Lanterne 22

Chapitre 22 : La vérité dévoilée


Hôpital interne de la CMC Pour rappel : Commission Militaire Centrale. (1), quatrième sous-sol.

La chambre d’hôpital était brillamment éclairée et toutes sortes d’appareils médicaux très chers et sophistiqués entouraient le lit. Tous ces appareils indiquaient que les constantes de la personne alitée étaient très critiques.

— Il s’agissait d’un très vieil homme aux cheveux gris, avec les yeux fermés et des cernes évidentes. Tout son visage faisait penser à de l’écorce séchée et il avait même l’air un peu effrayant. S’il se teignait les cheveux en noir, mettait un costume et se maquillait pour se donner un air plus vigoureux, beaucoup de gens dans tous le pays reconnaîtraient ce visage qui apparaissait souvent dans les journaux télévisés. Hélas, cet homme était à présent allongé sur le lit dans un état très flétri, juste un homme tragiquement à l’article de la mort.


Yu Jingzhong se tenait près du lit, l’air sombre. Un homme qui ressemblait à un médecin traitant entra. Il retira son masque et secoua la tête vers lui.

« La situation n’est guère optimiste. Quand nous avons dû évacuer des soins intensifs tout à l’heure, nous avons bougé trop vite, ce qui a nui à l’état de santé du patient… »

Yu Jingzhong grinça des dents et siffla :

« Ils n’avaient pas dit que Feng Si était parti en Enfer pour trouver le Seigneur Démon Fan Luo ? Alors pourquoi il est subitement apparu dans cet hôpital et s’est tout de suite dirigé vers les soins intensifs ?! »

Le médecin ne se risqua pas à répondre. Ce fut alors qu’ils entendirent une voix rauque et désagréable s’élever d’un coin de la chambre :

« C’était un piège tendu par Zhou Hui, chef-adjoint Yangjin. Le chef d’équipe Feng Si n’a jamais mis le pied dans l’un des quatre Dao du Mal depuis qu’il s’est brouillé avec notre Seigneur Démon lors de l’incident avec le Roi de Clarté Paon Mahā… Si Zhou Hui a répandu la nouvelle que le chef d’équipe Feng Si était parti, c’était uniquement pour détourner votre attention. »


‘Yu Jingzhong’ se retourna et vit quatre silhouettes extrêmement fines qui se tenaient dans le coin, toutes vêtues de capes grises épaisses qui les recouvraient de la tête aux pieds, leurs visages cachés par de larges capuches. Tout ce qu’on pouvait voir d’eux, c’était qu’ils tenaient chacun une cloche en or pur aussi grande qu’une lanterne et que les mains dévoilées sous les manches étaient fripées et d’un gris cendré.

Leur chef donna l’impression de sourire et fit :

« Son Altesse le Roi Démon a été également très surpris en apprenant la nouvelle mais après avoir cherché dans tous les Neufs Cieux et les Dix Terres, ainsi que les quatre Dao du Mal, il n’a pas trouvé la moindre trace du phénix… Quel dommage, notre Seigneur Démon a toujours ardemment désiré épouser proprement le chef d’équipe Feng Si. »


Les coins des lèvres de Yangjin Pincuo se crispèrent sèchement et cela transparut sur le visage de Yu Jingzhong à travers le masque de peau, ce qui donnait un résultat assez bizarre.

« La cinquième équipe ne pourra pas arrêter Feng Si. Vous aviez enfin réussi à enlever le divin Shenwan Tiansi et à en faire une marionnette mais à présent, vous allez perdre ce précieux atout… Il paraît que le chef d’équipe Feng Si ne s’est toujours pas remis d’une très grave blessure même après des centaines d’années. On dirait que même ce chameau émacié reste plus gros qu’un cheval. Que devons-nous faire ? »

L’homme vêtu de gris répondit d’un ton indifférent :

« Ne vous en faites pas pour ça — »

Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !

Dès qu’il eut terminé de parler, le vieil homme alité eut soudain du mal à respirer. Son corps s’arqua presque et il cracha de gros caillots de sang sous le respirateur. Tout le monde se mit à paniquer et le médecin en chef se précipita avec plusieurs personnes pour intervenir. Tous les instruments s’allumèrent en même temps et émirent des alarmes stridentes.

