Alternative 4.2 partie 6
Kurojū, cinquième mois de l’an 2445
Trois jours plus tard, Kikuchi réussit enfin à effectuer la botte secrète : le sabre de Yama tomba à terre dans un cliquètement. Le Vite se figea un moment, surpris, avant d'arborer un sourire de fierté.
« Bravo, tu as compris ! » le félicita-t'il.
Kikuchi l'entendit à peine. Le souffle court à cause de l'effort intense, il avait du mal à réaliser ce qui venait de se passer. Quand il comprit, il poussa un cri de joie et se jeta dans les bras de Yama en ne pensant qu'à une seule chose : sa récompense. Il attira le visage de l'homme vers lui et l'embrassa sans la moindre hésitation. Ce n'était que son second baiser et le premier avait été un peu confus, alors il se montra un peu maladroit mais très enthousiaste ! Sa langue se précipita à la rencontre de Yama, puis ne sut trop que faire après. Yama se remit de sa surprise et reprit le contrôle de leur baiser, ce que le Firal lui accorda volontiers. Les mains du Vite se posèrent sur ses hanches et le jeune homme fut envahi par le désir.
Quand il sentit Kikuchi trembler, Yama crut qu'il voulait cesser le baiser, alors il fit mine de reculer. Cependant, Kikuchi se pressa davantage contre lui, refusant la moindre séparation. Seul le manque d'air le força à mettre fin à ce second baiser qui n'avait rien de romantique ou de chaste. Les joues rouges, Kikuchi rouvrit les yeux et croisa le regard un peu étonné de son bien-aimé. En ce moment, le jeune homme était prêt à tout accepter de lui… et il désirait vraiment que Yama poursuive leur étreinte. Il se moquait bien d'être encore mineur, il connaissait son cœur et il savait ce qu'il voulait, et avec qui. Il prit délicatement la main de Yama pour la poser sur sa joue, rougissant davantage à ce contact intime.
« Yama, si tu veux, tu… tu… tu peux… »
Kikuchi se retrouva à balbutier, ce qui l'irrita au plus haut point. Il devait se montrer sûr de lui s'il voulait convaincre Yama qu'il n'était plus un enfant, bon sang !
« Je pense que cela suffit pour aujourd'hui, fit Yama en parlant de l'entraînement. Oh, à partir de demain, Chiharu se joindra à nous. »
Kaname avait finalement obtenu gain de cause. Tegami avait consenti à ce que son fils suive l'entraînement du Vite, mais uniquement à condition que Kikuchi soit également présent.
« Chiharu ? » fit le jeune homme d'un ton franchement déçu.
Leurs entraînements matinaux étaient l'un des rares moments où il pouvait avoir Yama pour lui tout seul. Il n'avait pas besoin d'une autre personne !
« Oui, tu lui enseigneras cet enchaînement. Comme ça, je verrai si tu l'as bien compris. »
Kikuchi fit la moue, mais n'osa pas manifester son mécontentement. Il pourrait encore être seul avec Yama lors des promenades à cheval de l'après-midi.
Yama partit. Kikuchi rangea son sabre et se passa une serviette sur le visage. Il entendit soudain des bruits de pas derrière lui et se retourna. C'était Kenshirō qui arborait un air furieux.
« C'était donc vrai, fit-il entre ses dents. Toi et Yama…
– Kenshirō, tu nous espionnais ? » s'indigna Kikuchi.
Cela faisait plus de quinze ans qu'ils étaient amis. Kikuchi se serait attendu à mieux de sa part.
« Vous êtes en cour, reprit Kenshirō sans répondre à l'accusation. Tu imagines comment réagirait ton père s'il le savait ?
– Mon père est au courant, répliqua Kikuchi avec un petit sourire en coin. Le seigneur Mitsuhide aussi.
– Vraiment ? Alors pourquoi vous vous cachez tous les deux ?
– On ne se cache pas, on est simplement discret ! C'est une qualité que tu ferais bien d'apprendre, Kenshirō ! »
Le jeune homme n'en crut pas ses oreilles. Jamais Kikuchi ne lui avait parlé sur un ton aussi agressif. Il ne put que déplorer l'influence néfaste de ce Yama, la seule explication selon lui.
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« Kikuchi, tu n'es plus toi-même depuis que tu as rencontré ce Vite…
– Au contraire, le coupa-t'il, je me connais mieux et je sais quel est mon but dans la vie ! »
Kenshirō écarquilla ses yeux violets.
« Tu te connais mieux ? Arrête, tu étais à deux doigts de te jeter sur lui à l'instant !
– C'est vrai, et alors ? » répliqua Kikuchi en redressant le menton avec défiance.
L'autre jeune homme n'en revint pas.
« Tu es encore mineur !
– Beaucoup de choses sont autorisées. »
C'était exact mais pour autant, cela ne se produisait pas pendant la première cour. Kenshirō secoua la tête, une douleur immense lui enserrant la poitrine.
« Tu es prêt à aller jusque là pour lui ?
