Esprit Malin 13

Chapitre 13 : Ensorcelé (1)


Chi Yan avait un petit-ami.

Il ne se souvenait pas de comment ils s'étaient rencontrés ni des origines et de la position de l'autre homme. Il semblait se rappeler qu'ils s'étaient rencontrés quand il avait rendu visite à son oncle et sa tante à Shiming, non ?

Cependant ses souvenirs flous ne le perturbaient pas. Il y avait une petite voix dans son inconscient qui lui murmurait que cela n'avait aucune importance du moment qu'ils étaient ensemble.

Au moins il se rappelait du nom de son petit-ami.

Il s'appelait Ye Yingzhi.


Ye Yingzhi. Savourant le nom dans son cœur, Chi Yan ressentit de la chaleur et de la sécurité ainsi qu'une légère confiance. Ce genre de confiance ne pouvait pas être faussée.

Avec ce membre supplémentaire dans la famille, Chi Yan devint plus énergique au travail et ses collègues le taquinaient en disant qu'il avait l'air épanoui. D'autres souriaient et lui rappelaient qu'il avait refusé avant qu'ils lui présentent quelqu'un. En fait il s'avérait qu'il avait déjà quelqu'un en tête et attendait que les choses se fassent.


Ce week-end, il avait trois jours de repos avec le premier Mai. Chi Yan avait donc prévu d'emmener Ye Yingzhi à la campagne pour un voyage de trois jours.

Il rentra chez lui avec la nourriture qu'il venait d'acheter. Avant même qu'il ne sorte sa clef, la porte de sécurité argentée s'ouvrit et dévoila le visage beau, doux et souriant ainsi que la silhouette droite de l'homme très familier pour Chi Yan.

En le voyant, Chi Yan se sentit rempli de douceur. Il leva la tête et étira ses lèvres comme s'il avait trouvé ce qui lui manquait et se sentait enfin complet. Il se dit qu'il devait vraiment beaucoup aimer cet homme.


L'homme le débarrassa de ses course et se rendit dans la cuisine avec familiarité tout en discutant avec Chi Yan. Son tempérament ne pouvait être dissimulé par les vêtements d'intérieur ordinaires qu'il portait.

Ye Yingzhi disait toujours qu'il pouvait entendre les pas de Chi Yan, voilà pourquoi il ouvrait toujours la porte avant lui.

Chi Yan ne se souvenait pas clairement depuis combien de temps ils étaient ensemble. Cela semblait à la fois peu de temps et très longtemps. Il contempla le dos de l'autre homme et ne put s'empêcher de sourire légèrement. Il y avait une voix dans son cœur qui lui murmurait que c'était suffisant et que c'était la vie stable et paisible à laquelle il avait toujours aspiré.


Pendant le dîner, Chi Yan parla avec enthousiasme du voyage qu'il avait arrangé. Il posa ses baguettes et regarda l'autre homme avec impatience, attendant sa réponse.

Cependant Ye Yingzhi n'accepta pas en souriant comme il s'y était attendu. Au contraire il hésita, le regarda et fit :

« On doit vraiment y aller ? Ce ne serait pas mieux de rester nous amuser ici ? »

Le cœur de Chi Yan s'alourdit comme une balançoire qui passait du sommet au plus bas. Cela faisait une semaine qu'il passait toutes ses pauses déjeuner à chercher les attractions autour et consulter les guides de voyage, et il avait déjà réservé le logement. Il attendait vraiment avec impatience de pouvoir voyager avec son petit-ami pour la première fois.


« Ah, fit-il en souriant et en se forçant à regarder Ye Yingzhi dans les yeux. Bien entendu si tu ne veux pas voyager, nous resterons ici pour le week-end. J'achèterai plus de nourriture avant le premier Mai. »

Il aurait dû savoir que Ye Yingzhi n'apprécierait pas de voyager. Après tout il avait organisé ce voyage pour lui faire plaisir donc il se plierait évidemment à ce que l'autre homme voulait.

Mais même en se disant cela, il ressentit un grand vide dans son cœur.

Ye Yingzhi lui saisit soudain la main et sourit.

« Allons, je te taquinais. Bien sûr qu'on va partir en voyage maintenant que tu as enfin des congés. »

Il avait vraiment un magnifique sourire, le coin de ses yeux était légèrement plissé et les yeux noirs semblaient contenir une affection infinie.

Pendant un instant, Chi Yan resta bêtement à le regarder puis il hocha la tête. Il oublia totalement que l'hésitation de Ye Yingzhi n'avait pas semblé feinte.


* * *


Chi Yan avait la légère impression que son comportement avait énormément changé depuis qu'il vivait avec Ye Yingzhi. Il y avait eu autrefois une chose qu'il craignait et dont il s'inquiétait tous les jours, et maintenant il n'y pensait plus du tout. Il avait même oublié ce dont il s'agissait.

Mais quand on y réfléchissait, qui conserverait son style de vie de célibataire une fois qu'il tomberait amoureux et vivrait avec son petit-ami ?

