Le Prince Solitaire 6 13

Chapitre Treize : Changement d'opinion


Aux alentours de la caserne de Tomako (Dekita),
septième mois de l'année 2454


Seiryū chevauchait, son regard ne quittant pas l'autre cavalier devant lui. Il avait peur que Haruni ne tombe de selle à tout moment et ne se rompe le cou. Cela faisait des heures qu'ils avaient quitté la caserne de Tomako et le Second Prince ne s'était pas arrêté un seul instant pour souffler. C'était comme s'il souhaitait mettre le plus de distance possible entre lui et ce lieu. Au vu de ce qu'il y avait vécu, c'était plus que compréhensible. Cependant, c'était très dangereux dans son état actuel. Au grand soulagement de Seiryū, Haruni s'arrêta peu après la tombée de la nuit et conduisit sa monture vers un ruisseau où l'animal se désaltéra avec empressement. Seiryū fit de même avec son cheval et fut bien content de se dégourdir les jambes après une si longue chevauchée.


Voyant que Haruni n'arrivait pas à défaire d'une main le lien qui fermait le sac de provisions fourni par les soldats, il s'approcha.

« Votre Altesse, laissez-moi vous aider. »

L'adolescent lui jeta un regard hostile qui figea Seiryū sur place. Il finir par venir à bout de ce nœud récalcitrant et tria les provisions. Les soldats avaient été généreux : de la viande séchée, des boulettes de riz, du riz en grain, des pommes et des poires, quelques légumes… Seiryū ouvrit son propre sac et trouva le même contenu. Ils n'auraient pas à s'inquiéter de la nourriture durant leur voyage.

« Je vais chercher du bois pour le feu, » annonça-t'il.

Haruni l'ignora complètement et se mit à mâchonner une des boulettes de riz sans grand entrain. En soupirant, Seiryū partit à la recherche de branches sèches.


Les températures étaient basses pour la saison, encore plus la nuit. Même si les soldats leur avaient donné à chacun une couverture et un manteau épais, un feu serait vital de nuit. Seiryū revint vite avec un tas de bois et ce alors qu'il se rendit compte qu'il n'avait pas de briquet. Il contempla bêtement le bois empilé devant lui, ne sachant que dire.

Fschhhh.

Le feu prit soudain et Seiryū recula avec effarement. Il inspira brusquement et se tourna vers Haruni qui était en train de ranger sa boulette de riz à moitié mangée.

« C'est vous qui… ? » commença-t'il.

Un reniflement dédaigneux lui répondit. Pour une fois, Seiryū fut bien content des pouvoirs magiques du Second Prince. Il ignorait comment ils auraient pu survivre sans feu.

« C'est bien pratique, » fit-il en se réchauffant les mains avec satisfaction.


Il mangea à son tour et pendant un moment, on n'entendit que le crépitement des flammes. Seiryū n'avait rien contre le silence quand il était confortable mais là, il y avait beaucoup de non-dits entre eux et c'était intolérable pour lui. Dès qu'il eut fini son repas frugal, il se tourna vers Haruni et se lança :

« Votre Altesse, ce qui s'est passé à la caserne tout à l'heure… c'étaient vraiment les Dieux ? »

L'adolescent fronça les sourcils, agacé et prêt à répliquer, puis il se décida à répondre :

« Qui d'autre ?

Je n'avais encore jamais ressenti une telle présence ! Ce que je ne comprend pas, c'est qu'Ils ne soient pas intervenus plus tôt pour vous sauver !

Ils ne sont pas intervenus pour me sauver, rectifia Haruni, mais parce que le commandant Gorō Les a insultés et a rompu son serment. »

Œuvre originale écrite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé mon histoire !

Seiryū secoua la tête.

« Je suis sûr que ce n'est pas que ça, insista-t'il. Je Les ai entendus à un moment et Ils étaient furieux de votre traitement. Ils ont agi pour vous protéger. »

Haruni lança un regard réprobateur aux ombres. Voilà justement le genre d'idées qu'il ne voulait pas voir se répandre.

« Pourquoi vous n'avez pas voulu rester à la caserne ? en profita pour demander le Firal. Cela aurait été bien plus confortable que de passer la nuit dehors en plein froid.

Trop dangereux.

Ah, avec ce qui s'est passé, personne n'aurait osé s'en prendre à vous ! »

Le Second Prince leva les yeux au ciel. Seiryū était vraiment trop naïf.


