Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !
Chapitre 23 : La respiration de Zhou Hui se fit plus lourde tandis qu’il se rappelait brusquement de la première fois où il avait vu le Phénix en tant que bête démoniaque
Dans le même bâtiment, aux soins intensifs.
Chu He s’appuya sur le long arc pour s’asseoir lourdement. Il porta la main à sa taille. La ceinture était déjà serrée à l’origine, alors c’était encore plus flagrant qu’elle soit imbibée de sang. Les broderies en forme de phénix étaient d’autant plus remarquables parmi les taches rouges. Il respira plusieurs fois et sentit une vive douleur à l’endroit où il avait été frappé par le vajra Domine Démon. C’était le signe que ses organes internes avaient été touchés.
Tous les membres de la cinquième équipe se retrouvaient avec leur âme dispersée. Ils restaient allongés comme des légumes un peu partout. Le divin Shenwan Tiansi gisait lui aussi, comme mort. Chu He pria pendant cinq bonnes secondes pour qu’il ne soit pas vraiment mort, puis il retira la longue flèche cyan fichée dans le ventre de l’adolescent. Du sang goutta aussitôt de la pointe de la flèche.
Cette flèche était faite en os de phénix. Il y en avait eu autrefois douze, douze os extraits de son corps d’origine. Il y avait bien longtemps, durant la guerre entre les dieux et les démons, Zhou Hui avait tranché onze flèches d’un coup en plein vol. La dernière, il l’avait attrapée avant que Chu He ne puisse la tirer, voilà pourquoi il avait pu la conserver jusqu’à ce jour.
Par la suite, Chu He avait songé à se refabriquer des flèches, mais il ne pouvait plus supporter la douleur de s’extraire des os, alors il ne l’avait jamais fait. Plus tard, Zhou Hui avait appris la provenance des flèches, alors il avait chassé plusieurs démons de haut niveau dans la Mer de Sang afin de gagner ses faveurs. Il en avait extrait onze os pour lui en faire cadeau comme gage d’amour.
Techniquement, leur relation à l’époque n’en était pas encore au stade où on pouvait employer le mot ‘gage d’amour’ pouvait être employé. Le mot ‘présent’ était plus approprié.
Chu He avait donc utilisé ces onze os de démon pour raffiner des flèches. Bien qu’elles n’étaient pas aussi solides que sa flèche en os de phénix et qu’elles n’avaient pas le pouvoir de purifier et d’apaiser les âmes, il les avait toujours employées de préférence jusqu’à aujourd’hui.
En y songeant à présent, c’était à partir du moment où il avait utilisé des os de démon comme arme qu’il avait déjà commencé à s’éloigner des enseignements de la Loi du Ciel. Mais alors à l’époque, pourquoi avait-il accepté ce cadeau de la part de Zhou Hui ?
Était-ce parce que cet homme qui lui tendait à deux mains les os en chancelant avait l’air vraiment misérable ? Ou bien était-ce parce que la tête qu’il faisait comme s’il offrait un immense trésor était bien trop ridicule ?
Chu He relâcha son souffle. Il planta la longue flèche dans le sol et se releva.
— À cet instant, un tintement résonna doucement à l’extérieur du couloir.
Chu He resta stupéfait un moment, puis une autre cloche tinta comme le murmure de l’eau, le son rebondissant dans l’air.
C’était un son très agréable, comme un carillon à vent qu’on entendait alors qu’on était allongé dans l’herbe, avec les oiseaux volant sous le soleil, le cœur rempli de bonheur et de détente. Il voulut se retourner pour regarder, mais tout son corps se sentait si détendu jusqu’aux os qu’il ne put s’empêcher de se mettre à genoux.
Ce fut alors que le soleil disparut, des nuages sombres s’amoncelèrent, les éclairs strièrent le ciel et une pluie battante tomba. Le tintement évoqua cette fois l’image de trombes d’eau glaciales et de vents violents qui emportaient tout. Chu He tenta de se redresser en dépit de la douleur, mais les pressions successives le contraignirent à se rabaisser. Il avait l’impression d’être le dernier être vivant au monde, fouetté indéfiniment par les pluies torrentielles et aspergé de sang sur tout son corps.
Chu He haleta en comprenant soudain ce qui se passait — une illusion !
L’Illusion des Cloches Dorées !