– Je l'aime, » répondit simplement Kikuchi.
Quand il vit son ami arborer un air désemparé et impuissant, il se radoucit un peu.
« Kenshirō, je sais bien que personne ne peut me comprendre, mais c'est comme ça.
– Et le seigneur Mitsuhide dans tout ça ? argua Kenshirō en reprenant son air féroce. Vous comptez vous partager Yama ou bien tu penses l'emporter contre lui ? »
Kikuchi se rembrunit.
« Je… je ne sais pas encore. Dans tous les cas, je n'ai pas l'intention de renoncer à Yama, alors j'aviserai le moment venu. »
Kenshirō plissa les yeux : il savait que son ami avait très certainement un plan en tête, lui qui se passionnait de stratégie. C'était juste que Kikuchi ne voulait pas lui en parler, ce qui le blessa énormément.
« Kikuchi, tu ne seras jamais heureux avec ce Vite ! cracha-t'il.
– Qu'est-ce que cela peut te faire ? » répliqua le Firal en fronçant les sourcils.
Kenshirō partit d'un rire rempli d'auto-dérision.
« Bah, tu as raison. Cela ne me concerne plus en rien ! Débrouille-toi et ne viens pas pleurer chez moi ensuite ! »
Furieux, le jeune homme quitta les lieux. Kikuchi le regarda partir avec tristesse. Il savait que Kenshirō n'irait pas raconter ce qu'il avait vu en souvenir de leur amitié, mais cela le désolait de voir qu'un de ses amis proches ne le soutenait pas.
« Yama, se dit-il, il ne se rend pas compte à quel point tu es exceptionnel. »
Tegami était face à un dilemme. Kenryū n'avait pas cessé de le harceler depuis qu'ils avaient pris le thé avec ce Vite. Le général était persuadé que Yama leur cachait des informations importantes, alors il voulait que Tegami interroge les Dieux à ce sujet.
« Mes ancêtres n'ont que faire d'un simple Vite, avait dédaigneusement rétorqué l'Empereur.
– Ce n'est pas un simple Vite ! Il sait parler notre langue, contrer la magie des Hikari, il a le même style de sabre que ton grand frère… Sans parler du fait qu'il a sauvé Kaname et Chiharu durant l'Invasion, puis nous a délivrés des Hikari. Ce Vite est tout sauf simple ! »
Il y avait aussi la forte ressemblance physique avec l'ancien empereur mais cela, Kenryū avait sagement préféré ne pas en reparler, vu la réaction de Tegami la dernière fois.
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« Que crois-tu ? avait directement demandé l'Empereur en fronçant les sourcils.
– Je n'en sais rien, mais je suis sûr que les Dieux savent quelque chose sur lui. Après tout, l'Armée Divine était sous ses ordres ! Je t'en prie, Tegami, j'ai le pressentiment que c'est très important ! »
Kenryū lui demandait rarement une faveur, sauf que celle-ci concernait les Dieux ! Toutefois, les liens entre les clans Kakurō et Inugami étaient profonds et solides. Kenryū avait toujours été là pour Tegami, même quand ce dernier l'avait ignoré et humilié sous l'influence des Hikari. Il avait aussi mis son propre fils en danger pour veiller sur Chiharu. Du coup, Tegami avait été contraint d'accepter, ce qui le mettait à présent dans l'embarras.
Seul dans son bureau, l'Empereur se mordit les lèvres. Personne ne le savait, mais il n'avait plus pratiqué le Rituel d'Invocation depuis des décennies. Même après la défaite des Hikari, il n'avait pas osé par peur de la réaction de ses ancêtres. Il ressentait également de la colère à leur encontre : il avait perdu son frère et ensuite son fils cadet. Pourquoi les Dieux ne les avaient-Ils pas protégés ? Cela voulait dire qu'Ils n'étaient pas si puissants que ça ! Tels avaient été les propos de Shumē pendant des années et ils avaient fini par envahir l'esprit de l'Empereur comme un poison incurable. Encore maintenant, alors que le clan Hikari avait été dissous, Tegami restait un peu sous leur influence. C'était également pour cette raison qu'il avait refusé le retour des prêtres au palais, de crainte qu'ils ne puissent percer ses mensonges.
Du coup, Tegami avait le choix entre mentir à Kenryū, un homme qui s'était toujours montré fidèle et dévoué, ou bien contacter ses ancêtres et subir Leurs réprimandes. Aucun des deux choix ne lui plaisait. Il avait bien conscience qu'il ne pourrait éviter les Dieux éternellement puisqu'il lui faudrait bien apprendre le rituel à Chiharu plus tard. Mais il comptait sur le fait que d'ici là, Leur fureur se serait sans doute calmée.
« Je n'ai qu'à dire à Kenryū qu'Ils n'ont pas répondu, se dit-il. Après tout, ce n'est qu'un Vite ! Kenryū se trompe à son sujet, il n'a rien du tout de spécial ! »
Ayant fait son choix, Tegami se releva et quitta la pièce sans remarquer les ombres qui s'agitaient faiblement dans les coins.