« Face à un miracle, les gens sont d'abord effrayés et remplis de révérence. Puis ils commencent à douter de ce qu'ils ont vu, recherchant une explication rationnelle. Pour finir, il se sentent floués et se mettent en colère. »

Seiryū l'écouta, stupéfait par l'analyse détachée. Haruni se redressa un peu et conclut :

« Tous les soldats de Tomako n'ont pas été convaincus. Je suis sûr que certains sont déjà partis avertir la garnison la plus proche. »

Maintenant qu'il y pensait, Seiryū dut reconnaître la validité de ce raisonnement.

« Vous pensez vraiment à tout, s'étonna-t'il, même en de telles circonstances.

C'est une autre autre façon de dire que je suis froid et calculateur ?

Non ! protesta aussitôt le Firal. Ce n'est pas ce que j'ai voulu dire ! »

Naturellement, le Second Prince n'y crut pas un seul instant. Seiryū ne se risqua pas à essayer de le convaincre de sa bonne foi, sachant que ce serait peine perdue.


« Ah, fit-il soudain, j'ai vu des pansements et de l'onguent dans nos affaires. Occupons-nous de vos blessures.

Non, rétorqua sèchement Haruni.

Il faut vous soigner, votre Altesse ! Votre état est très grave !

À qui la faute ? »

Seiryū se mordit les lèvres, bouleversé. Effectivement, Haruni avait été blessé à la base par sa faute et c'était aussi à cause de lui que le commandant Gorō avait appris pour la blessure et avait infligé un traitement aussi cruel à l'adolescent. Toutes les excuses du monde n'y changeraient rien, mais Seiryū tenait à demander pardon. Cependant au moment où il ouvrit la bouche, il entendit Haruni faire d'un ton glacial :

« Je me soignerai seul. »

Seiryū baissa la tête, affligé. Il comprenait très bien que l'adolescent ne lui faisait plus confiance.

« Du moment que vous vous soignez, » murmura-t'il.


Il alla chercher le nécessaire et le posa aux pieds du Second Prince. Haruni lui lança un regard significatif et Seiryū s'éloigna du feu, prenant sa couverture pour se réchauffer. Il observa tout de même l'adolescent de loin, le regard anxieux. Sans se soucier du froid, Haruni retira le haut de sa tunique avec difficulté. Le feu illumina la peau pâle de son torse et de ses épaules. Seiryū se mordit les lèvres en voyant le bras gauche où le pus se mêlait au sang. Haruni passa un linge trempé dessus pour nettoyer les plaies, mais grimaça sous l'effet de la douleur. Il lava superficiellement les plaques de pus, ne se risquant pas à tirer dessus pour les décoller : si elles tombaient avec le passage du linge, tant mieux. Sinon, tant pis. Il se mit ensuite de l'onguent pour désinfecter, sans en abuser. Il posa des compresses et noua un bandage de la main droite.

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La seconde plaie moins importante était le coup de griffes à l'abdomen. Il nettoya et pansa la plaie avec ce qui restait des compresses. Le reste était des bleus ou des égratignures sans trop de gravité. Haruni remit sa tunique. Son bras gauche lui faisait encore plus mal à présent qu'il l'avait manipulé. La fièvre était toujours présente, lui donnant l'impression de nager en plein brouillard. Malgré ça, il tentait de conserver une attitude calme et un esprit clair, même s'il ressentait tout le contraire. Il avait également du mal à manger, si bien qu'il avait dû se forcer tout à l'heure pour grignoter la boulette de riz et encore, il n'avait pas pu la terminer.


~*~


Seiryū revint près du feu une fois les soins finis. Il se sentait terriblement honteux.

« Votre Altesse, se risqua-t'il, je sais que vous êtes en colère contre moi et vous avez toutes les raisons de l'être. J'ai vraiment honte de ce que j'ai fait et de ce que vous avez subi par ma faute. Je vous demande pardon pour tout. »

Il s'inclina très bas afin de marquer sa sincérité. Après un long silence tendu, Haruni rétorqua brutalement :

« Je ne vous pardonne pas. »

Choqué, Seiryū se redressa et le fixa, la bouche ouverte. Haruni fronça les sourcils, le regard sur les flammes.

« La dernière fois que je vous ai pardonné, vous m'avez aussitôt drogué. Vos excuses ne sont pas sincères.

Mais je… ! »


Cette indignation disparut très vite pour refaire place à la honte. Seiryū reprit dans un souffle :

« Je l'ai fait pour vous aider… Vous ne vouliez pas vous faire soigner et…

Qui a dit que je ne voulais pas me faire soigner ? » le coupa Haruni.

