Cent façons de tuer un prince charmant 77

Chapitre 77


Yu Qing en resta figé, même ses cils ne bougèrent plus.

Manger de la viande de chauve-souris grillée, il n'avait entendu ça que dans les histoires d'horreur. Il n'aurait jamais cru que quelqu'un pouvait faire ça dans la vraie vie et que ce serait en plus un noble élégant et distingué.

Après un long moment, il retrouva l'usage de sa voix :

« Xiang Wen, c'est vrai ce que tu dis ? »

Bien entendu, l'autre homme avait menti. Il avait juste accusé Qiao Jiangyuan de la chose la plus perverse qu'il pouvait imaginer, mais ce n'était en réalité qu'un mensonge. Malgré ça, il fit exprès de regarder à droite et à gauche puis fit mine d'avoir très peur.

« N'en parle à personne et ne laisse pas le duc Qiao découvrir que tu connais son secret, sinon il va te dévorer. Aucun noble n'irait admettre qu'il a une telle pulsion alors s'il entend des rumeurs, tu peux être sûr qu'il fera tout pour tuer et réduire au silence la chauve-souris qui aura parlé. »

Il tendit son index vers Yu Qing :

« Et ce sera toi, la chauve-souris qui aura parlé. » 

Yu Qing « ... »


* * *


Cette nuit, quand Yu Qing alla se coucher, il fit un cauchemar. Dans son rêve, il tenait une personne dont il ne voyait pas le visage et buvait son sang. Tout à coup, quelqu'un surgit par derrière. Surpris, il se retourna pour regarder par-dessus son épaule et vit Qiao Jiangyuan. Le duc se lécha les babines et lui lança la torche qu'il tenait...

Yu Qing eut si peur qu'il se réveilla aussitôt en sursaut de son rêve.

Il ouvrit les yeux et contempla le plafond. Après un moment de confusion, il poussa un soupir de soulagement.

Ce n'était qu'un rêve.

« Tu as fait un cauchemar ? » fit soudain une voix dans l'ombre.

Yu Qing eut si peur que ses doigts se crispèrent sur la couverture.

« Qui est là ? » appela-t'il d'un ton paniqué.

La voix venait du canapé dans sa chambre et il se calma un peu avant d'oser jeter un coup d'œil. Les vampires pouvaient bien voir dans le noir alors il fut capable de distinguer au premier regard le visage de l'autre homme.

C'était Shen Jue.


Yu Qing souleva rapidement la couverture et sortit du lit. Ce fut alors qu'il s'aperçut qu'il ne portait que son caleçon, donc il enfila rapidement le pyjama à côté de lui. Cela faisait des années qu'il portait le même pyjama et le tissu était un peu éliminé. Cependant, il n'avait pas les moyens de s'en acheter un nouveau.

« Toutes mes excuses, mon seigneur. Je dormais trop profondément et j'ignorais que vous étiez là. »

Après que Yu Qing se soit habillé, il n'osa pas se détendre pour autant. Il ignorait pour quelle raison Shen Jue était venu dans sa chambre en pleine journée. Parfois, Yu Qing n'arrivait pas à dormir et arpentait le manoir durant le jour, cependant Shen Jue n'était pas une seule fois apparu pendant le jour : tous les nobles abhorraient la lumière du soleil.

« Ce n'est rien, assura Shen Jue d'un ton doux. Approche. »


La chambre de Yu Qing n'était pas bien grande : il suffisait de deux ou trois pas pour aller du lit au canapé. Yu Qing se trouvait déjà à un pas du duc alors il n'osait pas bouger plus. Il avait un peu peur que l'autre ne le punisse pour avoir bu son sang la veille.

« Qu'est-ce que tu fais si loin ? Rapproche-toi, » insista Shen Jue.

Yu Qing baissa les yeux vers ses chaussons. Il y avait un trou devant. Il ignorait si le duc l'avait remarqué. Il espérait que ce n'était pas le cas. Bien que Yu Qing soit un esclave, il était encore jeune et il avait l'amour-propre typique des jeunes hommes, un sentiment qui se manifestait souvent quand il ne le fallait pas.

