Chapitre 12
Nigel nageait dans la confusion la plus totale. La personne devant lui avait disparu subitement pour être remplacée par quelqu’un qui n’aurait pas dû être là, n’importe qui en serait choqué.
« Où-où est passé sire Schumach ?
– C’est important ? »
Nigel tressaillit devant ce ton qui était féroce et sec. Malgré tout, il demanda à Inas :
« Qu’est-ce que tu fais ici ?
– J’ai senti que vous étiez en danger.
– En danger… »
Nigel plissa le front. Oui, Inas avait raison : s’il avait dit quelque chose de mal, il aurait pu se retrouver avec la gorge tranchée…
« … Comment tu l’as su ? »
Comment Inas, qui aurait dû remonter vers la capitale par le sud à l’heure actuelle, avait-il su que Nigel courait un danger ? Se pouvait-il qu’il l’avait observé en secret ? Plusieurs sombres suppositions lui vinrent à l’esprit. Un frisson le fit se recroqueviller sans qu’il ne s’en rende compte.
Inas, qui le fixait de ses yeux calmes et étrangement féroces, sourit. La bête sauvage en lui disparut et Inas reprit son allure de chevalier formel.
« J’ai juste placé un sort sur le seigneur Nigel pour savoir si quelque chose le menaçait.
– Qui a dit que…
– C’est mon devoir que de protéger le seigneur Nigel. Bien que ma charge de travail se soit un peu alourdie, mon devoir est d’assurer votre sécurité. Prenez ça comme une simple extension.
– Hum, c’est vrai, mais… »
Cela avait l’air plausible. Il valait mieux utiliser la magie pour détecter un danger plutôt que de l’observer en permanence.
Pourquoi je me laisse toujours convaincre par les arguments ridicules d’Inas… ?
Le Nigel d’origine ne se serait pas fait avoir par ce que disait un autre. Nigel n’aurait pas pu hériter du duché en se comportant de la sorte.
Cependant, Inas s’exprimait bien mieux que dans les souvenirs de Nigel. Et le Nigel d’origine avait toujours accepté ce que disait son bien-aimé Inas, alors il ne cessait de se laisser convaincre.
Est-ce bien avisé ?
Nigel examina le visage d’Inas. L’autre homme était magnifique et aussi beau qu’une sculpture. Ses yeux, qui étaient toujours froids envers les autres, brillaient comme ceux d’un chiot lorsqu’il faisait face à Nigel. Par conséquent, Nigel ne pouvait vraiment que tout lui passer.
Bon, passons à autre chose.
Nigel se reconcentra pour écouter ce qu’il devait entendre.
« Mais depuis quand tu m’observais ?
– Depuis que le seigneur Nigel a quitté le manoir. »
Non, une minute, ce moment choisi était un peu étrange. S’il y avait eu menace, ce n’était pas plutôt lorsque Schumach avait saisi une dague quand Nigel était arrivé ?
Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !
En voyait l’air rempli de doutes du jeune homme, Inas sourit et expliqua :
« C’est dangereux hors du manoir.
– …
– Il y a bien des dangers dans ce monde. »
Ta définition du danger est bien trop large. Si tout à l’extérieur est dangereux, alors tu me dis que je dois simplement rester au manoir ?
Inas pouvait-il donc repérer Nigel dès que ce dernier mettait un pied dehors ? Nigel eut un rire jaune, frottant la chair-de-poule qui avait recouvert ses bras.
« Oui… Il peut y avoir du danger, mais j’ai pris une escorte avec moi.
– Non, cela reste dangereux. Il ne suffit pas d’une escorte, il y a beaucoup de cinglés dehors. »
… Dixit le plus cinglé de tous. Nigel continua de frotter doucement ses bras.
« Alors tu dis que tu me suis à chaque fois que je sors… ?
– Non, pas à chaque fois. Il faisait nuit cette fois, alors je n’avais rien d’autre à faire. En plus, le seigneur Nigel n’a pas pour habitude de sortir au beau milieu de la nuit. J’ai trouvé ça un peu étrange, voilà pourquoi je vous ai suivi. »
Nigel en resta stupéfait. Inas continua de le fixer imperturbablement avec son magnifique visage sauf que cette fois, Nigel n’était pas d’humeur à laisser passer ça. Il se redressa et se mit assis.
« Alors tu jouais les stalkers ?
– Stalkers ? » répéta Inas.
Nigel cligna des yeux, surpris par ce mot inconnu qui surgissait brusquement.
Stalker, qu’est-ce que cela voulait dire ?
« Qu’est-ce que tu veux dire par là ? demanda Nigel.
– C’est le seigneur Nigel qui vient de prononcer ce mot : stalker.
