Le Prince Solitaire 6 12

Chapitre Douze : Le serment rompu


Caserne de Tomako (Dekita), septième mois de l'année 2454


Haruni fut réveillé car on le secouait rudement. Il ouvrit un œil et vit le commandant Gorō à moitié penché sur lui, un pied sur ses côtes.

« Tu n'es pas encore mort, bâtard, commenta-t'il.

Navré de vous décevoir, » rétorqua l'adolescent.

Gorō renifla et se releva, retirant son pied. Son regard tomba sur le bras infecté et une lueur mauvaise éclaira ses yeux noisette.

« Ce n'est pas très beau à voir ! Je dirais que tu as de fortes chances de perdre ton bras.

C'est une possibilité, en effet. »

Surpris par son calme, Gorō le dévisagea. L'adolescent semblait totalement indifférent à l'idée de finir mutilé. Qui sait, c'était peut-être parce que sa magie lui permettrait de faire repousser son bras ? Tout était possible avec ces maudits Hikari !


En tout cas, le commandant Gorō ressentait une furieuse envie de lui faire perdre son air suffisant, comme quand on lui avait arraché les compresses. Puisque le bâtard semblait avoir une tolérance élevée pour la douleur, il lui fallait changer de registre. Son regard devint volontairement lubrique alors qu'il examina le torse nu de son prisonnier. Il se lécha les lèvres.

« Les Hikari ont toujours été réputés pour leur beauté. Tu es bien l'un d'eux ! Dis-moi, vu ton âge, ça a sûrement déjà commencé à te démanger par là, hein ? »

Son pied se posa entre les jambes de l'adolescent allongé, effleurant l'aine de la pointe. Haruni se renfrogna en se redressant pour reculer, son regard glacial.

« Qu'est-ce que ça peut vous faire ?

Je n'ai jamais eu l'occasion de me faire un Hikari. Puisque ton père s'est laissé asservir par sa putain, j'imagine que ça doit en valoir la peine ! »


Les ombres s'agitèrent, furieuses.

« Dégénéré ! crachèrent les Dieux, prêts à agir.

– Attendez, les retint mentalement Haruni. Je ne crois pas qu'il ira jusque là. »

Incrédules, ses ancêtres décidèrent cependant de l'écouter.

« Je suis encore mineur, commandant Gorō, » rappela-t'il calmement.

Le concerné eut un sourire sarcastique.

« Tu crois que ça me pose un problème ? »

Ils se défièrent du regard un moment. Le commandant tiqua et frappa soudain Haruni à l'entre-jambe. L'adolescent roula sur le côté à cause de la douleur intense. Gorō éclata de rire.

« Bah, je ne veux pas tremper ma queue dans une pourriture de Hikari. Elle ressortirait pleine de merde ! »

Il quitta la cellule dont la grille fut refermée derrière lui.


En se redressant avec difficulté, Haruni le héla :

« Commandant Gorō, que vous ont fait les Hikari pour que vous les haïssiez autant ? »

Dos tourné, le militaire se raidit. Depuis le début, Haruni avait senti que sa haine était personnelle. Il avait l'habitude du mépris et de la méfiance, mais la haine n'existait jamais sans raison. Le commandant se tourna vers lui, arborant un air terrible.

« Ils m'ont pris ma famille ! gronda-t'il. Ma femme, mon fils et ma fille sont morts lors d'un violent séisme il y a soixante ans de cela. Les corps de mes enfants n'ont jamais été retrouvés dans les décombres. J'avais fini par faire mon deuil jusqu'à ce que j'entende parler des Enfants Perdus il y a sept ans. C'est là que j'ai compris ce qui s'était passé ! »

Œuvre originale écrite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé mon histoire !

Haruni fronça les sourcils. Même si les circonstances correspondaient, rien ne prouvait que les enfants de Gorō faisaient partie des Enfants Perdus. Les Hikari avaient essentiellement visé à se débarrasser de leurs bâtards, de magiciens potentiels ou des enfants de leurs adversaires. Le regard de l'adolescent tomba soudain sur les cheveux rouges de l'autre homme et il eut une intuition subite :

« Akemi ? »

La fillette qu'il avait sauvée de la Géhenne il y avait fort longtemps avait les mêmes cheveux flamboyants. Était-ce la fille de Gorō ? Hélas, bien que Haruni avait donné l'instruction de la récupérer au couvent où elle se trouvait autrefois, l'expédition envoyée par Mitsuhide et l'évêque de Masara ne l'avait pas retrouvée. On leur avait dit qu'elle avait été recueillie bien avant par une autre personne. Si elle était revenue avec les autres Enfants Perdus, cela aurait-il changé le caractère du commandant ? La réponse se trouvait sûrement dans une des Alternatives des Dieux. Mais en l'état actuel des choses, que pouvait dire Haruni à ce père en colère ? Que sa fille avait survécu, mais qu'elle avait été envoyée chez les Vites pour qui tout démon méritait la mort ? Qu'elle se trouvait encore là-bas, mais qu'elle était peut-être morte ? Ou pire encore ? Mieux valait donc ne rien dire. Le commandant renifla de mépris et quitta la prison. Haruni s'adossa contre le mur en soupirant lourdement.


