Cent façons de tuer un prince charmant 76

Chapitre 76


Quand ces mots furent prononcés, même Qiao Jiangyuan en resta stupéfait.

Même lui n'irait jamais tendre le cou à un semi-vampire sur un coup de tête. Tout le monde savait que les semi-vampires étaient incapables de se contrôler. Si l'un d'eux vous mordait le cou, il risquait de vous vider de votre sang.

Il se redressa légèrement et fixa Shen Jue.

« Shen Jue, arrête tes bêtises.

– Ce ne sont pas des bêtises, répliqua le concerné. Je ne me suis jamais fait sucer le sang par un semi-vampire. Je suis un peu curieux alors j'ai envie d'essayer. »

Il tourna la tête vers son ami :

« Et si on essayait ensemble ? »


Qiao Jiangyuan et lui avaient grandi ensemble pendant plusieurs vies. Il y avait une chose qu'il savait avec certitude : Qiao Jiangyuan était extrêmement prudent et c'était un égoïste fini. Jamais il ne confierait sa vie à quelqu'un d'autre.

Sans surprise, Qiao Jiangyuan refusa aussitôt la proposition de Shen Jue.

Ce dernier arbora un air de regret.

« Alors dans ce cas, je serai le seul à essayer. »

Quand Yu Qing entendit ça, il fut encore plus affolé. Il ne savait pas quoi faire. Même si on lui multipliait son courage par cent, jamais il n'oserait boire le sang du duc.

Car même si Shen Jue lui permettait de boire son sang maintenant, il pouvait très bien retourner sa veste plus tard comme la dernière fois. Or boire le sang de son maître était un crime bien plus grave que le vol. Après avoir songé à tout ça, Yu Qing s'agenouilla simplement et lança un regard implorant au duc. Toutefois, ses canines n'avaient toujours pas disparu.


Shen Jue parut amusé par l'apparence du jeune homme et il tendit la main pour toucher les canines de l'autre.

Les canines étaient ce qu'il y avait de plus précieux aux yeux des vampires. Yu Qing se raidit à ce contact et n'osa plus bouger, de crainte que ses dents n’entaillent un tant soit peu le doigt du duc.

« Elles sont si petites, comment tu arrives à boire du sang avec ? murmura Shen Jue. Au fait, tu as déjà bu le sang d'un vampire ?

– Non, jamais, répondit Yu Qing avec nervosité.

– Tiens donc, alors je serai ton premier ? »

Shen Jue eut un léger rire puis se tourna soudain vers l'autre duc.

« Qiao Jiangyuan, tu te souviens la fois où j'ai bu ton sang quand on était plus jeunes ? »

Bien que ce soit une question, son ton était des plus affirmatifs.


Qiao Jiangyuan hocha la tête.

« Je m'en rappelle. Quand tu étais plus jeune, tu as dit que tu voulais goûter le sang d'un vampire et voir si c'était aussi bon que du sang humain. Tu as alors insisté pour que je te laisse boire mon sang et au bout du compte... »

Avant qu'il n'ait fini sa phrase, Shen Jue avait déjà complété pour lui :

« Je t'ai pris tant de sang que tu t'es évanouis. Désolé, ah. J'étais trop jeune à l'époque et je ne savais pas bien me contrôler. »

L'expression sur le visage de Qiao Jiangyuan ne varia pas.

« C'est pour ça que je pense que tu ne devrais pas faire quelque chose d'aussi dangereux. »

Il lança un regard à Yu Qing.

« Il peut boire bien plus de sang que toi quand tu étais jeune.

– Mais je viens de découvrir quelque chose d'intéressant, comment pourrais-je ne pas le faire ? Sinon, ce serait tellement ennuyeux d'avoir une si longue vie. »


Shen Jue détourna le regard pour le reposer sur Yu Qing en face de lui. Il tourna légèrement la tête sur le côté.

« Viens, prends une gorgée. »

Il dévoila son cou pâle.