Profitant d'une promenade à cheval, Kikuchi aborda un sujet très personnel :
« Yama, ça fait quoi de coucher avec quelqu'un ? »
L'interloqua toussota, surpris par cette question.
« Pourquoi tu me demandes ça ?
– Parce qu'à ma majorité, j'aurais le droit de prendre un amant. Ça m'intrigue. »
La curiosité de Kikuchi était tout à fait naturelle, sauf qu'il s'adressait à la mauvaise personne.
« Tu ferais mieux de demander à ton père, tenta d'éluder Yama.
– C'est déjà fait, mais je préfère avoir plusieurs avis, contra le jeune homme.
– Je ne peux pas t'aider pour ça car j'ai fait vœu de chasteté. »
Cette fois, ce fut Kikuchi qui manqua de s'étrangler. Les yeux émeraude se posèrent sur le Vite, incrédules.
« Tu ne l'as donc jamais fait ?
– Jamais.
– Même pas avec le seigneur Mitsuhide ?
– Non ! s'écria spontanément Yama. Quelle idée ! »
Kikuchi ne doutait pas un seul instant que Yama lui disait la vérité, mais cela le surprenait énormément.
« Vous êtes donc amants du jour ?
– Qu'est-ce que c'est encore ? soupira Yama.
– Mmm… C'est quand on s'aime mais que ce n'est pas une relation physique. »
Yama se dit alors, pas pour la première fois, que les Autres se compliquaient beaucoup l'existence avec toutes ces notions inutiles. À quoi bon vivre si longtemps si on se gâchait la vie pour des sentiments ?
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« Ah, ce sont des amis, alors.
– Non, c'est un lien plus fort que l'amitié.
– Des meilleurs amis ? »
Kikuchi se retrouva un peu démuni face à l'esprit pragmatique du Vite. Il persista néanmoins :
« Ce n'est pas de l'amitié, c'est de l'amour.
– Cela revient au même s'ils ne couchent pas ensemble ! »
Kikuchi retint un rire. Il avait l'impression de discuter avec un enfant inexpérimenté. Cela dit, c'était agréable de réaliser qu'il y avait un domaine dans lequel il s'y connaissait plus que Yama.
« Si tu as déjà embrassé Mitsuhide, cela veut dire que vous êtes amants du jour, expliqua-t'il.
– Nous sommes amis, c'est tout, » répliqua Yama.
Le Firal fut de nouveau surpris : cela voulait dire que Mitsuhide et Yama ne s'étaient jamais embrassés ? Alors du coup…
« Cela veut dire que j'ai été plus intime que Yama ne l'a jamais été avec Mitsuhide ? »
Il en rougit de bonheur. Chaque jour, son rêve semblait pouvoir se réaliser un peu plus. Rapprochant davantage sa monture, il passa les bras autour du cou de son prétendant pour l'embrasser. Jamais il ne se lasserait de cette sensation.
« Mais alors, reprit-il ensuite, qui as-tu déjà embrassé ?
– Tu croyais que c'était Mitsuhide ? comprit Yama.
– Euh… ben oui.
– C'est ridicule ! Comment tu as pu t'imaginer ça ?! »
Kikuchi le fixa d'un air interloqué, songeant que tout l'Empire de l'Aube les croyait amants. Laissant ça de côté, Yama répondit à sa première question :
« Je n'ai embrassé qu'une personne et c'était bien avant que je n'arrive dans l'Empire de l'Aube.
– Un autre Vite ? s'étonna Kikuchi. Je croyais pourtant que là-bas, les relations entre hommes étaient interdites. »
Yama se retint de soupirer : Kikuchi présumait automatiquement qu'il s'agissait d'un homme, comme les sœurs de Mitsuhide autrefois.
« C'est vrai, confirma-t'il.
– Mais comment ? Pourquoi tu… ? »
Yama prit un air embarrassé, une expression que Kikuchi ne lui avait encore jamais vue et qu'il trouva aussitôt charmante.
« Je n'aime pas raconter cette histoire. Les gens ont tendance à en rire.
– Je ne rirai pas ! assura immédiatement Kikuchi.
– … Soit. Lucius, c'est son nom, m'avait fait croire que c'était normal de s'embrasser entre bons amis. »
Kikuchi en resta bouchée bée… avant de plaquer aussitôt une main sur sa bouche.
« Tu viens de rire ? lui lança Yama d'un ton chagriné.
– Non… non… je ne ris pas du tout, » parvint à dire le jeune homme.
Une telle naïveté, c'était vraiment trop adorable ! Pas étonnant que ce Lucius en avait profité.
« Ça a duré longtemps ? demanda-t'il après s'être calmé.
– Oui, répondit Yama avec un regard vexé.
– Et ton ami n'a jamais tenté plus qu'un baiser ?
– Avec le recul, je me rends compte que si. Il n'a pas trop insisté cependant. »
Kikuchi nota la teinte mélancolique de sa voix et il pressa la main de l'autre homme.
