Chapitre 97
Dès que Yu Qing prononça ces paroles, tous les gens présents se tournèrent vers lui. Le visage de Qiao Jiangyuan se tordit de rage. L’instant d’après, il entendit la voix de Shen Jue :
« Pose-moi. »
La voix de Shen Jue était d’un froid polaire, suffisamment pour geler une personne.
Yu Qing plongea son regard dans le sien pendant un moment, puis il baissa les yeux et le déposa lentement.
Dès que les pieds de Shen Jue touchèrent terre, il saisit la rambarde de l’escalier. Son visage gracieux semblait recouvert d’une couche de glace. Il tourna légèrement la tête pour regarder Yu Qing qui continuait de baisser les yeux, et ajouta :
« À genoux. »
Sa voix n’était ni trop basse ou forte, on pouvait même dire qu’elle était très calme.
Les longs cils de Yu Qing frémirent. Il réprima les émotions qui submergeaient son regard puis se mit à genoux docilement.
Shen Jue détourna le regard de lui et reprit sa montée. Ye Ye fit un pas vers lui pour le soutenir en voyant ça mais, avant même qu’il ne puisse atteindre la main de Shen Jue, il se fit repousser brusquement par quelqu’un derrière.
Cette personne était Qiao Jiangyuan.
« Tu vas rester ici et le surveiller, qu’il reste bien à genoux, » fit-il à Ye Ye d’un ton furieux avant de s’avancer.
Il prit la main de Shen Jue et le tira pour monter les escaliers. Ce dernier avait déjà du mal à marcher à la base, alors quand Qiao Jiangyuan le tira par la main, il faillit trébucher.
Yu Qing vit cela et une lueur de malveillance brilla dans ses yeux noirs. Il était comme un guépard couché parmi l’herbe haute, fixant la proie devant lui, comme s’il était prêt à bondir pour lui déchiqueter la gorge à tout moment.
« Plus vite, fit Qiao Jiangyuan à Shen Jue avec irritation. Tu comptes encore faire attendre longtemps les gens ? »
Il tira l’autre homme dans la chambre, puis claqua la porte avec un bam. Son beau visage était complètement recouvert d’un froid polaire.
Personne ne pouvait conserver son sang-froid en voyant son futur fiancé au lit avec un autre. Qiao Jiangyuan sentait qu’il était déjà à deux doigts de tuer sur-le-champ celui qui l’avait trompé, alors il ne pouvait vraiment pas avoir une bonne attitude envers Shen Jue pour le moment.
Shen Jue fut ainsi poussé dans sa chambre par l’autre homme et faillit tomber. Quand il reprit enfin son équilibre, la main de Qiao Jiangyuan se tendit de nouveau vers lui.
Il semblait prêt à aider personnellement Shen Jue à s’habiller.
Ce dernier fronça les sourcils et recula d’un pas, évitant ainsi la main de l’autre homme. Cela rendit Qiao Jiangyuan encore plus furieux. Ces derniers mois, c’était à peine s’il avait pu toucher la main de Shen Jue. Chaque fois qu’il voulait aller un peu plus loin, l’autre homme se renfrognait et esquivait, ce qui l’obligeait à arrêter.
Bon, ce n’était pas grave. Il pouvait attendre jusqu’à leur mariage.
Mais en réalité ? Son futur fiancé si chaste avait couché avec un autre en un clin d’œil. Il avait même le cou couvert de marques.
Il avait prétendu jouer les chastes devant lui, mais s’était vite transformé en pute.
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Naturellement, Shen Jue avait bien conscience de la fureur de Qiao Jiangyuan. Il pesa ses mots et proposa :
« Qiao Jiangyuan, nous pouvons rompre notre contrat de mariage. C’est moi qui suis en tort, pas toi, alors je suis prêt à en supporter toutes les conséquences. Si tu veux une compensation financière, je peux aussi te la donner.
– Et ensuite ? ricana Qiao Jiangyuan. Tu crois qu’il te suffit de payer pour que personne ne se moque de moi ? Il vont tous savoir que je t’ai attendu toute la nuit aujourd’hui pendant que toi, tu te faisais baiser par un autre. »
En fait, il n’avait pas voulu employer un langage aussi grossier, mais il fut incapable de se retenir en voyant les marques sur le cou de Shen Jue.