Cela stupéfia Seiryū un moment.

« Le… le docteur Meidō a dit que vous aviez refusé de le voir. »

Haruni expira brusquement, passablement agacé.

« Je voulais d'abord examiner moi-même la plaie pour déterminer sa gravité, révéla-t'il. J'aurais fait appel au médecin après. »

Seiryū tomba totalement des nues et en bafouilla :

« Vous… Vous… Vraiment ?

Bien sûr ! Je ne suis pas inconscient ! »

Cela acheva de plonger Seiryū dans un océan de regrets. S'il avait attendu un peu, tout cela ne serait jamais arrivé. Mais il était resté borné sur sa vision du Second Prince et lui avait prêté des intentions qui n'étaient pas les siennes. Il avait vraiment été stupide.


« Je croyais bien faire, » murmura-t'il dans un souffle.

Haruni renifla de doute. De son point de vue, Seiryū s'était appliqué à le mettre en danger à chaque occasion possible. Et il avait à présent le culot de feindre les regrets ?!

« Peu m'importent vos intentions, fit-il froidement.

Je vous en supplie, dites-moi comment me faire pardonner ! » s'écria soudain le jeune homme.

Seiryū savait qu'il lui avait causé un tort énorme — bien que cela avait été totalement involontaire — et il ne demandait qu'à se racheter. Son honneur ainsi que son caractère moral l'exigeaient.

« Vous tenez vraiment à vous faire pardonner ? demanda soudain Haruni d'un ton neutre.

Oui ! s'écria Seiryū. Je suis prêt à tout !

Alors j'ai deux conditions. Premièrement, vous allez jurer sur les Dieux de ne jamais parler à qui que ce soit de ce qui s'est passé depuis l'attaque surprise dans la forêt. »

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Seiryū écarquilla les yeux.

« Mais… une fois à Kurojū, on va forcément nous poser des questions !

Je m'occuperai des explications, vous n'aurez qu'à acquiescer. »

Le Firal ne comprenait pas l'intérêt de cette requête. Cependant, il hocha la tête et prononça le serment demandé. Haruni l'observa avec satisfaction.

« Bien. Vous savez naturellement ce qui vous attend si vous rompez ce serment. »

Les cris du commandant Gorō et les craquements d'os lui revinrent en mémoire et il frissonna. Il déglutit et acquiesça.

« Deuxièmement, reprit Haruni, une fois rentrés, vous ne vous mêlerez plus jamais de mes affaires. »

Interdit, le jeune homme le fixa. Haruni prit un air dur.

« Et surtout, ne m'aidez plus jamais ! Vous êtes plus dangereux que tous les Gorō de ce monde ! »


Blessé par cette remarque, Seiryū ne pouvait toutefois pas accepter cette condition.

« Votre Altesse, objecta-t'il, ce que vous demandez n'est pas possible !

En quoi ce n'est pas possible ? le défia l'adolescent.

Ma famille est au service de la vôtre. Nous allons nécessairement interagir ! »

Un pli moqueur barra la bouche du Second Prince.

« Nos interactions seront réduites au minimum. Pour ma part, je ferai comme si vous n'existez pas. N'hésitez pas à faire de même.

Votre Altesse ! »

Seiryū ne pouvait absolument pas accepter cette condition. Il ne comprenait pas en quoi cela lui permettrait de se racheter. Au contraire, il souhaitait faire quelque pour aider le Second Prince ! Il ne savait pas quoi, mais il voulait se montrer utile. Ignorer complètement l'autre, c'était pour lui l'opposé de se faire pardonner.


« À prendre où à laisser, rétorqua Haruni devant son silence. Honnêtement, cela ne changera pas grand-chose à notre relation habituelle, non ? »

Le Firal serra les poings. Il décida d'accepter, mais uniquement pour gagner du temps. Le Second Prince était encore en colère contre lui — et à juste titre. Il finirait par se calmer et verrait les choses autrement. Cela ne servirait à rien de discuter avec lui pour le moment.

« Entendu, » céda-t'il.

Haruni eut un sourire satisfait. Il alla prendre sa couverture pour s'enrouler dedans et se reposer un peu. Le cœur lourd, Seiryū fit de même.


~*~

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Le lendemain, sentant qu'une certaine paix s'était établie entre eux — ou du moins, que Haruni semblait moins agressif envers lui — Seiryū conseilla :

« Votre Altesse, il faudrait nous arrêter dans le village le plus proche pour envoyer un message à la capitale et leur dire que nous sommes libres, vous ne croyez pas ?

