Chapitre 241 : L’Étoile de la Solitude

Lin Liuchun observa un bon moment avec stupéfaction les interactions entre ces deux-là, puis il tendit finalement la main pour taper sur la table. Il plissa les yeux et leur jeta un regard paresseux.

« Lin Xuanzhi, raconte-moi la version courte. »

Lin Xuanzhi se réfréna énormément et émit un son d’assentiment. Il expliqua de manière concise et soigneuse comment ils avaient obtenu le Feu Sacré aux Sept Brillances dans le Royaume Secret de la Frontière d’Alchimie, puis comment ils avaient été assiégés par Shen Changgeng et ses gens.

Quant à la dispute entre Yan Tianhen et lui, ainsi que ce qui s’était passé entre Duan Yuyang et Yuan Tianwen, il évita bien entendu d’en parler. Il termina son récit après un bâtonnet d’encens.

Lin Liuchun parut pensif et il retourna longuement cette histoire dans sa tête. Il finit par faire :

« Si je comprends bien, le Feu Sacré aux Sept Brillances appartenait au départ à Lu Qingli et le Royaume Secret de la Frontière d’Alchimie n’a jamais appartenu à la famille Shen.

– C’est bien ça, confirma Lin Xuanzhi. J’en suis absolument sûr et certain. »

Le Quatrième Aîné poussa un soupir de soulagement et hocha la tête.

« Je vois. Puisque c’est le véritable propriétaire du feu sacré qui vous l’a donné, vous avez tout à fait le droit de le conserver. Par contre, après aujourd’hui, tout le monde va savoir que le Feu Sacré aux Sept Brillances est entre vos mains. J’ai bien peur que de nombreuses puissances vont comploter contre vous, alors faites bien attention. »

Lin Liuchun se tourna spécialement vers Yan Tianhen et lui recommanda de se monter plus vigilant et d’arrêter d’agir sans réfléchir.

L’adolescent acquiesça.

« Ne t’en fais pas, Quatrième Aîné, j’ai mon grand frère pour me protéger ! Pas vrai, grand frère ? »

Lin Xuanzhi eut un léger rire et approuva :

« Naturellement. »

Lin Xuanzhi avait à la base une apparence exceptionnellement splendide, du genre à renverser des empires. Son apparence habituellement froide et indifférente faisait que les gens avaient du mal à détacher leurs regards de lui. Mais ce petit sourire était rempli de pruniers qui fleurissaient en hiver et les gens ne pouvaient que s’incliner devant lui.

Lin Liuchun devait reconnaître que c’était une scène vraiment magnifique mais en ce moment, son cœur était horriblement comprimé. Contre toute attente, ces deux garçons s’étaient mis ensemble sans crier gare et c’était arrivé pile poil sous son nez. Comment pourrait-il expliquer ça à Lin Zhan plus tard ?

Un peu fâché, il fit :

« Ah Hen, va dans ta chambre pour te reposer. J’ai d’autres choses à discuter avec ton grand frère. »

Yan Tianhen avait eu l’intention de roucouler un peu avec Lin Xuanzhi, mais il s’en faisait empêcher par Lin Liuchun. Il lui jeta aussitôt un regard rempli de ressentiment.

Lin Liuchun : « … »

Tu oses te montrer aussi audacieux, tu crois vraiment que ce Vénérable ne peut pas séparer maintenant les deux canards mandarins que vous êtes ?

« Ai, c’est d’accord, fit l’adolescent d’un ton démuni. Mais cela ne doit pas durer trop longtemps. Mon grand frère et moi avons aussi des choses à nous dire en secret. »

Lin Liuchun faillit bondir. Ce petit enfoiré ne savait pas ce qui était bon pour lui ! Dire qu’il l’aidait à réchapper des griffes de ce grand méchant loup, mais il se faisait traiter comme un idiot !

Lin Xuanzhi trouva seulement que son Ah Hen était trop adorable, alors il le tira vers lui et déposa un baiser sur son front.

