Cent façons de tuer un prince charmant 27

Chapitre 27


Ni Xinyan ne se rendit absolument pas compte qu'il avait créé des soucis à Shen Jue. Il vit que le garçon allait bien alors il annonça qu'il avait des choses à faire et quitta la cour des médecins impériaux en vitesse. Après son départ, Shen Jue soupira, remercia le docteur et se mit une fois de plus en route pour le pavillon des Affaires Domestiques.

Il avait voulu gagner du temps mais cela lui prit deux fois plus de temps que prévu.

Quand Shen Jue revint au palais de Qizhang, il trouva Lu Li qui l'attendait à l'extérieur. Quand il vit le jeune eunuque revenir, son visage s'assombrit.

« Shen Jue, pourquoi tu reviens aussi tard ? »

Il était impossible de cacher quoi que ce soit dans ce palais. Le fait que le prince héritier du roi de Ning ait porté un petit eunuque à la cour des médecins impériaux était tout bonnement un spectacle rare. Il ne faudrait pas plus de l'après-midi pour que l'histoire fasse le tour du palais. Après y avoir réfléchi, Shen Jue décida de ne pas mentir.


Il raconta clairement à Lu Li ce qui s'était passé. Quand l'autre eunuque apprit que Ni Xinyan, le fils du roi de Ning, avait emmené Shen Jue à la cour des médecins impériaux, il en resta estomaqué puis fit :

« C'est ce qui s'est passé ? Apporte d'abord les vêtements dans la chambre et partage-les. »

Shen Jue émit un son affirmatif. Il tria d'abord les vêtements de Lu Li puis emmena le reste dans leur chambre. Avant qu'il ne puisse commencer à faire le partage, Li Feng entra avec précipitation et l'informa que Murong Xiu exigeait sa présence au palais.

Une fois dans la pièce annexe, avant que Shen Jue n'ait le temps de s'agenouiller, la tasse de thé que tenait Murong Xiu avait déjà été lancée vers lui. Il n'osa pas esquiver. La tasse se brisa un peu devant ses pieds et le thé brûlant éclaboussa le bas de sa tunique.

« Approche, » fit froidement Murong Xiu.


Shen Jue baissa la tête et contourna avec précaution les morceaux de porcelaine brisés au sol pour s'approcher de Murong Xiu. Dès qu'il s'immobilisa, le prince renifla froidement :

« Tu oses faire un détour ? »

Cette remarque plongea Shen Jue dans la confusion car il ignorait si Murong Xiu parlait du fait qu'il avait contourné les morceaux de porcelaine ou bien s'il se référait à son détour avant de se rendre au pavillon des Affaires Domestiques.

Shen Jue y réfléchit un moment puis fit demi-tour et s'apprêta à marcher sur la porcelaine brisée. Il ne sut ce qu'il prit à Murong Xiu : ce dernier devint furieux en voyant ses agissements et s'écria d'un ton furieux :

« Disparais ! »

Il ne s'était même pas écoulé une tasse de thé Ancienne unité de temps qui correspond à une période entre dix et quinze minutes. C'est le temps de savourer une bonne tasse de thé ! (1) entre l'arrivée de Shen Jue au palais et son départ. Quand il sortit du palais, il ne put s'empêcher de lancer un regard en arrière. Le caractère de Murong Xiu dans cette vie était non seulement terrible mais aussi tout bonnement bizarre.


* * *


Dans les jours qui suivirent, Shen Jue connut la paix tandis que Murong Xiu fut très occupé. Comme le prince n'avait pas encore l'âge du guan, il devait aller en cours tous les jours au Collège Impérial de l'Apprentissage Suprême, tel était la règle. Deux jours auparavant, le huitième prince était accidentellement tombé au Collège et s'était ouvert le crâne. La concubine Jing reprocha publiquement à Murong Xiu, qui était le plus âgé, de ne pas avoir protégé le huitième prince alors elle l'obligea à rester debout aux portes du palais du huitième prince. Quand ce dernier reprendrait connaissance, la punition de Murong Xiu prendrait fin.

Et quelques jours plus tard, la rumeur courut dans le palais que le huitième prince était devenu un idiot et que la concubine Jing avait pleuré et s'était évanouie plusieurs fois. La punition de Murong Xiu évolua et passa de rester debout à rester agenouillé. Le jeune eunuque qui servait Murong Xiu le jour-là reçut trente coups de planche et ne revint plus jamais au palais de Qizhang. Li Feng se renseigna discrètement et revint dire que le jeune eunuque était handicapé à vie suite aux coups.

Quant à l'eunuque qui servait le huitième prince, il fut directement exécuté.


