Chapitre 296
Plus il se rapprochait, plus il souffrait. Shen Jue ne put s’empêcher de penser à la raison pour laquelle Lu Zhidao ne lui avait pas retiré ces menottes. C’était certainement pour ça.
Il voulait que Shen Jue se rende compte de la difficulté et renonce de lui-même.
Alors qu’il s’approchait de Lin Chuyan, qui se trouvait dans une position surélevée, les conversations dans la salle moururent progressivement. Même les instruments cessèrent de jouer. Ces beautés avaient tous les yeux rivés sur Shen Jue. Ils ne dirent rien, ils se contentèrent de regarder.
Les seuls qui ne prêtaient pas attention à Shen Jue étaient les trois personnes assises en hauteur.
Ces trois-là étaient concentrés les uns sur les autres et ne remarquèrent pas du tout la présence de Shen Jue.
Quand Shen Jue arriva au pied des neufs marches, le jeune homme dans les bras de Lin Chuyan se tourna enfin pour le regarder. Ses yeux s’écarquillèrent, mais il se pinça rapidement les lèvres et se nicha entre plus dans les bras de Lin Chuyan.
« Noble immortel, un nouveau cadeau est arrivé. »
On pouvait entendre un ton chagriné sans fin dans sa voix. Avec son splendide visage, il était vraiment adorable. Lin Chuyan éprouva vraiment de la compassion pour lui. Il souleva le visage du jeune homme d’une main et le réconforta :
« Ne t’en fais pas. Quel que soit le nombre de personnes qui viennent, c’est Qin Jiao que j’aime. »
Dès qu’il eut prononcé ces mots, le second jeune homme assis à côté de lui ne put rester silencieux :
« Et moi alors ? Est-ce que le noble immortel n’aime que Qin Jiao ?
– Bien sûr que non, j’aime aussi Ling You. »
Lin Chuyan consola ainsi les deux petites beautés dans ses bras.
Pendant que les trois-là étaient occupés à discuter, aucun ne se rendit compte que Shen Jue était arrivé devant eux. Il était à présent si proche de Lin Chuyan qu’il n’avait qu’à tendre la main pour le toucher, mais l’autre ne le voyait pas. Son attention était complètement fixée sur les deux beaux jeunes hommes dans ses bras.
Le sort des menottes était si douloureux que Shen Jue pouvait à peine tenir debout. Il serra les dents et parvint à prononcer quelques mots :
« Chuyan, c’est moi, Shen Jue. Tu te souviens de moi ? Je peux t’expliquer ce qui s’est passé dans le monde des humains. J’étais sous l’emprise de… »
Comme il n’arrivait pas à rester debout à cause de la douleur, il fut obligé de tendre la main pour saisir le bras de Lin Chuyan, voulant s’appuyer dessus pour ensuite se redresser. Mais il n’avait même pas effleuré la tunique qu’il se fit violemment projeter en arrière par un sort.
Son corps descendit en roulant l’escalier de jade et son front se cogna lourdement contre une marche.
Avant qu’il ne puisse se relever, il y avait déjà de vives réactions autour de lui.
Certains poussèrent des cris, d’autres ricanèrent et d’autres encore parlèrent d’un ton sarcastique sans se cacher :
« Yo, le nouveau n’a vraiment honte de rien ! Entre porter ça et ne rien porter, il n’y a aucune différence. Je vois que tu as un point cinabre au milieu du front, ce qui te donne l’air d’un petit moine saint. Mais en réalité, tu es encore plus dépravé qu’une pute dans un bordel ! »
En fait, quand Shen Jue était tombé, la cape noire autour de lui s’était ouverte. Ainsi, tout le monde put voir ce qu’il portait en-dessous.
Le jeune homme du nom de Qin Jiao prit la parole à son tour, mais ce fut pour remballer celui qui venait de se moquer :
« Ne dis pas ça. Il est clair que ce sont les femmes fantômes du Palais du Poème du Vent qui l’ont accoutré comme ça.
– Il a suffi que ces femmes lui disent de s’habiller comme ça pour qu’il le fasse vraiment ?! Et à l’instant, il a essayé de toucher le noble immortel de son propre chef. C’est vraiment honteux, ah ! » railla une autre personne.
Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !
Shen Jue porta une main à son front. Quand il la rabaissa, il y avait du sang sur ses doigts. Ses longs cils frémirent, puis il releva les yeux pour fixer la personne assise sur le trône. Lin Chuyan posa enfin les yeux sur lui, mais son regard ne contenait aucune tendresse, seulement de l’indifférence.