~*~


Rongé par la fièvre, il fut totalement inconscient du passage des jours. Quand il en avait la force, il marchait à quatre pattes pour récupérer son bol de riz quotidien et surtout pour boire. Les Dieux l'exhortaient à manger, bien que la nourriture l'écœurait. Il ne cédait que pour Les faire taire et vomissait bien souvent ensuite. L'odeur dans la cellule était devenu insoutenable, sauf pour lui qui ne sentait plus rien à force. Par contre, les deux gardes qui se présentèrent aujourd'hui à la grille jurèrent à haute voix en se couvrant le nez.

« Putain ! Tu crois qu'il est mort ?

Espérons que non, sinon le commandant trouvera le moyen de nous le reprocher ! »

Ils se firent violence pour entrer et avancèrent jusqu'à la paillasse en évitant les flaques de vomi.

« Votre Altesse ? Votre Altesse ?! »


Sans réponse, les deux hommes échangèrent un regard anxieux. L'autre soldat utilisa le bout de sa lance pour secouer l'épaule du prisonnier. Il réitéra son geste avec plus d'insistance.

« Qu'est-ce que vous voulez ? » marmonna Haruni en ouvrant les yeux à moitié.

Soulagés, les gardes répondirent :

« Le commandant veut vous voir. »

Haruni lâcha un léger rire, mais roula sur le côté droit pour mieux se redresser. Une fois debout, il vacilla et dut se tenir au mur. L'un des soldats n'y tint plus et lui proposa son bras, en dépit de son aspect peu ragoutant.

« Appuyez-vous sur moi, votre Altesse. »

En temps normal, l'adolescent aurait clairement refusé mais là, il n'était vraiment pas en état de marcher seul. Il lança un regard au soldat, qui paraissait sincère dans son offre, et acquiesça.

« Merci, » fit-il.

Cela surprit le soldat, plutôt habitué à des nobles arrogants. L'autre garde ne dit rien et ouvrit la marche.


Si le commandant Gorō obligeait son prisonnier à se déplacer malgré son état, c'était sûrement dans l'idée de lui imposer une “marche de la honte”. Effectivement, ils croisèrent de nombreux soldats qui s'arrêtèrent sur leur passage et dévisagèrent le Second Prince, ouvertement ou discrètement selon les gens. Des chuchotements s'élevèrent ensuite. Toutefois, Haruni était bien trop fiévreux pour s'en soucier : il goûtait à un état de détachement profond et aucune pensée ne l'encombrait. Il avait cependant bien conscience que cette euphorie factice était des plus dangereuses.

Œuvre originale écrite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé mon histoire !

Si Haruni avait prêté l'oreille aux nombreux commentaires des soldats, il se serait rendu compte que la caserne était partagée en deux. D'un côté, il y avait ceux qui soutenaient le commandant Gorō et se réjouissaient de l'état pitoyable du Second Prince, en majorité des hauts-gradés mais pas que. Ils n'avaient rien de particulier contre lui, ils détestaient juste les nobles qui les prenaient de haut et c'était pratiquement une jouissance pour eux de voir leur commandant — et eux par extension — capable d'humilier ainsi l'une des personnes les plus nobles de l'Empire. De l'autre côté se trouvaient les croyants qui s'horrifiaient de voir ainsi maltraité un descendant des Dieux. Ils craignaient la colère divine et priaient avec ferveur pour être épargnés quand elle s'abattrait sur leur maudite caserne. Cette faction, bien que plus nombreuse, n'osait cependant pas intervenir et s'opposer à leur commandant, car elle était majoritairement composée de simples soldats sans le moindre pouvoir.


~*~


Haruni se retrouva dans la même salle de repas que la fois précédente. Gorō était assis à table, mais c'étaient des parchemins qui se trouvaient devant lui. Il haussa un sourcil à l'arrivée du prisonnier.

« Ah, j'ai gagné mon pari, bâtard : tu es toujours en vie.

Commandant, » fit simplement l'adolescent d'un ton neutre.

La porte s'ouvrit derrière lui et Seiryū entra. En voyant Haruni, il écarquilla les yeux.

« Votre Altesse ! s'écria-t'il avec soulagement et inquiétude.

Vous voyez bien, Firal Seiryū, je ne vous ai pas menti, » rétorqua Gorō avec un sourire satisfait.

Seiryū examina le Second Prince et prit un air désemparé devant son état lamentable.

« Votre Altesse, je suis vraiment désolé, » murmura-t'il.


Il retira sa tunique pour la poser sur les épaules nues de l'adolescent, mais ce dernier recula d'un pas en se raidissant.

« Ne me touchez pas, » répliqua-t'il froidement.

De toute évidence, Seiryū s'entendait à merveille avec le commandant puisqu'il était vêtu de frais, mangeait à sa faim et ne pourrissait pas en cellule. Haruni lâcha un rire moqueur : deux personnes qui haïssaient les Hikari ne pouvaient que bien s'entendre ! Ils devaient sûrement prendre des paris sur le temps qu'il lui faudrait pour mourir. Gorō éclata soudain de rire alors que Seiryū fixait l'adolescent, ses yeux émeraudes remplis de larmes.

« Mon garçon, je crois que le bâtard a compris que tu l'as trahi.

Taisez-vous ! répliqua le Firal, furieux. Je n'ai trahi personne ! »

Honnêtement, Haruni s'en moquait bien. Pour que Seiryū le trahisse, il aurait déjà fallu qu'il lui fasse confiance !