Si un autre que lui s'était tenu devant Shen Jue, il aurait peut-être délibérément montré ses affaires en plus mauvais état devant lui, impliquant que le maître devait lui en acheter de nouvelles. Mais ce n'était pas le genre du Yu Qing actuel.


Il s'avança lentement.

« Encore. »

Un autre pas.

« Encore. »

Yu Qing sentit que ses chaussons miteux allaient entrer en contact avec la magnifique paire de chaussons duveteuses de l'autre homme. Il avait entendu dire que les chaussons du duc étaient faits à partir de fines plumes de harfang des neiges Une chouette des neiges. (1) de la meilleure qualité qui soit. Chaque plume était collée à la main. De tels chaussons lui coûteraient sûrement plusieurs années de salaire.

En tant qu'esclave, les gages de Yu Qing étaient bien plus bas que ceux de serviteurs employés comme Xiang Wen. Cela faisait des années qu'il mettait de l'argent de côté et pourtant, il n'avait économisé qu'un petit bocal de billets. S'il quittait le manoir, l'argent ainsi économisé ne lui durerait pas plus de quelques jours.


« Regarde-moi, » ordonna Shen Jue.

Yu Qing n'eut pas d'autre choix que de décoller son menton de son torse et l'instant d'après, l'autre tira fort sur son bras et le corps de Yu Qing se laissa automatiquement tomber en avant.

Quand le jeune homme se rendit compte qu'il était tombé dans une étreinte fragrante et un peu glaciale, il voulut aussitôt se relever mais les doigts glacés de l'autre homme s'étaient déjà posés sur son cou.

« J'ai faim. »

La voix du duc était très calme, avec même une pointe d'indifférence. Néanmoins, c'était comme si Yu Qing avait perdu toutes ses forces et ne pouvait que se presser mollement dans les bras de l'autre.

« Non, mon seigneur, mon sang n'est pas bon. Je vais tout de suite aux cuisines pour vous.

– Il est tard. »


Dès que le duc eut fini de parler, Yu Qing sentit que sa tête était gentiment penchée sur le côté et que quelque chose se frottait contre son cou. C'était doux, on aurait dit les lèvres du duc. Yu Qing avait un peu peur mais il n'osait pas résister et arbora une posture soumise.

Après que Shen Jue ait caressé de ses lèvres la nuque de l’autre, il se pencha et renifla un peu.

La peau était très propre et avait une légère odeur de savon.

Alors Shen Jue ouvrit la bouche et mordit un peu.

Quand il fit cela, il entendit le semi-vampire dans ses bras inspirer brusquement. Il le regarda du coin de l'œil et se rendit compte que l'autre battait rapidement des cils et semblait très mal à l'aise.

Évidemment qu'il était mal à l'aise.

Toutefois, ce n'était pas parce que Shen Jue était en train de boire son sang. Après tout, c'était déjà arrivé qu'un maître boive le sang d'un de ses serviteurs.


Non, le problème était que Yu Qing ressentait quelque chose de très étrange en se faisant sucer son sang. Une fois mordu, il eut l'impression qu'une bête puissante avait les crocs enfoncés dans son cou alors il ne put que se soumettre docilement et ne songea même pas à s'enfuir. Les réactions de son corps étaient également très étranges : son sang coulait plus vite et son corps semblait devenir brûlant.

Il frémit des sourcils et tint désespérément le coup, cependant il ne put retenir un léger son nasal.

Quand un vampire se faisait sucer son sang, il avait une sensation très proche de l'orgasme. Cela venait du sang qui parcourait toutes ses veines, sortait et entrait dans son cœur en un cycle sans fin, parcourant tout son corps.

Yu Qing était dans un tel état actuellement.

Mais dès qu'il cessa de gémir, il se fit aussitôt libérer.


Il en fut sidéré et ses yeux vacillèrent de confusion. Ce fut alors qu'il vit Shen Jue se couvrir la bouche, faisant une vilaine tête.

Yu Qing ouvrit la bouche mais avant qu'il ne puisse dire un mot, il vit Shen Jue se lever précipitamment pour se ruer dans la salle de bain de sa chambre.

L'instant d'après, il entendit des bruits de vomis.