« Il comptait beaucoup pour toi, non ?
– Oui, je lui dois énormément. Par contre, je ne le comprends pas, même encore aujourd'hui.
– Il n'a t'a jamais avoué ses sentiments ? »
Yama secoua la tête. Kikuchi se félicita alors d'avoir eu le courage de se déclarer. Les Vites étaient décidément bien compliqués en matière de sentiments.
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Le Conseil Restreint se réunit pour faire le point sur l'attaque contre Mitsuhide et Yama. Ces deux derniers étaient évidemment conviés. Yama préféra nettement le petit nombre par rapport à l'autre réunion du Conseil. Cela permettait de mieux se concentrer sur le sujet et de perdre moins de temps en débats stériles.
« Malgré des recherches intensives, nous n'avons trouvé aucune trace de ces hommes. Qui plus est, ils n'ont plus rien tenté depuis deux semaines, fit Kenryū.
– Nous pouvons donc supposer qu'ils ont renoncé à leurs plans, » conclut Hatochi en s'éventant.
Kenryū était sceptique, tout comme Yama.
« Ils étaient trop bien organisés pour renoncer après un seul échec, argua le Vite.
– Cependant, vous avez beau jouer les appâts, général Yama, ils restent inactifs.
– Ils sont patients et attendent le moment idéal pour frapper de nouveau.
– Que suggérez-vous donc que nous fassions ? »
Yama échangea un regard avec Mitsuhide : ils en avaient déjà discuté auparavant.
« Ils ne vont plus nous attaquer à Kurojū. Ils attendront plutôt que nous reprenions la route.
– Vous êtes sûrs ? s'enquit le ministre Mekkoshi.
– C'est ce que je ferai à leur place. »
Le général Kenryū hocha la tête pour marquer son accord.
« Que pouvons-nous faire alors ? demanda Hatochi.
– Rien, nous nous en occuperons nous-mêmes. »
Mitsuhide retint un soupir devant la réponse brève et cavalière de son ami, réponse qui ne pouvait qu'offenser la bonne volonté de leurs hôtes.
« Ce que Yama veut dire, intervint-il avec tact, c'est que nous vous sommes reconnaissants d'avoir assuré notre protection le temps de notre séjour. Pour notre retour, nos ennemis vont certainement attendre que nous ayons franchi les frontières de Kami avant d'agir de nouveau. Nous attendrons ce moment-là pour réagir et là, avec de la chance, nous les capturerons. Vous serez bien évidemment avertis. »
Yama roula des yeux : c'était la même chose que ce s'il avait dit, sauf que c'était dix fois plus long ! Quel était l'intérêt ?
Le Conseil Restreint était dubitatif, mais il n'y avait rien de plus à faire. Il fut donc décidé d'arrêter l'enquête ainsi que les mesures de sécurité intensives.
« Vous pouvez néanmoins rester dans le Pavillon Impérial, seigneur Mitsuhide, puisque votre séjour touche à sa fin, proposa généreusement Tegami.
– Merci, votre Majesté, fit Mitsuhide en s'inclinant.
– Général Yama, déclara ensuite l'Empereur en se tournant vers lui, vous n'avez plus à rester seul dans les quartiers des invités.
– Je suis bien là où je suis, » répondit aussitôt le Vite.
Mitsuhide ne put retenir son soupir cette fois. Les manières de Yama laissaient vraiment à désirer quel que soit son public. Il fallait croire que rien ni personne n'impressionnait Yama. Heureusement, l'Empereur ne se formalisa pas de sa réponse brusque, comme s'il s'en moquait bien.
La garde impériale se retira donc du quarter des invités et cessa ses rondes fréquentes de jour comme de nuit. Yama dégusta un thé du soir avec la seule compagnie de deux servants… plus un intrus. Retenant un mouvement d'agacement, le Vite leva les yeux au plafond et lança :
« Hé, vous n'avez pas eu vos ordres ? C'est fini, la surveillance rapprochée ! »
Le silence lui répondit, puis un léger grattement se fit entendre. Une dalle du plafond se déplaça et un homme vêtu de gris sauta du plafond pour atterrir au milieu de la pièce. Yama n'en fut guère surpris et les servants tressautèrent juste un peu.
« Kafūze, on dirait que tu te relâches un peu, non ? l'accueillit-il avec un sourire.
– Je n'ai pas cherché à dissimuler ma présence, Yama, » répondit l'autre homme.
