Chapitre 37

Shen Jue s'agenouilla et plaça deux doigts sous le nez de Murong Xiu.

Pas un souffle.

Il fronça les sourcils et se repassa soigneusement en tête ce qu'avait dit le Vénérable Chi Yan. Murong Xiu était volontairement mort de ses propres mains alors pourquoi n'avait-il pas quitté ce monde ? Se pouvait-il que Murong Xiu ne soit pas le maître de ce monde ?

Non, il avait tué Murong Xiu dans la vie précédente et le monde avait bien été détruit.

En y réfléchissant, Shen Jue se rappela soudain de quelque chose que Murong Xiu lui avait dit. Il lui avait demandé de promettre deux choses : la seconde était qu'après sa mort, Shen Jue ne pouvait pas être avec Ni Xinyan. Se pouvait-il qu'il doive faire cela pour briser cette illusion ?

Il songea à ce qui s'était passé dans la vie précédente : Ni Xinyan était mort en premier puis il avait tué Murong Xiu et le monde s'était détruit. Dans cette vie, Ni Xinyan était encore en vie. Les yeux de Shen Jue s'écarquillèrent légèrement : peut-être qu'il devait tuer Ni Xinyan aussi.

À cette idée, Shen Jue retourna le corps de Murong Xiu et retira la dague de son torse d'un geste décidé.

Le sang éclaboussa son visage et Shen Jue le ressuya du revers de la main d'un geste absent. Il allait ensuite dans la salle d'eau pour nettoyer le sang de la dague. Il prit la ceinture de Murong Xiu et se rendit à son étude. Après y avoir trouvé une carte des environs, il sortit du manoir. Il vit un cheval attaché aux portes du manoir. L'animal était couvert de sang, ce devait être le cheval que Murong Xiu avait pris pour revenir.

Shen Jue monta dessus et se dirigea vers la sortie de la cité.

La cité de Yongle était envahie par la panique et le chaos. Les gens avaient appris la nouvelle de la défaite de Murong Xiu alors ils avaient fait leurs bagages pour s'enfuir tard dans la nuit. L'ombre de la dernière cité massacrée était encore bien présente dans les esprits.

Shen Jue ne se fit pas remarquer parmi les gens en fuite. Aux portes de la ville, il descendit de cheval et se mêla à la foule. Les gardes de la cité de Yongle étaient complètement désorganisés. Tout le monde voulait s'enfuir alors qui allait s'intéresser aux autres ?

Après avoir quitté la ville, Shen Jue chevaucha jusqu'à la frontière du royaume de Yong.

Grâce la carte il ne se perdit pas. Après un jour de voyage, il était déjà arrivé aux abords de la ville où avait eu lieu le massacre. Cette ville faisait désormais partie du territoire du pays de Yong et elle était protégée par les troupes de Yong.

Shen Jue avait entendu Murong Xiu dire une fois que l'armée de Ni Xinyan était stationnée là.

Shen Jue arriva seul à cheval, cela attira immédiatement la suspicion des gardes sur les remparts.

Ils pointèrent Shen Jue de leurs flèches et l'interpellèrent vivement :

« Qui va là ? »

Shen Jue tint les rêne de son cheval d'une main et brandit la plaque de jade de Murong Xiu de l'autre.

« J'ai à parler à votre général Ni. Voici ma plaque, donnez-la lui. »

Les soldats lui lancèrent des regards méfiants. L'un d'eux s'avança prudemment et examina attentivement Shen Jue avant de marmonner quelques mots au soldat à côté de lui.

L'homme hocha la tête et partit aussitôt en courant.

Après un moment, les portes de la ville s'ouvrirent et un soldat en sortit. Il prit la plaque des mains de Shen Jue et fit :

« Attends ici. »

Puis il fit demi-tour en courant.

Le soldat apporta la plaque à l'homme précédente. Quand il vit la plaque, ses yeux s'illuminèrent en reconnaissant la plaque. Elle appartenait au général de Murong et c'était comme s'il se montrait en personne.

« Qui es-tu ? Un homme de Murong Xiu ? » cria l'homme à Shen Jue.

L'adolescent répliqua :

« Vous n'avez pas besoin de savoir qui je suis. Sachez simplement que j'apporte une grande nouvelle pour votre général. Vous pouvez lui dire qu'une vieille connaissance du nom de Shen est venue le voir. »

L'homme hésita puis se tourna et descendit vers la cité.

Shen Jue attendit un bon moment à l'extérieur de la ville avant d'entendre des bruits de sabots qui se rapprochaient.