Le duc avait vomi parce qu'il avait bu son sang ?

Yu Qing toucha son cou à l'endroit de la morsure, avec une expression inexplicablement fragile et pitoyable. C'était un coup dur : aucun vampire n'accepterait que quelqu'un boive son sang pour vomir ensuite. Boire le sang était un acte magnifique alors quand l'autre vomissait, cela signifiait que la personne à qui il avait pris le sang était répugnante.


Yu Qing resta assis un moment sur le canapé puis se ressaisit et s'avança vers la salle de bain.

La porte était fermée, il ne pouvait qu'entendre le bruit de l'eau qui coulait à l'intérieur.

« Mon seigneur, vous allez bien ? murmura Yu Qing en se tenant à la porte. Je suis désolé, je n'ai pas fait exprès. »

Au bout d'un moment, la porte de la salle de bain s'ouvrit.

Le visage de Shen Jue était pâle et il y avait encore quelques gouttes d'eau qui coulaient dessus. Il regarda Yu Qing et fit :

« Retourne te coucher. »

Les doigts de Yu Qing se crispèrent légèrement mais il s'écarta. Il regarda Shen Jue quitter sa chambre et serra les dents.


Avec tout cela, Yu Qing fut incapable de se rendormir. Dès qu'il fermait les yeux, il revoyait le duc se ruer vers la salle de bain. À quoi pouvait-il bien penser à ce moment ? Il devait le trouver répugnant. Une seconde, ce n'était pas de sa faute s'il était un semi-vampire et que les semi-vampires étaient très répugnants, ah ! Il avait pourtant dit au duc que son sang n'était pas bon mais le duc avait quand même voulu y goûter. Était-ce la faute de Yu Qing ? Certainement pas, donc il n'avait rien fait de mal et il ne pouvait certainement pas être coupable de sa naissance.

Pourtant, Yu Qing trouvait ça très triste.

Personne ne pouvait véritablement aimer un semi-vampire, ses parents n'avaient pas voulu de lui, personne ne voulait de lui.


Quand il se leva, Yu Qing était d'humeur bien morose. Il se rendit dans les cuisines comme une âme en peine. La cuisinière le salua mais Yu Qing hocha la tête avec apathie. Elle trouva aussitôt cela bizarre car elle n'avait encore jamais vu Yu Qing dans un tel état.

« Qu'est-ce qui ne va pas ? Yu Qing, tu as l'air très déprimé, fit-elle d'un ton inquiet. Quelqu'un t'a martyrisé ? »

Yu Qing secoua la tête. Ce n'était pas comme s'il pouvait dire que le duc s'était rendu dans sa chambre pendant la journée.

« Je n'ai pas bien dormi aujourd'hui.

– Ah bon ? »

La cuisinière consulta l'heure.

« Il reste encore une bonne heure avant que le duc ne se réveille, et si tu retournais dormir un peu ? Il n'y a pas trop de travail aujourd'hui.

– Non, je n'ai pas envie de dormir pour le moment. Je préfère travailler, » assura Yu Qing en se forçant à sourire.

En temps normal, Yu Qing aidait à servir les plats mais aujourd'hui, il préférait rester caché dans les cuisines. Il n'osait pas voir le visage de Shen Jue pour le moment, de peur que l'autre ne manifeste son dégoût.


* * *


Quant à Shen Jue, il n'avait pas bien dormi non plus.

Il avait cru qu'il n'aurait eu qu'à suivre son instinct pour boire du sang mais quand il avait entendu le gémissement de Yu Qing, il avait soudain pris conscience que l'autre était un être vivant. Cela lui avait aussitôt donné envie de vomir. Il avait été un immortel pendant tant d'années et n'avait jamais bu de sang, encore moins du sang de sa propre espèce.

La nausée était remontée jusque dans sa gorge alors il n'avait pas eu d'autre choix que de se ruer vers la salle de bain pour vomir.

Quand il se leva ce soir-là, la nausée était persistante et ne faisait pas mine de vouloir disparaître.

Il avait donc un air très fatigué ce soir-là. Cela rendit nerveux le majordome et Xiang Wen, qui craignaient d'avoir fait quelque chose de mal.