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Dès le premier soir après l'attaque, Yama avait perçu une présence dans le plafond et avait réagi en perçant la dalle juste à côté de l'intrus avec son sabre. Il avait alors eu droit à la visite du général Kafūze de l'Armée de l'Ombre, des espions / assassins / protecteurs au service de la famille impériale. Impressionné par la capacité de Yama à repérer ses hommes, pourtant entraînés spécifiquement à être invisibles, Kafūze avait demandé au Vite s'il pouvait lui envoyer ses meilleurs éléments afin de les tester. Yama avait accepté et les avait tous repérés grâce au pouvoir des ombres. En plus, Kafūze, qui était aussi du genre nocturne, avait passé quelques nuits à discuter avec le Vite, que ce soit de tactiques militaires ou d'autres sujets, et ils avaient joué aux Pierres, un jeu de stratégie que Yama avait appris grâce à Hakurō et qui était très apprécié dans l'Empire de l'Aube. L'existence de l'Armée de l'Ombre était secrète, seuls l'Empereur et le général Kenryū étaient au courant. Yama avait donc promis de ne rien dire, pas même à Mitsuhide. Il appréciait la compagnie du général Kafūze qui n'avait rien des nobles de la Cour. D'ailleurs, ils étaient vite passé au registre amical.
« Du thé ? proposa Yama.
– Pas ce soir. Comme tu l'as dit, les mesures de sécurité ont été levées. Tu ne seras donc plus importuné par mes hommes.
– Je vais enfin pouvoir dormir tranquille, plaisanta Yama. Quant à toi, profites-en pour intensifier l'entraînement de tes Ombres.
– C est déjà prévu, assura le général d'un air impassible, une lueur passant dans ses yeux verts. Il est inadmissible que mes hommes se soient faits repérer aussi facilement ! Ils ne méritent vraiment pas de faire partie de l'Armée de l'Ombre ! »
Yama les plaignit un moment : ce n'était pas de leur faute s'il usait de sa magie pour les débusquer. D'un autre côté, cela ne leur ferait pas de mal d'avoir un entraînement plus poussé. Kafūze s'inclina légèrement.
« Tu pars dans quelques jours et je ne pense pas que nous aurons l'occasion de nous revoir d'ici là. Je tenais donc à te faire mes adieux, Yama. J'ai vraiment apprécié de faire ta connaissance.
– Moi de même, Kafūze. »
L'homme quitta discrètement les appartements et Yama fut enfin seul.
Ce fut sans doute pour cette raison que pour une fois, il connut un sommeil profond. Comme toujours, il ne dormait pas plus de trois ou quatre heures par nuit, mais d'un sommeil léger. Là, il se reposa complètement. Par un heureux hasard, ce fut le moment que choisit Kikuchi pour se faufiler dans ses appartements. Les intentions du Firal n'étaient pas claires, même pour lui-même. Il savait seulement que Yama allait partir d'ici quelques jours et que la sécurité autour de ses quartiers avait été allégée. Alors lui était venue la folle idée de se glisser dans le lit de son bien-aimé. Il n'avait pas l'intention de faire plus que ça. En réalité, il s'attendait même à ce que Yama réagisse dès son approche, aussi avait-il préparé une belle déclaration :
« Yama, mon amour pour toi ne peux s'exprimer avec de simples mots. Cette cour, bien que brève, restera à jamais gravée dans ma mémoire. Dans un peu plus de trois ans, je serai majeur et en droit de prendre un amant. Tu as été ma première cour, je souhaite que tu sois aussi mon premier amant. »
En fin de compte, il n'eut pas l'occasion de s'en servir puisque Yama garda les yeux fermés, même lorsque le jeune homme s'agenouilla à côté de lui.
« … »
Kikuchi fut tenté de secouer le Vite pour le réveiller, mais ce fut alors qu'il fut captivé par le visage endormi et détendu de l'autre homme. La clarté de la lune à travers les tentures conférait une pâleur hypnotique à son visage qui ressortait des ombres. La bouche légèrement entrouverte, Yama était si silencieux et immobile dans son sommeil que Kikuchi se demanda un moment s'il respirait encore.
« Je ne l'avais jamais vu dormir, » songea le jeune homme avec tendresse.
Même durant leur première rencontre et le trajet qui s'était ensuivi, Yama avait toujours été le dernier à dormir et le premier à se réveiller.
Le Firal n'y tint plus et se glissa sous les couvertures, après avoir retiré sa tunique d'extérieur. Le mouvement réveilla Yama et Kikuchi se figea.
« Yatsu, c'est toi ? » marmonna le Vite d'une voix pâteuse.
Une main tâta l'épaule de Kikuchi, puis passa derrière pour l'attirer contre le dormeur. Kikuchi cessa de respirer, bien plus proche de Yama que ce qu'il aurait osé. Satisfait de serrer son “fils” contre lui, Yama se rendormit aussitôt. Kikuchi resta figé un long moment, les joues en feu, avant d'oser se détendre dans cette étreinte.
« Yama, » songea-t'il en posant les mains sur le torse large et musclé.
L'odeur de l'autre homme était plus forte et cela enivra le Firal. Il se rapprocha encore plus près, ses jambes frôlant celles de son bien-aimé. La tentation était forte de mêler aussi leurs corps jusqu'à ce qu'ils ne fassent plus qu'un, mais Kikuchi resta raisonnable. Pouvoir dormir dans les bras de l'homme qu'il aimait était déjà un grand plaisir. Avec un soupir de bonheur, le Firal ferma les yeux et s'endormit à son tour.