– … Ah bon ?! »
Ses lèvres qui s’ouvraient et se refermaient semblèrent étrangement lourdes. Un sentiment étrange d’incongruité s’empara de Nigel.
J’ai dit ça, moi ? Stalker. Stalker. Stalker. Stalker. Stalker. Stalker. Stalker. Stalker. Stalker. Stalker. Stalker. Stalker. Stalker. Stalker. Stalker. Stalker. Stalker. Stalker. Stalker. Stalker…
C’est bizarre, je n’avais encore jamais entendu ce mot, c’est certain. Pourtant, je suis sûr aussi de l’avoir entendu. Autrefois. Il y a bien longtemps…
Subitement, une vive lueur bleue aveugla ses yeux. Des centaines de fenêtres se mirent à flotter sous ses yeux.
Des phrases incomplètes et sans le moindre sens se mirent à entourer Nigel.
Cette phrase en rouge vif exprimait un avertissement incompréhensible.
Traduction faite par Karura Oh. Lisez sur mon site http://karuraoh.free.fr ou sur Scan Manga. Si vous la voyez sur un autre site, c'est qu'ils ont volé cette traduction !
Mêmes les phrases complètes n’avaient pas de sens et elles envahirent toutes son champ de vision en même temps.
« … Urgn. »
Sa tête lui faisait mal comme si elle allait exploser. Un certain souvenir était en train de se frayer un chemin de force dans l’esprit de Nigel. L’instant d’après, il fut comme happé dans un rêve et l’illusion qui apparut sous ses yeux semblait très réelle.
Une odeur douce envahit l’air jusqu’à devenir suffocante. Nigel tendait les membres avec impuissance, mais il n’arrivait pas à voir ce contre quoi il se débattait. Mais son corps refusa de bouger. Nigel renonça et ouvrit la bouche avec du mal.
« Inas, arrête, arrête…
– Nigel. »
La voix d’Inas s’éleva au-dessus de sa tête. Nigel, quant à lui, avait la tête baissée. Bizarrement, Nigel haleta douloureusement en entendant cette voix remplie d’émotions.
« Je t’en prie, c’est de la folie… Les ennemis du duc ne vont pas tarder à arriver… »
Nigel fut surpris par les paroles qui s’échappèrent de ses lèvres : “les ennemis du duc”. Tout à coup, il remarqua une longue chaîne qui traînait par terre. Nigel ne pouvait pas bouger à cause du poids de cette chaîne qui entravait étroitement ses poignets et ses chevilles.
Il crut que sa vision était floue, mais de petites gouttes d’eau tachèrent le sol en formant des cercles. Le Nigel de sa vision semblait être en train de pleurer.
« Je suis désolé, Nigel. Patiente encore un peu. Je vais aller tuer tous ces stalkers et je reviens.
– Non… Non, ce n’est pas ça… Ce n’est pas comme tu dis…
– Si, c’est tout à fait ça. Ça fait déjà la quinzième fois. Cet enfoiré a tenté de s’en prendre à toi quinze fois déjà…
– Non, ça va aller. Laisse-moi. Tu vas mourir si tu continues comme ça… »
Qui était-ce ? Au moment où Nigel se posa cette question, il sentit une forte odeur de sang. Lentement, le Nigel de sa vision releva la tête. C’était d’Inas que venait cette odeur de sang. Il était couvert de blessures. Un de ses yeux devait être blessé car il avait mis un bandage autour. Sa chemise était couverte de sang et de sueur, comme s’il n’allait pas tarder à trépasser.
« Inas. »
En voyant son allure piteuse, Nigel finit par fondre en larmes. Dans la vision, Nigel se lamenta en bafouillant tour à tour :
« Vraiment, je vais bien.
« C’est toi qui ne vas pas bien.
« Tu vas vraiment finir par mourir. »
À en juger par leur échange, Nigel était apparemment en danger et Inas l’avait protégé de manière extrême. Bien entendu, la famille ducale n’avait pas trouvé que cet emprisonnement était une protection, alors ils semblaient avoir donné l’assaut…
Inas, qui l’avait écouté calmement, soupira.
« La prochaine fois, j’apprendrai la magie de guérison. Au début, je comptais apprendre d’abord à fabriquer un poison paralysant.
– Inas.
– Ne t’en fais pas, Nigel, je ferai mieux dans la prochaine régression.
– … »
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Nigel s’immobilisa soudain brusquement. Son cœur qui battait avec affolement se calma peu à peu et même ses larmes cessèrent complètement de couler. Malgré ça, Inas continua :
« Si je suis résolu et que je rassemble des points de compétences, je peux l’apprendre plus vite que tu ne le crois, même s’il ne s’agit pas d’une compétence de chevalier. Je déteste te voir pleurer, alors j’apprendrai vite. Mais je ne veux pas non plus te voir souffrir…
– … »
Inas parla très lentement, tandis que Nigel ne disait rien et ne bougeait pas. Inas le regarda d’un air un peu triste, puis soupira.