Yu Qing vit la légère couleur bleue sous la peau et les canines qui avaient commencé à disparaître ressurgirent de nouveau. Il fixa le cou devant lui et son regard se figea peu à peu, comme s'il ne pouvait voir que le cou en face de lui et plus rien d'autre, qu'il ne pouvait plus entendre le bruit du monde extérieur mais ne pouvait que sentir la douce odeur du sang dans ses narines.

Non, c'était lui qui s'imaginait cette odeur de sang.

Mais il avait vraiment envie d'en boire, au point d'en devenir fou.


Le corps de Yu Qing frissonna légèrement. Après un moment, il se rapprocha lentement de Shen Jue. Pour une étrange raison, il sentait que cet homme était encore plus attirant à ses yeux que le sang humain qu'il avait bu la dernière fois. C'était sûrement parce qu'il s'agissait d'un être vivant. Le sang dans la coupe de la dernière fois avait beau être frais, cela faisait un moment qu'il avait été prélevé du corps. C'était donc du sang mort. Là, ce n'était pas du tout pareil. Il pouvait boire le sang le plus frais possible avec juste une morsure, du sang qui jaillissait des veines.

L'autre homme était cependant un noble dont le rang dépassait largement le sien, et son maître qui plus est.

Les vampires étaient une race qui avait besoin de sang pour survivre. Ils buvaient donc beaucoup et parfois ils buvaient également le sang de leur propre espèce mais souvent dans ce cas, c'était le vampire de rang supérieur qui buvait le sang d'un vampire de rang inférieur. C'était comme une marque de souveraineté, tout comme le vampire actif mordait le cou de son partenaire quand ils faisaient l'amour.

Il était donc très rare pour un vampire de rang inférieur de pouvoir boire le sang d'un supérieur, et encore moins pour un esclave semi-vampire de boire le sang de son maître.

C'était tabou mais plus une chose était tabou, plus elle devenait excitante et fascinante.


Yu Qing se lécha nerveusement les dents puis baissa un peu la tête.

En cet instant, le cou de Shen Jue était tout près de lui. Il n'avait qu'à ouvrir la bouche pour le mordre.

Mordre ou ne pas mordre ?

Yu Qing contempla fixement le cou de Shen Jue et se lécha de nouveau les dents. Il luttait contre lui-même, sauf que Shen Jue finit par perdre patience : il jeta un coup d'œil à Yu Qing puis tendit la main pour la passer derrière la tête de l'autre afin de pousser la tête vers lui.

Les canines touchèrent la peau froide et ne se firent pas prier pour la transpercer.

Shen Jue se renfrogna, un peu mal à l'aise. Il retira sa main puisque Yu Qing n'avait plus besoin de lui.

Le jeune homme pressa la nuque de Shen Jue de son propre chef et même ses mains devinrent audacieuses : il posa une main sur la nuque du duc, comme s'il craignait que sa noble proie ne s'échappe de ses crocs.


Sur le côté, Xiang Wen était à deux doigts de broyer ses dents. Il eut bien du mal à résister à l'envie de se précipiter pour arracher ce misérable de son seigneur duc.

Le duc était bien trop bon, il laissait un sale semi-vampire boire son sang. Même Xiang Wen n'avait jamais goûté au sang du duc. S'il pouvait un jour en boire ne serait-ce qu'une gorgée, cela suffirait à son bonheur.

Yu Qing but avec trop d'enthousiasme. L'odeur du sang emplit peu à peu l'air.

Xiang Wen se lécha les dents involontairement. Comme il avait peur de se montrer sous un jour guère reluisant, il préféra reculer. Ce sang frais avait vraiment une odeur merveilleuse.


De tous ceux présents, seul Qiao Jiangyuan garda la tête froide. Il observa Yu Qing qui buvait le sang de Shen Jue qui se trouvait dans ses bras.

Que ce soit sa posture ou l'expression de son visage, les deux révélaient l'extase du semi-vampire en cet instant.