« Le sang de Bouddha ! Apportez-moi le sang de Bouddha ! » s’écria le médecin en chef.

Il arracha la poche de sang des mains du médecin qui arrivait en courant. Il préleva le liquide rouge où on pouvait apercevoir quelques filaments dorés et l’injecta dans l’intraveineuse. Après quelques secondes, tout le sang avait pénétré dans la carotide du vieil homme. Ce dernier respira laborieusement et violemment pendant un moment, mais on voyait déjà une amélioration évidente. Ensuite, il se calma lentement, ses constantes reprirent des niveaux normaux et les alarmes s’arrêtèrent.


« C’ét-c’était la dernière dose de sang de Bouddha, » fit le médecin en chef.

Il se ressuya le front couvert de sueur et ajouta d’un ton désespéré :

« L’autre moitié, vous l’avez emmené à l’étage pour affronter le chef d’équipe Feng Si. Cette quantité qui nous reste est loin de suffire, très, très loin de suffire… »

Yangjin Pingcuo serra les dents et fit :

« Les objets que le petit chéri de Yu Jingzhong a ramené du Japon, ce ne sont pas des objets sacrés ? Ils n’auraient pas le pouvoir de prolonger la vie ?! »

Au moment où l’homme vêtu de gris allait répondre, quelqu’un toqua deux fois à la porte avant d’ouvrir. Un subordonné entra rapidement et murmura à l’oreille de Yangjin Pingcuo :

« Chef adjoint, c’est terrible. Le chef d’équipe Feng Si a dissipé les âmes de tout le monde. La cinquième équipe a été complètement anéantie… »


Le visage de Yangjin Pingcuo changea radicalement d’expression.

« Qu’est-ce que tu dis ?! »

Un grand silence se fit dans la chambre et l’air était très tendu, comme une corde sur le point de se briser.

Dans cette atmosphère oppressante, l’homme en gris ricana soudain.

« Aucune importance, laissez-nous nous charger du Roi de Clarté Phénix. »

Les quatre personnes en gris se tournèrent pour se diriger vers la porte en un mouvement coordonné. Sous la lumière, on pouvait voir que leurs corps émettaient un gaz presque indécelable et qu’ils avaient l’air d’être enveloppés dans une légère fumée noire. Quand ils marchèrent, des traces de pas noires restèrent au sol, mais elles séchèrent très vite au contact de l’air, ne laissant qu’une fine couche de particules grises, comme du gravier.

« — Vous êtes sûrs de vous ? les héla Yangjin Pingcuo de derrière.

– Ce n’est qu’une personne au bout de sa vie, pas de quoi avoir peur… »

L’homme en gris ne tourna même pas la tête et disparut rapidement au bout du couloir sombre du sous-sol de l’hôpital.

« Même si nous sommes censés ramener vivant le Roi de Clarté Phénix à notre Seigneur Démon, ce ne sera pas difficile. »


* * *


Alors que le groupe d’hommes en gris partait, l’odeur persistante de pourriture dans la chambre sembla se disperser d’un coup.

Yangjin Pingcuo inspira profondément, puis se tourna pour regarder le médecin qui ne parvenait pas à cacher son inquiétude ainsi que le vieil homme mourant alité. Le big régulier des appareils l’irrita particulièrement et par habitude, il voulut se prendre une cigarette, mais s’arrêta.

Il se tourna et ordonna à ses subordonnés :

« Amenez-moi Yan Lanyu. »

Les hommes hochèrent la tête et partirent. Après un moment, un fauteuil roulant fut poussé dans la chambre. Yan Lanyu, inconscient, se trouvait dessus. Il avait la tête penchée, ses mèches retombant au coin de ses yeux, et son visage était si pâle qu’on aurait presque cru qu’il était transparent.

Yangjin Pingcuo le fixa d’un air glacial, puis ordonna :

« Réveillez-le. »

Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !

