de toi-même. »

Sur ce, il fit claquer ses manches et fit demi-tour.

Shen Jue garda le bol vide dans ses mains et resta un moment sur le lit. Puis il posa lentement le bol à côté et se rallongea pour continuer à dormir.


* * *


Il fallut trois jours à Shen Jue pour se rétablir. Durant ces trois jours, Li Feng s'occupa très bien de lui. Il ne laissa pas Shen Jue faire le moindre travail et lui donna même des fruits confits.

« Cette petite boîte est remplie de fruits confits. Si tu trouves que le médicament est trop amer, prends-en un peu, » fit Li Feng en posant la petite boîte près de l'oreiller de Shen Jue.

Si Shen Jue n'avait pas vu à quel point Li Feng l'avait maltraité, il aurait pu croire que cet homme était un frère proche de lui.

Shen Jue tourna la tête pour regarder la boîte de fruits confits. La facture de cette boîte était extrêmement plaisante, surtout les gravures dessus. On pouvait voir que ce n'était pas n'importe quel artisan qui avait fabriqué la boîte et bien entendu ce n'était sûrement pas quelque chose qui appartenait à Li Feng. Quelqu'un avait donc dû passer par l'eunuque pour lui offrir ces fruits confits.

Malgré tout, Shen Jue fit comme s'il ne savait rien. Il tendit la main pour prendre la boîte dans ses bras, leva la tête et lança un sourire rayonnant à l'autre eunuque :

« Merci, frère Feng. »

Li Feng eut un sourire crispé.

« Ce n'est rien. »


Après trois jours, la situation de Shen Jue redevint comme avant : il continua à faire le travail sale et fatigant, cependant Murong Xiu ne vint pas le tourmenter. Malgré cela, Shen Jue était éreinté tous les jours. Son travail quotidien n'était pas adapté à son âge actuel.

Ce jour-là, Lu Li confia une tâche à Shen Jue. Ce serait bientôt l'automne. Conformément aux règles du palais, les eunuques pouvaient avoir deux tenues par saison. Lu Li demanda donc à Shen Jue d'aller récupérer les vêtements.

Shen Jue dut abandonner sa corvée puis il se lava les mains et quitta le palais de Qizhang.

Cela faisait des années qu'il vivait au palais alors il en connaissait les moindres chemins. Le palais de Qizhang était assez isolé. Il fallait au moins une demi-heure pour se rendre au pavillon des Affaires Domestiques par le chemin le plus court ; cela prenait donc une heure pour faire l'aller-retour. Shen Jue emprunta la petite allée. Il était midi et le soleil était mortel. Les nobles n'étaient donc pas enclins à sortir et se promener à cette heure, alors Shen Jue ne rencontra quasiment personne à part les gardes de patrouille.


Pendant que Shen Jue marchait le long de l'allée, non loin du pavillon des Affaires Domestiques, il prit un virage et heurta une personne de plein fouet.

L'homme qu'il heurta ne vacilla même pas mais Shen Jue tomba en arrière. Au moment où il allait tomber, l'homme à l'œil vif et aux mains agiles saisit rapidement sa main et la tira vers lui. Avec cette force d'attraction, Shen Jue se cogna de nouveau contre l'autre. Cette fois il ne tomba pas mais des étoiles défilèrent devant ses yeux et il eut la tête qui lui tourna.

Comment pouvait-on avoir un torse aussi dur ?

« Tu vas bien ? » fit une gentille voix au-dessus de sa tête.

Shen Jue retrouva ses esprits. Ses yeux virent clairement l'uniforme d'officiel de l'autre homme et il réagit aussitôt. Il fit un pas maladroit en arrière et allait s'agenouiller mais son corps se mit à trembler. Ces deux collisions lui avaient vraiment fait trop mal.


En le voyant dans cet état, l'homme fut un peu amusé et le tira de nouveau vers lui.

« Allons, n'essaie pas de t'agenouiller. Tu as la tête qui tourne ? »

Shen Jue leva la main pour frotter son front.

« Votre Excellence, cet esclave n'a pas la tête qui tourne.

– Ton front est rouge, tu n'as vraiment pas de vertige ? »

L'homme était bien plus grand que Shen Jue. Il s'accroupit pour mieux voir l'état du garçon. Ce fut ainsi que Shen Jue put voir clairement son visage.

Ses pupilles s'élargirent soudain.

L'homme vit Shen Jue le contempler avec hébétude et se dit seulement que le garçon avait un problème. Il tendit donc la main devant les yeux de Shen Jue et l'agita.

