Chapitre 271
Résidence Lin.
Le jeune homme portant une tunique de serviteur entra dans la chambre à pas légers avec un bol de médicament dans les mains. Voyant son maître vêtu d’une tunique en brocart et assis sous la fenêtre, il inclina rapidement la tête et s’approcha :
« Second jeune maître, j’ai apporté le médicament. »
Le jeune homme tourna la tête, dévoilant un splendide visage un peu pâle. Ces yeux qui étaient autrefois remarquables et élégants semblaient avoir à présent perdu toute couleur. Ils étaient couverts d’une couche de pluie et de brouillard, moroses et abattus.
Quand il vit le bol de médicament sur le plateau apporté par le serviteur, il le prit directement sans un mot et le vida d’un trait. Il le reposa ensuite sur le plateau et se ressuya la bouche avec un linge à côté de lui.
Au même moment, un autre serviteur entra.
« Second jeune maître, le jeune maître Xie est là. »
Quand le jeune homme entendit ça, ses longs cils retombèrent. Il fit après un long moment :
« Fais-le entrer. »
Xie Zhi avait appris de sa mère que Lin Chuyan était malade. Il voulut quitter de force le Temple des Mille Bouddhas et comme sa mère ne put le retenir, elle n’eut pas d’autre choix que de le laisser aller voir son ami.
Quand Xie Zhi entra dans la chambre, il avait l’air anxieux et inquiet. En voyant son ami assis sous la fenêtre, il s’approcha de lui en quelques pas.
« Chuyan, qu’est-ce que tu as ? »
Il s’assit à côté de lui. S’il n’y avait pas eu la présence des deux serviteurs, il l’aurait pris dans ses bras.
Lin Chuyan eut un sourire nonchalant.
« J’ai juste attrapé un rhume. Et toi, comment tu es venu ? Tante Xie t’a autorisé à venir ? »
Dès qu’il parla de la mère de Xie Zhi, ce dernier prit un air renfrogné. Il avait toujours eu l’impression que sa mère s’était faite ensorceler par un esprit maléfique, voilà pourquoi elle avait autant insisté pour l’envoyer au temple. Le pire était que son père se montrait beaucoup trop indulgent avec son épouse. Il avait accepté ce genre de requête et avait même envoyé des gens pour surveiller son fils. Xie Zhi avait pu sortir cette fois, mais son père ne l’avait autorisé à rester que sept jours dans la capitale. Une fois ce délai écoulé, il devrait retourner au Temple des Mille Bouddhas.
« Ne me parle pas de ma mère, ce n’est qu’une ignare. Il a suffi qu’elle fasse un rêve et qu’il se produise quelques incidents dans le manoir pour qu’elle affirme qu’il va m’arriver malheur ! »
Après avoir dit ça, il préféra changer de sujet. Il regarda Lin Chuyan de la tête aux pieds et fit d’un ton alarmé :
« Comment ça se fait que tu aies perdu autant de poids ? »
Était-ce à cause de leur dispute de la dernière fois ?
Xie Zhi ne pouvait s’empêcher de le regretter.
Lin Chuyan et lui avaient toujours été de bons amis après tout. Même s’ils s’étaient violemment disputés la dernière fois, ils n’avaient qu’à ne plus parler de cette querelle au Temple des Mille Bouddhas pour faire la paix et prétendre que rien ne s’était passé.
Toutefois, l’attention de Lin Chuyan était portée sur ce qu’il venait de dire.
Un rêve ?
Il battit de ses longs cils. La pluie et le brouillard dans ses yeux parurent se dissiper. Il saisit alors le bras de son ami et sa voix se fit pressante :
« Shengyi, tu dis que ta mère a aussi fait un rêve ? De quoi parlait ce rêve ? »
Xie Zhi regarda la main de Lin Chuyan posée sur son bras et ressentit un peu de joie. Aussitôt, il raconta le rêve de sa mère en détail et parla même des incidents étranges qui étaient survenus chez eux à la même période.
En entendant ça, Lin Chuyan se renfrogna lentement et ne put même pas écouter ce que son ami dit ensuite. Quand Xie Zhi le ramena enfin à ses esprits, il le renvoya sous prétexte qu’il était fatigué et qu’il voulait se reposer.
Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !
Xie Zhi ne s’était assis que le temps d’un bâton d’encens avant de se faire raccompagner par l’un des serviteurs de la résidence Lin. La mince joie qu’il avait ressentie au début s’envola aussitôt. Son beau visage se couvrit de nuages sombres, ce qui effraya tellement son serviteur qui l’accompagnait que ce dernier osait à peine respirer, craignant d’offenser ce tyran à l’air sinistre.
Xie Zhi grinça des dents et fit d’une voix glaciale :
« Tu vas te renseigner pour moi sur les déplacements du second jeune maître Lin ces derniers temps. »
Pour son retour à Beijing cette fois, rendre visite à Lin Chuyan avait été un de ses objectifs. Le second, c’était découvrir qui était avec son ami. Il voulait savoir qui avait osé séduire son Chuyan en son absence. Qui que ce soit, il tuerait cette personne.
De son côté, Lin Chuyan fit partir tous les serviteurs de la chambre et s’allongea sur le lit de jour. La pluie et le brouillard dans ses yeux se firent plus denses. Il agrippa le devant de sa tunique et n’arrivait presque pas à émettre le moindre son.
Quelques jours auparavant, il avait enfin appris de Ah Yuan le véritable visage de cette personne qu’il avait entretenue, un adolescent qui ne mangeait pas et ne buvait rien de la journée. Ajoutez à ça ce qu’avait dit la mère maquerelle du pavillon Tunjin. Lin Chuyan n’était pas idiot, comment aurait-il pu ne pas deviner l’identité de cet adolescent ?