Un des hommes pressa d’une main un certain point d’acupuncture sur la tête de l’adolescent et appuya dessus de toutes ses forces. Cependant, cette méthode qui aurait pu réveiller même un mort ne fit pas effet cette fois. Le subordonné dut presser plus fort encore deux ou trois fois avant que Yan Lanyu ne frémisse et n’ouvre lentement les yeux.

Yangjin Pingcuo baissa les yeux sur lui et demanda :

« Tu es réveillé ?

– … »

L’adolescent se radossa contre le fauteuil, haletant à cause de la vive douleur. Après un long moment, il cracha une mousse ensanglantée de sa trachée et parvint à reprendre un peu son souffle.

« … Qui… Qui tu es ? demanda-t’il avec du mal.

– Je suis Yu Jingzhong, ah, répondit Yangjin Pingcuo avec un sourire. Pourquoi tu demandes ?

– Tu n’es pas lui… Qui est-tu ? Où est Yu Jingzhong ?! »


Le sourire retomba sur les lèvres de Yangjin Pingcuo. Il jeta un regard noir au visage hagard de Yan Lanyu et demanda après un moment :

« Personne ne m’avait encore démasqué, même Zhou Hui a juste été décontenancé un moment. Mais toi, tu es le seul à avoir compris qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas à l’instant où tu m’as vu. Qu’est-ce que j’ai fait pour me trahir ? Ou bien le fait de coucher ensemble change-t’il tellement une relation que tu peux distinguer le vrai du faux au premier regard ? »

Les lèvres sèches et ensanglantées de l’adolescent s’étirèrent en un sourire qui contenait un peu d’ironie.

« Non, je n’ai pas couché avec lui, fit-il. Il n’y a absolument rien entre nous… alors tu ne risques pas de pouvoir faire pression sur lui en te servant de moi. »

Yangjin Pingcuo comprit enfin où il s’était trompé.

Il ne put s’empêcher de vouloir se taper la tête contre le mur — ça avait été son unique erreur, mais elle était fatale.

« C’était donc ça. Ce Yu Jingzhong… »

Il grinça des dents et aperçut soudain un petit sourire de satisfaction sur le visage de Yan Lanyu.


Cet adolescent, qui semblait à deux doigts de mourir à tout instant, avait pourtant conservé sa détermination après tous ces jours d’emprisonnement et de torture. Il arrivait à prendre l’avantage dans une confrontation du tac au tac, ce qui montrait que rien ne pouvait vraiment l’intimider ou lui faire peur pour de bon.

— Des gens comme Yan Lanyu, qui étaient prêts à mourir, n’avaient vraiment aucune faiblesse.

Yangjin Pingcuo savait cependant qu’il ne pouvait pas laisser les choses se poursuivre ainsi et qu’il devait reprendre l’avantage.

« Faisons un marché, » fit-il en inspirant.

Puis il demanda :

« Est-ce que tu sais pourquoi tout le monde s’est imaginé que Yu Jingzhong et toi étiez en train de raviver la flamme du passé ?

– … »


Yangjin Pingcuo continua sans attendre la réponse de l’adolescent :

« C’est parce que Yu Jingzhong s’est comporté comme si c’était le cas ! C’est à cause de son attitude que beaucoup de gens se sont mis à croire qu’il y avait eu quelque chose entre vous — Quand Yu Jingzhong a échoué dans sa mission d’infiltrer la secte Mizong, son compagnon et lui ont été capturés. C’est toi qui l’as libéré en secret, ce qui lui a permis de sauver sa vie et celle de son compagnon. Si les renseignements de nos supérieurs sont corrects, tu as grandi dans la secte Mizong et tu as le même nom de famille que le maître de secte, pas vrai ? C’était donc inconcevable que quelqu’un comme toi risque sa vie pour le laisser s’en aller. Si Yu Jingzhong n’avait pas sorti cette excuse, il n’aurait jamais pu expliquer autrement cette histoire. »

Yan Lanyu ferma les yeux, signifiant qu’il ne voulait pas en entendre davantage.