Une fois le dîner terminé, le majordome déposa une invitation devant le duc.

« Mon seigneur, c'est une invitation de la famille Wei. Ils vont organiser un gala de bienfaisance dans trois jours. »

Quand Shen Jue entendit parler de gala, il voulut refuser sur-le-champ mais il se rappela soudain de quelque chose et changea d'avis :

« Rappelle-le moi dans trois jours. »

Il jeta un regard à son majordome.

« Au fait, tu as trouvé un autre valet ?

– Pas encore, répondit le majordome. Cela risque de prendre un peu de temps. »

Dans la capitale impériale, leur duc était connu pour son mauvais caractère et les gens un tant soit peu intelligents préféraient éviter de travailler pour lui.


Shen Jue comprit de quoi il en retournait. Il connaissait sa réputation et devait être l'un des trois nobles les plus détestés de la capitale. Dans ses vies précédentes, comme il était amoureux de Qiao Jiangyuan, il avait tout fait explicitement et secrètement pour empêcher les autres vampires de s'approcher de lui. Si quelqu'un osait s'approcher de Qiao Jiangyuan, il ne se gênait pas pour lui créer des ennuis ainsi qu'à sa famille. Au bout d'un moment, Qiao Jiangyuan ne pouvait même plus organiser de bal car personne n'osait venir. De son côté, Shen Jue en était ravi.

Maintenant qu'il y repensait, Qiao Jiangyuan devait sûrement le détester depuis longtemps et souhaiter se débarrasser de lui. Mais comme il était alors riche et puissant, Qiao Jiangyuan ne pouvait pas se montrer discourtois avec lui.

« Alors prends quelqu'un du manoir, suggéra calmement Shen Jue. Trouve quelqu'un capable de supporter les reproches. »


Capable de supporter les reproches ?

Le majordome songea tout de suite à Yu Qing mais le jeune homme s'était fait chasser l'autre jour, alors il se contenta de hocher la tête et assura qu'il ferait de son mieux.

« Au fait, tu emmèneras Yu Qing acheter des vêtements et des chaussures convenables. Dans trois jours, je le prendrai avec moi à ce gala de bienfaisance, » poursuivit le duc.

Cela choqua vraiment le majordome. Bien qu'il appréciait énormément Yu Qing, ce n'était qu'un semi-vampire et un semi-vampire n'avait rien à faire au milieu des nobles. Ce serait un affront pour les nobles.

Le majordome hésita :

« Mon seigneur, vous avez vraiment l'intention d'emmener Yu Qing avec vous ? C'est juste que le garçon n'a fait que travailler dans les cuisines, il ne connaît donc rien à l'étiquette durant une soirée.

– Aucune importance, assura Shen Jue. Il devra juste rester derrière moi. »

Le majordome s'inclina devant cet ordre et, après que Shen Jue soit monté dans son bureau, il alla trouver Yu Qing.


* * *


Yu Qing était assis près de la porte arrière des cuisines et épluchait des pommes de terre. En entendant le majordome arriver, il se leva aussitôt et se lava les mains avant de le rejoindre.

« Que puis-je faire pour vous ?

– Range d'abord ton travail, tu sors avec moi, fit l'autre homme.

– Maintenant ? Pour aller où ? »

Yu Qing en resta ébahi un moment.

« J'ai des courses à faire. »

Le majordome n'allait certainement pas apprendre la nouvelle à Yu Qing dans les cuisines.

Yu Qing répliqua par un oh puis alla enfiler ses vêtements d'extérieur. Sa tenue pour sortir n'était pas la même que les vêtements qu'il portait d'ordinaire dans le manoir. À cause de la présence de Shen Jue, il portait toujours une chemise blanche et un pantalon noir pour travailler dans la manoir mais quand il sortait, il s'habillait beaucoup plus simplement : une salopette en laine fine avec une chemise à carreaux, ainsi qu'un béret qui égayait le sommet de sa tête.

Il sortait rarement alors il fut un peu excité en montant dans la voiture. Il demanda au majordome :

« Où allons-nous ? Au marché ?