Après un moment, Qiao Jiangyuan n'y tint plus et se leva. Il s'avança rapidement vers le couple et tira directement Yu Qing en arrière.

« Ça suffit, tu veux vider ton maître de son sang ? »

Quand il se fit tirer en arrière, il y avait encore un peu de sang sur les dents de Yu Qing et son regard était vide, comme s'il n'avait pas encore retrouvé ses esprits.

Qiao Jiangyuan le fixa avant de se tourner vers Shen Jue.

L'homme semblait fatigué et pâle. Il leva une main à l'endroit où il venait de se faire mordre.

Il avait un peu sous-estimé Yu Qing : ce gars l'avait bien mordu et bu son sang, sa nuque était percée de plusieurs trous.


« Tu vas bien ? »

Qiao Jiangyuan se pencha légèrement pour voir la blessure de Shen Jue mais ce dernier esquiva. Qiao Jiangyuan ne manqua pas la lueur de dégoût qui passa dans les yeux de son ami. Il se raidit un peu et sa main tendue resta un moment dans les airs avant de retomber le long de son corps.

« Je n'en mourrai pas, » répondit Shen Jue d'un ton léger.

Il baissa la main et vit qu'il y avait du sang dans sa paume. Il allait demander à Xiang Wen de venir avec un mouchoir quand quelqu'un d'autre le prit de vitesse.

C'était Yu Qing.

Il se rua aussitôt et se mit à lécher rapidement et avidement le sang dans la paume du duc.

Après avoir nettoyé la paume, il lança un regard timide au duc puis reprit sa position initiale et se mit à genoux.


Xiang Wen, qui avait assisté à tout cela, était vraiment sur le point de devenir fou. Ce foutu semi-vampire a vraiment toutes sortes de méthodes pour séduire, c'est dur d'y résister. Et là, il prend un air si misérable et innocent, tu crois berner qui comme ça, ah ?

Il grinça des dents férocement et trempa immédiatement son mouchoir dans la piscine. Il revint ensuite ressuyer méticuleusement la main de Shen Jue qui avait été léchée, sans oublier les doigts. Ce faisant, son expression était si féroce que même Shen Jue ne put que le fixer.

« Pourquoi tu fais une tête pareille ? » s'enquit-il.

Le visage du valet grimaça un moment puis il imita l'air misérable de Yu Qing.

« Mon seigneur, il vous a pris tant de sang. Vous sortez à peine d'une terrible blessure dont vous avez failli ne pas vous réveiller. J'ignore combien de compléments il vous faudra pour retrouver la santé. »


Toutefois, Xiang Wen resta fidèle à lui-même. Il lança un regard noir à Yu Qing et le piétina avec des mots :

« Certains ne se soucient vraiment pas de votre santé, mon seigneur. Vous lui avez généreusement permis de boire une gorgée et lui, il a bu tellement de sang. »

Ainsi réprimandé, Yu Qing n'osa rien dire pour se défendre et ne put que baisser la tête.

Shen Jue venait de perdre pas mal de sang alors il se sentait un peu fatigué. Il n'était donc pas d'humeur à servir d'arbitre entre Xiang Wen et Yu Qing. Il se leva, enfila le peignoir à côté de lui tout en disant à Qiao Jiangyuan :

« Je suis un peu fatigué alors je vais me retirer dans ma chambre pour dormir. Tu... »

Avant qu'il n'ait pu finir sa phrase, son ami sourit et fit :

« Ce n'est pas grave, je reviendrai te voir d'ici quelques jours. »

Shen Jue hocha la tête puis s'éloigna. En voyant ça, Xiang Wen s'empressa de le suivre.


Qiao Jiangyuan prit un air un peu complexe après le départ de Shen Jue mais quand il vit Yu Qing toujours agenouillé, il arbora un gentil sourire et lui tendit la main.