L'aube n'était pas encore là, mais le ciel s'éclaircissait déjà à l'horizon lorsque Kikuchi fut rudement secoué. Un peu confus, il ouvrit un œil en marmonnant. Il dormait si bien, pourquoi le réveillait-on ?
« Kikuchi, » fit une voix glaciale.
Cela l'extirpa très efficacement de son sommeil et les souvenirs lui revinrent : il s'était endormi dans les bras de Yama. Sa propre audace le laissa sans voix une fois le jour levé. Cependant, il n'en conçut aucun regret. Il se redressa sur un coude, se frotta les yeux de l'autre main et adressa un sourire au Vite assis à côté du lit.
« Bonjour Yama, fit-il d'un ton qui se voulait détendu. Tu as bien dormi ?
– Qu'est-ce qui t'a pris ?! » répliqua le Vite.
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Le sourire de Kikuchi se figea. Yama n'avait pas du tout apprécié son initiative. Il baissa la tête un peu piteusement.
« Je suis venu te voir au milieu de la nuit, expliqua-t'il, et tu m'as pris pour Yatsu. »
Yama plissa le front. Cette idée était ridicule ! Comment aurait-il pu le confondre avec son fils ? … Cependant, cela lui évoqua un vague souvenir de la nuit. Il soupira.
« Même si c'est le cas, pourquoi ne pas m'avoir réveillé ? »
Kikuchi tritura nerveusement le bord de la couverture.
« C'est que… c'était si agréable ! »
Il préféra jouer la carte de l'honnêteté, incapable de trouver une bonne excuse. Le visage de Yama se durcit.
« Kikuchi, tu te rends compte des conséquences que cela pourrait avoir ?
– Personne ne m'a vu entrer ! assura aussitôt le Firal.
– Et si on découvrait ton absence maintenant ? »
Kikuchi se mordit les lèvres. Il nota néanmoins que Yama ne lui en voulait pas de s'être glissé dans son lit, mais qu'il s'inquiétait seulement des conséquences si cela venait à se savoir. Voilà qui était bon à entendre.
« Tu imagines la réaction de ton père ? poursuivit Yama.
– Je lui dirais que rien ne s'est passé et que nous avons juste dormi, car c'est la vérité ! affirma le jeune homme.
– Tu crois qu'il te laisserait le temps de parler ? En tant que père, si je découvrais que Yatsu avait passé la nuit dans le lit d'un homme bien plus âgé, je frapperai ce dernier sans écouter la moindre explication !
– Mon père est plus calme que toi.
– Vraiment ? »
Le Firal y réfléchit, puis grimaça avant de secouer la tête. Yama croisa les bras.
« Tu as agi de façon irresponsable, le sermonna-t'il. Ne recommence plus jamais, ou bien j'annule notre cour sur-le-champ.
– Non ! » s'écria Kikuchi, désemparé.
Yama avait utilisé le terme “annuler” et non “mettre fin”, ce qui était plus grave. Une cour annulée signifiait que l'on détruisait tous les cadeaux échangés et que la cour ne serait plus jamais mentionnée, comme si elle n'avait jamais eu lieu. C'était un geste très fort et violent, employé rarement. Cependant, Yama n'avait pas fait exprès d'employer ce terme et ignorait la différence entre les deux. Kikuchi ne le savait pas et réagit donc vivement.
« Je suis désolé, fit-il d'un ton suppliant en tirant sur la manche du Vite. Je ne recommencerai plus, c'est juré ! »
Yama nota son agitation et mit cela sur le compte du fait qu'il avait enfin réalisé la gravité de son acte. Il hocha la tête, satisfait de l'attitude repentante du Firal.
« Rentre vite chez toi, fit-il, et qu'on ne te voie pas. »
Sans oser discuter, le Firal se leva et remit sa tunique d'extérieur. Il enfila ensuite ses bottes qu'il avait laissées à l'entrée des appartements, côté cour. Il lança un dernier regard implorant à Yama, n'osant toujours pas dire un mot, puis partit d'un air abattu. Yama secoua la tête en soupirant.
Apparemment, Kikuchi avait réussi à passer inaperçu puisque personne ne vint importuner Yama dans la matinée, et surtout pas un certain père en colère. L'entraînement au sabre eut lieu en présence de Chiharu, comme c'était le cas depuis quelques jours. Yama laissa Kikuchi se charger de former le Premier Prince. Il resta au bord au terrain sans adresser la parole au Firal. Kikuchi chercha plusieurs fois son regard en vain et il était donc d'humeur plutôt morose. Chiharu nota l'atmosphère tendue et devina une dispute entre les deux : se pouvait-il que Kikuchi ait enfin déclaré ses sentiments et qu'il se soit fait rejeter ? Très curieux, le Premier Prince ne risqua pourtant pas à poser la moindre question. La séance se termina rapidement. Une fois seul avec Yama, Kikuchi osa enfin parler :
« Yama, je…
– C'est du bon travail, Kikuchi, le coupa-t'il d'un ton neutre. Je te laisse tout ranger et ne sois pas en retard à tes leçons. »
Rabroué, le Firal hocha la tête, les épaules affaissées. Yama lui en voulait toujours.