Les portes s'ouvrirent de l'intérieur et un homme se rua vers lui sur un cheval noir.

C'était Ni Xinyan.

Portant un masque noir, Ni Xinyan galopa jusqu'à Shen Jue avant de tirer sur les rênes pour faire stopper son cheval. Il contempla l'adolescent sans rien dire un bon moment puis murmura :

« Que fais-tu ici ?

– Murong Xiu est mort, » répondit Shen Jue.

Ni Xinyan sembla pris au dépourvu.

« Mort ? Qui l'a tué ? »

Il marqua une pause puis fit :

« C'est toi qui l'as tué ? »

Shen Jue acquiesça.

Ni Xinyan descendit aussitôt de cheval à cette nouvelle. Il s'approcha de la monture de Shen Jue et souleva soudain l'adolescent pour le poser par terre. Il le tint fermement dans ses bras, le regard brûlant.

« Tu l'as vraiment tué ?

– Le corps se trouve toujours dans la cité de Yongle. Si tu ne me crois pas, tu peux envoyer quelqu'un vérifier, » répliqua-t'il calmement.

Ni Xinyan eut un léger rire et avait l'air très heureux.

« Non, je te crois. Shen Jue, je sais que la dernière fois, tu l'as berné pour gagner sa confiance mais pourquoi fallait-il que tu le tues toi-même ? Et s'il t'avait blessé ? »

En disant cela, il se mit à vérifier si Shen Jue était blessé.

L'adolescent l'arrêta.

« Je ne suis pas blessé, inutile de regarder.

– D'accord, d'accord, céda Ni Xinyan. Tu as fait tout ce chemin, tu dois être fatigué. Suis-moi d'abord en ville. »

Shen Jue jeta un coup d'œil aux soldats qui l'observaient du haut des remparts et hésita. Il choisit alors de ne pas agir tout de suite. Il suivit docilement Ni Xinyan dans la ville. Quand l'homme vit le cheval qu'il montait, il fit une grimace de dégoût et voulut que l'adolescent monte avec lui.

Ni Xinyan voulait qu'il prenne place devant mais Shen Jue secoua la tête.

« Je n'aime pas être assis devant. Pas question que je m'installe devant.

– Alors c'est moi qui serai devant, » fit-il d'un ton conciliant.

Ni Xinyan monta sur le dos de son cheval puis se tourna vers Shen Jue.

« Monte. »

Il lui tendit la main.

Shen Jue saisit sa main, s'appuya sur lui et monta en selle.

Ni Xinyan tira sur les rênes d'une main et saisit la main de Shen Jue de l'autre pour la passer autour de sa taille.

« Tiens-toi bien. Ce cheval court vite. Attention à ne pas tomber.

– En, répondit l'adolescent.

– Quand mes hommes m'ont dit que quelqu'un voulait me voir, je ne m'attendais pas à toi en premier. En voyant la plaque de jade, j'ai d'abord cru que c'était Murong Xiu qui venait se rendre. J'allais lui dire que c'était trop tard, ah ah. »

Dans la nuit, la silhouette de Ni Xinyan était baignée par le clair de lune et sa voix semblait plus douce que jamais.

« Tu as raté ça, j'ai battu son armée il y a deux jours, ils se sont fait dessus et ils se sont enfuis en débandade. Il n'a rien pu faire contre moi. Je suis un peu déçu qu'il soit mort avant que je l'entende reconnaître sa défaite. Par contre, c'est mieux pour lui. »

Shen Jue regarda l'homme devant lui sans cligner des yeux.

Ni Xinyan parlait beaucoup. Quand il vit que Shen Jue n'avait pas encore dit un mot, il tourna légèrement la tête.

« Qu'y a-t'il ? Tu es effrayé ? Je te l'ai dit, pourquoi l'avoir fait toi-même ? La prochaine fois, laisse-moi faire.

– Ni Xinyan, appela doucement Shen Jue.

– Mmm ? » répondit-il en se tournant vers lui.

L'instant d'après, il grogna. Il baissa les yeux vers la dague qui dépassait de son corps et en fut choqué.

« Xiao Jue ? » fit-il d'un ton ébahi.

Shen Jue appliqua un peu plus de force. Ni Xinyan cracha du sang. Il porta une main tremblante à sa blessure sur le côté et lança un regard incrédule à l'adolescent.

« Shen Jue, pourquoi tu... pourquoi tu veux me tuer ? »

Shen Jue ne le regarda pas : il contempla l'horizon. Comme prévu, le monde commençait à s'estomper.