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Malheureusement, Yangjin Pingcuo refusa de se taire. Sa voix était calme, voire même un peu cruelle :

« En fait, Yu Jingzhong aurait très pu trouver une autre excuse. Je ne comprends pas pourquoi il a été choisir celle-ci. En toute logique, cette excuse ne le met pas du tout en valeur, alors je pense que c’était un choix inconscient. Peut-être qu’au fond de lui, il aurait voulu que ce soit vraiment le cas… »

L’adolescent détourna.

Des larmes coulèrent de ses yeux clos et glissèrent silencieusement sur ses joues pâles et émaciées.

« Alors faisons un marché. Je ne vais pas te demander grand-chose. Tu es encore jeune après tout, considère cette dernière demande comme une compensation envers toi. »


Yangjin Pingcuo désigna l’homme alité et expliqua :

« Cet homme est notre chef. Nous devons le garder en vie à tout prix afin de nous assurer que la passation de pouvoir de notre faction se fasse complètement. Aida Tadaishi a dit que tu étais l’un des onmyōjis les plus talentueux de la nouvelle génération du Japon. Peux-tu voir ce que tu pourrais faire ? Si tu y arrives, je te laisserai voir Yu Jingzhong une dernière fois… Eh oui, il n’est pas encore mort. »

Le corps de Yan Lanyu se mit à trembler un peu et il ouvrit les yeux.

Sous la lumière, ses paupières étaient très fines et la pointe de ses yeux était un peu étirée vers le haut, ce qui donnait une courbe très douce. Ses larmes étaient comme des taches de rouge sur une peinture à l’encre. Yangjin Pingcuo le contempla un moment, fasciné, et une touche de pitié apparut fugitivement dans son cœur. Puis il se dit que ce serait très difficile d’avoir la résolution de tuer une telle personne.


« … Son âme s’est dispersée… murmura doucement Yan Lanyu. Il n’y a aucun moyen… Je ne peux rien faire. »

Le visage de Yangjin Pingcuo s’assombrit et il insista :

« Il n’y a vraiment rien à faire ? Ce fragment que tu portes —

– Il sert uniquement à exorciser les esprits maléfiques, il ne peut pas empêcher la mort, encore moins quand il ne reste plus qu’un souffle de vie. Pour lui sauver la vie, je ne vois que les larmes versées par le Phénix depuis son trône divin du Ciel ou bien le sang pur et bienveillant de Bouddha versé volontairement… Les deux sont pratiquement impossibles à obtenir. »

Après avoir dit ça, Yan Lanyu se mit à tousser, encore plus fort qu’avant. Il faillit même se plier en deux. Du sang frais continuait de couler de son nez et de sa gorge, ses paumes étaient couvertes d’écume rouge. Yangjin Pingcuo le saisit par les épaules et constata qu’il était vraiment en train de mourir. Cet adolescent avait atteint la fin de son existence.


Il hésita un peu mais après un moment, il fit signe à un de ses subordonnés et fit d’une voix grave :

« … Emmène-le dans la salle de garde et laisse-le voir Yu Jingzhong pour la dernière fois. »

L’homme acquiesça et demanda :

« Qu’allez-vous faire ? »

Yangjin Pingcuo réfléchit un moment avant de marmonner pour lui-même :

« Le sang pur et bienveillant… versé volontairement. »

Il se reprit et ordonna subitement à voix haute :

« Apporte-moi un autre masque de peau de mon armoire. C’est celui que j’ai fait récemment — le masque ayant la forme du visage du chef d’équipe Feng Si. »

Le subordonné hocha la tête et poussa le fauteuil roulant de Yan Lanyu dans le couloir.


* * *


Le couloir hors de la chambre était très sombre. Peut-être parce qu’ils cherchaient à ne pas trop attirer l’attention, beaucoup de recoins étaient carrément plongés dans le noir. Il faisait très froid dans ce quatrième sous-sol. Yan Lanyu se mit à frissonner, à moitié conscient. Le subordonné eut pitié de lui et retira son manteau pour le poser sur lui.

« Tu es tellement beau. Si tu voulais, tu pourrais avoir la belle vie. Alors pourquoi tu restes tellement fixé sur cette personne ? Tu vas y perdre la vie, c’est tout, » marmonna l’homme en secouant la tête et en soupirant.