« Bien sûr, bien sûr ! rit de nouveau Gorō. Je vous laisserai en discuter plus tard, ce sera très intéressant à regarder. Pour le moment, je veux que le bâtard écrive à son père pour le supplier de le sauver. »

Il poussa du papier en direction de Haruni. Ce dernier réfléchit un moment, son cerveau embrumé par la fièvre.

« L'Empereur n'a pas cédé aux conditions de Tadeoru ? comprit-il.

Tss, ce minable ne tient pas à son fils, » cracha Gorō.

Ce fut une agréable surprise pour Haruni : son père avait donc écouté ses recommandations ? Il faudrait qu'il le félicite ! De son côté, Seiryū manifesta également sa surprise, mais dans l'autre sens : comment un homme pouvait-il risquer la vie de son fils ? C'était normal dans le cas de Kenryū puisqu'ils étaient des guerriers. Seiryū pouvait comprendre que son père refuserait de céder si les conditions étaient trop déraisonnables. Mais en ce qui concernait Haruni… Dans tous les cas, Gorō n'était pas ravi.

« Écris, bâtard, fit-il d'un ton très sec. À toi de le convaincre que tu vas mourir si tu restes ici. Après tout, c'est la vérité ! »

Œuvre originale écrite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé mon histoire !

Haruni s'assit à table et prit le pinceau. Il lui fut difficile d'écrire sans pouvoir tenir le papier de l'autre main, mais son bras gauche était vraiment devenu inutile. Il traça tant bien que mal quelques caractères avant de reposer le pinceau. Satisfait de sa docilité, Gorō reprit la lettre et plissa des yeux.

« C'est quoi cette écriture ? Tu es tellement malade que tu n'arrives plus à écrire correctement ?! C'est tout bonnement illisible ! »

Haruni se retint de préciser que c'était son écriture habituelle. Pendant que Gorō décryptait le message, Seiryū ne pouvait détacher son regard du bras gauche de Haruni. La plaie était encore plus hideuse que la dernière fois, avec plus de croûtes de pus que de sang. L'état général du Second Prince était indescriptible. Le Firal sentit son échec le frapper durement. Il avait pour mission de le protéger, mais avait lamentablement échoué. Le pire était que Gorō prenait un malin plaisir à bien le traiter, tandis que le Second Prince pourrissait en cellule. Cela ne faisait que renforcer la culpabilité et l'impuissance du jeune homme.


« Sale bâtard ! » fit soudain Gorō en se levant.

Il frappa rudement Haruni au visage d'un revers de la main et du sang coula de son nez. Malgré ça, l'adolescent sourit. Gorō agita la lettre devant lui.

« Tu as perdu la tête ? Tu ne comprends donc pas la situation dans laquelle tu te trouves ?!

Je la comprends très bien, le détrompa-t'il. Voilà pourquoi je félicite mon père pour sa décision et que je l'encourage à ne pas céder devant Dekita. Cela lui fera plaisir. »

Seiryū n'en crut pas ses oreille : Haruni avait vraiment écrit ça ? Il cherchait à pousser leur geôlier à bout ou quoi ?!

« Je sais qu'il est têtu, se dit-il, mais comment peut-il encore l'être dans la situation actuelle ? »

Soit l'adolescent était admirable, tel un roc millénaire qui résistait aux vents et aux marées, soit il avait sombré dans la folie.


Gorō ne se posa pas tant de questions : il frappa de nouveau le Second Prince pour le punir de sa témérité. Du sang tacha sa main et il la fixa d'un air dégoûté avant d'avoir une idée. Il prit un carré de soie et saisit le visage de l'adolescent en un geste brusque, puis il ressuya le sang qui maculait le visage de Haruni. Satisfait, il plia le tissu et le posa sur la table. Il dégaina ensuite son sabre court et prit une poignée de cheveux noirs pour les couper.

« Commandant ! »

Couper les cheveux d'une personne, c'était encore pire que de le frapper au visage : c'était une insulte mortelle ! Cela dit, Haruni s'en moquait totalement, lui. Gorō pouvait bien lui raser la tête si ça lui chantait ! Gorō posa la longue mèche à côté du tissu ensanglanté et déclara avec un grand sourire :

« Puisque tu refuses d'écrire un message, tu seras le message ! On verra bien si ton père résistera encore en recevant un bout de toi ! »

Content de son idée, il ordonna aux soldats de ramener Haruni en cellule.


Seiryū voulut de nouveau lui faire accepter sa tunique.

« Je vous en prie, votre Altesse, laissez-moi vous aider un peu !

Vous en avez déjà assez fait comme ça, » répliqua froidement Haruni.

Seiryū se mordit les lèvres et baissa d'un ton :

« Je ne vous ai vraiment pas trahi ! Si le commandant me traite si bien, c'est juste parce qu'il veut gagner les faveurs de mon père !

Franchement, je n'en ai rien à faire. Laissez-moi tranquille, c'est tout ce que je demande ! »

Consterné par le ton distant, Seiryū aurait encore préféré se faire insulter ou frapper.

« Les garçons, intervint Gorō, la tête penchée sur son message, assez discuté ! »

Les soldats signalèrent à Haruni d'avancer. Impuissant, Seiryū serra les poings.


~*~


Quelques jours s'écoulèrent à nouveau et l'état de Haruni ne s'améliora pas. Il n'empira pas non plus, comme en équilibre. Haruni s'était habitué à la fièvre permanente, tout comme à la douleur lancinante dans son bras gauche. Les Dieux lui fournirent une excellente nouvelle : Tomuki avait regagné Kurojū sain et sauf. Il avait déjà rejoint la troupe de la garde impériale envoyée à sa rencontre et ensemble, ils étaient arrivés à la capitale.