Serrant les deux petites beautés contre lui, il le fixait avec supériorité. Shen Jue se releva en prenant appui sur le sol. Au moment où il allait remettre la cape autour de lui, quelqu’un s’approcha.
« Qu’est-ce que tu veux couvrir ? Puisque tu portes cette tenue, pourquoi ne pas la montrer à tout le monde ? »
Sur ces mots, l’homme tira sur la cape de Shen Jue. Il semblait étrangement hostile et agressif envers lui sans raison précise. Les autres virent ça, mais restèrent tous silencieux.
Même Qin Jiao, qui avait pourtant pris la défense de Shen Jue tout à l’heure, ne dit rien cette fois.
Shen Jue venait d’être blessé par deux sorts d’affilée, alors il ne lui restait plus beaucoup de force. Malgré ça, il refusait qu’on lui retire sa cape en public. Alors même si l’autre homme tira de toutes ses forces, Shen Jue continua de s’accrocher au vêtement, ne laissant pas l’autre le retirer.
Il se put que la résistance de Shen Jue enragea l’autre homme. Voyant que Shen Jue ne lâchait pas, il leva la main et le gifla très fort.
Après ce coup, tout le monde en resta choqué. Qin Jiao regarda d’abord Lin Chuyan à côté de lui. Voyant que l’autre ne semblait pas réagir, il se leva et descendit les marches.
« Pourquoi tu te comportes de manière si scandaleuse ? Tout le monde est ici pour servir le noble immortel. Ce petit frère est nouveau, c’est normal qu’il ne connaisse pas les règles. »
Tout en parlant, il s’était déjà approché de Shen Jue. En voyant le sang sur le front de l’autre, il prit un mouchoir de sa manche et le lui tendit.
« Nettoie le sang sur ton front. »
Shen Jue tourna lentement la tête, contemplant le mouchoir blanc qu’on lui tendait. Bien qu’il remercia l’autre homme d’une voix faible, il ne le prit pas. Au lieu de ça, il releva la tête pour regarder de nouveau Lin Chuyan.
Ce dernier était assis sur son trône d’un air calme, comme si la farce grotesque qui avait lieu plus bas n’avait rien à avoir du tout avec lui.
Oui, cela ne comptait pas.
Shen Jue n’avait connu Lin Chuyan que pendant deux ans. En plus, l’autre n’était pas un simple mortel, mais un noble immortel. Deux années ne représentaient pas grand-chose pour un humain, alors encore moins pour un immortel. Et vu que Shen Jue avait gâché sa tribulation, ce serait normal que Lin Chuyan le haïsse. Le fait que Shen Jue n’avait pas été châtié pour ça prouvait la bonté de Lin Chuyan.
Afin de briser ce monde, Shen Jue avait besoin que Lin Chuyan soit prêt à mourir pour lui. Mais à présent que l’autre homme avait une tribulation à subir, il était normal qu’il ne prête plus aucune attention à ce petit obstacle.
Chacun avait ses propres souhaits.
Lu Zhidao avait eu beau le prévenir dès le début, Shen Jue avait conservé ses illusions.
En songeant à tout cela, Shen Jue leva une main pour ressuyer le sang sur son front, puis il tourna les talons et partit sans rien dire.
Qin Jiao en resta stupéfait un moment en le voyant s’en aller.
« Où est-ce que tu vas ? »
Shen Jue ne répondit pas.
Personne ne tenta de l’arrêter et il sortit de la salle sans ennui. Les guides qui se tenaient à la porte dans le couloir furent ébahis en le voyant. Ils échangèrent des regards et l’un d’eux murmura :
« Le noble immortel n’est pourtant pas si violent que ça, ah.
– Excusez-moi, messieurs. Je voudrais m’en aller, » fit doucement Shen Jue.
Il était monté ici sur le dos d’un phénix rouge, alors ce serait difficile de redescendre à pied.
Il n’avait vraiment plus de forces. Il avait pu déjà garder le dos droit en sortant de la salle, mais c’était sa limite.
« Une minute, fit l’un des guides, je vais aller chercher ce Trente-quelque chose. »
Il voulait parler de Trente-six.
Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !
Shen Jue attendit un moment avant de voir Trente-six revenir. L’autre semblait s’être précipité et ses longs cheveux étaient plus emmêlés qu’avant.
« Que… Comment tu as pu finir ainsi ? »
Il vit la blessure au front de Shen Jue, ainsi que la marque de main sur sa joue.
« J’ai offensé le noble immortel. Trente-six, vous pouvez me renvoyer au Troisième Palais ? »
Il n’avait vraiment pas la force de rentrer tout seul.
Trente-six resta un moment silencieux avant de hocher la tête.