Rien que le fait de manger. Autrefois, Chi Yan mangeait uniquement par nécessité. Même quand il restait chez lui et ne travaillait pas, il se faisait souvent livrer à domicile. Maintenant qu'il y avait quelqu'un pour lui cuisiner des plats orientaux ou occidentaux, il devait faire des courses pour le lendemain dès qu'il quittait le travail. Évidemment que sa vie avait changé.

Il avait également le vague souvenir qu'il devait cuisiner une part en plus autrefois sauf qu'en fouillant dans ses souvenirs, il ne pouvait pas se rappeler d'une autre personne dans sa vie.


* * *


Le premier jour du long week-end, Chi Yan emmena Ye Yingzhi en voiture tôt le matin. Ils portaient tous les deux des vêtements de détente. Ye Yingzhi avait trouvé des lunettes de soleil allez savoir où et il était assis dans le siège passager avec ses longues jambes croisées. Il avait tout à fait l'air d'une star.

Une fois en voiture, Chi Yan s'amusa à lui enlever ses lunettes pour se pencher et déposer un baiser sur sa temple. Il examina les lunettes de soleil qu'il tenait et sourit.

« Elles sont pas mal. Je ne t'avais encore jamais vu les porter. C'est toi qui les as achetées ? »

Il disait ça comme ça et se disait que Ye Yingzhi l'accompagnait rarement aux courses alors du coup il n'avait encore jamais eu l'occasion de le voir porter des lunettes de soleil.

Ye Yingzhi sourit et plissa les yeux de satisfaction. Il répondit vaguement :

« Ce sont de vieilles lunettes. »


Chi Yan roula en se fiant au GPS mais se rendit compte avec surprise que les cartes n'étaient pas à jour. Il tomba à un moment sur une route en travaux qui était bloquée donc il dut faire demi-tour et prendre une autre route.

Le sentiment d'impuissance à l'idée de devoir revenir sur ses pas fit ressurgir d'un coup la fatigue et la raideur de son corps. Il poussa un léger grognement et se tourna vers Ye Yingzhi.

« Yingzhi, je n'ai plus envie de rouler. Tu peux prendre le relais ? »

Il n'avait pas bien dormi la nuit précédente et en plus il avait dû se lever à l'aube. Pourquoi devait-il rouler alors que le coupable était confortablement assis à côté et se reposait les yeux fermés ?

Ye Yingzhi eut un léger rire et se tourna vers lui.

« Qu'y a-t'il ? Fatigué ? C'est ma faute. Mais bébé, tiens encore le coup. »


Chi Yan rougit lorsque Ye Yingzhi l'appela bébé. Il ne dit rien et continua consciencieusement à rouler.

Avec un sourire, Ye Yingzhi ajouta :

« Tu as oublié ? Je ne peux pas rouler, je n'ai pas le permis. »

Ah bon ? Chi Yan fut un peu déconcerté. Cela ne semblait pas coller à l'image de Ye Yingzhi qu'il avait... Comment cela se faisait-il que le troisième jeune maître Ye ne pouvait pas rouler ? Était-ce à cause de sa santé fragile ?

Une voiture passa en face. Il secoua vivement la tête et se concentra.

Qui est le troisième jeune maître Ye ? Comment ce titre m'est-il venu à l'esprit ? Même si Yingzhi est un peu pâlot, c'est parce qu'il reste enfermé et ne sort jamais sous le soleil. Il n'a pas du tout une santé fragile et il n'est jamais tombé malade.


Sur la route il y avait plein de camions transportant du matériel de construction, certainement à cause de la route en travaux. Chi Yan n'osa plus se laisser distraire au volant et négligea donc un élément de toute évidence suspect — il ne connaissait pas cet homme qui partageait son lit tous les jours et avec qui il voulait passer le reste de sa vie. Il ignorait s'il pouvait rouler, nager ou faire du vélo... Qui était-il, d'où venait-il et avait-il encore de la famille ?

Mais Ye Yingzhi lui avait simplement dit —

« Cela fait presque un an que nous sommes ensemble. »


* * *


L'hébergement qu'il avait réservé était chez un particulier. La petite maison de deux étages était composée de deux appartements séparés et indépendants, chacun avec une cuisine, une petite salle à manger, un salon et une chambre. La fenêtre de la chambre donnait sur le lac. Chi Yan avait eu une réduction spéciale en réservant par internet et c'était très rentable de ne payer que deux cents yuans Environ 26 €. Ce n'est pas cher du tout ! Y aurait-il un piège ? (1) par jour dans une période si demandée.

Quand ils arrivèrent à destination, il était un peu plus de midi. Le soleil brillait et leur hébergement disposait d'un parking privé. Le second étage de la petit maison était un peu ombragé mais la vue sur le lac était plutôt magnifique et dégagée. Il y avait d'autres petits bâtiments de deux ou trois étages aux alentours mais ils semblaient peu occupés. Ce devait être des locations pour les touristes des cités voisines.


Comme c'était un long week-end, ils avaient vu de nombreuses voitures sur la route, des gens qui voyageaient comme eux. Le tourisme semblait donc plutôt actif dans le coin pourtant le rez-de-chaussée de la maison louée par Chi Yan était fermé par un gros cadenas et les fenêtres étaient sales et poussiéreuses.