Il était vraiment très mal à l’aise. Il comprenait à présent pourquoi le majordome et Ye Ye lui avaient lancé des regards compliqués. Même eux savaient qu’il portait le plus voyant des chapeaux verts C’est l’équivalent des cornes de cocu chez nous. (1).
« Je suis désolé, s’excusa de nouveau Shen Jue. Alors qu’est-ce que tu veux comme compensation ?
– Pas question d’annuler nos fiançailles, répondit froidement Qiao Jiangyuan. Tu te changes tout de suite et tu me suis à l’hôtel. »
Shen Jue plissa le front mais ne refusa pas. Il fit cependant :
« Alors tu sors pendant que je me change.
– Je reste ici, sinon qui me dit que quelqu’un d’autre ne va pas s’introduire dans ta chambre ? répliqua-t’il d’un ton sombre. Dans ce cas, tu pourrais toujours sortir aujourd’hui ? »
Ce nouvel assaut verbal fit pâlir Shen Jue. Il jeta un regard à l’autre homme puis se dirigea vers son armoire.
Comme il ne pouvait plus porter le costume initialement prévu, il dut s’en prendre un autre et dut en choisir un avec un col haut. Pendant qu’il se changeait, Qiao Jiangyuan resta derrière à l’observer. Son visage s’assombrit au fur et à mesure. Quand Shen Jue eut enfin terminé, Qiao Jiangyuan ne perdit pas une minute et le tira hors de la chambre.
Yu Qing était toujours à genoux au même endroit. Quand il vit Shen Jue sortir, il le fixa sans ciller.
Qiao Jiangyuan le regarda puis passa un bras autour de la taille de Shen Jue. Il adoucit exprès sa voix :
« Et si on y allait ? Je n’ai encore rien mangé. Nous mangerons après à l’hôtel, qu’en dis-tu ? »
Quand les deux hommes passèrent à côté de Yu Qing, ce dernier tendit soudain la main. Il saisit la manche de Shen Jue, ses yeux insondables.
« N’y va pas. »
Il contempla fixement le profil de Shen Jue.
« Tu m’avais promis de me laisser cinq ans, tu ne peux pas revenir sur ta promesse. »
Shen Jue s’arrêta.
« Cela ne fait que trois ans à présent, n’est-ce pas ? »
Toujours à genoux, Yu Qing se précipita devant lui. Ses yeux étaient si fervents, comme s’il contemplait ce qu’il y avait de plus précieux au monde.
« Tu m’avais promis, tu n’as pas le droit de revenir sur ta parole. »
Shen Jue baissa les yeux sur lui.
« Je ne t’ai rien promis. J’ai juste promis de t’envoyer à l’armée. Pour le reste, je n’ai fait absolument aucune promesse. »
Le regard de Yu Qing vacilla légèrement, comme si on avait jeté un petit caillou dans un lac calme et profond, provoquant des rides dans l’eau.
« Tu as dit que peu importait qui tu épousais, du moment que cela t’apportait quelque chose, mais il ne te traitera pas bien. Il te traite déjà si mal maintenant, alors quand tu l’épouseras, ce sera encore pire. Moi, j’ai signé un contrat d’âme avec toi. Tout ce qui est à moi t’appartient. Je suis le seul qui ne pourra jamais te trahir. »
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Il saisit la main de Shen Jue en descendant le long de sa manche et la serra très fort. La froideur des doigts de Shen Jue parut se transmettre à son cœur.
Qiao Jiangyuan ne put en entendre davantage. Il tira brusquement sur l’autre main de Shen Jue. Yu Qing craignit que Shen Jue ne se fasse mal à la main, alors il le lâcha aussitôt.
« Allons-y, fit Qiao Jiangyuan en tenant la main de Shen Jue. Il est déjà tard. »
Voyant qu’ils allaient partir, Yu Qing faillit se lever mais repensa à l’ordre de Shen Jue.
Qiao Jiangyuan fourra Shen Jue dans la voiture puis s’installa derrière le volant. En voyant que l’autre homme n’avait pas bougé, il se pencha en avant pour attacher sa ceinture.
Après ça, il démarra la voiture.