La concubine Jing avait agi de façon aussi extrême, surtout le fait que Murong Xiu était puni et devait rester à genoux. L'Empereur se mit en colère en apprenant ça. Quoi qu'il se soit passé, Murong Xiu était aussi un prince. Il n'y avait aucune raison pour qu'il se mette à genoux à cause de son petit-frère. De plus l'Empereur avait soigneusement enquêté sur la cause de la blessure du huitième prince. C'était le huitième prince qui s'était montré indiscipliné et imprudent : il avait insisté durant la pause pour monter sur le dos de son eunuque comme sur un cheval. Puis il était accidentellement tombé d'en haut et s'était cogné la tête sur la bordure d'un parterre de fleur. Tout cela n'avait strictement rien à voir avec Murong Xiu.

Après la colère de l'Empereur, bien qu'il ordonna à tous les médecins impériaux de soigner le huitième prince, il confina la concubine Jing chez elle pendant un mois.

Cependant Shen Jue savait parfaitement que la blessure du huitième prince ne pouvait pas ne rien avoir avec Murong Xiu : après tout durant les vies précédentes, le huitième prince ne s'était jamais blessé à la tête et était encore moins devenu un idiot. Shen Jue devina donc que Murong Xiu avait dû arranger ça en secret et que son but était certainement lié à la concubine Jing : à présent que le huitième prince était un idiot, la concubine Jing n'aurait pas d'autre choix que de soutenir Murong Xiu à l'avenir.


En effet un mois plus tard, le confinement de la concubine Jing prit fin et elle envoya aussitôt sa dame de compagnie la plus compétente afin d'inviter Murong Xiu.

Shen Jue avait deviné environ 70 à 80% des pensées de la concubine Jing. Son propre fils étant devenu stupide, il n'était plus apte à prétendre au trône. Durant ce mois passé, elle n'avait pu dormir de toute la nuit. Ses jours de gloire étaient maintenant derrière elle et à présent l'Empereur ne venait dans son palais que pour s'asseoir et prendre le thé. La concubine la plus récente était aussi belle qu'une fleur, comment pourrait-elle lutter pour obtenir les faveurs de l'Empereur ? Sa famille maternelle ne suffisait pas et cette famille comptait également sur elle pour obtenir du pouvoir au palais. Elle avait désormais à sa charge un fils idiot, que pouvait-elle faire ?

La concubine Jing songea alors à Murong Xiu et se targua de ne pas s'être montrée trop méchante envers lui, surtout avant la naissance du huitième prince. Le huitième prince était pratiquement un frère pour Murong Xiu. Quand quelque chose arrivait à son petit-frère, le grand-frère devait naturellement le protéger. Par conséquent la concubine Jing invita Murong Xiu dans son palais.


Le jour après l'invitation, le palais de Qizhang reçut plein de bonnes choses, toutes envoyées par la concubine Jing. Il y avait aussi quelques eunuques parmi les présents et dans ce groupe, Shen Jue vit quelqu'un qu'il ne se serait jamais attendu à voir — Feng Qingbao.

Feng Qingbao avait environ le même âge que Shen Jue et il était né comme une splendide brioche à la vapeur. À cause de son visage plaisant, même Li Feng se montra très aimable avec Feng Qingbao.

Dès que Feng Qingbao arriva au palais de Qizhang, il devint l'eunuque personnel de Murong Xiu. Bien qu'il lui arrivait de faire des erreurs, Murong Xiu ne le punissait jamais et l'appelait Qingbao d'un ton affectueux.


Shen Jue avait à peu près le même âge que Feng Qingbao mais leurs statuts étaient très différents. Le Feng Qingbao de cette vie ne se souvenait pas de Shen Jue, il lui lançait juste des regards curieux quand il le voyait se faire punir. Cependant dès que Murong Xiu surprenait son regard, la punition de Shen Jue devenait encore plus sévère.

Après un moment, Feng Qingbao réalisa aussi après coup que dès qu'il regardait Shen Jue, ce dernier se faisait punir. Alors il arrêta de le regarder afin que l'autre eunuque ne soit plus puni. Il ressentait vraiment de la pitié pour Shen Jue à chaque fois qu'il se faisait punir.


* * *


Peu de temps après l'incident du pavillon des Affaires Domestiques, Shen Jue vit de nouveau Ni Xinyan. Ce jour-là Shen Jue avait reçu l'ordre de cueillir des fleurs dans un jardin près du palais de Qizhang afin de les faire sécher et d'en faire du thé d'hiver. Le jardin fleuri n'était pas comparable au jardin impérial, peu de gens s'y rendaient. Alors Shen Jue porta son panier et cueillit des fleurs tout en marchant. Il se concentra uniquement sur les fleurs et ce fut pour ça qu'il marcha sur quelqu'un par accident.