Déjà fait, répondit simplement Haruni.

Hein ? »

Seiryū se demanda un instant si le Second Prince ne s'était pas absenté durant la nuit pour envoyer un message, mais par quel moyen ? Ce n'était pas concevable. Haruni soupira et daigna s'expliquer :

« Les Dieux ont transmis nos nouvelles à l'Empereur.

Oh… Alors vous… vous êtes en contact avec Eux ? Vous savez faire le Rituel d'Invocation comme Tomuki ? »

Ce rituel était normalement un secret de la famille impériale, mais cela faisait longtemps que les Inugami étaient impliqués dans ces secrets. Avec un sourire amer, Haruni se dit que le jour où ce clan les trahirait, ils seraient encore plus redoutables et efficaces que les Hikari.


« Je n'ai pas besoin d'un rituel pour Les contacter, » expliqua-t'il sans trop savoir pourquoi.

Alors que Seiryū prenait un air perplexe, Haruni changea de sujet :

« Il y a une troupe de la garde impériale qui nous attend à plusieurs kilomètres. Nous allons les rejoindre et ils nous escorteront à Kurojū.

Oh… ce sont aussi les Dieux qui vous l'ont dit ? Et au fait, qu'en est-il de Tomuki ? Avec ce que le commandant Gorō a dit…

Cet homme a menti, comme je l'ai dit. Cela fait une semaine que Tomuki est rentré, sain et sauf. »

Le soulagement envahit le visage de Seiryū.

« Loués soient les Dieux ! s'écria-t'il, rempli de ferveur et de gratitude.

Pff, ce n'est pas comme s'Ils avaient fait le plus dur, » rétorqua Haruni, oubliant un moment de penser ça au lieu de parler.


Les ombres se sentirent aussitôt vexées et réagirent vivement :

« Comment ça, Nous n'avons pas fait le plus dur ?! Tu oublies un peu que c'est Nous qui t'avons prévenu du danger au départ !

Oh, ça va ! Vous êtes vraiment trop susceptibles !

C'est la meilleure, tiens ! »

Haruni se rendit soudain compte que Seiryū le fixait d'un air choqué. Il se sentit embarrassé et détourna la tête, mais le Firal n'allait pas laisser passer ça comme ça.

« Vous... Vous êtes en train de Leur parler en ce moment même ?

D'habitude, maugréa-t'il, Ils ont le bon sens de se taire quand il y a quelqu'un avec moi.

Il ne peut pas Nous entendre, alors quelle importance ?

Moi, je Vous entends et c'est déjà de trop ! »


Seiryū n'en revenait toujours pas.

« Alors vous parlez vraiment aux Dieux, et sans le moindre rituel. C'est incroyable !

Pas tant que ça, répliqua Haruni. Vous oubliez comment j'ai passé les vingt-cinq premières années de ma vie. »

Seiryū plissa le front : le long sommeil du Second Prince au temple de Myūjin, l'un des lieux les plus saints, était donc la raison de ce lien étroit avec les Dieux ? C'était plausible. Il comprit soudain autre chose :

« La raison pour laquelle vous étiez au courant des attaques du camp… Ne me dites pas que c'étaient les Dieux qui vous l'avaient dit ?! »

Haruni se renfrogna et ne répondit pas. Sérieusement, ça lui faisait toujours bizarre et ridicule d'entendre ça, comme s'il était une sorte de prophète.

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Seiryū semblait pourtant très impressionné.

« C'est extraordinaire ! Pourquoi vous ne l'avez pas dit avant ? Même le général Bakkushō n'aurait pas osé contester la parole des Dieux ! »

L'adolescent le dévisagea pour voir si l'autre ne se moquait pas de lui. Cela aurait-il pu être aussi simple que ça ?

« Nous te l'avions bien dit, renchérirent les Dieux.

C'est bon, fermez- la ! » fit-il avec humeur.

Comment était-il censé savoir que c'était acceptable de recevoir des messages divins ?

« Si tu Nous avais écoutés…

Je vous ai dit de la fermer, putain ! »

Les ombres se turent, mais il continua de sentir leur triomphe. Il se massa la tempe.