Il s’arrêta devant une porte avec des barreaux en acier au bout du couloir.

« On y est. »

C’était à la base un couloir qui conduisait à la salle du réseau électrique, voilà pourquoi l’accès était complètement bloqué par des portes de sécurité. Il faisait noir à l’intérieur, on ne pouvait pratiquement rien voir entre les barreaux et l’odeur de poussière était omniprésente.

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Yan Lanyu se pinça les paumes pour se forcer à rester conscient. Il regarda attentivement l’agent qui tapait le code d’entrée en lui tournant le dos. L’adolescent ne rata pas le moindre mouvement du coude de l’autre homme. Après un moment, le code fut entré et confirmé, puis la porte en acier s’ouvrit avec un clic.

Le subordonné se tourna et poussa Yan Lanyu dans la salle en faisant :

« Là, le voilà. »

— On pouvait voir une personne à moitié assise et à moitié allongée contre le mur. Bien que le visage était pratiquement invisible dans l’obscurité, Yan Lanyu reconnut tout de suite cette silhouette qui était exactement la même que dans ses souvenirs.

Ses larmes se mirent à couler sans un bruit. On aurait dit qu’il y avait quelque chose de dur et d’amer dans sa gorge qui l’empêchait même de sangloter.


Le subordonné semblait très ému à son tour. Il voulut dire quelque chose, mais garda le silence. Au final, il secoua simplement la tête en faisant :

« Désolé, directeur-adjoint Yu, nous ne faisons que suivre les ordres. Vous… Prenez votre temps pour discuter tous les deux, je ne vous dérangerai pas. »

Puis il se tourna pour sortir de la pièce. Il referma la grille derrière lui et la reverrouilla avec un clic.

À terre, Yu Jingzhong bougea un peu. Ce ne fut que lorsque la silhouette de l’agent disparut au bout du couloir qu’il soupira et fit :

« … Petit frère, je te demande vraiment pardon. »

Ça faisait longtemps que Yan Lanyu avait attendu ces mots. Cela avait commencé il y avait deux ans lorsqu’il se trouvait encore au Japon : profitant d’une nuit enneigée, il avait libéré en cachette cet agent étranger qu’il n’avait rencontré qu’une seule fois. Ensuite, durant les deux années qui avaient suivi, il avait précieusement conservé cette promesse vague et avait constamment poli son espoir le plus fragile et ayant le moins de valeur. Il avait répété ce cycle d’espoir et de découragement pour finalement perdre tout espoir à force d’endurer les jours et les nuits sombres…


Il attendait donc ces mots. C’était la seule et unique chose à laquelle il avait refusé de renoncer durant sa courte vie d’à peine plus de dix ans.

Toutefois, après avoir enfin entendu ces paroles, il ne perdit pas le contrôle de ses émotions, il ne fondit pas en larmes et il ne sentit même pas la douleur amère et piquante qui l’avait pourtant tourmenté des centaines ou des milliers de fois.

Yan Lanyu prit une grande et lente inspiration et sentit l’air lui faire très mal en remplissant ses poumons. Du coup, sa voix fut éraillée :

« Ce n’est… Ce n’est pas grave. »

Yu Jingzhong se rapprocha et malgré la pénombre, Yan Lanyu put voir qu’il était couvert de sang. Mais le sang avait séché en grande partie, alors il ne savait pas comment ça avait pu se produire. Yu Jingzhong nota son regard mais n’expliqua pas l’origine de ses blessures. Il tendit plutôt la main pour sentir le pouls et la température de l’adolescent derrière son oreille. Il fit :

« Tu dois absolument te faire soigner d’urgence, il ne faut pas attendre plus longtemps. Qu’est-ce que tu fais ici ? Ils veulent aussi te tuer ? »

Yan Lanyu ne répondit pas.