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À l'heure du thé dans l'après-midi, quand les garçons furent repartis pour leurs cours, Yama fixa Mitsuhide et fit :
« Dis-moi, tu te souviens de ta description d'une premier cour ?
– Euh… oui, répondit son ami, pris au dépourvu.
– Les sentiments, se tenir la main et s'embrasser, récita Yama grâce à son excellente mémoire.
– Oui, c'est sûrement ce que j'ai dit. »
Mitsuhide ne voyait pas où l'autre voulait en venir. Yama lui adressa un sourire ironique et révéla :
« J'ai retrouvé Kikuchi dans mon lit ce matin. »
Le seigneur de Madare pâlit sous le choc. Il lui fallut deux bonnes minutes pour réussir à parler de nouveau, tandis que Yama le fixait sans rien dire, la mine sombre.
« Il… Il a… Tu… toi, tu… »
Mitsuhide déglutit plusieurs fois et finit par trouver ses mots :
« Il n'a rien tenté… de plus ?
– Comme si je l'aurais laissé faire ! Non, il a juste dormi avec moi.
– Tu ne t'étais pas rendu compte de sa présence ? » s'étonna l'autre homme.
Yama lui jeta un regard lourd de sens.
« Je dormais. J'ai bien senti une présence, mais j'ai cru que c'était Yatsu.
– … Yatsu aurait traversé tout le palais au milieu de la nuit pour te rejoindre ?
– Kikuchi l'a bien fait, lui. »
Le silence revint. Rassuré que rien de plus ne se soit passé durant la nuit, Mitsuhide était néanmoins furieux contre le Firal, mais aussi un peu admiratif.
« Les jeunes de nos jours sont si entreprenants ! songea-t'il. Ils n'ont vraiment peur de rien ! »
Mitsuhide toussota, puis déclara :
« Je vais de ce pas voir le général Kenryū pour mettre fin à cette cour. L'attitude de Kikuchi est inadmissible et aurait pu te causer de gros soucis !
– J'ai déjà réglé la situation avec Kikuchi. Il ne recommencera plus.
– Ah bon ? s'étonna Mitsuhide en clignant des yeux. Tu lui as fait la morale, et c'est tout ? Yama, tu aurais dû te montrer plus sévère envers lui ! »
Le Vite prit un air perplexe et agacé.
« Il faudrait savoir ! La dernière fois, tu m'as reproché d'avoir été trop brusque avec lui et maintenant, tu te plains du contraire !
– Hum… Ce sont deux choses bien différentes.
– Tant pis, c'est fait ! »
Mitsuhide ne l'entendait pas de cette oreille. Puisque son ami ne voulait pas impliquer le général Kenryū, il se dit que rien ne l'empêchait d'avoir une petite conversation avec Kikuchi à son tour.
Le Firal répondit à la 'convocation' en se doutant de ce qui l'attendait. Après tout, Yama lui avait dit qu'il racontait tout à Mitsuhide, donc ce dernier était forcément au courant de leur nuit ensemble. Du moment que son père n'en entendait pas parler, Kikuchi était prêt à subir tous les sermons du monde. Après tout, il ne regrettait absolument pas son initiative audacieuse. Ce merveilleux souvenir rejoindrait tous les autres dans son cœur. Aussi se tint-il la tête haute, assis en face de son rival, tandis que des servants préparaient le thé et disposaient la table. Mitsuhide l'observa d'un air sévère.
« Tss, c'est qu'il a l'air fier de lui en plus ! »
Il était ridicule de se sentir menacé par quelqu'un de bien plus jeune que lui, pourtant Mitsuhide plissa les yeux.
« Firal Kikuchi, fit-il d'un ton froid, vous savez sûrement pourquoi je vous ai fait venir.
– Je vois plusieurs raisons, seigneur Mitsuhide, répliqua le jeune homme. Je vous en prie, éclairez ma lanterne. »
Les lèvres de Mitsuhide frémirent. Ce garçon ne manquait vraiment pas d'aplomb !
« Yama m'a parlé de votre dernier exploit, expliqua-t'il avec ironie. J'estime qu'il s'est montré bien trop indulgent envers vous, alors je tiens à m'assurer que vous ayez bien compris la gravité de vos actes.
– Yama me l'a fait comprendre, assura le Firal.
– Je me permets quand même d'insister. D'après vous, que se passerait-il si cela venait à se savoir ? »
Kikuchi ne parut pas inquiet outre-mesure.
« Le palais regorge de rumeurs en tout genre.
– Je ne parle pas de rumeurs, mais d'un fait avéré. Comment réagirait votre père ? Et votre entourage ?
– Mon père serait furieux, mais j'arriverais à le calmer. Quant à mon entourage, mes amis son sincères et loyaux. »
Mitsuhide soupira.
« Vous ne voyez vraiment pas le problème. Yama est un Vite, alors ce genre de comportement de sa part ne passerait pas ! »
Œuvre originale écrite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé mon histoire !