Il saisit la flèche en os de phénix qu’il venait de retirer du corps de Wan Tiansi. Serrant les dents, il se l’enfonça dans la paume. Dès que la chair fut transpercée, la douleur sévère lui permit de reprendre ses esprits. L’illusion se retira couche après couche comme la marée basse et la vue de l’étage démoli des soins intensifs fut restaurée. Chu He se tourna soudain et vit quatre silhouettes vêtues de gris qui se tenaient derrière lui !
Il les avait déjà vus avec le Seigneur Démon, alors il put les reconnaître sans même voir leur visage. Il sut également comment Shenwan Tiansi avait pu se faire transformer complètement en marionnette — Il s’agissait des quatre démons aînés, chacun ayant le grade légendaire de roi Ashura. Les cloches dorées qu’ils tenaient avaient le pouvoir de créer une illusion démoniaque dans laquelle même les dieux et les Bouddhas se perdaient au son des cloches !
Quand Shenwan Tiansi les avait rencontrés, il y avait dû y avoir une bataille sanglante où il avait épuisé ses forces et s’était fait capturer. Il n’avait même pas eu le temps d’appeler des renforts. S’il ne venait pas de se faire transpercer par l’os de phénix, il aurait fini ses jours comme marionnette ou bien serait mort quand son esprit se serait brisé. Comparé à ça, c’était une bien meilleure fin que de rester piégé dans une illusion jusqu’à la fin de ses jours et que Zhou Hui n’aurait pas d’autre choix que de le faire interner dans un hôpital psychiatrique.
Chu He se mit soudain en colère et recula brusquement. Cependant, les autres furent plus rapides. Les quatre personnes lancèrent en même temps dans les airs les lourdes cloches dorées qui étaient aussi grosses que des lanternes. Les cloches tintèrent avant de se transformer en immense filet qui le recouvrit !
« Vous —
– Veuillez nous suivre gentiment, votre Majesté Roi de Clarté Phénix, fit le chef des démons d’une voix grave. Nous allons vous ramener aux Enfers. C’est uniquement dans ce but que nous sommes intervenus dans les affaires du monde humain. »
Chu He tomba soudain par terre, déséquilibré, et le filet doré se referma totalement sur lui avant de devenir invisible et d’enserrer son corps. L’homme en gris savait également qu’il avait déjà combattu Shenwan Tiansi, ce qui l’avait pratiquement vidé de ses forces, alors il ne craignait rien. Deux des démons s’approchèrent pour le saisir par les poignets.
« Sa Majesté le Seigneur Démon vous attend dans la Mer de Sang… »
Chu He les attrapa pour les repousser un par un. Il se redressa avec du mal et recula brusquement, en faisant d’un ton sévère :
« Si Fan Luo veut me voir, il n’a qu’à venir lui-même ! Pour qui vous vous prenez, minables ?! »
En parlant, il tendit la main dans le vide. Sa lance qui était par terre au milieu des débris plus loin vola aussitôt vers lui. Il la rattrapa et balaya aussitôt les deux hommes en gris d’un revers de sa lance !
Quelqu’un du niveau de roi Ashura était extrêmement puissant dans les Quatre Dao du Mal et en plus, il y en avait quatre. Ils n’avaient sans doute encore jamais été traités de ‘minables’. Les deux démons repoussés ne tombèrent pas et revinrent aussitôt vers lui en faisant d’un air sombre :
« Votre Altesse, le Seigneur Démon vous veut vivant mais il n’a pas précisé dans quel état — Quand vous aviez encore votre véritable corps, vous étiez effectivement digne d’inspirer la terreur. Mais pouvez-vous vous permettre de jouer encore les durs maintenant ? »
Chu He avait les oreilles qui saignaient, alors il n’entendit pas clairement ce que l’autre lui dit. Ce fut alors que l’homme vêtu de gris tendit la main et la serra en plein air —
Suivant son mouvement, le filet doré qui entourait le corps de Chu He se resserra soudain !
Il poussa un cri qu’il ne put même pas entendre. La douleur était si intense qu’elle pouvait rendre fou. En un instant, il raffermit sa prise sur sa lance et attaqua avec violemment, l’enfonçant dans le démon en gris le plus proche. Il l’entailla de l’épaule à l’avant-bras d’un seul coup !
— Le tintement de la cloche résonna profondément dans son corps et la conscience de Chu He devint subitement floue dans la brume de sang qui explosa par la suite.
Il sembla passer subitement du monde réel à une illusion. Devant lui ne se trouvait plus l’hôpital en sale état, ni les Ashuras vêtus de gris qui s’étaient violemment jetés sur lui.