« Écoute, reprit Yu Jingzhong, j’ai quelques informations pour toi. Ils m’ont torturé pendant longtemps pour essayer de me les arracher. Quand tu les auras entendues, tu pourras les leur dévoiler petit à petit quand tu les reverras. Tu dois bien doser, il faut que tu tiennes le coup jusqu’à ce que Zhou Hui découvre tout et vienne te sauver. Zhou Hui est le chef de la première équipe parmi les six de notre département spécial. Si tu le rencontres, tu seras forcément sauvé. Dis-lui que c’est mon ultime ordre : il faut que tu survives…

– C’est inutile… fit Yan Lanyu d’une voix faible. Ne t’embête pas avec ça, c’est inutile. »

Yu Jingzhong saisit les repose-coudes du fauteuil roulant de l’adolescent comme s’il voulait dire quelque chose, mais il se fit interrompre par la voix douce mais irréfutable de Yan Lanyu :

« Je suis un maître du Yin et du Yang, je me connais… Ne t’en fais pas pour ça, inutile de me dire ce que tu sais. Dis-moi plutôt d’abord, qu’est-ce qui a causé tout ça ? Pourquoi cet homme s’est fait passer pour toi ? »

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Ils restèrent à se regarder un moment sans rien dire, puis Yu Jingzhong poussa un long soupir. Il fit d’un ton morne :

« … Dans la CMC, il y a une force qui nous est hostile et un de ses chefs est en train de mourir. »

Yan Lanyu écouta en silence.

« Mais les autres membres ne sont pas prêts à prendre la relève, alors une fois que leur chef tout puissant mourra, toute leur organisation risque de s’effondrer. Voilà pourquoi afin de prolonger sa vie, ils veulent utiliser toutes les ressources de notre département spécial. Je suis devenu un obstacle pour eux. Il y a un mois, j’ai appris que tu étais venu dans la cité de H, alors je voulais en profiter pour t’exfiltrer. J’ai envoyé Zhou Hui là-bas avec cet ordre secret. Malheureusement, la faction rivale a profité de l’absence de Zhou Hui à Beijing pour s’allier à ce qui s’appelle les ‘Quatre Dao du Mal’. Ils ont maîtrisé Shenwan Tiansi, le chef de la cinquième équipe qui refusait de les suivre, pour le manipuler, puis ils ont poussé le chef adjoint Yangjin Pingcuo à inciter toute la cinquième équipe à la révolte. Ils lui ont aussi ordonné de se faire passer pour moi pendant qu’ils me retenaient prisonnier ici. »

Yu Jingzhong ne perdit pas de temps à expliquer comment un chef adjoint avait pu conduire toute une équipe à se rebeller alors que leur propre chef n’avait pu rallier aucun partisan à lui.


« S’ils ne m’ont pas encore tué, c’est parce que je détiens pas mal d’informations qu’ils veulent. Sans ça, Yangjin Pingcuo ne peut pas continuer de se faire passer pour moi sans se faire repérer. »

Il marqua une pause avant de reprendre :

« — Mais si les plans de cette faction se réalisent et que leur grand patron revient à la vie, notre département spécial deviendra complètement chaotique et les six équipes s’effondreront. À ce moment-là, ils pourront me tuer quand ils voudront car il n’y aura plus personne pour soupçonner Yangjin Pingcuo d’être un imposteur. »

Yu Jingzhong soupira de nouveau et conclut :

« Alors mes chances de survie sont extrêmement faibles. Tout dépend de combien de temps je vais pouvoir conserver mes informations… Au départ, je voulais tenir le coup le plus longtemps possible mais maintenant que je t’ai revu, ça n’a plus aucune importance. Dieu a eu la bonté de me donner cette dernière chance avant de mourir. »


Yan Lanyu inspira et eut un léger sourire.

« J’ai toujours pensé que Dieu me maltraitait… fit-il doucement. Je me dis à présent que ça en valait la peine. »

Il s’appuya sur les accoudoirs et se redressa lentement, avec beaucoup de mal. Dès qu’il fut debout, il tituba. Yu Jingzhong se précipita pour le soutenir et lui demanda d’un ton interdit :

« Qu’est-ce que tu fais ?!

– … »

Yan Lanyu agita la main pour lui signaler de ne rien lui demander. Puis il se libéra de son soutien et s’avança en chancelant vers la grille en acier.