« Me voilà rassuré, murmura Haruni dans le silence de sa cellule froide et humide.

Il reste encore à te sauver toi ! nuancèrent les Dieux.

Impossible de m'échapper, fit-il avec lucidité.

Alors ton père doit accepter les conditions imposées !

Ne soyez pas naïfs. »

Les Dieux manquèrent de s'étouffer : Ils avaient vécu plusieurs centaines d'années pour la plupart et ce gamin de seulement quarante ans Les trouvait naïfs ?!

Œuvre originale écrite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé mon histoire !

« Si l'Empereur cède, Tadeoru ne me relâchera pas pour autant. Il continuera de faire d'autres demandes, encore et encore. Pourquoi me libérerait-il ? Ce serait stupide. »

Les Dieux en restèrent cois. Dit comme ça, ça tombait sous le sens.

« Il est hors de question de te laisser prisonnier aux mains de ce fou !

Que disent Vos Alternatives ? »

Après un moment de silence, les Dieux répliquèrent :

« Tu ne voulais plus en entendre parler…

Je ne veux plus que Vous me les montriez. Donnez-moi juste la tendance générale.

Hum... C'est mitigé.

Bon, ça veut dire au moins que tout espoir n'est pas perdu, non ?

– … »

Franchement, les Dieux ne pouvaient pas comprendre le raisonnement de cet adolescent. Haruni ne dit plus rien et les Dieux se retirèrent, forts inquiets.


~*~


À peine deux jours plus tard, la même nouvelle au sujet du Premier Prince arriva à la caserne avec un message du seigneur Tadeoru. Le commandant Gorō grimaça de rage en le lisant :


Maintenant que l'Empereur a récupéré son héritier, le bâtard ne nous sert plus à rien. Je suis très déçu de vous, commandant Gorō, car vous avez laissé échapper le seul prince qui comptait. Débarrassez-vous au plus vite des prisonniers et amenez vos hommes à la caserne de Kudata pour une réaffectation.


Il était clair que Gorō était tombé en disgrâce et allait se faire rétrograder. Furieux, il déchira le document en petits morceaux, mais cela ne le calma pas pas pour autant. Se débarrasser des prisonniers… Kenryū avait suivi son Empereur et refusait la moindre de ses exigences, pourtant très raisonnables. Gorō eut soudain une bonne idée pour que ses prisonniers lui servent enfin à quelque chose. Avec un sourire féroce, il donna ses ordres.


~*~


Lorsque Haruni fut encore tiré de sa cellule, il s'attendait à rejoindre la salle de repas comme les autres fois. Aussi fut-il surpris d'être conduit à l'extérieur, dans la cour intérieure de la caserne. La lumière vive du soleil lui fit mal aux yeux un moment, accentuant sa migraine causée par la fatigue et la malnutrition, mais il accueillit avec joie l'air frais et inodore. On était à la fin de l'automne et les températures se rafraîchissaient de jour en jour. Haruni aperçut ensuite un enclos au milieu de la cour, apparemment construit à la va-vite. De nombreux soldats se pressaient autour et les murmures étaient vifs. Le silence se fit quand ils notèrent la présence du Second Prince. Le commandant Gorō arriva à son tour, accompagné de Seiryū. Ce dernier blêmit en voyant Haruni, dont l'état n'avait fait qu'empirer et était encore plus visible à la lumière du jour.

Œuvre originale écrite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé mon histoire !

« Votre Altesse, quelle splendide journée, vous ne trouvez pas ? »

Haruni le dévisagea avec méfiance. Quand cet homme se mettait à lui donner du “Votre Altesse”, c'était toujours très mauvais signe.

« Voilà bientôt trois semaines que vous êtes mon invité et je ne vous ai jamais proposé le moindre divertissement. Vous devez penser que je suis un bien piètre hôte.

Je n'ai nul doute sur votre sens de l'hospitalité, commandant Gorō. »

Le militaire sourit mais intérieurement, il était furieux que ce bâtard conserve encore son sens de la répartie, même à moitié mort.

« On va voir s'il fera autant le malin dans une minute, » songea-t'il avec haine.


Une cage rectangulaire sur roulettes fut poussée par trois soldats et s'arrêta près de l'enclos.

« Quoi qu'il en soit, je souhaite me rattraper, reprit Gorō. J'ai donc organisé un spectacle qui vaut le détour, un spectacle dont vous allez être l'une des vedettes ! »

À son signal, les soldats firent coulisser vers le haut la porte de la cage et après un certain temps, un tigre bondit dans l'enclos. Ce n'était pas un adulte, mais il était d'une taille assez impressionnante. Ses yeux jaune marron parcoururent la foule et il feula, provoquant l'excitation des soldats. Gorō éclata de rire tandis que Haruni fronça les sourcils. De son côté, Seiryū espérait avoir mal compris. Hélas, les paroles du commandant furent plus qu'explicites :

« Bâtard contre tigre, je me demande bien qui va l'emporter ! »


Seiryū manqua de s'étouffer d'indignation :

« Commandant, vous êtes vraiment méprisable !

Merci pour ce compliment, Firal Seiryū, » répondit l'autre en riant.