« Tu vas bien ? »

Shen Jue secoua brusquement la tête. Il venait de rencontrer le régent en avance. Non. Pour le moment Ni Xinyan qui avait moins de vingt ans n'était pas encore régent. Il n'était que le fils du roi Bienvenue dans la Chine antique et ses titres compliqués ! Ici un roi (wang) peut désigner le frère ou oncle de l'Empereur ou bien un dirigeant de province qui a prêté allégeance à l'Empereur. (2) de Ning.


« Je ne crois pas que tu ailles bien. »

Ni Xinyan se leva et regarda tout autour avant de ramener son regard sur Shen Jue. Il se pencha soudain et saisit Shen Jue par la taille. Les yeux du garçon s'écarquillèrent d'épouvante mais pour Ni Xinyan, il n'y avait aucun mal à soulever soudainement un jeune eunuque dans ses bras.

« Je vais t'emmener voir un médecin impérial.

– Non, votre Excellence, cet esclave va bien. Votre Excellence devrait lâcher cet esclave. »

Shen Jue ne se serait jamais attendu à ce que Ni Xinyan l'emmène voir un médecin impérial et comment Ni Xinyan, un prince, pouvait-il traverser le palais en portant un jeune eunuque ?

Néanmoins Ni Xinyan ignora totalement les protestations du garçon. Il était si fort que Shen Jue ne pouvait pas se libérer de sa prise.

« Ne t'inquiète pas, c'est moi qui t'ai heurté et t'ai fait mal alors je vais t'aider à te soigner. N'aie pas peur, petit-frère. »

Après que l'homme ait déclaré cela, il se tourna et se mit en route.


Shen Jue en resta sans voix. Impuissant, il ne put que passer son bras autour du cou de l'autre homme afin de ne pas tomber. Cependant après un moment, il ne put s'empêcher de dire :

« Votre Excellence, vous n'allez pas dans la bonne direction. La cour des médecins impériaux n'est pas par là. »

Les pas de Ni Xinyan s'arrêtèrent soudain. Il se pinça les lèvres, pivota et partit dans une autre direction.

Shen Jue lui lança un regard.

« Votre Excellence, ce n'est pas non plus par là. »

Il désigna la bonne direction de son doigt.

Ni Xinyan toussota deux fois, son beau visage montrant un peu d'embarras.

« Je sais. »

Shen Jue fut également un peu gêné. Après tout, durant ces innombrables vies, Ni Xinyan et lui n'avaient jamais eu d'interaction aussi amicale qu'en ce moment. Il baissa les yeux et fit d'une toute petit voix :

« C'est cet esclave qui parle trop. »


Ni Xinyan, cet homme tint vraiment parole et persista à le garder dans ses bras en l'emmenant à la cour des médecins impériaux. Shen Jue tenta de résister plusieurs fois en chemin, en vain. Certains gardes proposèrent même leur aide mais Ni Xinyan refusa.

Quand le médecin impérial de service dans la cour vit Ni Xiayan se présenter avec un jeune eunuque dans les bras, son visage prit un air indescriptible. Ni Xinyan s'avança rapidement et pressa le docteur d'examiner le patient comme si Shen Jue était gravement malade et sur le point de mourir.

Le médecin impérial se hâta donc d'ausculter le garçon et fit ensuite à Ni Xinyan :

« Votre Excellence, ce petit eunuque va bien. »

Ni Xinyan prit un air soupçonneux.

« Mais il avait des vertiges et ses pupilles étaient toutes dilatées.

– Ce petit eunuque a des carences, répondit le docteur. C'est apparemment une réaction ordinaire et cela n'arrivera plus si à l'avenir ce petit eunuque prend des tonifiants. »


Ni Xinyan fit alors en se tournant vers Shen Jue :

« Tu vas bien, ne t'en fais pas.

– ... »

Il ne s'en faisait pas.

Non, il y avait quelque chose qui l'inquiétait : la cour des médecins impériaux était très loin du pavillon des Affaires Domestiques.

Quelque soit le nombre de vies, est-ce que Ni Xinyan existait uniquement pour lui créer des ennuis ?


La parole à l'auteur :

Auteur immoral : Bien que le beau Murong soit devenu maléfique, tu as droit pour le moment à un régent doux et un peu idiot.

Shen Jue : Dégage !


Note de Karura :

Grosse surprise pour le régent !

Shen Jue et le régent se rencontrent (de nouveau) dans cette vie ~

Shen Jue : (°Д°) … (oh non, pas lui!)

Régent : (• o •)… (⁄ ⁄•⁄ o ⁄•⁄ ⁄)⁄

Shen Jue : (⊙_⊙)


Notes du chapitre :
(1) Shen Jue n'a vraiment aucun quotient émotionnel. 😓
(2) Bienvenue dans la Chine antique et ses titres compliqués ! Ici un roi (wang) peut désigner le frère ou oncle de l'Empereur ou bien un dirigeant de province qui a prêté allégeance à l'Empereur.






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