Il ne sentait même plus la moindre douleur. Le sang qui avait jailli quand la lance avait entaillé son adversaire était devenu comme de l’encre rouge sur une toile : il disparut par morceau, dévoilant une faible lumière qui éclairait des montagnes.
— Je suis mort ?
Chu He se tenait dans un espace découvert. Il leva la tête et contempla le vaste ciel où un vent lointain soufflait.
« Votre Majesté Roi de Clarté, fit une voix circonspecte dans son dos. Qu’est-ce que vous faites ici ? »
Chu He tourna la tête, ses yeux vacillants, puis il se reconcentra au bout d’un moment. Il reconnut derrière lui le splendide temple bouddhiste du Trente-troisième Ciel qui s’élevait vers les nuages. Sur les marches du temple se trouvait un jeune moine aux traits clairs qui le regardait avec respect.
Il demanda sans même réfléchir :
« Où est Zhou Hui ?
– Qui est Zhou Hui ? »
Le petit moine le fixa d’un air étrange, puis demanda :
« Votre Majesté, vous venez à peine de sortir du temple et vous vous êtes subitement arrêté. Vous avez eu une illumination ?
– … Non… pas du tout, répondit Chu He en secouant la tête d’un air vague. Pas du tout. »
Il tourna la tête de nouveau et leva la main pour l’examiner. Il eut vaguement l’impression d’avoir affaire à une situation très urgente, mais sa tête se mettait à tourner dès qu’il essayait d’y penser.
À cet instant, un rugissement bestial résonna brusquement à l’arrière du temple. C’était difficile d’entendre clairement à cause de la distance, mais le cri semblait vaguement triste et aigu, ainsi qu’acharné. Après avoir hurlé pendant une dizaine de secondes, on entendit ensuite un choc contre du métal. Le sol sous les pieds de Chu He trembla un peu avant de se calmer.
« … Quel est ce bruit ? » s’enquit-il.
Le petit moine prit un air encore plus étrange.
« Vous ne vous en souvenez pas, votre Majesté ? Bouddha s’est rendu dans la Mer de Sang et a prêché la parole divine afin de sauver tous les êtres vivants. Tous les démons se sont inclinés devant le trône de lotus, à l’exception d’un démon de bas niveau qui a refusé de se prosterner. Comme il a manqué de respect au Bouddha, il s’est fait capturer et emmener au Trente-troisième Ciel. Il va se faire arracher le cœur et raffiner les os afin de servir d’exemple à tous les démons. »
Le jeune moine sourit de nouveau et ajouta :
« Ce fauve est vraiment sauvage. Il s’est fait torturer de toutes sortes de manières, mais il refuse de se convertir. Ça fait deux jours qu’il se débat dans les affres de la mort. Bouddha l’a scellé dans la Cloche de Diamant, alors ce que vous venez d’entendre, c’est sûrement le démon qui essaie désespérément de s’échapper en se jetant contre la paroi. »
Un autre bruit de collision se fit entendre. Tout le temple se mit à vibrer et à trembler.
Le Phénix plissa le front et demanda :
« Quel genre de démon c’est ? »
Le petit moine baissa la tête, semblant un peu intimidé.
« Je… Je n’en sais rien. »
L’instant d’après, il sentit ses manches agitées par un courant d’air et quand il leva les yeux, il vit le Phénix passer à côté de lui pour se diriger vers l’arrière du temple.
Ses longs cheveux étaient retenus en une queue de cheval haute, retombant sur sa tunique d’un blanc immaculé. Tandis qu’il marchait, ses manches semblaient dégager un subtil parfum de lotus. Sa silhouette était fine et élancée. Son ombre se reflétait sur les pavés dorés du temple alors qu’il marchait. Rien qu’en la voyant, les gens pouvaient s’éprendre de lui.
Le petit moine ne put s’empêcher de retenir son souffle.
La salle arrière du temple était remplie de la fumée d’encens et l’immense Cloche de Diamant se tenait en son centre, avec des vibrations et des rugissements provenant de l’intérieur.
Cette cloche sonnait quatre-vingt-dix-neuf fois tous les quatre shichen et à chaque fois, elle apportait la colère des dieux du Neuvième Ciel à la Dixième Terre. Les vibrations sans fin réduisaient en poussière tout ce qui se trouvait sous la cloche. Depuis les temps immémoriaux, les moines qui avaient commis des crimes très graves étaient enfermés dans la Cloche de Diamant. Quand la cloche sonnait, même si le moine possédait un corps immortel, il restait enfermé à l’intérieur et ses os se brisaient, jusqu’à ce qu’il périsse à cause des vibrations.