Ils arrivèrent rapidement à l’hôtel. Le père de Qiao Jiangyuan poussa un gros soupir de soulagement en voyant que les deux hommes étaient enfin arrivés, et il n’eut pas le temps de réprimander. Comme il ne s’agissait que de fiançailles, ce n’était pas aussi grandiose et vaste qu’un mariage. Cependant, il s’agissait quand même des fiançailles de deux ducs, alors la famille Qiao s’était affairée pour respecter tous les détails mineurs de la procédure du début à la fin.
Tandis que la cérémonie traînait en longueur, le visage de Shen Jue devint de plus en plus pâle et il se mit même à trembler un peu. Qiao Jiangyuan, le plus proche de lui, posa calmement une main au creux de ses reins et murmura :
« Tu peux t’appuyer contre moi. »
Shen Jue cligna des yeux à ces mots, mais ne s’appuya pas contre lui. Les lèvres de Qiao Jiangyuan frémirent et il continua d’un ton neutre :
« Si tu t’évanouis, comment je l’expliquerai ? »
Après ça, il sentit un léger poids contre sa main.
Il raffermit sa prise et soutint fermement l’autre homme, cependant rien ne se lut sur son visage. Aux yeux des autres, ils étaient un couple encore pas marié qui se montrait très affectueux.
L’avant-dernière étape de la cérémonie de fiançailles était l’échange des anneaux de fiançailles.
Les anneaux avaient été commandés quelques mois auparavant. Il s’agissait d’une paire d’anneaux sertis de diamants. Shen Jue sortit l’anneau de sa boîte en velours rouge puis le passa au doigt de Qiao Jiangyuan. Ce dernier fit de même mais juste après, il sortit une autre boîte en velours rouge de la poche intérieure de sa veste.
Cette boîte était un peu plus grosse que celle qui avait contenu les anneaux de fiançailles.
Qiao Jiangyuan l’ouvrit : elle contenait un collier. Shen Jue connaissait très bien le pendentif accroché à la chaîne car il s’agissait de la bague en diamants que Qiao Jiangyuan offrait toujours à Yu Qing dans les autres vies. C’était la bague de Manshan, la beauté légendaire qui avait fait vaciller tous les cœurs de l’empire.
Dans cette vie, Shen Jue avait tenté de s’en emparer mais comme Yu Qing avait été drogué à ce moment, il avait dû quitter la vente aux enchères avant. Jamais il n’aurait pensé que la bague finirait quand même entre ses mains.
Qiao Jiangyuan passa lui-même le collier autour du cou de Shen Jue.
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La dernière étape, c’était le baiser.
Plus bas, les invités étaient presque en train de siffler et crier pour les encourager. Cependant, les regards des deux hommes sur l’estrade étaient très calmes, presque indifférents. Au moment où Shen Jue allait dire quelque chose pour esquiver, Qiao Jiangyuan se pencha en avant et le saisit par la taille.
Leurs lèvres se rapprochèrent jusqu’à presque se toucher.
Les pupilles de Shen Jue se dilatèrent légèrement. Il tenta de se débattre mais en fut incapable. Il n’arrêta que lorsqu’il fut pratiquement à bout de souffle. Qiao Jiangyuan profita du fait que Shen Jue était à bout de forces. Il sourit et fit au public :
« Il est un peu timide. Je vais l’emmener dans la chambre pour qu’il se repose un peu. »
Après ça, il l’enlaça à moitié puis le conduisit hors de la salle.
Ils avaient réservé une chambre au premier étage de l’hôtel afin de se changer à la moitié de la soirée et de se reposer un peu.
Qiao Jiangyuan emmena Shen Jue dans la chambre. Aussitôt rentré, Shen Jue le repoussa et se rua directement dans la salle de bains.
Des bruits de vomis se firent entendre.
Le visage de Qiao Jiangyuan changea subitement d’expression. Il inspira profondément plusieurs fois avant de refermer la porte de la chambre. Il défit ensuite son nœud de papillon, retira sa veste et se dirigea lentement vers la salle de bains.
Dans la salle de bains.
Shen Jue n’avait plus rien à vomir. Il s’était laissé tomber sur le carrelage froid, les yeux rougis, et son visage arborait un air fragile qu’on ne lui voyait que rarement. Ses yeux noirs étaient vides et stériles, comme un champ ravagé par un incendie, qui aurait dû être plein de vitalité mais où il ne restait plus rien à présent.