Chi Yan prit les clefs et demanda d'un ton nonchalant au propriétaire qui leur faisait la visite :

« Les affaires doivent bien marcher pour les congés. Pourquoi vous ne louez pas le bas ? »

Le propriétaire était un homme dans la quarantaine. Il se raidit en entendant la question puis se frotta les mains et fit :

« C'est en cours de rénovation. »


L'escalier qui menait à l'étage était en acier et à l'extérieur de la maison. Il était peint en bleu mais la peinture s'écaillait par endroit. L'escalier conduisait directement à une terrasse filante à l'étage où se trouvait la porte d'entrée. Chi Yan n'attacha donc pas d'importance au rez-de-chaussée. Cependant quand il descendit, il jeta un regard involontaire au rez-de-chaussée. Il y avait beaucoup de poussière sur les fenêtres et des traces de peinture blanche. Il ne put voir clairement l'intérieur mais aperçut vaguement du désordre.

Chi Yan se dit que la rénovation n'était pas terminée mais qu'elle avait été temporairement suspendue afin de ne pas déranger les autres occupants et de ne pas rater une location pour ce long week-end férié.


Chi Yan n'avait pas encore déjeuné alors une fois les bagages montés, il comptait emmener Ye Yingzhi manger dehors.

Ce dernier s'adossa contre le montant du lit et se massa les tempes, l'air pas bien. Il leva les yeux sur Chi Yan et fit doucement :

« Je crois que la voiture m'a rendu un peu malade, je préfère me reposer. Et si tu sortais manger seul ? Ramène-moi juste à manger après. »

Chi Yan se dit que si Ye Yingzhi se forçait à manger, cela ne ferait qu'empirer son état alors il acquiesça et sortit.

C'était une petite ville qui vivait autrefois de son agriculture. Au fil des années le tourisme avait pris le dessus. Les restaurants indiquaient tous "poissons fraîchement péchés" ou "produits de la ferme". Chi Yan opta pour un établissement qui avait l'air propre. Il entra, commanda trois plats à emporter avec du riz et prit le chemin du retour pour manger avec Ye Yingzhi.


Ils mangèrent tous les deux dans la chambre. Ye Yingzhi affirma qu'il se sentait déjà mieux alors Chi Yan proposa de faire une balade autour du lac afin d'admirer la scène et de se détendre.

Le lac n'était pas très loin de leur logement, à seulement dix minutes de marche. À peine Chi Yan mit le pied dehors qu'une femme l'aborda.

Elle était dans la cinquantaine et était habillée comme les autres vieilles femmes de cette ville. Elle avait l'air ordinaire et banale.

Ils étaient proches du lac mais pas dans la zone où il y avait la meilleure vue. C'était un endroit relativement à l'écart sans personne autour. La femme arrêta Chi Yan et fit :

« Jeune homme, comment se fait-il que vous viviez chez le vieux Hu ? »

Chi Yan fit mine de l'ignorer. De nos jours il y avait de nombreux escrocs et arnaqueurs. Il fallait faire preuve de prudence, surtout dans les petites zones touristiques. Le mieux à faire quand un inconnu vous abordait, c'était de l'ignorer totalement.


Toutefois la femme ne renonça pas. Elle le suivit et fit :

« Je loue aussi ma maison et il y a une chambre de libre. Je peux vous faire 40 % de réduction. Vous pouvez venir tout de suite, hein ? »

Ainsi c'était juste pour promouvoir sa chambre à louer. Chi Yan se détendit un peu. En plus ils étaient deux hommes adultes, avec Ye Yingzhi, donc cette femme aurait bien du mal à tenter de les kidnapper. Il s'arrêta donc et répondit :

« Madame, nous avons déjà loué alors pas besoin. Ne perdez pas votre temps ici et allez voir si quelqu'un d'autre n'a pas besoin d'une chambre. »


En voyant qu'il s'était arrêté pour lui répondre patiemment, la femme hésita et marmonna :

« Mon garçon, écoute un peu cette vieille femme : la maison du vieux Hu n'est pas pure. D'autres personnes peuvent résider dedans sans soucis mais toi, tu es différent. Ta constitution est extrêmement faible... Tu ferais mieux de partir le plus vite possible. »

Qu'est-ce qu'elle entendait par une "faible constitution" ? Et par "pas pure" ?

Ce n'était pas qu'il ne croyait pas en ces superstitions arriérées mais dans sa mémoire, les seuls fantômes qu'il avait vu à ce jour étaient ceux dans les films d'horreur.


Chi Yan prit un air perplexe et protesta intérieurement, cependant les mots impure et faible touchèrent étrangement une corde sensible dans son cœur. Il se mit à trembler sans savoir pourquoi, comme s'il était instinctivement paniqué et apeuré.

Son instinct le poussa à demander plus de détails mais à cet instant une paire de bras s'enroula autour de sa taille et il fut enlacé par derrière. Ye Yingzhi s'approcha de son oreille eut un léger rire.

« Avec moi, tu n'as plus rien à craindre. »


Notes du chapitre :
(1) Environ 26 €. Ce n'est pas cher du tout ! Y aurait-il un piège ?






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