– Non, au centre-ville. »

Le majordome fixa Yu Qing et vit ainsi les deux petits trous dans son cou. Il fallait en général quatre à cinq jours pour que disparaisse la marque des dents quand on se faisait mordre par un vampire. Et le majordome n'avait pas l'impression d'avoir vu ces marques sur le cou de Yu Qing la nuit dernière.

Toutefois, il ne posa aucune question et détourna le visage en silence.

« Pourquoi aller au centre-ville ? »

Yu Qing avait déjà été là-bas. Il y avait pleins de magasins. Derrière les vitrines, on pouvait voir tout un étalage de denrées de luxe dont les gens avaient du mal à détourner les yeux. Mais avec son argent, Yu Qing ne pouvait rien s'acheter là-bas. Il ne pourrait même pas se payer une simple paire de chaussettes.


« Le duc va t'emmener avec lui à un gala de bienfaisance dans trois jours. Il m'a donc spécifiquement demandé de t'acheter des vêtements. Y a-t'il autre chose que tu voudrais acheter ? Tu pourras l'acheter avec aujourd'hui. »

En entendant tout à coup parler de Shen Jue, Yu Qing déglutit nerveusement. Il ne comprit pas lui-même pourquoi il réagissait ainsi.

« Le duc veut m'acheter quelque chose ?

– Tu as bien de la chance, » fit le majordome en hochant la tête.

Yu Qing écouta sans rien dire et ne put s'empêcher de lever la main à son cou. Son geste ne passa pas inaperçu aux yeux du majordome, pourtant ce dernier ne commenta toujours pas.


* * *


Le gala eut lieu trois jours plus tard.

Shen Jue se tint devant le miroir de plein pied et finit de nouer son nœud de papillon. Il prit son chapeau haut-de-forme des mains de Xiang Wen et se dirigea vers la porte. Ce soir, il portait un costume croisé un peu resserré à la taille, ce qui soulignait sa taille fine et allongeait ses jambes. Il sortit de la chambre, son visage pâle et glacial n'exprimant aucune émotion.

« Où est Yu Qing ? » demanda-t'il à Xiang Wen à côté de lui.

Le valet n'avait pas été jugé digne d'accompagner son maître ce soir, alors il avait créé plein de problèmes à Yu Qing durant ces trois derniers jours, sans pour autant aller trop loin.

« Il vous attend en bas, » répondit-il.

Shen Jue hocha la tête et descendit les escaliers. Quand il arriva au rez-de-chaussée, il vit le jeune homme qui l'attendait dans le salon.


Manifestement, c'était la première fois que Yu Qing portait des vêtements si riches. Il était un peu guindé mais splendide. On pouvait dire que son visage était comme un morceau de jade à l'état brut et que son costume avait poli la surface du jade, faisant découvrir aux gens sa véritable beauté.

Quand Xiang Wen le vit, même lui ne put s'empêcher d'écarquiller les yeux.

Toutefois, Shen Jue se renfrogna légèrement.

Yu Qing avait guetté en cachette la réaction du duc. En voyant sa tête, il se redressa aussitôt et sa nervosité augmenta.

« Mon seigneur.

– La couleur ne va pas. Monte te changer. »

Shen Jue fixa le costume blanc du jeune homme et cela lui rappela de mauvais souvenirs.

« Ah, tout de suite. »


Yu Qing se dépêcha de retourner dans sa chambre pour enfiler un costume noir à la place du blanc. Quand il revint, Shen Jue attendait déjà dans la voiture. Yu Qing regarda le conducteur et le garde du corps qui occupaient les deux places à l'avant. Après réflexion, il ouvrit la porte arrière.

Shen Jue ne fit pas attention aux mouvements de Yu Qing, il était en train de lire un petit livret.

Le livret avait été envoyé en même temps que l'invitation et il présentait les objets en vente ce soir.

En voyant que Shen Jue ne le regardait pas, Yu Qing s'assit avec circonspection. Naturellement, il n'osa pas s'installer trop près du duc. Après avoir refermé la porte, il se pressa quasiment contre, craignant d'importuner le duc.