Son amant était un fantôme.
Malgré tout, Lin Chuyan avait pratiqué des actes très intimes avec lui et il n’y avait pas une parcelle de la peau de l’autre qu’il ne connaissait pas.
Mais il s’avérait que c’était un fantôme, un fantôme !
Il avait fréquenté ce fantôme pendant si longtemps. S’il n’était pas revenu du Temple des Mille Bouddhas ce jour-là et n’avait pas forcé ce fantôme à manger, il serait encore dans l’ignorance.
Et à l’instant, quand il avait entendu Xie Zhi parler du rêve de sa mère, il avait subitement repensé aux songes étranges qu’il avait faits autrefois. Pour une certaine raison, il était convaincu que ces rêves avaient quelque chose à voir avec ce fantôme du nom de Shen Jue.
Il paraissait que les fantômes avaient le pouvoir d’entrer dans les rêves.
« Shen Jue. »
Lin Chuyan releva subitement la tête pour regarda droit devant lui. Ses yeux passèrent de flous à acérés.
« Que ce soit dans un rêve ou en personne, tu me dois une explication, tu ne crois pas ? »
Mais quand il eut prononcé ces paroles, personne ne lui répondit. Cela n’avait aucune importance, il pouvait attendre.
L’autre était un fantôme qui l’avait délibérément abordé, mais qui était resté longtemps à ses côtés sans lui faire le moindre mal. Cela voulait dire qu’il devait avoir d’autres intentions.
Lin Chuyan n’eut pas à attendre bien longtemps. La nuit suivante, il rêva de Shen Jue.
Dans son rêve, Shen Jue était assis sous un kiosque et le regardait. Il ne portait pas la tunique rouge de l’autre jour, mais une tunique noire. Les premiers mots qu’il prononça quand il le vit furent —
« Tu me cherchais ? »
Lin Chuyan le contempla longuement. Puis il fit avec de la retenue :
« Oui, je te cherchais. C’est un rêve ? Tu es entré dans mon rêve ?
– C’est exact. »
Lin Chuyan aurait pensé que l’autre allait continuer à tenter de jouer la comédie un peu plus longtemps. Il ne s’attendait pas à ce que Shen Jue admette directement.
En fait, Shen Jue savait depuis longtemps qu’il ne pouvait plus dissimuler son identité.
Depuis le jour où Lin Chuyan l’avait obligé à manger un bout de viande, il avait souffert pendant quatre à cinq jours et s’était caché dans son manoir en périphérie sans aller nulle part. Le temps qu’il récupère, le sort sur Ah Yuan devait s’être automatiquement dissipé. Bien que le serviteur ne pouvait pas parler, il serait quand même capable d’expliquer à Lin Chuyan son étrangeté.
En plus, vu que Shen Jue avait disparu durant des jours, si Lin Chuyan voulait le retrouver, il se rendrait forcément au pavillon Tunjin.
Et là, son identité serait complètement dévoilée.
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Puisqu’il avait été percé à jour et qu’il ne pouvait pas employer l’hypnose sur Lin Chuyan, Shen Jue n’avait pas d’autre choix que de ne plus le voir pour le moment. Les gens ordinaires redoutaient les fantômes. Même si Lin Chuyan était très courageux, il devait sans doute avoir peur. Alors Shen Jue voulait simplement lui laisser le temps de s’y faire. Il en profita également pour réfléchir attentivement à ce qu’il allait faire ensuite.
Ces jours-ci, il était resté aux côtés de Lin Chuyan sans se montrer. Quand il avait entendu l’autre dire qu’il voulait le voir, il y avait réfléchi un moment avant d’entrer à nouveau dans ses rêves. Le Lin Chuyan du rêve ressemblait à celui de la réalité : il avait perdu beaucoup de poids, son teint était pâle et il avait l’air affaibli.
…
Lin Chuyan grinça des dents en entendant la réponse de Shen Jue. Il le fixa avec un regard complexe, mélange de peur, de colère et même d’autres émotions difficiles à nommer.
« Tu es un fantôme ? » demanda-t’il.
Shen Jue ne répondit que par un mot :
« Exact. »
Lin Chuyan ferma les yeux. Au bout d’un long moment, il reprit :
« Puisque tu es un fantôme, tu devrais tuer les gens. Pourquoi tu n’as pas pris ma vie ? »
Mais quand cette question fut lancée, il n’y eut aucune réponse. Lin Chuyan regarda l’adolescent vêtu de noir non loin. Voyant qu’il gardait le silence, il ne put s’empêcher de faire un pas en avant.
« Parle ! »
Dès qu’il ouvrit la bouche, il se rendit compte que la silhouette de l’autre disparaissait peu à peu.
Les pupilles de Lin Chuyan se dilatèrent et il s’avança aussitôt, voulant saisir la manche de l’autre. Il parvint à l’attraper, mais la manche glissa ensuite de ses mains comme un courant d’air.
« Shen Jue ! »
Il eut beau crier son nom, l’adolescent quitta tout de même son rêve.
Lin Chuyan rouvrit les yeux. Quand il se rendit compte qu’il s’était réveillé, il se tourna pour regarder par la fenêtre.
L’aube était là, mais le temps était couvert, brumeux et froid. Le froid semblait imprégner ses os.
Au bout d’un certain temps, on entendit un plic plic dehors.
Il pleuvait.
Le clapotis de l’eau tomba sur son cœur avec le froid qui ne faiblissait pas.
Lin Chuyan referma les yeux, un sourire amer aux lèvres.
Note de Karura : Shen Jue n’arrête pas de narguer le gong en se sauvant à la dernière minute. Il va bientôt le regretter !
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