Le jeune homme en resta sans voix. Gorō se tourna ensuite vers Haruni et fit avec une courbette moqueuse :

« Votre Altesse, vous allez entrer dans l'enclos et combattre cet animal afin de nous divertir. »

Haruni conserva son calme et fit simplement :

« Non. »

Gorō le fixa avec un sourire qui menaçait de devenir dangereux.

« Non quoi ?

Je ne me battrai pas contre ce tigre pour votre amusement.

Vous n'aurez guère le choix si je vous fais jeter dans l'enclos.

Les tigres ont peur du feu, que je sache. »


Le sourire du commandant retomba et il lâcha un juron.

« Tu iras, sale bâtard, et tu n'utiliseras pas tes tours de lâche. Sinon, je tuerai ton ami ici présent. »

Pour bien illustrer ses propos, il posa la main sur l'épaule de Seiryū et serra de façon peu amicale, faisant grimacer le jeune homme. Haruni esquissa un sourire moqueur.

« Mon ami ? Vous croyez que je tiens à lui ? »

Profondément choqué, Seiryū se tourna vers lui pour protester, sauf que les événements de ces dernières semaines lui revinrent en mémoire. Il baissa la tête, honteux. Bien sûr que Haruni se moquait de son sort ! Seiryū n'avait rien fait pour l'aider et lui donner une raison de se soucier de lui, au contraire !

Œuvre originale écrite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé mon histoire !

De son côté, Gorō renifla de doute. En réalité, il ne connaissait pas la relation exacte entre les deux jeunes gens. Il avait cependant constaté l'inquiétude de Seiryū pour le Second Prince et en avait tiré ses conclusions. Apparemment, il s'était trompé. Mais même s'ils n'étaient pas amis, Gorō aurait cru que le bâtard avait plus d'honneur que ça pour sauver la vie d'une personne, surtout quelqu'un d'aussi important que le fils du général Kenryū, du vaillant clan Inugami qui servait la famille impériale depuis des générations ! Bah, les Hikari étaient tous les mêmes au final ! Gorō relâcha Seiryū en le poussant rudement. Il avait décidé de ce divertissement et entendait bien le mener jusqu'au bout.

« Je vois. Alors que dis-tu de ceci : si tu gagnes, je te laisserai partir libre. »

Haruni ne battit même pas des cils avant de refuser :

« Je ne vous crois pas.

Voyons, je n'ai qu'une parole !

Je ne vous crois pas. »

Serrant les dents, le commandant se retint de frapper l'adolescent, surtout parce qu'il voulait qu'il soit en forme pour le combat.


« Comment te convaincre ? » demanda-t'il d'un ton trahissant son impatience.

Haruni réfléchit un moment.

« Je veux une arme et vous, vous devez jurer sur les Dieux de me libérer sans chercher à me capturer de nouveau ensuite.

Arf, t'es un petit malin, toi ! » ricana le commandant pour le flatter.

Un serment sur les Dieux ? Ce gamin était stupide ou quoi ? La province de Dekita les avait reniés ! Gorō fit semblant de soupeser les conditions.

« J'accepte, céda-t'il finalement en cachant son sourire triomphant. Mais si tu utilises la moindre magie, notre marché sera annulé !

Dites-le complètement, insista Haruni.

Quoi ?

Votre serment. Énoncez-le correctement et entièrement. »


Gorō faillit le frapper à ce moment. Il prit une fois encore sur lui et fit avec un sourire crispé :

« Moi, Gorō du clan Baifū, je jure solennellement sur les Dieux de libérer le Second Prince sans chercher à le capturer de nouveau s'il parvient à tuer ce tigre sans magie. Alors c'est bon ? Content ? »

Haruni acquiesça.

« Votre Altesse ! intervint alors Seiryū, ayant retrouvé l'usage de la parole. Vous ne pouvez pas…

Vous, la ferme, » répliqua l'adolescent sans même le regarder.

Gorō rit devant la mine déconfite du Firal.

« Allez, venez apprécier le spectacle avec moi, » lui fit-il en lui prenant le bras de force.


Haruni fut escorté devant la porte de l'enclos et on lui remit un sabre de piètre qualité. En voyant cela, un des soldats proches n'y tint pas et sortit sa propre lame pour la tendre à l'adolescent, s'attirant des regards choqués, inquiets ou mauvais.

« Tenez, votre Altesse.

Merci. »

Le soldat lui lança un regard compliqué avant de reculer sous les huées de quelques-uns. La scène avait heureusement échappé à Gorō qui prit place de l'autre côté de l'enclos, Seiryū à ses côtés et retenu par deux soldats. Entre eux, le tigre s'agitait de plus en plus à cause de la foule excitée et ses feulements augmentèrent. Le commandant leva une main et ordonna :

« Faites entrer le bâtard. »

Haruni n'attendit pas qu'on le pousse et s'avança de lui-même dignement. La porte de l'enclos se referma bien vite derrière lui.


Pendant qu'une bonne partie des soldats faisaient leurs paris, le tigre fixa sa proie d'un œil spéculateur. Gorō l'avait capturé trois ans plus tôt et l'avait gardé en vie pour s'amuser avec. Il lui avait fait combattre des chiens féroces et d'autres animaux sauvages. Il l'avait également récompensé en le nourrissant de prisonniers condamnés à mort. Il s'en servait aussi pour faire peur aux soldats comme d'une punition en cas de transgression du règlement. Le félin savait donc ce qui était attendu de lui. De son côté, Haruni ne paniqua pas lorsque le tigre s'approcha de lui en trois bonds : il fendit l'air de son sabre qu'il maniait d'une seule main et blessa l'animal à la patte antérieure. Ce n'était qu'une petite égratignure, mais le tigre recula un peu. Tout autour, les soldats criaient leurs encouragements, que ce soit envers le Second Prince comme envers le tigre. Apparemment, les paris ne portaient pas sur l'identité du vainqueur, mais sur le temps que tiendrait Haruni avant de se faire dévorer. Voilà qui n'était guère encourageant.