Le Phénix ouvrit le couvercle.
Il y avait des barreaux à l’intérieur de la Cloche de Diamant, formant une immense cage. Et à l’intérieur de cette cage se trouvait une bête démoniaque d’environ neuf pieds Un peu plus de 3 m. (1) de haut, couchée sur le ventre.
Elle ressemblait à un mélange de lion et de tigre. Son corps était recouvert de plaies ulcérées, les griffes de ses quatre pattes étaient sorties à cause de sa lutte et sa crinière était couverte de chair pourrie. Sûrement parce qu’elle s’était mordue pour endurer la douleur, ses crocs étaient couverts de chair noircie et rigide, ce qui lui donnait un air à la fois féroce et misérable. Seuls ses yeux verts de fauve luisaient d’une lueur très sinistre, fixant le Phénix. La bête gronda de manière menaçante.
Le Phénix le contempla et demanda :
« Pourquoi tu ne t’es pas prosterné ? »
Le monstre rugit furieusement. Il bondit et heurta les barreaux en acier de la cage !
À cet instant, ses crocs n’étaient qu’à quelques pouces des longs cils du Phénix, mais ce dernier ne recula pas d’un pas et insista :
« Pourquoi tu ne t’es pas prosterné ? »
Le démon le fixa intensément, puis poussa une longue expiration. Il finit par répondre d’une voix rauque et éraillée :
« … Pourquoi je devrais me prosterner devant toi ?
– Je ne parle pas de moi, rectifia-t’il. Pourquoi tu ne t’es pas prosterné quand tu t’es retrouvé face à Bouddha dans la Mer de Sang ? »
L’homme et le fauve se regardèrent à travers les barreaux en acier. Au bout d’un long moment, le fauve recula lentement, se mettant assis sur ses pattes arrière sanglantes. Il déclara d’un ton fier :
« Je ne crois pas au Dao du Ciel, alors pourquoi je devrais me prosterner ?!
– Si tu n’y crois pas, quand tu mourras, ton âme se dispersera et tu ne pourras jamais te réincarner. Tu ne veux toujours pas y croire ?
– Je n’y crois pas, » persista le fauve.
Le Phénix le contempla sans rien dire. Puis tout à coup, il tendit la main et la cage immense s’effondra.
Le monstre se redressa soudain sur ses quatre pattes et avança de deux pas, incrédule. Mais il s’arrêta soudain au bord de la cage, se demandant si ce n’était pas un piège. Face à ses yeux remplis de doute et de méfiance, le Phénix ne s’expliqua pas. Il tourna les talons et se dirigea vers la sortie, disant simplement :
« Tu peux y aller.
– … Pourquoi ? ne put s’empêcher de rugir le fauve. Pourquoi tu me laisses partir ? »
Sans un regard en arrière, le Phénix sortit de la salle interne, sa tunique de neige voletant autour de lui. C’était comme un lotus qui fleurissait au moindre de ses pas.
L’escalier de jade devant lui descendait aussi loin que le regard pouvait porter. Au loin, les pagodes du temple étaient splendides et élevées, atteignant le ciel pour disparaître au milieu des nuages.
« Pas de raison particulière, fit-il, sa voix flottant dans le vent. Pars, c’est tout. »
Le fauve contempla son dos d’un air choqué. Ce ne fut que lorsque le Phénix fut assez loin qu’il bondit soudain hors de la cage et se rua pour descendre les marches. Alors qu’il courait follement, beaucoup de chair et de sang se détachèrent de son corps sous l’effet du mouvement, éclaboussant les marches en jade, mais il ne parut pas s’en rendre compte.
Il bondit tel un météore noir. Le Phénix se tourna et tendit la main pour le bloquer, mais le fauve brisa la barrière invisible à la vitesse de l’éclair et bondit devant le Phénix.
« Attends — »
Dans l’hôpital, les quatre cloches dorées tintaient en même temps. Chu He se boucha les oreilles de douleur, mais c’était complètement inutile. En transe, le monde sous ses yeux était resté telle que la dernière scène de l’illusion : le monstre qui tombait du ciel, ses crocs brillant d’une lueur glaciale, prêts à s’enfoncer dans sa gorge comme une flèche —
Les pupilles de Chu He se contractèrent et il saisit frénétiquement sa flèche d’os. Il l’enfonça en avant de toutes ses forces !