« Ah Hen, va dans ta chambre et attends-moi. Grand frère va te rejoindre très vite. »

Le cœur de l’adolescent explosa de joie après ce baiser. La tête prise de vertige comme au retour du printemps, il s’éloigna à petits pas rapides.

Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !

Quand la porte se referma, Lin Liuchun toisa son neveu et souleva un coin de ses lèvres.

« Tu fais ça juste sous mes yeux, petit enfoiré. Tu crois vraiment que je ne remarquerai pas votre relation illicite, ah ? »

Lin Xuanzhi fit avec un léger sourire :

« Les yeux du Quatrième Aîné sont comme des torches alors naturellement, rien ne peut échapper à ton regard perçant. »

L’autre homme lâcha un pei.

« Inutile de me flatter, je ne suis pas là pour séparer un couple de canards mandarins. Je veux juste te poser une question : de vous deux, qui a initié la relation ?

– C’est bien sûr moi qui ai commencé. Ah Hen est encore jeune et ne sait pas tout des affaires humaines.

– Alors tu as bien conscience qu’il est jeune et n’a aucune connaissances des affaires humaines ! »

Le visage de Lin Liuchun s’assombrit et il fixa Lin Xuanzhi d’un air morose.

« Tu te souviens encore que c’est ton petit frère ? Le petit frère que ton père a élevé à ses côtés comme un fils pendant sept ou huit ans ?!

– Xuanzhi en a tout à fait conscience. »

Lin Xuanzhi prit un air plus respectueux mais ne recula pas pour autant.

« Je n’ai pas oublié son identité, mais je sais aussi qu’il n’est pas mon frère de sang, alors être avec moi ne peut pas être considéré comme tromper le maître et anéantir les ancêtres Commettre un très grand crime. (1), ni même trahir les liens familiaux. »

Lin Liuchun inspira profondément et ne put se retenir de pointer du doigt le nez du jeune homme.

« Tu crois que je me fais du souci pour ce genre de choses ? S’il était quelqu’un d’ordinaire, même s’il s’agissait de ton propre petit frère, ce Vénérable ne me soucierait pas de vous deux ! »

Cela prit Lin Xuanzhi par surprise et ses paupières tressaillirent.

Le Quatrième Aîné poursuivit :

« Tu as de la boue à la place du cerveau ou quoi ? Qu’est-ce tu y connais au sujet de l’identité et des origines de Yan Tianhen ? Tu crois vraiment que ton père aurait ramené n’importe quel gamin pour l’élever ? »

Le visage de Lin Xuanzhi changea plusieurs fois d’expression.

« Quelle est l’identité de Ah Hen ? J’implore le Quatrième Aîné de bien vouloir me l’apprendre. »

Lin Liuchun poussa un léger soupir, puis posa une main sur son front.

« Seul ton père connaît son identité dans le détail mais quand il l’a ramené, il a brièvement confié que Yan Tianhen est lié à la famille impériale du monde supérieur. »

La famille impériale du monde supérieur ?

Les yeux de phénix de Lin Xuanzhi s’écarquillèrent soudain, avant de se plisser de nouveau.

Les Cinq Continents appartenaient au Royaume Céleste du Milieu et ne représentaient qu’un tout petit coin des Neuf Royaumes avec très peu de Qi spirituel. Il y avait bien des nations, des familles royales et des sectes ici, mais elles étaient innombrables. Rien que dans le Continent Est, il y avait sept ou huit nations et le pouvoir d’une famille royale ne pouvait jamais surpasser celui d’une secte.

Ce n’était pas du tout pareil dans le monde supérieur.

On racontait qu’il n’y avait qu’une seule dynastie impériale dans les Neuf Royaumes qui rassemblait le droit divin et le droit de régner sur tous les royaumes.

Bien que Lin Xuanzhi n’avait jamais vu la vraie famille impériale, il avait entendu plus d’une histoire terrifiante et sanglante à propos des luttes de pouvoir de la famille impériale quand il se trouvait dans les Neuf Royaumes.

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La famille impériale attachait une importance extrême à la lignée. Même des gens de moins bonne extraction n’avaient pas le droit d’épouser quelqu’un de cette famille, alors il était encore moins possible que quelqu’un ayant le sang de Démon Céleste dans les veines puisse avoir le moindre lien avec eux.