À côté de lui, Seiryū n'en revenait pas qu'il osait ainsi s'adresser aux Dieux et qu'en plus, Ces derniers toléraient son manque de respect ! Cela devait dire qu'Ils devaient beaucoup le chérir. Voilà qui changeait tout pour Seiryū. Jamais les Dieux ne protégeraient quelqu'un qui avait de mauvaises intentions envers la famille impériale, fut-il un de Leurs descendants. Ils l'avaient pourtant clairement choisi, ouvertement protégé et instruit du futur, lui plutôt que Tomuki, l'héritier légitime… Cela signifiait-il que les Dieux souhaitaient que Haruni monte sur le trône plutôt que son grand frère ? Pourquoi choisiraient-Ils un Hikari plutôt qu'un héritier au sang plus noble ? Dans tous les cas, Haruni n'était pas une menace pour l'Empire de l'Aube, on pouvait même dire qu'il était son avenir.

« Une minute, se dit soudain le jeune homme, tu te mets à penser comme un conspirateur. Arrête un peu de partir dans tous les sens ! »


Il inspira pour se calmer.

« J'ai appris tant de choses sur lui ces derniers temps que je ne sais plus quoi penser, » reconnut-il.

Il était clairement confus et avait besoin de temps pour faire le tri dans ses idées. Une chose était sûre : il s'était trompé sur le compte de Haruni et souhaitait à présent se faire sa propre opinion sur l'adolescent… du moins si l'autre le lui permettait.

« Votre Altesse, déclara-t'il soudain avec un doux sourire, votre confiance m'honore et sachez que je…

Quelle confiance ? le coupa sèchement Haruni.

Hé bien, vous m'avez confié le secret de vos liens avec les Dieux, sans parler de votre magie et…

Ce n'est pas une question de confiance. Je vous rappelle que vous avez juré de ne rien dire et les Dieux seront là pour vous faire respecter votre serment. »


Seiryū en resta bouche bée. S'il y avait un point sur lequel il ne s'était pas trompé au sujet du Second Prince, c'était bien son manque de sociabilité !

« Qui plus est, insista Haruni, n'oubliez pas qu'une fois de retour à Kurojū, nos chemins devront se croiser le moins possible, voire pas du tout ! »

Le Firal ne dit plus rien, sentant que la rancœur de Haruni à son égard était toujours aussi vivace. Haruni lui en voudrait encore longtemps pour ces horribles événements. Du coup, le moment était mal choisi de lui parler de ses résolutions. Cela ne voulait pas dire pour autant qu'il allait renoncer à découvrir la vérité sur Haruni et se faire une nouvelle opinion plus juste sur cet adolescent.


~*~


Le lendemain en cours de journée, ils tombèrent sur les gardes impériaux qui les attendaient à la frontière, ces derniers menés par Kenryū en personne.

« Père ! » s'écria Seiryū, oubliant totalement la présence d'autres personnes.

Il descendit de cheval pour se précipiter vers lui. Kenryū fit de même et prit son fils dans ses bras.

« Seiryū, fit-il d'une voix remplie d'émotion. Tu n'as rien, les Dieux soient loués ! »

Seiryū se sentit soudain redevenu comme un petit garçon qui avait eu une grande frayeur et qui retrouvait du réconfort dans l'étreinte puissante de son père. Les larmes lui montèrent aux yeux et sa voix se fit plaintive.

« Oh père, c'était horrible ! commença-t'il. C'était… »

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Il s'interrompit subitement en entendant les autres soldats saluer le Second Prince.

« Votre Altesse. »

Seiryū se rappela du serment qu'il avait fait et se tut. Son père le serra un dernier moment contre lui avant de le relâcher et de saluer Haruni à son tour.

« Votre Altesse, vous… vous allez bien ?! »

Même si le général ne portait pas Haruni dans son cœur, il ne put s'empêcher d'être interloqué en voyant la mine horrible de l'adolescent. Les yeux de Kenryū passèrent de Haruni, qui avait tout l'air d'avoir souffert, à son fils, qui semblait aller très bien, et l'incompréhension put se lire sur son visage.

« Par les Dieux, que s'est-il passé ? » s'écria-t'il.


Gêné, Seiryū ne put rien dire. Ce fut Haruni qui répondit :

« Les explications pourront attendre. Mettons-nous en route, je préférerais m'éloigner de la frontière au plus vite. »

Kenryū était clairement inquiet, mais il hocha la tête et remonta sur son cheval. Le plus sûr était de s'enfoncer dans Kami au plus vite.

« En route, » ordonna-t'il aux gardes.

Seiryū se remit également en selle, tout en lançant un regard inquiet au Second Prince. Il se rassura en se disant qu'ils seraient bientôt en sécurité et que Haruni allait pouvoir recevoir les soins nécessaires pour son bras.