« Allons-y. »
Quand Shen Jue revint, Lu Zhidao était chez lui. Il ne fut guère surpris de le voir rentrer dans un tel état. Il demanda juste au petit fantôme derrière lui d’aider Shen Jue à regagner sa chambre pour se reposer, puis il invita Trente-six à prendre le thé.
Après le départ du garde fantôme, il se rendit dans la chambre qu’occupait actuellement Shen Jue.
Ce dernier avait déjà changé de tenue et était allongé sur le lit. Bien qu’il avait les yeux ouverts, il regardait dans le vide.
« Il va falloir réparer la blessure à ton front. Il y a une couturière dans l’autre monde qui est spécialisée dans l’entretien des peaux. Quand tu te sentiras mieux demain, tu iras la voir avec la plaque de jade que je t’ai donnée. Elle réside dans le Cinquième Palais. Dis simplement aux gardes fantômes que tu cherches une couturière et ils t’emmèneront la voir. »
Lu Zhidao repéra alors les vêtements que Shen Jue avait jetés sur la chaise. Il tendit la main pour les saisir et les examiner, puis inspira brusquement.
Malgré les multiples couches, c’était comme si on ne portait rien. En plus, il découvrit qu’il suffisait de tirer sur la ceinture pour que toute la tenue se défasse et tombe par terre.
« C’est quoi cette tenue ?! »
Lu Zhidao fronça les sourcils et se tourna de nouveau vers Shen Jue. Voyant que l’autre ne répondait pas et gardait simplement les yeux ouverts, il s’inquiéta subitement :
« Tu ne vas pas te jeter après dans le Fleuve de l’Oubli, hein ?
– Non, » répondit enfin Shen Jue.
Il se tourna pour regarder le juge qui se trouvait à côté du lit.
« Pourquoi tout le monde croit toujours que je vais sauter ? »
Lu Zhidao expliqua :
« C’est parce que tu ressembles beaucoup aux autres fantômes que j’ai déjà vus se jeter dans le Fleuve de l’Oubli. Je ne parle pas de l’apparence, mais plutôt du sentiment qui se dégage de toi. Laisse-moi te dire à nouveau : sauter dans le Fleuve de l’Oubli ne t’apportera pas la paix. Ce sera au contraire le commencement de milliers d’années de souffrances.
– En. »
Après cette réponse laconique, Shen Jue sombra de nouveau dans le silence. Quand Lu Zhidao vit cela, il comprit que Shen Jue n’avait plus envie de parler, alors il sortit.
Au bout d’un certain temps, Shen Jue se leva du lit et s’assit sur le rebord de la fenêtre. Il replia une jambe devant lui et posa la main dessus en une position nonchalante. Il regarda sur le côté en direction du Fleuve de l’Oubli qui se trouvait non loin.
De nuit, le fleuve avait un aspect un peu différent que durant le jour. Ces eaux brillaient d’une lueur bleue et la surface scintillait. Il n’y avait clairement pas d’étoiles dans l’autre monde, pourtant on voyait des étoiles se refléter sur le fleuve.
Il contempla la scène un long moment, puis finit par pencher la tête sur le côté et s’adosser contre la fenêtre.
Le clair de lune dehors tomba sur son visage blanc comme la neige, ainsi que sur le point cinabre au milieu de son front. C’étaient les femmes du Palais du Poème du Vent qui l’avaient peint sur lui avec une substance inconnue. Shen Jue avait essayé de l’effacer, mais il n’y était pas parvenu. Alors il avait laissé tomber.
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Il avait à la base un visage glacial et pas de cheveux. Avec ce point cinabre en plus sur le front, il ressemblait moins à un fantôme, exactement comme l’avait dit cet homme du Dixième Palais quand il s’était moqué de Shen Jue.
Shen Jue ressemblait à présent à un petit moine saint, mais c’était le genre de petit moine saint qui donnait envie aux gens de le ravager.
Ils voulaient que son expression soit teintée par le monde mortel et qu’il ne soit plus lointain et indifférent.
« Faux, marmonna Shen Jue, ce monde est complètement faux. L’autre monde est faux, le Fleuve de l’Oubli est faux, Lu Zhidao est faux et Lin… Chuyan est également faux. Maître, soyez sûr que je vais revenir. »
Ces derniers mots furent pratiquement inaudibles.
Note de Karura : Que c’est dur pour Shen Jue.
Quant à Lin Chuyan, vous croyez vraiment qu’il a pu rester indifférent à son charme ?
Sinon, petite contradiction de l’auteur : Shen Jue n’est pas censé saigner quand il est blessé.
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