Le Firal prit un air perplexe.
« Je ne vois pas ce que ça change, le fait qu'il soit un Vite.
– Les Vites ont une horrible réputation et peuvent facilement être soupçonnés d'être des dégénérés. »
Kikuchi écarquilla les yeux et protesta aussitôt :
« Yama n'est pas comme ça !
– Vous et moi le savons, mais ce n'est pas le cas de tout le monde. Votre petit jeu aurait pu lui causer de graves ennuis ! »
Le jeune homme baissa les yeux. Il avait tendance à oublier que les autres s'imaginaient le pire des Vites, encore plus depuis l'Invasion. Mitsuhide nota enfin du remords chez lui et eut un sourire satisfait.
« Je sais à présent que vous ne recommencerez plus car vous avez compris le danger pour Yama. »
Kikuchi hocha la tête. Mitsuhide prit une gorgée de thé.
« Nous repartons dans quatre jours, lui rappela-t'il. Tâchez de bien vous tenir jusque là. »
Kikuchi hocha de nouveau la tête, puis le fixa d'un air songeur. Mitsuhide avait conscience de son regard, mais il but son thé sans s'en soucier, attendant que le Firal prenne la parole.
« Seigneur Mitsuhide, puis-je vous poser une question ? » fit-il finalement.
Mitsuhide acquiesça.
« Pourquoi vous n'avez jamais avoué vos sentiments à Yama ? »
Cela stupéfia Mitsuhide. D'un, la question était très indiscrète. Et de deux, comment savait-il qu'il ne s'était jamais déclaré à Yama ?
« Ce ne sont pas tes affaires ! répliqua-t'il sèchement en passant au registre informel.
– Vous devriez lui dire. Moi, j'ai osé le faire et il l'a plutôt bien accepté. »
Mitsuhide se pinça les lèvres.
« Il a accepté parce que j'ai insisté auprès de lui, rappela-t'il, et aussi parce que tu n'es qu'un enfant. Les choses auraient été très différentes si tu avais été majeur et que cela n'avait pas été ta première cour. »
Bien sûr que Kikuchi en avait parfaitement conscience. Pour autant, il déclara avec insistance :
« À ma majorité, j'ai bien l'intention de me déclarer à nouveau !
– Attends-toi alors à une grande déception. Et là, je ne parlerai plus en ta faveur. »
Kikuchi plissa ses yeux émeraude.
« Vous êtes juste jaloux, décréta-t'il, parce que je suis plus proche de Yama que vous ne l'avez jamais été ! »
Loin de se fâcher, Mitsuhide partit d'un grand rire. Le visage de Kikuchi s'assombrit.
« Tu n'es encore qu'un enfant, fit le seigneur de Madare. Tu crois que s'embrasser et dormir ensemble veut dire que tu es proche de lui ? Ah, tu as encore beaucoup à apprendre sur les sentiments ! »
Piqué au vil, le jeune homme lui jeta un regard furieux, les joues rouges.
Mitsuhide eut un sourire assuré.
« Même si Yama et moi ne sommes pas dans une relation amoureuse, nos liens sont indestructibles. Après tout ce que nous avons vécu, nous sommes aussi proches que des amants. Tu ne peux pas nous séparer, Kikuchi, pas plus que tu ne pourrais le séparer de son fils. Alors je n'ai aucune raison d'être jaloux de toi.
– C'est vous qui le dites ! répliqua hargneusement le Firal.
– J'ai sa confiance, son respect et son affection, énuméra Mitsuhide. Peux-tu en dire autant ? »
Kikuchi ne dit rien, mais sa colère réprimée le faisait trembler de tout son long. Mitsuhide eut finalement pitié de ce pauvre garçon.
« Allons, tu es encore jeune. Tu as tout le temps de découvrir l'amour et ses différentes formes. Tu accepteras d'autres cours et tu finiras bien par trouver celui qui te convient. »
Kikuchi fit la moue : c'était Yama qui lui convenait, et personne d'autre ! Il n'avait pas besoin d'avoir d'autres cours pour le comprendre.
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Cependant, il n'argua pas et adressa un sourire poli à l'autre homme.
« Merci pour cette conversation enrichissante, seigneur Mitsuhide. Je réfléchirai à vos paroles.
– Je suis ravi de vous avoir apporté mes conseils, Firal Kikuchi, fit Mitsuhide en reprenant le ton formel. Si vous souhaitez poursuivre notre conversation une autre fois, ce sera avec plaisir.
– Vous êtes trop aimable. »
Lorsque Kikuchi se retira, Mitsuhide ne put s'empêcher de rire à nouveau. Décidément, cela ne lui ressemblait pas de martyriser un enfant, mais il fallait reconnaître que celui-là était particulièrement effronté.
« Pff, songea-t'il en reprenant du thé. Quoi qu'il arrive, Yama repart avec moi dans quelques jours. C'est donc Kikuchi qui a toutes les raisons d'être jaloux ! »
Cela lui procura un certain plaisir.
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