« Il est parti, tu peux te relever. »

Yu Qing n'osa pas laisser le duc l'aider à se relever. Il savait que Shen Jue et lui s'entendaient très bien, que Qiao Jiangyuan avait un noble statut et qu'il ne pouvait par conséquent pas l'assister. Il avait également un peu peur que Xiang Wen ne l'observe en cachette, prêt à lui tomber dessus à tout moment. Alors il se releva tout seul et fit au duc d'un ton circonspect :

« Duc Qiao, je vais retourner aux cuisines pour travailler. »

Suite au départ de Shen Jue, l'odeur de sang avait disparu de l'air et ses canines étaient également rentrées. Cependant, ses lèvres étaient d'un rouge vif, comme une rose encore fraîche en plein hiver.


« Ne t'en fais pas, assura Qiao Jiangyuan avant de baisser les yeux sur le thé de sang sur la table. Au fait, je me suis toujours demandé comment tu pouvais faire un si délicieux thé de sang. Tu peux me montrer ? »

Yu Qing contempla la tasse de thé auquel on n'avait visiblement pas touché. Il sentit que la remarque du duc était vraiment étrange alors il fit d'un ton évasif :

« Ce n'est pas moi qui l'ai préparé.

– Oh, alors qui l'a fait ? »

Qiao Jiangyuan sentit que cette petite beauté se méfiait un peu de lui mais il avait toujours su faire preuve de beaucoup de patience.

« Tu peux m'emmener voir cette personne ? »

Yu Qing ouvrit la bouche sans savoir que répondre. Ce fut à ce moment que Xiang Wen réapparut soudain.

Le valet fixa les deux personnes près de la piscine d'un air neutre puis il fit d'une voix glaciale :

« Yu Qing, le duc te réclame.

– Entendu. »

Yu Qing hocha la tête en guise d'excuse à Qiao Jiangyuan puis accourut aussitôt aux côtés de Xiang Wen.


Après avoir marché un moment, Yu Qing demanda :

« Pourquoi le duc veut me voir ? »

Il va encore me punir ?

Xiang Wen le fixa puis eut soudain un rire sarcastique.

« Tu es vraiment impressionnant. Le duc se faisait du souci pour toi, il craignait que le duc Qiao ne te martyrise alors il m'a demandé exprès de t'appeler. »

Yu Qing en resta interloqué.

« Me martyriser ? Comment ça ? »

Xiang Wen réfléchit un moment puis mentit sans que rien ne paraisse sur son visage :

« Tu n'es pas au courant ? Le duc Qiao est... »

Il se pencha à l'oreille de l'adolescent et baissa la voix :

« … un dégénéré. Il aime en particulier manger de la viande de chauve-souris. Si notre seigneur ne veut plus lui parler, c'est justement parce qu'il a appris récemment que le duc Qiao mangeait des chauve-souris. Si tu n'as pas peur de mourir, tu peux rester avec le duc Qiao mais ne viens pas pleurer quand tu te feras bouffer. »


La parole à l'auteur : Une autre histoire du soir.

Il était une fois une princesse du nom de Yu Qing qui fut obligée de s'enfuir dans la forêt parce que l'impératrice était jalouse de sa beauté. Il rencontra un nain dans la forêt alors il lui demanda :

« Nain, ah, nain, je peux aller vivre chez toi ? »

En entendant ça, le nain mordit subitement la princesse à la jambe. Ce fut alors que la princesse se rendit compte qu'il ne s'agissait pas d'un nain mais d'un caniche qui portait des vêtements. La princesse attrapa la rage et finit par mourir.

Xiang Wen : ???

Yu Qing : … c'est quoi ce conte de fées ?


Note de Karura :

Shen Jue : Après avoir appris de mes erreurs dans les deux premiers mondes, j'ai décidé de ne plus mordre personne. Ce sont les autres qui vont me mordre maintenant, ah ah !

Yu Qing, après la morsure : Aaaah, Shen Jue, je t'aime !!!

Shen Jue : … C'est encore pire.







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