Il s'avérait qu'il ne suffisait pas de tuer Murong Xiu, il fallait aussi tuer Ni Xinyan. Cela voulait-il dire que Ni Xinyan était également le maître de ce monde ?

Shen Jue se rappela que parfois, Murong Xiu et Ni Xinyan avaient présenté des similarités frappantes dans leurs pensées et leurs comportements, comme s'ils ne faisaient qu'un. Se pouvait-il que Murong Xiu et Ni Xinyan ne soient qu'une seule et même personne ?

Mais ce n'était qu'une supposition de la part de Shen Jue. Peut-être simplement que Murong Xiu l'avait vu tuer Ni Xinyan et était donc prêt à laisser son âme se dissiper.

Ni Xinyan ne parut pas se rendre compte que le monde autour de lui s'effaçait. Il regarda uniquement Shen Jue pendant un bon moment avant de dire :

« Tu m'as tué pour lui ? Tu as menti en disant que tu avais tué Murong Xiu ? »

Le regard de Shen Jue se modifia légèrement. Il se tourna vers Ni Xinyan. Comme il n'était pas exclu que cet homme soit aussi le maître de ce monde, Shen Jue s'expliqua cette fois :

« Non, j'ai bien tué Murong Xiu mais je devais aussi te tuer, Ni Xinyan. Tu savais que c'était ton monde et celui de Murong Xiu ? J'ai été piégé dans ce monde pendant plusieurs vies et à chaque fois je suis mort de tes mains.

« Je ne peux me libérer qu'en te tuant. »

Ni Xinyan parut trouver cela ridicule. Il eut un rire impuissant puis tendit lentement la main pour toucher le visage de Shen Jue, le regard grave.

« Je ne comprends pas de quoi tu parles mais si tu m'as vraiment tué pour Murong Xiu, je ne peux que renoncer. Xiao Jue, quand tu m'as extirpé des cadavres, je te devais une vie. Je te rembourse ma dette maintenant. Rappelle-toi de sourire davantage à l'avenir. Mais si tu n'as pas envie de sourire, alors ne souris pas. Si tu te contentes de faire semblant, c'est triste... »

Tandis que sa voix s'éteignait sur le dernier mot, il tomba lentement sur Shen Jue.

L'adolescent le regarda puis leva la tête pour voir le ciel qui disparaissait progressivement au loin.

Le frère aîné martial de Shen Jue lui avait dit une fois :

« Petit-frère, tu es si peu romantique. Si quelqu'un tombe amoureux de toi plus tard, il va à l'encontre d'une grande déception. »

À l'époque le visage de Shen Jue était resté inexpressif.

« Pour quelle raison un immortel aurait-il besoin d'amour ? N'est-ce pas la source de tourments des mortels ? À force d'employer le mot amour pour tout et n'importe quoi, on ne fait que chercher les tourments. Seule la cultivation du Dao est le bon chemin. Le maître a dit que tant qu'on s'entraîne durement, on peut comprendre la vérité suprême. »

Son frère martial prit un air attristé.

« Comment tu as pu prendre un tel tempérament ? Quand tu étais petit, tu étais pourtant si mignon... »

Shen Jue n'eut pas la patience d'en écouter davantage et fit demi-tour, son épée en main.

Le mot amour était synonyme de tourments..

Ce n'était qu'en se débarrassant de l'amour qu'on n'avait plus aucune crainte dans le cœur.

Shen Jue s'était toujours conseillé cela.

La parole à l'auteur : Ce petit monde est fini.

Choisissons ce que je vais écrire dans le prochain monde :

1. Omega (Shen Jue) x Playboy

2. Chef d'une secte démoniaque (Shen Jue) x Clair de Lune blanc Un Clair de Lune est une personne que l'on aime de loin et qui est inaccessible. Blanc est pour la pureté et la gentillesse. (1) qu'on ne peut pas aimer.

Note de Karura : Que voilà des idées intéressantes mais en fait... l'auteur a modifié ces idées.

Bon, tout le monde a survécu à ce monde ? Vous commencez à comprendre ce qui m'a rendu accro très vite ? Bon, recollez les morceaux de vos cœurs brisés et... continuons !

Notes du chapitre :
(1) Un Clair de Lune est une personne que l'on aime de loin et qui est inaccessible. Blanc est pour la pureté et la gentillesse.

Commentaires :

Karura Oh a écrit le samedi 30 Octobre 2021 à 12:48:25
Eh oui, même pas un dernier baiser ! Après, Shen Jue n'a rien demandé de tout ça, il ne fait que subir en attendant de pouvoir s'échapper.
Malheureusement pour lui, il va y avoir encore plein d'autres mondes à subir.