Le tigre tenta une autre approche. Cette fois, il esquiva le coup de sabre et ses griffes entaillèrent l'estomac de Haruni. Les sillons sanglants n'étaient heureusement pas trop profonds.

« Le bâtard offre au moins un bon spectacle ! » commenta Gorō avec un rire ravi.

Seiryū retint une exclamation écœurée. Tout cela n'était qu'un cauchemar sans fin. Si ses ancêtres voyaient comment il protégeait la famille impériale — même s'il s'agissait en l'occurrence d'un bâtard Hikari — ils le renieraient sans hésiter ! Tout cela ne pouvait que mal se finir.

Œuvre originale écrite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé mon histoire !

Dans l'enclos, Haruni avait complètement occulté les soldats autour. Il se concentrait uniquement sur les mouvements du félin, comme il le ferait pour un autre adversaire. La seule différence, c'était que l'animal agissait de façon imprévisible. Cela ne dérangeait guère le Second Prince qui avait toujours préféré les vrais combats plutôt que les duels restreints par des règles rigides. Le sabre moyen qu'on lui avait donné pouvait être manié correctement avec une seule main, ce qui était parfait pour lui dont un bras était inutile. Par contre, cela ne lui donnait que peu de portée, il devait donc être près du félin pour le blesser, ce qui était plus dangereux. Le tigre bondit subitement dans sa direction pour le renverser et Haruni réagit en roulant sur la terre battue. Il se dressa et se retourna aussitôt pour enfoncer sa lame dans la cuisse de l'animal. Le tigre feula et tourna vivement la tête pour le mordre. Haruni retira l'arme de justesse avant de reculer et évita ainsi les crocs aussi gros et longs que ses pouces. Tout cela avait épuisé ses maigres réserves d'énergie — entre la fièvre et la malnutrition — et il savait qu'il ne tiendrait plus bien longtemps.


À cause d'une erreur d'inattention, Haruni reçut un coup de griffes sur la cuisse et mit un genou à terre, s'appuyant sur son sabre pour se soutenir. Le tigre s'approcha mais se figea soudain lorsque l'adolescent brandit son bras gauche sous son mufle. L'animal feula et recula un peu. Haruni persista à agiter son bras gauche devant lui, provoquant la même réaction. Les soldats ne comprenaient pas son geste : était-il si désespéré qu'il préférait sacrifier son bras blessé en premier ? L'adolescent releva soudain l'autre bras et enfonça le sabre dans le cou massif du tigre. Il remua la lame avant de la lâcher et de retomber à genoux. Le tigre secoua la tête comme pour tenter de se débarrasser de la chose étrangère fichée dans sa gorge, en vain. Il balança un autre coup de griffes à sa proie, mais manqua de perdre l'équilibre. Confus, l'animal fit quelques pas sans voir que son pelage noir et orange se teintait de sang frais coulant de la blessure. Haruni avait visé la carotide, alors l'animal se vida rapidement de son sang avant de tomber lourdement au sol, dans un silence ébahi.


Le souffle court, Haruni ressentit un détachement suprême par rapport à ce qui venait de se passer. Il rassembla ses forces pour se relever et fixa le commandant droit dans les yeux.

« J'ai gagné, » fit-il simplement.

Les yeux noisette de Gorō passèrent du tigre qui baignait dans une mare de son propre sang à l'adolescent à moitié mort, qui pourtant se dressait devant lui, triomphant. Son visage se tordit d'une horrible grimace.

« Tu as triché, sale bâtard ! s'écria-t'il.

Je n'ai pas triché.

Tu as sûrement utilisé ta magie, c'est obligé !

Où avez-vous vu de la magie ? »

Seiryū avait dans un premier temps partagé l'avis du commandant mais après réflexion, il n'avait aperçu aucune flamme ou autre élément durant le combat. Aussi incroyable que cela pouvait paraître Haruni avait vraiment vaincu un tigre sans magie !


« Quand tu étais à terre, insista Gorō, le tigre ne t'a pas attaqué. Ne me dis pas que ce n'était pas un de tes tours, hein ?!

Ah, ça. »

Haruni sourit et s'approcha du commandant. Les soldats se tendirent pour la plupart, mais d'autres restèrent sans rien faire. Gorō posa tout d'abord une main sur son sabre, puis il se morigéna aussitôt : c'était ridicule de se sentir menacé par un gringalet aux portes de la mort et désarmé ! Pourtant, il émanait de Haruni un pouvoir inébranlable. Le Second Prince tendit son bras gauche par-dessus l'enclos et même Seiryū dut porter une main à la bouche.

« Quelle puanteur ! grogna Gorō.

Imaginez ce que le tigre a pu sentir, rétorqua Haruni. Même lui n'a pas voulu de cette viande pourrie. »

Ainsi c'était l'infection de la blessure de Haruni qui lui avait servi à repousser l'animal. Seiryū n'en revint pas : le Second Prince avait su transformer un malheur en avantage ! Un esprit inébranlable et vif, une ingéniosité qui faisait fi des conventions et normes… Seiryū n'avait rencontré qu'une personne similaire : Yama.