Il ne savait pas pourquoi il réagissait ainsi. Il y avait encore quelques jours, il n'avait pas aussi peur que ça de son maître mais depuis peu, il se sentait terrifié dès qu'il le voyait Il sent qu'il va souffrir ! 😋 (2).


Shen Jue lut un moment et trouva enfin ce qui l'intéressait. Il étira les lèvres et fit au chauffeur à l'avant :

« En route. »

Toutes les pièces mises en vente ce soir-là étaient des dons de la part de certains nobles et l'argent récolté serait reversé à des œuvres de charité. Si Shen Jue voulait participer à ce gala de bienfaisance, c'était pour une bague en diamants.

Cette bague appartenait autrefois à Manshan, une beauté légendaire qui avait fait chavirer tous les cœurs de l'empire. Les rumeurs disaient que c'était un cadeau de son premier amour et qu'elle l'avait toujours conservée sur elle. Même si elle s'était mariée par la suite, Manshan n'avait jamais retiré cette bague en diamants. Ce ne fut qu'une fois qu'elle apprit la mort de son premier amour qu'elle fit don de la bague.

Et cette bague en diamants avait fini au doigt de Yu Qing par la suite.


Shen Jue ne s'était pas du tout intéressé à ce gala de bienfaisance dans ses autres vies. Il n'y avait fait qu'une brève apparition juste pour acheter un objet au hasard et faire don ainsi d'un peu d'argent. Cependant, il avait été marqué par la bague en diamant parce que les enchères avaient atteint des sommets.

Une bague en diamants datant que quelques siècles n'avait rien d'extraordinaire en soi mais l'histoire qui se cachait derrière ainsi que sa précédente propriétaire lui avaient conféré une certaine réputation.

Shen Jue n'avait jamais vu Qiao Jiangyuan à ce dîner de bienfaisance dans les autres vies mais maintenant qu'il y pensait, l'autre duc avait dû demander à quelqu'un de l'aider à enchérir, afin de ne pas trop attirer l'attention sur lui. Une fois qu'il mit la main sur cette fameuse bague, il s'empressa de l'offrir à Yu Qing.

Ah, comme c'est amusant.


* * *


Après avoir roulé un bon moment, la voiture arriva à destination.

Un portier s'avança aussitôt pour ouvrir la porte de la voiture pour Shen Jue tandis qu'un autre fit de même du côté de Yu Qing. Le jeune homme lança un petit merci timide et sortit du véhicule avec le duc. Il n'avait encore jamais été dans un tel endroit avant alors il avait l'air un peu gauche en marchant derrière Shen Jue. Toutefois, il ne voulait pas faire honte à son maître alors il fit de son mieux pour ne pas laisser son regard dériver tout autour.

Du coup, il ne regarda que droit devant lui et ne vit pas les marches sous ses pieds.

« Attention. »

Shen Jue se retourna et soutint Yu Qing avec sa main. Il baissa la voix pour ajouter :

« Tu vas m'embarrasser en public ici ?

– Non, » fit Yu Qing en se redressant fermement.

Shen Jue le fixa puis retira sa main.

« Ne sois pas si nerveux, fais comme si c'était le manoir. »

Yu Qing ne put que lui renvoyer un sourire crispé.

En voyant ça, Shen Jue l'ignora et reprit son chemin.


La réception avait lieu au rez-de-chaussée. Ils suivirent le guide dans la grande salle où l'éclairage était tamisé. Les tableaux au mur étaient étranges et extravagants, représentant du sang et des fleurs côte à côte.

Dès que Shen Jue fit son entrée, cela attira l'attention de bien des gens. Ces gens s'avancèrent pour le saluer et personne ne rata la présence de Yu Qing derrière le duc.

« Ouah, où as-tu trouvé cette petite beauté derrière toi ? »

Un vampire se caressa le menton et son regard balaya rapidement le corps du jeune homme. C'était un libertin notoire et il s'était une fois intéressé à Qiao Jiangyuan. Mais comme Shen Jue l'avait foudroyé du regard, le noble avait dû renoncer.

Sa devise était — Chaque fleur de ce monde a un parfum différent. J'ai juste envie d’apprécier le parfum de toutes ces fleurs.