Il ne regardait pas Qiao Jiangyuan, il ne regardait rien. Il était complètement immergé dans son propre monde.
Bien que c’était pour briser le cycle des réincarnations, bien qu’il soit déterminé à faire tout ce qu’il fallait, il se sentait pourtant écœuré. Il venait à peine de coucher avec un homme que là, il en embrassait un autre. Cela le rendait malade.
Quand était-il devenu ainsi ? Shen Jue ne pouvait pas se permettre d’y réfléchir. Il n’y avait plus de foi, plus rien. Il ne comptait que sur la haine pour le soutenir tout du long. Du moment qu’il pouvait se sortir de là, il était prêt à tout, même ce qu’il n’aurait jamais accepté de faire avant.
Il avait écarté ses jambes pour cet homme telle une prostituée, tout ça pour obtenir son soi-disant amour sincère.
Hé hé, c’était si hilarant.
Il n’était plus Shen Jue. Il ne savait plus qui il était devenu, peut-être un monstre sous forme humaine.
Shen Jue éclata soudain de rire mais, en même temps qu’un sourire se dessina sur ses lèvres, les larmes coulèrent également de ses yeux.
Cela faisait plus de mille ans, pas un an, pas deux ans, mais plus de mille ans qu’il était piégé ici. Pour quitter ces mondes, il devait user de toute son intelligence, tout donner et se servir de son corps pour arriver à ses fins. Si l’Empereur de Jade et son fils chéri le voyaient à présent, ils trouveraient certainement ça très ironique.
Il était devenu ce qu’il haïssait le plus au monde.
Sa résistance au début lui apparaissait désormais comme suprêmement ridicule.
Tout n’était qu’une question d’écarter les jambes.
Qiao Jiangyuan comptait au départ se fâcher mais quand il vit Shen Jue en train de pleurer, il se figea aussitôt, un peu perdu. La colère dans son colère se dissipa aussitôt.
Il avait déjà vu le Shen Jue dominateur et le Shen Jue froid et indifférent. Jamais encore il n’avait vu un Shen Jue aussi fragile et pitoyable qu’en ce moment.
Après un moment, Qiao Jiangyuan soupira. Il s’avança gentiment et s’accroupit. Comme il n’avait pas de mouchoir, il ressuya simplement les larmes de ses doigts mais découvrit que plus il ressuyait, plus les larmes coulaient.
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Shen Jue ouvrit ses yeux magnifiques et vides, et les larmes continuèrent de couler.
Voyant son apparence, Qiao Jiangyuan se sentit encore plus souffrant, comme si son cœur était pris dans un étau. Il soupira de nouveau, le prit carrément dans ses bras et le cajola doucement :
« C’est bon, c’est bon, arrête de pleurer. J’arrête de m’en prendre à toi, d’accord ? Je sais que tu ne voulais pas, tout est de la faute de Yu Qing. C’est à lui que j’en veux, pas à toi, d’accord ? Sois sage, ne pleure plus. Bébé, si tu continues à pleurer, je ne saurai plus quoi faire. »
Note de l’auteur :
Lao Qiao : C’est clairement moi qui porte le chapeau vert dans l’histoire, alors pourquoi faudrait-il que je le cajole ? Logiquement, ce devrait être ma scène où je deviens mauvais et l’enferme dans une chambre noire, ou quelque chose dans le genre…. (tourne la tête et voit Shen Jue en larmes, reste silencieux un moment) Laissez tomber, je vais le cajoler.
Note de Karura : Bon, notre Shen Jue a finalement craqué après presque trois mondes. Je sais qu’il peut sembler froid, indifférent, manipulateur, calculateur, mais le fait est qu’il fait tout ça pour sortir des cycles de réincarnations et obtenir vengeance. Cependant, la haine ne peut soutenir quelqu’un que pendant un temps. Là, il a subitement pris conscience de tous les changements en lui et surtout qu’il est devenu typiquement le genre de personne qu’il méprisait autrefois.
Cela apporte donc une touche nettement plus réaliste à ce personnage.
La carapace de Shen Jue commence à se fissurer…
Notes du chapitre :
(1) C’est l’équivalent des cornes de cocu chez nous.
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