« Commandant Gorō, fit Haruni avec un léger sourire, permettez-moi de vous remercier pour vos soins. Une partie de ma victoire vous revient. »

Le militaire serra les dents sous la raillerie. Il dégaina son sabre et attaqua Haruni par-dessus la barrière de l'enclos. L'adolescent recula prestement, pas étonné du tout de la vive réaction du commandant.

« Je vais te tuer, bâtard, fit ce dernier entre ses dents, le visage blême de rage.

Vous oubliez votre serment sur les Dieux, commandant. »

Cela lui valut un rire moqueur.

« Quel serment ? Tu croyais que j'étais sérieux ?! En voilà un, des serments : tu ne quitteras pas ces lieux en vie ! »


D'un bond, Gorō sauta par-dessus la barrière et fit un pas vers Haruni.

« En voilà un autre : je vais te faire lentement souffrir, puis j'enverrai tes restes à ton père ! »

Haruni ne semblait pas plus effrayé que ça, bien qu'il n'était clairement pas en état d'affronter Gorō. Son visage pâle se fit sévère :

« Commandant Gorō, vous avez juré sur les Dieux. Êtes-vous vraiment sûr de vouloir rompre un tel serment ?

Je crache sur tes dieux, petit merdeux ! répliqua-t'il en joignant le geste à la parole. Ils ne sont rien ! »

Les soldats autour en restèrent choqués. C'était une chose de ne pas croire aux Dieux, mais c'en était une autre de Leur manquer ouvertement de respect.

Œuvre originale écrite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé mon histoire !

Un mince sourire étira les lèvres du Second Prince.

« Je Vous le laisse, » fit-il aux ombres.

Gorō se rua sur lui, sabre en main. Seiryū réussit enfin à se libérer des soldats qui lui retenaient les bras et voulut entrer dans l'enclos à son tour, même s'il savait qu'il arriverait trop tard. Le pire était que Haruni ne tentait même pas de s'enfuir. Il restait sur place, fixant son assaillant sans réagir. Était-il trop faible pour se défendre ? Le Firal pensa à cette raison, jusqu'à ce que l'impensable se produise. Les ombres surgirent brusquement du sol entre Haruni et Gorō, menaçantes. Ce dernier s'arrêta net avant de renifler de mépris.

« De la magie ! gronda-t'il dédaigneusement.

Pas la mienne, » répondit brièvement Haruni.


Le commandant n'y crut pas un seul instant et fendit les ombres de son sabre. Mais ces dernières étant immatérielles, il ne leur fit aucun mal. Il cessa rapidement ses coups de sabre, comprenant le ridicule de la situation, et se reconcentra sur l'objet de sa haine. Cependant au moment où il voulut bouger, il se rendit compte que ses pieds n'avançaient pas. Baissant les yeux, il les vit recouverts d'ombres qui grimpaient le long de ses bottes.

« Sale bâtard ! explosa-t'il. Combats-moi comme un homme ! »

Voilà qui était ironique de la part de celui qui lui avait fait combattre un tigre dans des conditions plus que désavantageuses.

« Ce n'est pas moi que vous affrontez, commandant, répondit Haruni en secouant la tête. Ce sont Ceux que vous avez insultés. »

Une terreur religieuse s'empara des soldats autour, tandis que Gorō restait incrédule.

« Ne va pas me faire croire que ce sont les dieux ! Tu n'es qu'un bâtard, une pour… »


Ses paroles se transformèrent en hurlements quand les ombres lui broyèrent les jambes d'un coup ! Elles continuèrent de grimper sur lui pour atteindre ses côtes et tous purent entendre des craquements sinistres, suivis des cris de douleur et de rage de Gorō. Les ombres s'attaquèrent ensuite aux bras, en commençant par briser les doigts jusqu'à disloquer les épaules.

« Achevez-le tout de suite, Leur fit Haruni entre deux cris.

Pas question ! s'écrièrent les Dieux avec un ton vindicatif. Il a rompu son serment, Nous a insultés et il t'a fait souffrir pendant des jours. Il doit payer ! »

Les ombres se manifestèrent avec tant de puissance que tous purent les entendre. Après un moment de stupéfaction, les soldats se mirent à genoux et posèrent le front à terre, suppliant les Dieux de bien vouloir les épargner.


Les Dieux étaient entièrement concentrés sur Gorō, enragés par ce misérable. Haruni céda :

« Faites comme Vous voulez. »

Et effectivement, les Dieux s'attelèrent à faire du commandant un exemple pour tous. Les cris de l'homme retentirent un bon moment, la terreur le disputant à la douleur. À la fin, Gorō semblait avoir perdu l'esprit : il pleurait en appelant sa mère et son père. Les ombres finirent par envelopper sa tête et on put entendre un craquement encore plus horrible que les précédents. Les cris cessèrent d'un coup. Le silence qui s'ensuivit sembla durer une éternité. Les ombres se retirèrent totalement du corps du commandant qui tomba à terre, méconnaissable et ensanglanté. Haruni put ressentir Leur satisfaction morbide. Ils avaient dû assister impuissants aux souffrances de Leur descendant pendant des semaines, Ils avaient donc de la haine à revendre !