~*~


Ils chevauchèrent jusqu'au début de l'après-midi. Là, estimant qu'ils étaient assez loin de la frontière, Kenryū décida d'une pause. De son côté, Haruni aurait préféré continuer mais les ordres du général l'auraient emporté sur les siens. Il descendit donc prudemment de cheval, tandis que les gardes sortaient leurs provisions pour le déjeuner et s'occupaient de leurs montures.

« Votre Altesse, vous êtes sûr que ça va ? » demanda de nouveau Kenryū en le voyant descendre de cheval avec du mal.

Haruni lui jeta un regard noir. Décidément, le père comme le fils étaient pénibles ! Ils sortaient vraiment du même moule, et pas que physiquement !

« Non, répondit Haruni en détachant chaque mot, mais je tiendrai jusqu'à Kurojū. »


Kenryū se pinça les lèvres et plissa ses yeux saphir.

« Nous nous arrêterons à la prochaine ville pour la nuit, décida-t'il. Il est hors de question que vous dormiez dehors dans votre état. Vous êtes blessé ou malade ? Dans tous les cas, je ferai venir un médecin. »

En entendant ça, Seiryū fut grandement soulagé. Haruni ne pourrait pas dire non au général Kenryū, alors il allait bien être obligé de se faire soigner au plus vite. Effectivement, Haruni fut tenté de répliquer, mais il avait bien conscience que ce n'était pas possible. Cela ne l'empêcha pas d'arguer :

« J'ai quelques blessures, mais je les ai traitées hier. Inutile de faire venir un médecin pour le moment. Cela pourra attendre. »


Kenryū prit un air sévère.

« Je suis responsable de votre sécurité, votre Altesse. S'il vous arrive quoi que ce soit, votre père me demandera des comptes. Alors vous écouterez ce que je dis ! »

Le général et le Second Prince se défièrent un moment du regard, tandis que les autres retenaient leur souffle. Haruni eut ensuite un sourire qui n'en était pas un.

« Faites comme bon vous semble, » fit-il.

S'il semblait céder en apparence, il avait en fait l'intention de cacher sa blessure la plus grave au médecin qui viendrait. Il n'aimait pas ce genre de procédé sournois, mais c'était tout ce qu'il pouvait faire pour le moment.

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Kenryū ne se douta pas un seul instant du stratagème de l'adolescent. Il hocha la tête, satisfait d'avoir su convaincre cette tête de mule, puis se tourna vers son fils pour lui demander :

« Et toi, Seiryū, tu n'as rien ?

Non, père, » répondit le jeune homme.

Kenryū se renfrogna devant cette réponse.

« Comment se fait-il que tu n'aies rien, tandis que son Altesse est dans un si grave état ? »

Seiryū prit un air penaud. Il aurait bien aimé se justifier, mais son serment l'empêchait de parler. En plus, il devait reconnaître qu'il avait sa part de responsabilité dans l'état du Second Prince. Il baissa la tête et serra les poings, prêt à subir les réprimandes de son père. À sa grande surprise, Haruni daigna expliquer :

« Le commandant Gorō a pris un malin plaisir à nous traiter de manière différente. Cela faisait partie de son jeu. »


À la mention de cet homme, Kenryū serra les poings, une lueur meurtrière dans le regard.

« Ce porc immonde, siffla-t'il. Ah, cela ne m'étonne guère de sa part ! Tout s'explique à présent. »

Seiryū jeta un regard de gratitude à Haruni, mais ce dernier avait détourné les yeux, comme si cela ne le concernait guère. Par contre, le Firal vit les soldats échanger des regards entre eux et comprit pourquoi son père l'avait interrogé ainsi en public. Les Inugami étaient les protecteurs de la famille impériale. Même s'il s'agissait du bâtard Hikari, Seiryū avait clairement manqué à son devoir en laissant le Second Prince se retrouver dans un état si horrible, tandis que lui-même n'avait rien. Les gardes impériaux n'avaient rien dit, mais ils n'avaient pas pu manquer de discuter entre eux à ce sujet. Kenryū avait donc décidé d'obtenir la vérité en leur présence afin d'étouffer dans l'œuf la moindre rumeur. Cela montrait à quel point il savait anticiper les problèmes et trouver des solutions adaptées, des qualités qui faisaient de lui un grand général respecté de l'Empire. Admiratif, Seiryū ne pouvait qu'espérer lui arriver à la cheville un jour.






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