Pourquoi Yan Tianhen avait-il été envoyé sur les Cinq Continents ?

Et pourquoi avait-il été confié à Lin Zhan ?

Était-ce pour éviter que des gens détectent le sang dans ses veines ou bien parce que… il avait déjà été repéré, alors il s’était caché ici pour échapper aux poursuites ?

Est-ce que la mort de Lin Zhan avait un lien avec la famille impériale du monde supérieur ?

Est-ce que ces gens savaient déjà où se trouvait Yan Tianhen ?

Les Cinq Continents, Ling Chigu de la Capitale Céleste de l’Empereur Pourpre, Feng Jingyu le maître du Palais Impérial de l’Ouest, et Bai Yichen qui demeurait un mystère…

Chacune de ces perles semblait reliée par un seul fil. Lin Xuanzhi avait le vague pressentiment que la personne au bout de ce fil était celui qui ignorait tout de sa propre situation : Yan Tianhen.

Pour une raison mystérieuse, Lin Xuanzhi se sentit affolé. Il regarda l’autre homme et demanda :

« Qu’est-ce que mon père a dit d’autre ? »

Lin Liuchun réfléchit un moment.

« Ton père a dit aussi qu’à la naissance de Yan Tianhen, un prophète a lu sa destinée dans les étoiles : Yan Tianhen devait connaître une vie mouvementée, remplie de difficultés. Il ressentirait un profond amour mais ne vivrait pas longtemps et il mourrait seul à la fin de sa vie. Il n’obtiendrait jamais ce qu’il cherchait, ni même ce qu’il désirait. Il est l’Étoile de la Solitude. Ton père a dit qu’il avait beaucoup de peine pour ce petit, alors qu’il allait très bien le traiter. Il a dit aussi que s’il disparaissait un jour, il voulait que toi et moi, nous nous occupions bien du garçon, quelle que soit la manière dont les autres le traitaient. »

Lin Xuanzhi eut l’impression qu’un couteau était en train de remuer dans son cœur et il vacilla, manquant de perdre l’équilibre.

Celui qui avait raconté l’avenir de Yan Tianhen était un prophète, alors il y avait de très fortes chances que tout cela soit vrai.

En plus, le destin de Yan Tianhen dans sa vie passée s’était déroulé exactement comme l’avait dit ce prophète.

Il avait été complètement isolé dès son plus jeune âge. Depuis la mort de Lin Zhan, il n’avait plus connu la moindre chaleur de la part du monde. Hormis Duan Yuyang et Lie Fenkong, qui nourrissait de mauvaises intentions envers lui, tout le monde l’avait détesté et haï. Plus tard, ils eurent peur de lui et le redoutèrent. Quant à Lin Xuanzhi —

Il ferma les yeux.

Il était le principal coupable de la mort de Yan Tianhen.

Son esprit fut ébranlé et il ne parvint à se calmer qu’après un long moment.

Cette vie avait déjà recommencé à zéro !

Alors quoi qu’il arrivait, il ne laisserait jamais le sort de Yan Tianhen être aussi tragique et misérable que dans sa vie précédente.

Lin Xuanzhi rouvrit les yeux et regarda Lin Liuchun qui arborait un air soucieux. Il fit d’un ton neutre :

« Quatrième Aîné, même si son identité est problématique, mon père l’a pourtant gardé à ses côtés et l’a élevé. Puisque je l’ai choisi, je ne vais certainement pas l’abandonner à cause de ces troubles externes. Ce ne serait pas bon de deviner son identité, alors je n’en ferai rien. J’espère à présent que le Quatrième Aîné et moi pouvons faire comme si nous n’étions au courant de rien, cela conviendra-t’il ? »

L’Aîné secoua la tête.

« Je me moque bien de ce que tu veux faire avec lui. C’est juste que la famille Lin est une grande famille qui compte plusieurs centaines de personnes. Ce que m’inquiète beaucoup, c’est que plus tard à cause de toi, notre famille se fasse entièrement massacrer. »

Il contempla ce jeune homme qui ressemblait énormément à Lin Zhan et soupira.