— Splash !
Le sang jaillit devant lui. Zhou Hui grinça des dents et saisit la flèche cyan. Il fit de son mieux pour éviter que son flanc droit se fasse totalement embrocher.
Il attrapa le poignet de Chu He et utilisa très peu de force afin d’éviter de lui casser l’articulation, mais assez de force pour que l’autre ne puisse pas résister. Il retira lentement la longue flèche de son flanc. Chu He n’avait pas l’esprit clair et il tituba en avant. Zhou Hui l’assomma du tranchant de la main sur la nuque, puis le tint dans ses bras.
« … Ça fait des années que tu ne t’étais pas jeté dans mes bras comme ça. »
Zhou Hui siffla en passant une main sur sa côte. Il se tourna pour foudroyer du regard les quatre Ashuras en gris. Il fit d’un ton sinistre :
« Pour cette raison, je vais vous éliminer rapidement aujourd’hui. »
Les quatre démons échangèrent des regards de sous leur capuche. Il était clair qu’ils n’étaient pas chauds à l’idée d’affronter Zhou Hui en face à face. Ils battirent en retraite rapidement et en même temps. Cependant au moment moment, Zhou Hui disparut de là où il se trouvait pour réapparaître une seconde après derrière l’Ashura qui avait été le plus rapide à s’enfuir.
Arborant un air indifférent, comme si le dieu de la mort était venu en ce monde, il tenait Chu He d’une main et fendit l’air de son sabre avec l’autre main.
— Dans la lueur blanche qui trancha l’air, l’Ashura fut coupé en deux par la lame !
La moitié supérieure de son corps s’envola dans les airs, répandant de l’eau noire avant de retomber par terre avec un plop. D’innombrables serpents aussi larges que des tasses déferlèrent de sa cavité abdominale telle la marée. Mais dès qu’ils entrèrent en contact avec l’air, ils s’enflammèrent en émettant des sifflements stridents !
« — Grand chef Zhou ! »
Les trois autres démons pâlirent. L’un d’eux brandit sa cloche dorée et hurla :
« Nous étions juste venus inviter le Roi de Clarté Phénix à nous suivre. Vous désirez vraiment déclencher une guerre avec les Enfers ?! »
Avant même d’avoir fini de parler, ce démon sentit un grand froid sur sa nuque.
Il eut soudain l’impression de voler, mais il aperçut alors son corps toujours au sol du coin de l’œil. L’instant d’après, sa tête heurta un mur avec un bruit sec, puis roula par terre. Une fois arrêtée, sa bouche s’ouvrit et se referma deux fois, mais aucun son n’en sortit.
Les deux démons restants ne se seraient jamais attendus à ce que Zhou Hui se montre aussi cruel et sans pitié. Ils en restèrent stupéfaits. Dès qu’ils se ressaisirent, ils agitèrent aussitôt les cloches frénétiquement. Les lourdes cloches en or démoniaques émirent une série de tintements très forts. La vague sonique invisible et mortelle bloqua chaque recoin de l’espace dans la salle. N’importe qui d’autre se serait aussitôt effondré, mais Zhou Hui ne sourcilla même pas.
« Vous voulez utiliser la magie démoniaque contre moi ? fit-il calmement. Vous avez choisi la mauvaise personne. »
Il fit un pas en avant et dès que son pied toucha terre, tout son corps s’élargit et se déforma. Il se transforma en silence en une gigantesque bête qui ressemblait à un lion ou un tigre, avec de la fourrure noire et luisante couvrant tout son corps. Son dos touchait presque le plafond et ses yeux émirent une sorte de lueur verte toxique, un peu comme un serpent.
« Quand je courtisais encore le Phénix, je m’échinais à le complimenter tous les jours tout en lui demandant de m’aimer. Même la nuit, je restais à la périphérie du Trente-troisième Ciel car je ne supportais pas d’être éloigné de lui pendant même un moment… Mais maintenant, vous et votre Seigneur Démon, vous vous permettez de le convoquer ou de le faire venir à votre guise. Vous rêvez vraiment si vous pensez pouvoir rendre ce grand-père cocu comme ça ! »
Le fauve toisa du regard les deux Ashuras en gris restants. Il dévoila ses crocs terrifiants et luisant d’une lueur glaciale.
« Quel imbécile, j’ai vraiment été trop bête de l’avoir considéré comme mon rival en amour. »
Les deux Ashuras tournèrent les talons pour déguerpir mais avant d’avoir pu faire au moins deux pas, la gigantesque bête noire bondit du ciel et d’un coup de patte, elle arracha la tête, la peau et le crâne du fuyard le plus lent !