« J’arrête de dire des choses étranges, alors réveille-toi, Nigel.
– …
– Nigel, comme tu l’as dit, les attaquants ne vont plus tarder.
– Inas. »
Ce ne fut qu’à ce moment que le Nigel de la vision réagit. C’était une réaction très étrange. Apparemment, bien qu’Inas avait parlé depuis un moment, Nigel se comportait comme s’il n’avait entendu que ses derniers mots.
« Je t’en prie, embrasse-moi une dernière fois, Nigel.
– … Ne dis pas que c’est la dernière fois. Il est hors de question que je te laisse mourir !
– Je sais, Nigel. »
La voix d’Inas était fragile, comme s’il allait se briser et disparaître. Cela n’avait rien à voir avec le Inas actuel. Le Nigel de la vision hésita un moment, puis embrassa lentement Inas.
« Uck… ! »
Stupéfait, Nigel s’enfuit de cette vision.
Il avait… embrassé Inas. Ce n’était pas une hallucination, c’était bien réel. Et ce n’était pas non plus juste une simple baiser sur le front ou la joue, mais un vrai baiser. Il avait pressé et frotté ses lèvres contre celles d’Inas, jusqu’à ce que cela produise un son humide… Il l’avait bel et bien fait.
Ridicule, il ne pouvait pas y croire. Bien sûr, il en avait rêvé plusieurs fois mais dans les faits, Nigel n’avait jamais eu son premier baiser, alors son imagination était toujours limitée…
Ce qu’il venait de voir était vraiment, vraiment, vraiment très bien.
Non, alors se peut-il que le baiser avec Inas dont je me rappelle au moment où il m’a tué ne soit pas une simple hallucination provoquée par l’imminence de ma mort ?
Cette pensée le ramena dans le présent. Le mal de crâne qui poignardait son cerveau jusque là disparut tout à coup, comme emporté par la pluie. Puis il vit un Inas extrêmement surpris en face de lui.
« Nigel.
– … Inas.
– Vous allez bien ? »
Quand Nigel ne répondit pas, Inas le souleva dans ses bras. Il le porta nonchalamment dans l’autre pièce pour l’allonger sur le lit. Nigel se ressaisit en sentant la texture un peu rêche de la couverture.
… C’est clairement la demeure de quelqu’un d’autre, alors comment ça se fait que tu connaisses si bien les lieux ?
La réponse était évidente, inutile de demander, alors Nigel garda la bouche fermée et fit plutôt :
« C’est de toi que j’ai entendu ça… Ce mot, ‘stalker’ et tout. »
Inas se figea.
« Je trouve qu’il t’arrive parfois d’employer des mots étranges… En fait, très souvent même. »
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Ce qu’il avait vu tout à l’heure n’était pas une hallucination. C’est un peu confus, mais Nigel s’en rappelait. Inas avait souvent employé des mots comme ‘stalker’ de manière naturelle.
Et il n’y avait pas que ça : dans le jeu, régression, boucle temporelle, stats, HP et MP, tous des mots qu’il ne pouvait comprendre que maintenant. Nigel avait souvent entendu ces mots mais les avait oubliés à chaque fois.
« C’est vrai, seigneur Nigel… Vous vous sentez mieux ?
– Je vais bien. Mais au fait… »
Nigel leva les yeux vers lui, un peu anxieux. En fait, après avoir expérimenté la mort plusieurs fois, la réalité lui avait semblé un peu confuse. Alors il s’était imaginé que ce qu’Inas avait fait dans la régression précédente était réel avec un peu d’espoir.
Mais il semblait que plus de choses s’étaient produites dans le passé que Nigel pouvait bien l’imaginer…
Il y avait même eu une fois où Nigel s’était donné la mort, comme il s’en était rappelé en se réveillant de sa première mort.
Il en eut la chair-de-poule. Nigel se connaissait très bien. Il savait qu’il n’irait pas se suicider comme ça. Est-ce qu’Inas avait fait quelque chose de si grave qu’il veuille aller jusqu’à s’ôter la vie ? Ou bien était-ce juste un malentendu au sujet d’autre chose… ?
Il avait peur de poser la question. Mais il devait le faire.
Nigel fut toutefois incapable de demander tout de suite, seules ses lèvres s’agitèrent sans bruit. Des pensées compliquées tourbillonnèrent dans sa tête. Finalement, après un long moment, Nigel rassembla son courage à deux mains.
« Quelle était notre relation ? »
… C’est vraiment ça, ce que je voulais demander ?!
Mais les mots avaient été lancés.
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