« Les gens du monde supérieur sont totalement différents de nous autres du monde inférieur. Nous ne sommes soumis ni au pouvoir impérial, ni régi par le monde supérieur. Nous sommes une zone non réglementée, ce qui veut dire que la majorité des gens de là-bas qui viennent ici agissent à leur guise, se comportent en despotes et n’éprouvent pas un fort besoin d’exercer des représailles. Il y a bien des choses dont ils ne se soucient guère et on peut même dire qu’ils méprisent la famille impériale. Cependant, dans le royaume supérieur où les pouvoirs impérial et divin ne font plus qu’un, les cultivateurs sont sous le joug de la famille impériale. J’ai bien peur qu’ils ne laisseront jamais vivre un poisson qui aurait échappé entre les doigts de la famille Impériale. »

Les deux hommes continuèrent de se fixer et le regard de Lin Xuanzhi ne dévia pas.

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Lin Liuchun continua :

« Ton père n’est pas mort des mains de cultivateurs démoniaques, ceux qui l’ont attaqué étaient clairement des assassins venant d’au-delà des Cinq Continents. Ton père a préféré entraîner dans la mort avec lui le groupe de cultivateurs venus capturer Ah Hen afin de les empêcher de transmettre la nouvelle. Mais les Cinq Continents ne sont plus un endroit sûr. Tôt ou tard, ces gens remonteront à la source et le retrouveront ici. Dans ce cas, comment feras-tu pour le protéger ? »

Lin Xuanzhi serra inconsciemment un poing dans sa manche.

Il avait déjà spéculé à propos de l’identité de Yan Tianhen. Le pire auquel il avait pu penser, c’était que le père ou la mère de Ah Hen appartenait au clan des démons et avait le sang de Démon Céleste dans ses veines, en plus d’un statut élevé. Du coup, les gens du royaume supérieur avaient découvert les origines de Ah Hen.

Mais il n’aurait jamais pensé que l’identité de Ah Hen serait encore plus compliquée — s’il était de sang royal, alors il avait un certain droit sur le trône. Et plus le statut du père était élevé, plus le rang de Ah Hen serait extrêmement élevé. Mais comment la famille impériale aurait-elle pu laisser quelqu’un avec du sang de démon monter sur le trône ?

Comment pourraient-ils reconnaître un semi-démon comme prince de la famille impériale ?

Le royaume supérieur avait des idées bien arrêtées : il arrivait fréquemment que des descendants soient massacrés dans le seul but de préserver la pureté et la noblesse d’une lignée.

En voyant les hésitations de Lin Xuanzhi, Lin Liuchun se sentit un peu déçu, mais il se réjouit également.

Il fit :

« Tant que vous n’en êtes pas encore arrivés au stade où vous serez inséparables, le mieux serait de l’envoyer loin de la maison au plus vite, pas vrai ? L’alchimiste Zhongli Shen de la secte du Pic Céleste est une vieille connaissance et Ren Fuyao, le jeune maître de la secte, est aussi un ancien ami à moi. Si tu préfères éviter de t’en mêler ouvertement, laisse-moi faire lieu d’intermédiaire pour envoyer Yan Tianhen ailleurs. Cela permettra à la famille Lin de survivre par la suite. »

Quand Lin Xuanzhi entendit ça, il fut extirpé de ses pensées et se pinça les lèvres. Puis il ploya le genou et mit un genou à terre.

Il y avait de l’or sous les genoux d’un homme. Bien que Lin Xuanzhi n’avait mis qu’un genou à terre, cela suffit à choquer l’autre homme.

Lin Liuchun se releva et fixa avec stupéfaction le visage extraordinairement pur comme celui d’un immortel déchu.

Il s’était agenouillé.

Le fier et droit Lin Xuanzhi qui ne s’était jamais incliné devant personne venait de s’agenouiller.

Note de Karura : Un peu de suspense pour la véritable identité de Yan Tianhen et les circonstances de la mort de Lin Zhan.

Notes du chapitre :
(1) Commettre un très grand crime.

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