Le corps s’affaissa et tomba dans un éclaboussement d’eau noire. Le cerveau fut expulsé par les sept orifices. Le dernier Ashura savait qu’il n’avait aucun espoir de survivre, alors il se précipita en avant avec un hurlement, tentant une attaque désespérée. Il se retrouva pressé sous la patte du fauve immense qui rugit tel le tonnerre !
Les griffes immenses et lourdes s’enfoncèrent fermement dans le béton, causant des craquelures de plus de dix mètres de long. Le démon hurla et se débattit, mais il ne put se libérer de la puissante bête démoniaque. Un de ses bras avait déjà été tranché par Chu He avant et du sang noir en jaillit de nouveau, éclaboussant les murs et le sol avec d’horribles flaques.
Zhou Hui rétrécit les yeux, cette expression semblant très féroce sur sa gueule de fauve.
« Retourne donc dire à ton Seigneur Démon… siffla-t’il d’un ton glacial entre ses crocs. Dis-lui que si je l’ai attaqué autrefois, c’était simplement pour justifier mon salaire auprès du Dao du Ciel. Mais s’il ne veut pas mourir, qu’il reste loin du Phénix. File, va lui rapporter exactement mes paroles. »
Zhou Hui souleva sa patte et l’Ashura en gris se releva en titubant. Il n’osa même pas regarder derrière lui et courut jusqu’au bout du couloir où il sauta par une fenêtre en brisant la vitre.
Une immense porte des enfers apparut dans les airs et elle s’entrouvrit légèrement avec le hurlements des fantômes. D’innombrables mains de squelette apparurent par cette ouverture pour tenter d’en sortir. Mais alors que l’Ashura en gris se glissait sans hésitation dans la fente, la porte se referma avec un bruit sourd et disparut dans le néant, accompagné d’un son de cor triste et strident.
Le fauve géant le fixa jusqu’à ce qu’il disparaisse totalement, puis il fit gentiment rouler Chu He sur le côté par terre, reniflant sa nuque avec son museau.
Chu He était inconscient, les yeux fermés. Il semblait souffrir même dans son évanouissement car son front était un peu plissé. Son souffle était léger et froid, et son corps semblait particulièrement doux dans la pénombre.
Le démon releva sa patte et le secoua très légèrement, sans obtenir de réaction.
Il se rappela brusquement de la première fois où il avait vu le Phénix. À l’époque, le statut de l’autre était si élevé, comme une fleur noble et splendide qui fleurissait dans les nuages, tandis que lui-même était misérable, dans la fange et que sa nature bestiale n’avait pas disparu. Malgré sa réticence, il ne pouvait que gésir dans la poussière et accepter la pitié et la charité de l’autre.
Mais à présent, la situation avait été complètement inversée.
Les dizaines de milliers d’années depuis lui avaient permis de transcender les limites des dieux et des démons. Il était devenu un être extrêmement puissant et terrifiant dans tous les six Royaumes, faisant trembler n’importe qui entre le Neuvième Ciel et la Dixième Terre à la simple mention de son nom. Il avait même obligé le Royaume du Ciel à céder plus d’une fois devant lui.
Il avait enfin pu atteindre facilement ce lotus autrefois inaccessible dans les nuages, le dévorer, le tourmenter, le cueillir et le ravager jusqu’à sa destruction, et personne ne pouvait rien faire pour l’en empêcher. Il avait gagné le pouvoir de faire tout ce qu’il voulait.
C’était certainement plus difficile de se contrôler sous sa forme de bête démoniaque. Zhou Hui sentit le sang se réchauffer dans son corps pour la première fois depuis longtemps. Le flux rapide se heurta contre les vaisseaux sanguins, ce qui fit que tous les muscles de son corps se raidirent involontairement. Son souffle se fit plus rapide et il oublia même à quel point la situation et le moment étaient mal choisis. Il baissa simplement la tête et renifla la nuque, les épaules et le torse de Chu He avec son museau brûlant. L’odeur du sang l’irrita grandement, mais il fut aussitôt envahi par un désir instinctif et une excitation difficiles à réprimer.
Note de Karura : Le prochain est aussi verrouillé sur le site de l’éditeur et cette fois, je comprends pourquoi ! 😜
Notes du chapitre :
(1) Un peu plus de 3 m.
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