Œuvre originale écrite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé mon histoire !

Haruni expira quand les Dieux retournèrent dans le monde des esprits. Il tourna ensuite la tête et vit les faces prosternées. Son visage s'assombrit : c'était toujours pareil quand les Dieux se manifestaient.

« Relevez-vous tous, » ordonna-t'il.

Les soldats redressèrent juste la tête avec réticence. Ils se figèrent en voyant ce qui restait de leur commandant. Seiryū, qui s'était mis à genoux comme les autres, pâlit et fixa Haruni avec stupéfaction.

« Votre Altesse, épargnez-nous, par pitié ! » s'écria un des soldats.

D'autres suivirent :

« Nous n'avons rien fait de mal, c'était le commandant !

Nous ne pouvions pas lui désobéir !

Moi, je suis arrivé il y a deux jours seulement ! Je n'y suis pour rien ! »

Devant ce concert de suppliques et de surenchères, Haruni fronça les sourcils.

« Taisez- vous ! » lança-t'il d'une voix forte qui surpassa les autres.


Le silence revint aussitôt.

« Qui servez-vous, Tadeoru ou l'Empire ? »

Aucun ne se risqua à répondre, tous gênés. Soudain, un soldat s'avança à genoux et fit :

« Nous avons suivi notre seigneur Tadeoru, mais nous avons eu tort ! »

Plusieurs de ses camarades approuvèrent vigoureusement, tandis que d'autres ne disaient rien. Soit ils voulaient se faire oublier, soit ils estimaient leurs chances de fuir cet endroit sans se faire tuer.

« Nous voulons nous racheter, reprit le premier soldat. Nous voulons servir l'Empire de l'Aube ! Votre Altesse, pardonnez-nous ! »

La majorité des soldats reprirent cette dernière phrase.


Haruni fixa ce soldat plus bra ve que les autres.

« Je me souviens de toi, tu m'as aidé à marcher pour voir le commandant.

Votre Altesse, je ne mérite pas que vous vous souveniez de moi ! Pardon ! » s'écria le soldat en se tapant le front contre le sol.

Haruni observa la foule et déclara :

« Votre commandant est mort. Vous allez quitter cette caserne. Ceux qui souhaitent sincèrement se racheter, rendez-vous à Kurojū pour vous présenter devant l'Empereur. C'est son pardon que vous devez implorer, pas le mien. Il décidera de votre sort.

Nous vous obéirons, votre Altesse, jura le soldat, suivi par d'autres. Que pouvons-nous faire pour vous ?

Amenez-moi un cheval, des vêtements, des armes et de la nourriture, » ordonna-t'il.

Œuvre originale écrite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé mon histoire !

Avec empressement, des soldats se ruèrent pour exécuter ses ordres. Cela ramena Seiryū à la réalité et il contourna l'enclos pour rejoindre Haruni qui en sortit à pas mesurés.

« Votre Altesse, que comptez-vous faire ? s'enquit-il.

Rentrer à Kurojū, répliqua l'adolescent sans le regarder.

Dans votre état ? Il vous faut des soins urgents ! Votre bras… vos blessures… »

Un éclair parcourut les yeux dorés.

« Mon état ne vous concerne en rien.

Mais Kurojū est loin et l'hiver est presque là ! Nous aurons du mal à faire le voyage ! »

Haruni s'arrêta et se tourna vers lui, le visage glacial.

« Nous ? Il n'y a pas de nous, Firal Seiryū. Je rentre à Kurojū et vous faites ce que vous voulez !

Votre Altesse ! s'écria le jeune homme, choqué.

Je ne veux plus rien à voir avec vous. »


Ignorant les protestations du Firal, Haruni se dirigea vers l'entrée de la caserne, les soldats murmurant sur son passage avec émerveillement et crainte. Seiryū serra les poings, puis saisit un soldat qui passait près de lui :

« Toi, amène-moi aussi un cheval et mes sabres ! » ordonna-t'il.

Hébété, le soldat obéit sans discuter. De son côté, Haruni reçut ce qu'il avait demandé. Il enfila les vêtements avec difficulté à cause de son bras gauche. Cependant, il n'accepta aucune aide et passa un sabre à sa ceinture. Un soldat lui présenta sa monture en précisant que c'était celle du commandant, le meilleur étalon de la caserne. Haruni se mit en selle et prit les rênes. Tous les soldats dans la cour se prosternèrent de nouveau sur son passage. Il quitta les lieux de sa torture sans un regard en arrière, suivi par Seiryū.


Note de Karura : Ouf, le commandant Gorō a enfin eu ce qu'il méritait !

Bon, la relation entre Haruni et Seiryū est vraiment au plus bas. Il faut dire que Seiryū a enchaîné les erreurs et s'est montré incroyablement naïf. Pardonnez-lui, il n'a pas beaucoup d'expérience.

Quant à Haruni, disons qu'il lui en veut à mort et que ça n'est pas près de s'arranger.







Commentaires :


:

:

Pour insérer des émojis dans le message, appuyez sur la touche Windows et ; de votre clavier (pour Windows 10).

Derniers chapitres parus :
La Renaissance du Suprême Immortel 447 et 448
Lanterne 52
La Renaissance du Suprême Immortel 445 et 446

Planning des mises à jour :
Dimanche tous les quinze jours : Lanterne : le reflet d’une fleur de pêcher
La Renaissance du Suprême Immortel
Le Prince Solitaire