« N'est-il pas mignon ? »

Shen Jue ne sembla pas fâché par les paroles de l'autre noble. Il se tourna et fit à Yu Qing :

« Viens, dis bonjour au marquis Yan. Il est connu pour sa générosité : dès qu'il voit quelqu'un de beau, il lui offre des cadeaux. Tu n'avais pas repéré un collier parmi les enchères ? Laisse-lui te l'offrir. »

Ces deux, trois phrases firent pâlir le marquis Yan. Il y avait effectivement un collier aux enchères ce soir, ce serait la pièce maîtresse. On disait que ce collier avait autrefois appartenu à une princesse de la famille impériale. S'il voulait l'acquérir, combien cela coûterait-il ? Il avait beau aimer les beautés, il n'avait pas les moyens de claquer trop d'argent pour une beauté.

Le marquis Yan eut aussitôt un rire gêné et s'éloigna pitoyablement.

Le reste des gens ne put retenir des rires en le voyant filer en douce.


« Tu arrives toujours à calmer ce vieux pervers. J'ai vraiment envie de vomir chaque fois que je le vois. »

Celle qui venait de parler était une vampire du nom de Xiao Wenshan. Elle suivit Shen Jue jusqu'à un canapé et fit d'un ton familier :

« Tu te sens mieux après être resté chez toi si longtemps ?

– Ça va, » répondit-il d'un ton léger.

Xiao Wenshan regarda autour d'elle en tenant un verre de sang puis elle sourit à Shen Jue.

« Qiao Jiangyuan n'est pas là ce soir, tu sais ce qu'il fait ? »

C'était un dialogue familier.

Xiao Wenshan lui avait également dit la même chose dans les autres vies.

« Non, qu'est-ce qu'il fait ? demanda Shen Jue usant aussi des mêmes paroles que dans les autres vies.

– J'ai entendu dire que la famille Qiao souhaite le marier. Cela fait un moment qu'ils s'occupent de ça. Qiao Jiangyuan doit normalement rencontrer la femme en question ce soir, » fit Xiao Wenshan avec un autre sourire.


Dans les vies précédentes, Shen Jue avait failli quitter les lieux quand il avait appris ça. Au bout du compte, il s’était raisonné et était resté assis. Cependant, après la fin de la soirée, il s'était rendu directement au manoir de Qiao Jiangyuan et quand il avait appris que son ami était absent, il avait piqué une colère. Cette histoire était devenue un sujet de plaisanterie dans la noblesse par la suite.

Parce qu'en réalité, Qiao Jiangyuan était juste dans les champs de sa famille à la campagne ce jour-là.


« Vraiment ? Alors tous mes vœux de bonheur pour lui, » répondit Shen Jue avec un sourire.

Sa réaction stupéfia Xiao Wenshan. Elle lui lança un regard surpris.

« Tu... Ça ne te dérange pas ?

– Pourquoi ça me dérangerait ? Il est mon brave vieux frère. S'il trouve le bonheur, je ne peux que m'en réjouir pour lui. En plus, j'ai moi aussi trouvé mon bonheur. »

Shen Jue attira soudain contre lui Yu Qing, qui lorgnait sur le verre de sang posé sur la table à côté de lui, et l'embrassa sur la joue.

« N'est-ce pas, bébé ? »


La parole à l'auteur : Cette histoire s'intitule également : Le seigneur despotique et son charmant petit esclave.


Note de Karura : Et alors, je croyais que Shen Jue avait décidé de ne plus mordre les gens ?

Shen Jue : De toute façon, quoi que je fasse... (soupir)


Notes du chapitre :
(1) Une chouette des neiges.
(2) Il sent qu'il va souffrir ! 😋






Commentaires :


:

:

Pour insérer des émojis dans le message, appuyez sur la touche Windows et ; de votre clavier (pour Windows 10).

Derniers chapitres parus :
La Renaissance du Suprême Immortel 447 et 448
Lanterne 52
La Renaissance du Suprême Immortel 445 et 446

Planning des mises à jour :
Dimanche tous les quinze jours : Lanterne : le reflet d’une fleur de pêcher
La Renaissance du Suprême Immortel
Le Prince Solitaire