L'homme sur qui Shen Jue venait de marcher inspira un grand coup. Shen Jue se rendit également compte qu'il avait marché sur quelque chose et il retira vivement son pied avant de baisser les yeux.

Il vit Ni Xinyan dans un uniforme d'officiel d'un noir d'encre et allongé par terre en souriant avec insouciance. Quand il vit Shen Jue, il s'assit en s'appuyant sur ses mains et un sourire innocent apparut sur son beau visage.

« C'est toi, petit-frère. »


Shen Jue recula prestement de deux pas et salua d'abord Ni Xinyan.

Le jeune homme vit le panier dans les mains du garçon et demanda avec curiosité :

« Tu cueilles des fleurs ? C'est pour prendre un bain avec des pétales de fleurs ? Ça ne va pas attirer les insectes ?

– ... »

Il avait presque oublié que pour le moment, Ni Xinyan était uniquement un guerrier.

Son père, le roi de Ning, venait d'une famille de militaires. Plus tard il reçut le titre de roi et un nom de famille différent grâce à ses exploits militaires impressionnants. En tant que fils unique du roi de Ning, Ni Xinyan avait grandi dans les camps militaires. Contrairement à la jeunesse noble de la capitale, il avait été complètement élevé comme un guerrier puis il s'était rendu à la frontière pour y passer plusieurs années. Voilà pourquoi il tomberait par la suite amoureux de Murong Xiu dès le premier regard : Ni Xinyan était habitué à ne voir que des hommes rugueux alors la première fois qu'il vit une beauté comme Murong Xiu, son cœur en fut ému.

Après que Ni Xinyan soit devenu le régent, il se débarrassa peu à peu de ses manières de brigand.


« Ce n'est pas pour se baigner, c'est pour faire du thé, expliqua Shen Jue en sortant une fleur du panier. Quand on a fait sécher la fleur, on la met dans une jarre. On peut alors s'en servir pour faire du thé en hiver. »

Le coin des yeux de Ni Xinyan se redressa, il se leva et prit la fleur des mains du garçon. Il l'examina à la lumière du soleil puis eut un léger rire et la rejeta dans le panier de l'eunuque.

« Qu'est-ce qu'il y a de bon dans le thé ? L'eau de vie, c'est bon. Tu as déjà bu de l'alcool ? »

Shen Jue sentit la migraine venir. Qui irait demander à un garçon de dix s'il avait déjà bu de l'alcool ?

En fait, il en avait déjà bu mais pas dans son corps actuel.

« Cet esclave n'a jamais bu. »


Dès qu'il entendit la réponse de Shen Jue, Ni Xinyan posa la main sur la tête du garçon. Vu la taille du jeune homme, la main sur la tête de Shen Jue parut pile poil à la bonne hauteur.

« Comment un homme peut-il ne pas avoir bu ? J'avais déjà bu à l'âge de sept ans. Viens, je vais t'emmener dans une taverne.

– Cet esclave n'est pas un homme, répliqua Shen Jue en se pinçant les lèvre.

– Comment peux-tu ne pas.. »

La voix de Ni Xinyan s'interrompit brusquement et ses yeux se dirigèrent vers le bas. Après un moment, il eut une toux embarrassée.

« Ce n'est pas grave, ça va repousser plus tard.

– ... »

C'est vraiment amusant de mentir aux enfants ?


Shen Jue avait la patience de jouer avec Murong Xiu mais n'avait pas du tout la patience de continuer à bavarder avec Ni Xinyan. Après tout cet homme n'était pas le maître de ce monde alors il lui fit d'un air sérieux :

« Votre Excellence, cet esclave doit cueillir les fleurs. Si votre Excellence a quelque chose à faire, il peut partir. »

Le jeune Ni Xinyan semblait ne pas comprendre la langue humaine.

« Ne t'en fais pas pour moi, tu veux que je t'aide ? De toute manière, je n'ai rien d'autre à faire. »

Shen Jue rejeta Ni Xinyan sans merci et le jeune homme ne manifesta pas son mécontentement mais continuer à rester allongé par terre avec désinvolture.

Heureusement, Shen Jue avait cultivé le Dao pendant de nombreuses années et il avait déjà croisé toutes sortes de gens étranges. En voyant Ni Xinyan se rallonger, il ne montra aucune surprise et se rendit directement de l'autre côté avec son panier. En voyant que Shen Jue s'en allait, Ni Xinyan se redressa de nouveau.


Il contempla le dos du garçon avec une expression stupéfaite. Quand les gens de ce palais le voyaient, ils le regardaient soit avec des yeux craintifs, méprisants ou étonnés. Bien que ce petit eunuque ait été d'abord surpris en le voyant, il tentait de l'éviter au maximum.