Il arrivait à peine à tenir debout. Vues de profil, ses joues, qui étaient jolies que celles d’une fille, avaient l’air encore plus émaciée. Mais dans ce corps frêle se cachait un courage terrible et désespéré qui devint une force immense pour soutenir sa colonne vertébrale, lui permettant de se tenir droit et de ne pas tomber.

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L’adolescent se posta devant la grille. Il avala une gorgée de salive ensanglantée et l’instant d’après, il tendit la main pour se démettre l’épaule. Son corps parut se rétrécir d’un coup et la moitié glissa tel un serpent dans l’espace entre deux barreaux qui n’était que de quelques centimètres !

Choqué, Yu Jingzhong s’écria :

« — Du contorsionnisme ?! »

Le torse de l’adolescent était coincé entre les barreaux, alors il inspira, ce qui lui causa une vive douleur — Pendant quelques secondes, il fut tout bonnement incapable de supporter cette douleur agonisante. Il leva malgré tout sa main intacte et la posa sur l’épaule du même côté. Crac ! Avec ce son sec, il se démit la seconde épaule. Sous le bruit effroyable des os qui frottaient, il s’extirpa petit à petit de la grille !

Il tomba par terre de l’autre côté avec un bruit sourd. Yu Jingzhong se rua à la grille pour serrer les barreaux avec une telle force que ses doigts se convulsèrent violemment.


Lui faisant signe de ne pas faire un bruit, Yan Lanyu mit un moment à reprendre son souffle. Puis il se mit debout avec du mal et serra les dents. Il cogna son épaule contre le mur pour remettre l’articulation dans un craquement.

On voyait clairement qu’il avait l’habitude de ce genre de dislocation puis de remise en place. Gardant les dents serrées, il leva son avant-bras et le bougea plusieurs fois. Quand il sentit que ses doigts retrouvaient lentement leur sensation, il se posta devant le panneau pour entrer le code, chiffre par chiffre. Après quelques secondes, la grille s’ouvrit avec un clic.

Yu Jingzhong le rejoignit en un pas. Il serra contre lui Yan Lanyu qui était en train de s’affaisser et il tomba à genoux, tremblant. Il sentit que ses yeux lui brûlaient, même l’air qu’il respirait était chaud et âcre. Au contraire, le corps dans ses bras était très, très froid et les os pointaient durement contre ses mains. On aurait dit qu’il y avait un froid glacial sans fin qui provenait de la moelle même, dévorant rapidement le peu de vie qui restait chez ce malheureux adolescent.


« Ça… ça ne fait pas mal, fit Yan Lanyu d’un ton confus. Ne… Ne pleure pas, ne pleure pas… »

Il voulut lever la main, mais elle retomba avant de se faire saisir par l’autre homme. Cet homme expérimenté qui travaillait depuis dix ans dans le monde de l’espionnage tremblait de tout son long. Il pressa son visage contre la nuque de l’adolescent, le désespoir vidant complètement son esprit.

La conscience de Yan Lanyu était déjà en train de s’assombrir. Il avait seulement froid, le genre de froid glacial comme si tout son corps était brisé et incomplet. Il voulut demander à Yu Jingzhong de le serrer plus fort mais en fait, ils étaient déjà si proches que c’était comme s’ils avaient fusionné leurs os et leur sang. Toutefois, il ne parvenait pas à le sentir.

« Vite… pars… supplia-t’il avec des yeux troubles. Vite… Tu… dois t’en aller vite… »

Yu Jingzhong haleta violemment. Il redressa la tête et fixa le couloir souterrain qui était sombre et silencieux. Après un moment, il serra les dents et se releva. Portant l’adolescent sur son épaule, il s’avança en titubant.


Note de Karura : J’ai dit que je n’étais pas fan de ce couple, mais quand Yan Lanyu a simplement répondu “ce n’est pas grave” à Yu Jingzhong après tout ce qu’il a dû endurer, j’ai senti un petit pincement au cœur.

Sinon, ce chapitre est verrouillé sur le site de l’éditeur, mais je me demande pourquoi. Il n’y a pas de scène chaude. Allez comprendre la censure chinoise, des fois.



Notes du chapitre :
(1) Pour rappel : Commission Militaire Centrale.






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