Oui, Ni Xinyan avait découvert que Shen Jue cherchait à l'éviter.

Bien qu'il semblait être un esclave bien élevé, il n'y avait en fait aucun respect dans ses yeux, seulement du silence.

En plus ce petit eunuque n'avait pas du tout eu l'air surpris de le voir se rallonger.

Pourquoi ?

Quelqu'un de normal lui demanderait pourquoi il était allongé là, non ?

Dans ce cas il aurait pu répondre qu'il trouvait que la vue était belle d'ici et que c'était très confortable d'être allongé au soleil.

Mais ce petit eunuque n'avait pas posé la question.


* * *


Shen Jue s'éloigna tout en sentant le regard insistant dans son dos. Il n'y songea qu'un peu avant de reléguer Ni Xinyan au fin fond de son esprit. Le Ni Xinyan actuel était trop faible alors il n'avait pas besoin de faire trop attention à lui.

Trois ans plus tard, Ni Xinyan changerait du tout au tout.

Cependant même si Shen Jue voulait ignorer Ni Xinyan, ce dernier semblait avoir décidé de ne pas le laisser faire à sa guise. Avec obstination, il se dépêcha et se plaça devant Shen Jue.

« Rien qu'à te voir cueillir des fleurs pour faire du thé, j'imagine que ton maître est quelqu'un d'élégant, un prince peut-être ? Et si je lui rendais visite ?

– Non, » répondit Shen Jue sans réfléchir.

Ni Xinyan en fut étonné.

« Pourquoi ? »

Shen Jue réfléchit avant de répondre cette fois.

« Mon maître a peur des étrangers. »

Il marqua une pause.

« Tout comme cet esclave. »


Comment pourrait-il laisser Ni Xinyan voir Murong Xiu en avance ?

Mais les paroles de Ni Xinyan sonnèrent comme un coup de massue pour Shen Jue. Le Murong Xiu actuel avait ses souvenirs alors il se rappelait évidemment de Ni Xinyan et se rappelait que ce dernier l'avait aidé à monter sur le trône.

Quand Shen Jue cultivait le Dao, son frère aîné martial aimait lire des romans de mortels et parfois il insistait pour les raconter à Shen Jue. L'un de ces romans parlait d'une femme qui était renée après une mort tragique et était revenue en arrière pour se venger. En cours de route, elle finit aussi avec celui qui l'avait toujours appréciée sincèrement dans sa vie précédente.

Ce n'était pas grave si Murong Xiu le haïssait pour le moment mais si le prince tombait amoureux de Ni Xinyan, alors Shen Jue n'aurait plus aucune chance.

Mais comment faire pour l'en empêcher ? Il craignait fort que Murong Xiu n'ait plus du tout confiance en lui.

Le regard de Shen Jue se posa alors sur Ni Xinyan. Et si le Ni Xinyan de cette vie ne tombait pas amoureux de Murong Xiu ? Cela augmenterait-il ses chances ?


Ni Xinyan vit soudain le garçon le fixer avec attention. Il l'entendit dire avec surprise :

« Votre Excellence, l'eau-de-vie est vraiment meilleure que le thé ? »


La parole à l'auteur : Si tu ne m'aimes pas, alors je vais... séduire ton futur petit-ami.

Murong Xiu éjecte Feng Qingbao d'un coup de pied et fait d'un ton indigné : Je n'ai pas séduit cet esclave.

Shen Jue : Désolé, cette phrase est pour moi.

Ni Xinyan : De quoi tu parles ? Pourquoi je n'y comprends rien ?


Note de Karura :

[Ni Xinyan vous a envoyé une demande d'amitié.]

Shen Jue, sèchement : Refusé.

Ni Xinyan : Il est timide. (✿◡‿◡)

[Ni Xinyan vous a envoyé une demande d'amitié.]

Shen Jue, agacé : Refusé.

Ni Xinyan : Il est trop embarrassé. (❁´◡`❁)

[Ni Xinyan vous a envoyé une demande d'amitié.]

Shen Jue, soupire : Accepté.

Ni Xinyan : Yatta ! \(@^0^@)/

Murong Xiu, seul devant son écran à hésiter : … C'est une demande d'amitié ou une demande de mort ?


Sinon, j'aime beaucoup les lectures de ce frère aîné martial. Au fait, il semble beaucoup vouloir que Shen Jue s'intéresse à l'amour, mmm ?


Notes du chapitre :
(1) Ancienne unité de temps qui correspond à une période entre dix et quinze minutes. C'est le temps de savourer une bonne tasse de thé !






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